3. De nouvelles utilisations de la vidéosurveillance mal prises en compte par les textes

Comme l'a rappelé M. Philippe Melchior, lors de l'adoption de la loi du 21 janvier 1995, les responsables politiques n'avaient pas encore une idée précise de l'utilisation de la vidéosurveillance. Du fait des circonstances et en particulier de la polémique relative au projet de la ville de Levallois-Perret, le législateur a retenu pour seule grille de lecture la finalité de protection de la sécurité publique.

Ainsi, les finalités de la vidéosurveillance dans les espaces publics sont définies de façon réductrice comparée à l'usage qu'en ont les communes aujourd'hui. Compte tenu du coût de ces systèmes, des communes cherchent à amortir l'investissement en diversifiant les applications (voirie, entretien, secours...).

Or, la loi ne prévoit pas ces finalités. La décision du Conseil constitutionnel incline à penser que si elles ne sont pas prévues, elles sont donc a priori interdites.

Toutefois, on imagine mal revenir en arrière tant la vidéosurveillance est devenue dans certaines villes un mode de gestion urbaine.

Une autre difficulté déjà évoquée tient au développement récent des dispositifs mobiles ou provisoires de vidéosurveillance. Le nombre de ces dispositifs devrait être décuplé dans les prochaines années, la police et la gendarmerie souhaitant en acquérir massivement, soit dans les véhicules, soit sur les agents.

Or, la loi du 21 janvier 1995 ne prévoit aucune disposition spécifique 34 ( * ) alors que ces dispositifs se concilient difficilement avec certains principes comme l'information du public 35 ( * ) , à moins de considérer que ces caméras ne relèvent pas de ce cadre légal. Ces caméras ne seraient pas assimilables à de la vidéosurveillance ; elles ne seraient que le prolongement de l'oeil des policiers et gendarmes.

En tout état de cause, une clarification juridique est sans doute nécessaire.

Il en est également ainsi pour les dispositifs de vidéosurveillance fixes mais provisoires. Le Général Guy Parayre, ancien directeur général de la gendarmerie nationale, a ainsi fait part des projets de développement de systèmes de vidéosurveillance provisoires, faciles à déplacer, afin de répondre ponctuellement à des besoins. En effet, des évènements comme des concerts, des ferias, des raves, des courses automobiles ou des sommets de chefs d'Etat pourraient utilement faire l'objet de vidéosurveillance.

Toutefois, la procédure ne s'y prête pas, à moins que la finalité ne soit la prévention d'actes de terrorisme. Dans ce cas, une procédure d'urgence sans avis préalable de la commission départementale peut être activée. Dans tous les autres cas, les délais rendent la mise en oeuvre difficile. La loi du 21 janvier 1995 apparaît donc mal taillée.

Or, à bien des égards, un dispositif temporaire est préférable à un système permanent. Il est notamment plus conforme aux principes de finalité et de proportionnalité.

* 34 Toutefois, l'article 2 du décret n° 96-926 du 17 octobre 1996 évoque indirectement ce cas de figure en disposant que l'utilisation de « dispositifs mobiles de surveillance de la sécurité routière » s'oppose à la transmission de certains documents lors de la demande d'autorisation, en particulier le plan masse des lieux filmés et le plan d'implantation des caméras.

* 35 Toutefois, on peut estimer que l'uniforme de l'agent ou la sérigraphie du véhicule suffit déjà à informer le public qu'il est surveillé.

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