2. Le renforcement de la logique interarmées
a) Une démarche inaboutie
La marine se plaît volontiers à rappeler qu'elle doit exercer tous les métiers des autres armées réunies, à l'exception des servants de char, en plus des métiers spécifiques à l'environnement maritime. Il y a donc place, en termes de formation, pour un travail en interarmées.
Comme l'a précédemment exposé votre rapporteur, les armées ont commencé à tirer les conséquences d'un certain degré de communalité de leurs besoins en regroupant les formations sur des sites gérés par l'une ou l'autre des armées.
Cette logique rencontre des limites qui tiennent à la spécificité des métiers et des milieux dans lesquels évoluent les armées mais, dans certains cas, il semble qu'elle puisse être poussée beaucoup plus loin notamment pour tout ce qui y a trait aux métiers du soutien et de l'administration.
L'école des fourriers de Querqueville qui forme aux métiers de bouche et d'administration est un bon exemple de rapprochement sur un même site des formations des trois armées et de la gendarmerie.
Mais elle est davantage une colocalisation qu'une école interarmées : les équipes enseignantes sont interarmées, les installations, de même que les inspecteurs sont mutualisés mais pas les élèves auxquels les cours restent dispensés par armée. Les efforts, réels, des personnels de l'école, se heurtent à des différences d'organisation propres à chacune des armées : différences de systèmes d'exploitation, de logiciels ayant le même objet, de procédures qui n'ont pas de justification opérationnelle, de logique de métiers et de carrières différentes, de périodes de recrutement dans l'année....
Ces obstacles à une mutualisation plus poussée qui sont liées aux limites d'une démarche « bottom-up » et de simple coordination pourraient trouver leur solution dans une impulsion donnée en interarmées.
b) Le besoin d'un pilotage à haut niveau
Les ressources humaines étant une composante, sinon, la composante décisive de l'outil de défense, il semble qu'une stratégie de formation doive être définie au plus haut niveau, c'est à dire au niveau du chef d'état-major des armées pour en assurer la cohérence et l'adéquation au besoin.
Certes, les armées disposent d'une structure de dialogue, le comité de coordination de la formation créé en 1993, qui réunit des représentants des différentes armées ou services. Il recense les contenus des formations et les rapprochements possibles. Le bilan du comité de coordination n'est pas nul mais il semble nécessaire de renforcer dans ce domaine l'impulsion politique donnée à ce mouvement.
Dans ce domaine, il faut être clair sur les objectifs d'une telle capacité d'arbitrage donnée à l'état-major des armées : Il ne s'agit pas de créer un échelon supplémentaire ou de « recentraliser » une organisation décentralisée au profit des écoles en définissant des contenus de formation mais bien de lever les obstacles qui s'opposent à des rapprochements plus conséquents et plus profitables.
En termes d'économies, le regroupement et la rationalisation peuvent rencontrer des limites. La mutualisation/ interarmisation de la formation d'une part, le partage des simulateurs entre tâches de formation et besoins d'entraînement d'équipages d'autre part imposent des contraintes géographiques. Il ne s'agit pas de diminuer les coûts de la formation en augmentant les coûts de déplacements et les frais de missions ou de stage des élèves ou des équipages à l'entraînement, avec un grand centre unique forcément éloigné d'une de nos façades maritimes, voire des deux si ce centre est interarmées. Néanmoins, des marges de progrès substantiels existent.