(1) L'instruction des demandes de permis de construire par les services de l'État
A quelques rares exceptions près 23 ( * ) , l'instruction des demandes de permis de construire a été réalisée par les préfectures pour le compte des communes sinistrées.
Dans ce cadre, votre mission a constaté que les actuelles conventions de mise à disposition des services de l'État étaient rédigées en des termes permettant une prise en compte effective des risques naturels . Les conventions conclues, à la fin de l'année 2007, entre la préfecture de Vendée et les communes de La Faute-sur-Mer et de L'Aiguillon-sur-Mer, prévoient que le service instructeur (la DDE, puis la DDTM) « donne systématiquement un avis défavorable sur toute demande de certification d'urbanisme, de permis de construire et de permis d'aménager en zone rouge [du PPR], et un avis assorti de prescriptions en zone bleue ». En outre, la préfecture a indiqué que les décisions ne suivant pas les avis des services instructeurs ont été , depuis cette même date, systématiquement déférées devant le juge administratif .
Votre mission souligne néanmoins que ces conventions sont récentes (elles datent de 2007, alors même que les lotissements les plus contestés ont été bâtis autour de l'année 2000, voire avant) et rappelle que l'instruction des demandes de permis de construire a connu une réforme profonde avec l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 , dont les dispositions sont entrées en vigueur au 1er octobre 2007. En effet, depuis 2007, seules les communes de moins de 10 000 habitants ou les EPCI de moins de 20 000 habitants peuvent disposer, de droit, d'une assistance des services de l'État, les autres communes ne pouvant plus les solliciter que de manière « ponctuelle » et dans des cas particulièrement justifiés.
Toutefois, avant 2007 (et donc au moment où les autorisations d'urbanisme litigieuses ont été délivrées), les services de la DDE apportaient aux communes une assistance gratuite et sans condition dans l'instruction des demandes ; les communes recouraient d'ailleurs fréquemment à ces services.
Ainsi, si le recours aux services préfectoraux est aujourd'hui restreint et encadré par des règles strictes et précises, tel n'était pas le cas à l'époque où les permis de construire les plus litigieux ont été délivrés : les services de l'État ont donc eu une influence réelle et majeure dans la délivrance des permis de construire .
(2) Un contrôle de légalité insuffisant
Dans son pré-rapport, votre mission avait considéré que les préfectures n'avaient pas exercé leurs compétences propres -et notamment leur mission constitutionnelle de contrôle de légalité- avec une diligence suffisante :
- la procédure de « porter à connaissance » n'a pas permis d'informer les communes des risques naturels auxquels leur territoire était soumis, les préfectures se bornant le plus souvent à faire le catalogue des réglementations opposables aux permis de construire, sans mettre l'accent sur les facteurs de danger pour les populations ;
- les préfectures ont peu fait usage des outils dont elles disposaient pour empêcher que des bâtiments ne soient construits dans des zones à risque . Selon les auditions menées par votre mission, cette attitude n'a pris fin que tardivement en Vendée : MM. Stéphane Raison et Jean-Jacques Brot ont ainsi précisé que ce n'était qu'à partir du début de l'année 2007 que la préfecture avait fait un usage systématique de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme 24 ( * ) afin d'empêcher l'implantation d'habitations dans les zones exposées à un risque naturel fort ;
- les représentants de l'État n'ont que rarement déféré les autorisations d'urbanisme au juge administratif : ainsi, seuls 49 recours au fond ont été formés entre 2001 et 2009, et ceux-ci n'ont pas été systématiquement assortis d'un référé (ce qui aurait permis, sous certaines conditions, d'entraîner la suspension immédiate des actes litigieux jusqu'à ce que le juge administratif ait statué). Ce constat révèle un contrôle de légalité faible, voire inexistant dans certaines périodes .
Charente-Maritime |
Vendée |
|||
Année |
Déféré préfectoral |
Référé suspension |
Déféré préfectoral |
Référé suspension |
2000 |
non connu |
non connu |
0 |
0 |
2001 |
2 |
0 |
4 |
3 |
2002 |
8 |
0 |
1 |
0 |
2003 |
4 |
0 |
0 |
0 |
2004 |
0 |
0 |
1 |
0 |
2005 |
4 |
0 |
5 |
3 |
2006 |
4 |
0 |
0 |
0 |
2007 |
2 |
1 |
0 |
0 |
2008 |
5 |
2 |
3 |
0 |
2009 |
2 |
0 |
4 |
0 |
TOTAL |
31 |
3 |
18 |
6 |
Source : ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales
* 23 En effet, les communes membres de la communauté d'agglomération de La Rochelle et de la communauté de communes de Charron ne font pas appel aux services préfectoraux pour l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme qui leur étaient adressées.
* 24 Cet article dispose que « le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales [par le préfet] s'il est de nature à porter atteinte [...] à la sécurité publique ».