III. MIEUX GERER LA SURVENANCE D'UNE SUBMERSION MARINE AU MOYEN D'UNE MEILLEURE COORDINATION

A. UNE MEILLEURE COORDINATION DES SECOURS

Rappel des premières préconisations de la mission dans son rapport d'étape

- Généraliser le passage des SDIS au réseau numérique ANTARES ;

- Dédier une ou deux fréquences aéronautiques nationales aux secours ;

- Rendre les moyens de communication compatibles entre les SDIS, les services de la Gendarmerie et les personnels militaires ;

- Rénover le réseau national d'alerte (RNA) afin de répondre aux exigences d'alerte du XXIème siècle.

Si les secours se sont mobilisés de manière remarquable - et même héroïque - et ont globalement bien fonctionné , votre mission a identifié des améliorations nécessaires sur les moyens de télécommunications et sur la coordination des moyens aériens. A la lumière des informations recueillies lors de son déplacement à Bruxelles, elle a par ailleurs évalué le rôle que pouvait jouer l'Union européenne dans ce domaine.

1. Le rôle des moyens de télécommunications

La tempête Xynthia, phénomène exceptionnel, a provoqué des dysfonctionnements majeurs des moyens de communications.

Tout d'abord, le réseau de téléphonie fixe et mobile a été gravement perturbé.

Dans les jours suivants la tempête, France Telecom a mobilisé plus de 2.000 techniciens afin de réparer les dégâts. Selon l'opérateur, environ 100.000 lignes terminales ont été coupées suite à des chutes d'arbres, plus de 1.000 antennes relais de téléphonie mobile ont été affectées par des coupures d'électricité, impactant 170.000 clients au total.

Par ailleurs, le réseau mobile est constitué de 50 000 stations de base, qui couvrent chacune une cellule d'environ un kilomètre, reliées entre elles par des réseaux filaires. Le 27 février, la tempête Xynthia a entraîné la mise hors service de 700 à 1.000 stations de base par opérateur dans quatre zones, soit une perte de service pour 700 000 à un million de clients. Le réseau a cependant été rétabli quatre jours après quand il avait fallu une semaine pour parvenir à ce résultat lors de la tempête Klaus en Gironde, événement climatique de moindre ampleur.

Cependant, seul un opérateur de téléphonie mobile a fonctionné correctement dans les heures et jours suivant la catastrophe . Pendant douze heures, les services de secours de Vendée n'ont disposé que d'une seule ligne fixe.

Pour SFR ou Bouygues, la résilience du réseau dépend du bon fonctionnement du réseau électrique et du réseau France Télécom dans la mesure où les données sont transférées via le réseau filaire.

La principale cause d'indisponibilité est due aux défauts d'électricité , la rupture de l'alimentation électrique représentant 80 à 85 % des incidents. Les stations de base disposent de batteries qui ont une autonomie de 2 à 3 heures, et des groupes électrogènes prennent le relais en cas de rupture du réseau électrique, ces groupes équipant des sites stratégiques. Il apparaît donc essentiel qu'une véritable coordination soit mise en place entre les opérateurs de téléphonie mobile et ERDF. Les opérateurs ne savent en effet absolument pas sur quels sites ERDF intervient en cas de crise, et ne peuvent donc implanter au mieux leurs groupes électrogènes.

A la suite de Xynthia, la direction de la sécurité civile a créé un groupe de travail rassemblant tous les opérateurs de réseaux - eau, télécommunications, électricité, hydrocarbures - afin de définir un plan ORSEC réseaux, soit les priorités de rétablissement du réseau. La mission estime en effet que, même si des progrès ont manifestement été enregistrés depuis la tempête de 1999 et la tempête Klaus, il convient d'assurer une meilleure coordination entre les services préfectoraux et les opérateurs de réseaux.

Proposition n° 63 de la mission :

Etablir et structurer une coopération entre les services déconcentrés de l'Etat et les gestionnaires de réseaux et entre les opérateurs de téléphonie mobile, France Telecom et ERDF pour rétablir le plus rapidement possible les communications en cas de catastrophe naturelle.

Dans ces circonstances, des moyens de télécommunications adaptés aux situations d'urgence sont nécessaires.

On rappellera que, en application de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure et de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, a été publié un décret n°2006-106 du 3 février 2006 relatif à l'interopérabilité des réseaux de communication radioélectriques des services publics qui concourent aux missions de sécurité civile. Tous les réseaux de communication doivent être conformes à un ensemble de règles et normes techniques dénommé architecture unique des transmissions (AUT). L'objectif est d'assurer l'interopérabilité des transmissions des sapeurs-pompiers, des unités de la sécurité civile, des unités militaires, des SAMU, de la police et de la gendarmerie, pour les opérations de sécurité civile. Le réseau ANTARES (adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours) doit ainsi être le réseau numérique des services publics qui concourent aux missions de sécurité civile.

