5. La société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France
Enfin, l'audiovisuel extérieur représente un élément essentiel de notre diplomatie d'influence.
A la différence de nos partenaires européens, qui disposent souvent d'un opérateur unique, comme la BBC pour le Royaume-Uni ou la Deutsche Welle pour l'Allemagne, l'audiovisuel extérieur français se caractérise toutefois par la dispersion de ses opérateurs , avec deux chaînes de télévision - TV5 Monde et France 24 - deux radios - Radio France Internationale et RMC Moyen-Orient - et un organisme de coopération - Canal France International, qui fournit des émissions en français aux radios et télévisions des pays francophones du Maghreb, d'Afrique sub-saharienne et d'Asie.
De nombreux rapports 11 ( * ) ont mis en évidence la fragmentation, la mauvaise organisation et le manque d'efficacité de l'audiovisuel extérieur français, malgré un budget équivalent à celui consacré par nos partenaires.
À l'initiative du Président de la République, un comité de pilotage, composé de fonctionnaires issus de différents ministères réunis sous la direction de M. Jean-David Lévitte, conseiller diplomatique du Président de la République, et de M. Georges Marc Benhamou, ancien conseiller de l'Élysée pour l'audiovisuel, a remis un rapport en décembre 2007. Ce rapport n'est pas resté lettre morte, puisque sa principale recommandation - la création d'une société holding regroupant l'ensemble des opérateurs de l'audiovisuel extérieur - a été suivie d'effets.
La société holding « Audiovisuel Extérieur de la France » (AEF) a été créée le 4 avril 2008. Elle a vocation à regrouper l'ensemble des participations publiques dans les sociétés de l'audiovisuel extérieur, c'est-à-dire TV5 Monde, Radio France Internationale (RFI) et France 24.
Canal France International (CFI) n'a pas été intégré dans ce nouvel ensemble car il ne s'agit pas à proprement parler d'un média, mais d'un organisme de coopération ayant vocation à concentrer son action sur l'aide aux médias des pays en développement.
Cette réforme vise à offrir davantage de cohérence et de visibilité à l'audiovisuel extérieur français. La holding a en effet pour mission de définir les priorités stratégiques des différents opérateurs de l'audiovisuel extérieur français, dans le respect de l'identité de chacun. Il s'agit notamment de définir les priorités en termes de publics visés, d'objectifs géographiques, et de moyens de diffusion.
Cette réforme vise également à renforcer les synergies et à encourager les mutualisations (notamment en matière de distribution) entre les opérateurs, tout en écartant toute idée de fusion.
Chaîne francophone à caractère multilatéral, TV5 Monde occupe une place à part dans ce nouvel ensemble. Craignant de se voir marginaliser, nos partenaires francophones de la chaîne (la Belgique, la Suisse, le Canada et le Québec) ont ainsi obtenu que la holding ne détienne que 49 % du capital de TV5 Monde, alors qu'elle devrait à terme détenir 100 % du capital de RFI et de France 24.
Concernant son statut, il s'agit d'une société anonyme dont le capital de 37 000 euros est entièrement détenu par l'État. Elle est dotée d'un conseil d'administration de dix-huit membres, composé de six représentants des administrations concernées, de six personnalités qualifiées et de six représentants des salariés des différentes sociétés. M. Alain de Pouzilhac, président du directoire de France 24, a été désigné président directeur général de la holding. Il est secondé par Mme Christine Ockrent, directrice générale déléguée. La société compte actuellement une douzaine de collaborateurs.
La loi n° 2009-58 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision a conféré à la société AEF le statut de société nationale de programme. La société devra ainsi obéir à un cahier des charges et signer avec l'État un contrat d'objectifs et de moyens. La composition du conseil d'administration de la société sera modifiée et son président sera nommé, comme pour France Télévisions et Radio France, par décret pour cinq ans après avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel et après avis des commissions parlementaires compétentes.
En 2009, les crédits consacrés à l'audiovisuel extérieur représentent 298 millions d'euros , dont 233 millions d'euros de subventions et 65 millions au titre de la redevance audiovisuelle.
Alors que précédemment la tutelle sur les opérateurs de l'audiovisuel extérieur était partagée entre le ministère des affaires étrangères (en ce qui concerne TV5 Monde, RFI et Canal France International) et les services du Premier ministre (s'agissant de France 24), l'audiovisuel extérieur est désormais entièrement placé sous l'autorité de la direction du développement des médias (DDM), qui relevait des services du Premier ministre, mais qui a été rattachée au ministère de la culture et de la communication. Dans le cadre de la réorganisation du ministère de la culture annoncée en avril 2008, la DDM a vocation à se fondre dans une direction générale du développement des médias et de l'économie culturelle.
Ainsi, l'audiovisuel extérieur échappe désormais en partie à la tutelle du ministère des affaires étrangères, même si ce dernier continue de jouer un rôle, notamment au sein du conseil d'administration de la société holding.
Or, comme l'affirment les conclusions du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France, il est indispensable que le ministère des affaires étrangères et européennes conserve un rôle de premier plan dans le pilotage stratégique de cette composante essentielle de notre action extérieure.
* 11 - « La politique audiovisuelle extérieure de la France », rapport de M. Francis Balle, La Documentation française, Paris, 1996 ;
- « Pour une nouvelle stratégie de l'action culturelle extérieure de la France : de l'exception à l'influence », rapport n° 91 de M. Louis Duvernois, présenté le 1 er décembre 2004, au nom de la commission des affaires culturelles du Sénat ;
- « L'audiovisuel extérieur : quels choix pour demain ? », rapport n° 3589 présenté par M. François Rochebloine, au nom de la mission d'information de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, le 17 janvier 2007.