E. FAVORISER LA CONCILIATION DE LA VIE PROFESSIONNELLE ET DE LA VIE FAMILIALE
Les auditions de la délégation ont montré que la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale reste l'un des problèmes majeurs à surmonter pour permettre aux femmes de réussir leur insertion professionnelle dans tous les métiers, dans les mêmes conditions que les hommes.
Ainsi, selon Mme Christel Gilles, chargée de mission au département travail, emploi, formation du Centre d'analyse stratégique, la segmentation professionnelle résulterait en partie d' « arbitrages » en matière d'emploi effectués au sein du ménage et de « choix » opérés par les femmes en faveur d'emplois dans des secteurs et métiers compatibles avec leurs responsabilités familiales. C'est en effet sur les femmes que repose l'essentiel des tâches liées aux soins apportés aux enfants, ainsi qu'aux parents âgés dépendants.
Face à ce constat, il importe donc de développer les instruments de conciliation entre obligations professionnelles et obligations familiales, notamment grâce à des modes de garde d'enfants souples et adaptés, ainsi que de compenser les coûts qui peuvent résulter pour les entreprises du remplacement de leurs salariées parties en congé de maternité.
À plus long terme, le règlement de ce problème passe aussi par une évolution des mentalités pour favoriser un partage plus égalitaire entre les pères et les mères des tâches familiales et domestiques, ce qui suppose de lutter contre les stéréotypes sexués.
1. Développer l'offre de modes de garde d'enfant diversifiés
Selon les témoignages recueillis par la délégation, les réticences de certains chefs d'entreprise à embaucher des femmes dans des secteurs peu féminisés sont souvent liées à des inquiétudes concernant leur disponibilité, supposée moins grande que celle des hommes en raison des responsabilités familiales qu'elles exercent. En effet, les femmes assument une part prépondérante dans l'accomplissement des tâches ménagères, l'éducation des enfants et les soins aux personnes âgées, et doivent donc souvent en pratique exercer un « double métier », à la maison et à l'extérieur.
Mme Marie-Jeanne Campana, présidente de l'Association française des femmes juristes, a insisté, devant la délégation, sur la difficulté pour les femmes qui accèdent à des métiers prestigieux, de les exercer, faute de disposer de moyens de garde suffisants pour leurs enfants.
De même, Mme Eveline Duhamel, présidente de la Chambre de commerce et d'industrie de Dieppe, a estimé qu'il était nécessaire de sécuriser psychologiquement les femmes grâce à des modes de garde d'enfants qui leur permettent de travailler l'esprit libre sans être perpétuellement confrontées aux difficultés qui résultent de l'insuffisance du nombre de places disponibles en crèche et de leurs horaires trop stricts, ainsi que du coût des gardes à domicile qui les mettent hors de portée de bien des bourses, difficultés qui sont renforcées lorsqu'un enfant est malade ou qu'il faut partir en déplacement professionnel.
La question de l'accroissement du nombre de places de crèches, et plus généralement, de l'offre de modes de garde d'enfants, apparaît primordiale.
À cet égard, Mme Gisèle Gautier, présidente de la délégation, regrette que la question écrite qu'elle a posée au Gouvernement en décembre 2007 sur l'application des différents « plans crèches » annoncés aux cours des dernières années soit jusqu'ici restée sans réponse, en dépit de l'annonce de l'institution prochaine d'un droit opposable à la garde d'enfants 32 ( * ) .
L'intérêt d'une diversification des modes de garde doit également être souligné, car elle peut permettre une plus grande souplesse d'organisation, grâce à un recours à des formules telles que les crèches d'entreprise ou les crèches parentales.
L'idée d'une création de crèches par les chambres de commerce et d'industrie a par exemple été avancée au cours de l'audition des représentants des chambres consulaires par la délégation. Mme Eveline Duhamel s'est déclarée favorable à cette idée, tout en rappelant qu'elle avait échoué dans sa tentative de création d'une crèche dans une zone industrielle et commerciale, faute d'être parvenue à fédérer les entreprises sur ce projet.
La délégation recommande donc le développement d'une offre de modes de garde d'enfants diversifiés (crèches publiques, crèches d'entreprise, crèches parentales...).
* 32 Question écrite n° 2990 sur l'accueil de la petite enfance, publiée au JO Questions Sénat du 27 décembre 2007.