Si le SDIS de Charente-Maritime a utilisé le réseau numérique ANTARES dans de bonnes conditions, le SDIS de Vendée a eu recours à un réseau analogique . La généralisation du passage des SDIS à ANTARES doit donc être préconisée. 13 millions d'euros sont prévus à ce titre en 2010 dans le cadre du fonds d'aide à l'investissement (FAI) des SDIS. La mise en place du dispositif ANTARES à l'échelle nationale doit donc être accélérée, la généralisation du dispositif à tout le territoire national n'étant prévue qu'à l'horizon 2014.

Selon le directeur de la sécurité civile, ANTARES est plus qu'un instrument de radio communication crypté. Il permet d'acheminer instantanément toutes les informations sur le terrain. Grâce à l'activation de la charte satellitaire, il peut transmettre des cartographies de première qualité, mais aussi des informations médicales utiles au diagnostic au pied de la victime

ANTARES susciterait, à terme, des économies, puisqu'il permettrait, dans les opérations de sauvetage, de disposer de toutes les informations médicales, et dans les opérations de secours, de retransmettre immédiatement images et données. C'est grâce au satellite que les secours ont découvert que l'île de Ré était coupée en deux ; grâce à lui qu'un effort important a pu être déployé sur la commune de Charron, en Charente-Maritime, grâce à lui que le centre opérationnel de Paris a pu assurer la coordination.

La mission ne peut donc que préconiser le développement d'un système unique de communication satellitaire , même si certains professionnels font observer que le système ANTARES ne dispose pas de toutes les fonctionnalités modernes et en soulignent le coût élevé à l'heure actuelle, en raison d'un nombre de ventes limitées. La généralisation du système pourrait cependant avoir un impact sur les prix.

Aujourd'hui, les services de secours ne disposent pas encore de suffisamment d'équipements, et doivent souvent recourir à des téléphones mobiles.

Enfin, il apparaît qu'une véritable concertation entre les services de secours et les opérateurs téléphoniques devrait être encouragée. Aujourd'hui, deux mondes semblent se côtoyer sans véritables recherches de synergies : d'une part, les fournisseurs des services de secours (EADS, Thales) et d'autre part, les opérateurs mobiles.

Propositions n° 64 et n° 65 de la mission :

- Doter l'ensemble des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) d'un réseau numérique moderne et robuste.

- Pour la généralisation du réseau ANTARES :

- d'une part, veiller à faire évoluer le système afin de faciliter les échanges de données nécessaires (par exemple pour l'envoi de cartographies ou de diagnostics « au pied de la personne» au bénéfice des services d'urgence),

- d'autre part, faire supporter par l'Etat la charge les coûts de fonctionnement liés à ANTARES.

Par ailleurs, les réseaux de transmission des SDIS et de l'armée ne coïncidaient pas dans la phase aérienne de secours hélicoportés. Il pourrait donc être envisagé de dédier une ou deux fréquences aéronautiques nationales aux secours et de rendre les radios des hélicoptères militaires compatibles avec celles des SDIS.

Propositions n° 66 et n° 67 de la mission :

- Dédier une ou deux fréquences aéronautiques nationales aux secours.

- Rendre les moyens de communication compatibles entre les SDIS, les services de la Gendarmerie et les personnels militaires.

Si la phase d'alerte a bien fonctionné lors de la tempête Xynthia, il faut néanmoins relever que le réseau national d'alerte (RNA) date des années 1930 (5000 sirènes publiques et industrielles). Selon les acteurs de la protection civile, il est dans un état dégradé. Il y a ainsi 32 sirènes en Charente-Maritime et six seulement en Vendée : c'est, selon les termes mêmes du directeur de la sécurité civile, un système vétuste, mal adapté aux risques d'aujourd'hui. L'Etat s'est engagé à l'entretenir, mais le coût d'une sirène s'élève à 42.000 euros. L'abonnement à des systèmes d'appels groupés - fax, email, SMS et téléphone - permettrait sans aucun doute de répondre davantage aux besoins de protection civile aujourd'hui.

Proposition n° 68 de la mission :

Rénover le réseau national d'alerte (RNA) afin de répondre aux exigences d'alerte du XXIème siècle .

Lors de son audition par la mission, M. Jean-Marie Danjou, délégué général de l'AFOM a fait état des réflexions en cours sur la « priorisation » des appels d'urgence au sein de la commission interministérielle de coordination des réseaux et des services de communications électroniques pour la défense et la sécurité publique qui rassemble les opérateurs de téléphones mobiles, les opérateurs de téléphones fixes, les fournisseurs de services publics. La « priorisation » permet, en cas de crise, de privilégier les appels d'urgence au détriment de tous les autres qui contribuent à engorger le réseau voire à le neutraliser.

Proposition n° 69 de la mission :

Prioriser les appels d'urgence et adapter, si nécessaire, la réglementation dans ce sens.

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