2. La « querelle » du financement du RMI et des contrats aidés
a) L'écart entre les recettes et les dépenses du RMI
La loi portant décentralisation du RMI de 2003, votée après l'adoption de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 212 ( * ) , s'inscrit dans le cadre des dispositions du quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, qui prévoit une compensation des transferts de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales.
L'article 4 de la loi de 2003 précise ainsi que « les charges résultant, pour les départements, des transferts et créations de compétences réalisés par la présente loi sont compensées par l'attribution de ressources constituées d'une partie du produit d'un impôt perçu par l'État dans les conditions fixées par la loi de finances ». La loi de finances pour 2004 a octroyé aux départements une fraction de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP). Cependant, cette part de la TIPP (fixée en 2003 à la somme de 4,941 milliards d'euros) ne couvre qu'environ 80% des dépenses engagées au titre du RMI en 2007 , en partie en raison de la hausse du nombre de bénéficiaires du RMI depuis 2003 (environ 200 000 allocataires de plus entre 2003 et 2006).
b) Les compensations exceptionnelles versées par l'Etat
Pour tenir compte de la croissance des dépenses de RMI en 2004, l'Etat a versé une subvention exceptionnelle de 457 millions d'euros. La dépense afférente au RMI ayant continué d'augmenter plus vite que la TIPP en 2005, le Gouvernement a créé, lors de l'examen de la loi de finances pour 2006 et pour deux ans, un fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI) doté de 100 millions d'euros en 2006 et de 80 millions d'euros en 2007, afin de compenser, en partie, cet écart.
En 2007, à l'issue d'une concertation avec l'assemblée des départements de France (ADF), le dispositif a été amélioré sur deux points : le FMDI est créé non plus pour deux ans mais pour trois ans (de 2006 à 2008) ; le fonds dispose annuellement de ressources qui ont quintuplé et qui atteignent donc 500 millions d'euros par an .
Le FMDI est composé de 3 parts : - la première part représente 50 % du fonds (soit 250 M€) en 2006 et 40 % ensuite. Elle est versée en fonction du niveau de dépenses de RMI, et a donc vocation à combler partiellement le « déficit » effectif que chaque département enregistre entre son droit à compensation et le montant réel des allocations versées ; - la deuxième part représente 30 % du fonds (soit 150 M€, d'où il faudra retrancher une quote-part pour les DOM). Elle est destinée à la péréquation. Les inégalités entre départements sont mesurées par un indice synthétique de ressources et de charges. Pour les ressources, il s'agit du potentiel financier par habitant. Pour les charges, il s'agit de la proportion de bénéficiaires du RMI dans la population ; - la troisième part représente initialement 20 % du fonds (soit 100 M€ en 2007) puis 30% ensuite). Elle est dite d'« insertion », car il s'agit d'une dotation destinée à encourager les efforts accomplis par les départements. Elle est versée en fonction du nombre de contrats d'avenir, de CI-RMA et de mesures d'intéressement observés au 31 décembre de l'année précédente. |
Par ailleurs, en application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), la loi de finances pour 2006 a créé un compte de concours financiers intitulé « avances aux collectivités territoriales ». Ce compte verse par douzième, et par avance, le produit des impôts recouvrés par l'Etat au profit des collectivités territoriales. La part de TIPP revenant aux départements y a été incluse, de sorte qu'il est reversé environ 412 millions d'euros par mois aux départements.
Malgré ces améliorations, le FMDI ne permet pas de compenser l'écart d'environ 1 milliard d'euros entre les recettes de TIPP et les dépenses d'allocations. Or, les départements n'ont aucune maîtrise du montant de l'allocation, celle-ci ayant été revalorisée par l'Etat d'environ 7 % entre 2003 et 2007, ni de ses critères d'attribution. En outre, la TIPP est un impôt non dynamique dont le produit stagne et devrait décliner en raison des économies d'énergie.
On constate certes depuis 2006 une baisse du nombre de bénéficiaires du RMI (-0,8 % en 2006, -6,6 % entre 2007 et 2008) tandis que le nombre de CI-RMA et de Contrats d'avenir a augmenté pour atteindre 78 000 personnes en décembre 2007, soit une hausse de 20,4 % en un an.
Cependant, comme l'a remarqué M. Michel Mercier, président du Conseil général du Rhône, lors du déplacement de la délégation dans le Rhône, ce mouvement ne s'est pas traduit en 2006 par une baisse des dépenses des départements au titre du RMI . Cette divergence s'explique, selon la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), par l'augmentation du montant moyen perçu par les allocataires, due notamment à la revalorisation du RMI, ainsi qu'à des effets de structure de la population des allocataires, le montant du RMI variant en fonction de la situation familiale des bénéficiaires.
La question est en outre désormais posée du financement du nouveau revenu de solidarité active (RSA), qui fusionnera sans doute le RMI, l'allocation de parent isolé (API), et la prime pour l'emploi (PPE).
* 212 Loi n°2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République.