B. UNE REPARATION EFFECTIVE

Rappel des premières préconisations de la mission dans son rapport d'étape

- Veiller à l' indemnisation rapide et juste par les sociétés d'assurances des sinistres provoqués par la tempête Xynthia ;

- Soutenir les exploitants agricoles ainsi que les conchyliculteurs et pisciculteurs à travers le versement d' aides exceptionnelles ainsi que par l' indemnisation publique des aléas non assurables via le Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA). Ce dernier devra être activé pour les pertes de récolte mais aussi pour les pertes de rendement des sols inondés en prenant en compte les effets de la salinisation. Sur le plan du financement communautaire, outre un redéploiement de crédits de la PAC et du Fonds européen pour la pêche , la mission préconise de recourir à la « mesure 126 » de l'UE qui permet la mobilisation d'un fonds d'urgence pour reconstituer les capacités des territoires frappés par une catastrophe naturelle ;

- Mobiliser, pour les autres filières économiques fragilisées par la catastrophe, le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) , afin de les accompagner et de restaurer un certain dynamisme économique. Il convient également d'envisager le relèvement du plafond d'éligibilité des entreprises au FISAC , aujourd'hui fixé à un million d'euros de chiffre d'affaires annuel hors taxes ;

- Réparer les dommages subis par les collectivités territoriales en recourant à la solidarité nationale pour ce qui concerne leurs biens non assurables, en particulier leurs infrastructures ;

- Mettre à l'étude un mode de compensation des pertes de recettes fiscales induites pour les collectivités territoriales par la démolition des maisons situées en zone d'acquisition amiable ;

- Obtenir des autorités communautaires l'octroi d'une aide au titre du Fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE) en vue de contribuer au financement des interventions d'urgence entreprises par les autorités publiques nationales et locales face aux conséquences de la tempête Xynthia ;

- Prévoir une réaffectation de crédits issus du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds social européen (FSE) en direction des zones sinistrées ;

- Prévoir l'intervention du Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds « Barnier », pour l'indemnisation des sinistrés dont les maisons sont classées en « zone d'acquisition amiable », en intégrant le risque de submersion marine au sein du champ des risques couverts ;

- Mettre à l'étude une révision des règles d'abondement et de fonctionnement du fonds « Barnier » ;

- Poursuivre une réflexion de moyen-terme sur la réforme du régime d'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles , ou régime « catnat ».

La violente tempête Xynthia a provoqué d'importants dégâts ainsi qu'il a été exposé dans la première partie du présent rapport. Ce bilan dramatique justifie une très grande diligence tant des assurances que des pouvoirs publics pour aboutir à une indemnisation juste et effective dans des délais rapides .

A ce stade, votre mission a pu constater la bonne mobilisation des assureurs sous l'impulsion des pouvoirs publics. Elle souhaite insister sur la nécessité d'un soutien durable aux filières économiques durement touchées et sur l'aide indispensable qui doit être apportée aux collectivités territoriales . Elle est, par ailleurs, préoccupée par les perspectives de mobilisation du fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE) .

Par ailleurs, elle constate que l'utile et ambitieux dispositif d'indemnisation mis en place dans les zones d'acquisition amiable induira un coût considérable qui pose la question des capacités financières du Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds « Barnier ».

Enfin, elle dresse un bilan nuancé quoique globalement positif du régime d'assurance des catastrophes naturelles, au sein duquel la prévention doit être encouragée.

1. Permettre une juste indemnisation des particuliers
a) L'impulsion donnée par les pouvoirs publics

Si face aux conséquences de la tempête Xynthia, les assureurs se déclarent fortement mobilisés , les pouvoirs publics qui ont largement contribué à cette mobilisation en veillant à mettre en place un cadre favorable à la gestion des sinistres.

Les victimes ont ainsi bénéficié de facilités non négligeables en matière fiscale et sociale, parmi lesquelles trois exemples peuvent être donnés :

- l'examen avec bienveillance, par les services fiscaux et les Urssaf, des demandes de délais de paiement et de remise de majoration et de pénalités pour le paiement des impôts et des cotisations sociales 49 ( * ) ;

- la remise en totalité, sur demande du contribuable, des cotisations 2010 de taxe d'habitation et de taxe foncière sur les propriétés bâties, dès lors que les locaux auront été détruits ou subis des dégâts tels, qu'après expertise, ils soient voués à la démolition ;

- la prise en charge par l'Etat des indemnités de chômage partiel versées par les employeurs 50 ( * ) .

Votre mission souligne également le délai d'un jour franc dans lequel a été signé l'arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle 51 ( * ) . Par cet arrêté, l'Etat a déclenché l'ouverture du régime d'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles, dit « catnat », qui permet aux assureurs, pour certains dommages, de bénéficier d'une réassurance publique, garantie par l'Etat.

Tous les dommages causés sur les biens par la tempête Xynthia, ne seront toutefois pas indemnisés par le biais de ce régime « catnat ». En effet, les dommages assurables résultant d'évènements comme le passage d'une tempête, la grêle, le gel ou le poids de la neige, relèvent des garanties contractuelles de droit commun .

Suite au passage de Xynthia, les dommages causés par les effets du vent relèveront donc de la garantie tempêtes , dont la mise en jeu ne nécessite pas la reconnaissance d'un état de « catastrophe naturelle ». Le détenteur du contrat sera donc indemnisé par sa compagnie d'assurances pour les dommages matériels qu'il aura subis, par exemple du fait du vent mais pas du fait d'une « catastrophe naturelle ». Sont couverts par la garantie tempêtes les dommages matériels causés aux biens par l'action directe du vent ou du choc d'un corps renversé ou projeté par le vent ainsi que les dommages de mouille causés par la pluie lorsque celle-ci a pénétré à l'intérieur des bâtiments mais seulement dans les jours qui suivent la tempête.

L'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles relève d'un dispositif particulier : le régime légal d'assurance des catastrophes naturelles, dit « catnat » , issu de la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982. Il se trouve mobilisé en raison des inondations provoquées par la tempête Xynthia puisque sont considérés comme les effets d'une catastrophe naturelle, au sens de l'article L. 125-1 du code des assurances , « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises » .

Ce régime permet la prise en charge des dommages matériels causés aux biens assurés 52 ( * ) , sous l'effet d'une catastrophe naturelle. Il est, de manière générale, moins avantageux que l'assurance de droit commun parce que des franchises sont systématiquement appliquées et que la valeur à neuf n'est pas garantie entraînant l'application de coefficients de vétusté qui sont à déduire des indemnisations 53 ( * ) .

L'Etat déclenche l'ouverture de la garantie par un arrêté interministériel constatant la catastrophe pour une zone et une période déterminée : cette procédure a ainsi conduit, dans le cas de la tempête Xynthia, à l'arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle du 2 mars 2010.

Par ailleurs, un médiateur des assurances a été nommé 54 ( * ) . Sa mission consiste à veiller au bon déroulement des procédures d'indemnisation, au traitement rapide et efficace des dossiers et à la qualité des relations entre les assureurs et les assurés.


* 49 Cf. la circulaire UNEDIC n° 2010-05 du 31 mars 2010.

* 50 Cf. l'arrêté du 12 avril 2010 portant application de l'article D. 5122-42 du code du travail. Son article 1 er précise que le taux maximum de prise en charge par l'Etat des indemnités de chômage partiel est fixé à 100 % pour les conventions signées du 1er janvier au 31 décembre 2010 par les entreprises contraintes de réduire ou de suspendre temporairement leur activité du fait des événements naturels d'intensité anormale définis par l'arrêté du 1er mars 2010 susvisé. Un arrêté du 19 avril 2010 applique le même principe aux entreprises des départements de la Gironde et de la Loire-Atlantique, contraintes de réduire ou de suspendre temporairement leur activité du fait de la tempête Xynthia.

* 51 L'arrêté est en effet daté du 2 mars 2010.

* 52 L'assurance des catastrophes naturelles couvre les mêmes biens et comporte les mêmes exclusions que la multirisque habitation. Elle prend ainsi en charge les frais de déblais, de démolition, de pompage, de nettoyage et de désinfection des locaux. Elle intervient aussi si les murs de la maison sont fendus, si la stabilité de la maison est atteinte du fait d'un glissement de terrain. Elle garantit également les dommages causés à des appareils électriques, au contenu des réfrigérateurs et congélateurs à la suite d'une submersion due à une inondation. En revanche, la garantie catastrophe naturelle ne couvre pas les dommages consécutifs à la seule coupure d'électricité ou les dommages qui ne seraient pas directement causés par la catastrophe naturelle : frais de déplacement et de relogement, perte de loyers, perte d'usage, honoraires d'expert, etc. En outre, les terrains, plantations, ainsi que les clôtures et murs d'enceinte sont, sauf stipulation explicite, hors contrat. Sont également exclus de la garantie toutes les causes de dommages qui ne proviennent pas des circonstances précitées, et liés à la chose assurée : constructions non ancrées selon les règles de l'art ; dommages résultant d'un manque d'entretien indispensable ; bâtiments non entièrement clos et couverts ou comportant certains matériaux, tels que du carton ou du feutre bitumé, non fixés sur voligeages jointifs ; parties vitrées de la construction ; biens en plein air.

* 53 Les aléas concernés peuvent être : des inondations (de plaine, crue torrentielle, ruissellement en secteur urbain, coulées de boue et remontées de nappe phréatique) ; des phénomènes liés à l'action de la mer ; des mouvements de terrain (effondrement, affaissement, éboulement et chute de blocs et de pierres, glissement et coulée boueuse associée, lave torrentielle) ; la sécheresse (y compris les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation du sol) ; une avalanche ; un séisme ; les effets du vent dû à un événement cyclonique. Les simples effets du vent ne relèvent pas de la garantie catnat. Dans un arrêt n° 175215 du 22 Janvier 1997 « société hôtelière de l'Anse heureuse », le Conseil d'Etat a ainsi précisé que les effets du vent sont au nombre de ceux qui revêtent un caractère assurable au sens des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances, que ces effets soient effectivement assurés ou non.

* 54 La fonction de médiateur des assurances a été confiée pour la troisième fois à M. Yann Boaretto, inspecteur général des finances, après la catastrophe de la tornade qui a frappé le Val de Sambre le 3 août 2008 et le passage de la tempête Klaus du 24 janvier 2009, qui a principalement touché le sud-ouest de la France. Lors de son audition, M. Bernard Spitz, président de la fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) a estimé que ce mandat relève plus d'une mission de coordination que de médiation, dans la mesure où il s'agit de mettre à disposition des assurés, des assurances et des collectivités publiques un porte-parole et un interlocuteur unique.

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