27. Audition d'Amorce
M. Nicolas Garnier , délégué général d'Amorce , a tout d'abord présenté le rôle et les missions de l'association.
AMORCE, association loi de 1901, regroupe 250 collectivités territoriales (45 millions d'habitants) et 115 professionnels (notamment opérateurs et constructeurs de réseaux de chaleur). Son objectif est promouvoir une bonne gestion des déchets, de l'énergie et des réseaux de chaleur.
Lieu d'échange d'expériences, AMORCE se veut également force de proposition face aux pouvoirs publics.
M. Nicolas Garnier a détaillé les trois grands domaines d'activité de l'association :
- les réseaux de chaleur (technique, économie, droit, fiscalité) ;
- la gestion des déchets municipaux (choix techniques de collecte, de valorisation, de stockage, de transport, réglementations, coûts, financements, aspects juridiques, fiscalité, information) ;
- la gestion de l'énergie par les collectivités territoriales (production, distribution, consommation, conséquences des choix d'urbanisme et de transport).
M. Nicolas Garnier a soutenu que la chaleur était au coeur d'un curieux paradoxe : omniprésente dans le bilan énergétique français, elle est néanmoins la grande absente des débats de politique énergétique et du cadre juridique.
Rappelant que la chaleur constitue le premier poste énergétique en France (avec 35 % de l'énergie consommée), loin devant l'électricité spécifique (11 % environ), il a relevé qu'il n'existait pourtant aucun service administratif en charge spécifiquement des questions de chauffage et de chaleur, au sein des ministères du transport, du logement ou de l'industrie.
Il a expliqué que cette situation expliquait en grande partie la difficulté de notre pays à élaborer une politique nationale sur ce thème et, partant, le retard qu'accusent la France et l'Europe dans le développement de la chaleur d'origine renouvelable.
Il a exposé que la centralisation encore très forte de la politique énergétique française contrariait l'épanouissement des initiatives locales dans le domaine des énergies renouvelables thermiques.
Par ailleurs, il a considéré que la chaleur n'était pas seulement absente du débat politique, mais aussi du cadre législatif et réglementaire français.
Il a ainsi regretté que la loi du 3 janvier 2003 relative au service public de l'énergie ne traite que du gaz et de l'électricité et que la commission de régulation de l'énergie ne concerne que les marchés du gaz et de l'électricité et ne concerne en aucun cas les acteurs de la chaleur (producteur, fournisseur, distributeur, ou consommateurs)
Par ailleurs, il a rappelé que dans le code des marchés publics, la nomenclature ne prévoyait pas la fourniture de chaleur contrairement à la fourniture de gaz, d'électricité ou encore de fioul.
M. Nicolas Garnier a également regretté que l'Europe se focalise sur l'électricité d'origine renouvelable, évoquant la directive de 2001 qui vise à produire 21 % d'électricité « verte » à l'horizon 2010.
Il a toutefois salué que la France ait inscrit dans la loi d'orientation énergétique du 14 juillet 2005 l'objectif d'augmenter de 50 % la chaleur d'origine renouvelable d'ici à 2010.
Il a rappelé qu'en France seuls 3 millions d'équivalent d'habitants sont alimentés par des réseaux de chaleur (et 100 millions de personnes au total dans l'Europe des 25). Les réseaux sont au nombre de 450 environ en France aujourd'hui (120 en Ile-de-France) et ce dans plus de 350 villes.
M. Nicolas Garnier a brossé ensuite un historique rapide des réseaux de chaleur : ces derniers sont nés après guerre, à la suite de l'extension urbaine, lorsque l'on souhaitait alimenter les logements -notamment les logements sociaux-, le plus souvent à partir d'une énergie fossile. Ils ont connu une deuxième vague au moment des chocs pétroliers de 1974 et 1979, à ceci près que l'on a soutenu cette fois-ci les réseaux utilisant des énergies renouvelables. Les réseaux de chaleur utilisent aujourd'hui toute la palette des énergies disponibles : énergies fossiles (charbon, gaz...), géothermie, bois, incinération des ordures ménagères, récupération de la chaleur des hauts fourneaux etc...
Il a expliqué qu'un des principaux chevaux de bataille de son association était la lutte contre les distorsions fiscales contraires au développement durable et aux objectifs désormais fixés dans la loi Energie. Il s'est ainsi réjoui que la France ait décidé d'appliquer la TVA à taux réduit sur les abonnements aux réseaux de chaleur (réparant ainsi une anomalie qui datait de 1999) ainsi que sur la consommation de chaleur produite par des réseaux alimentés à 60 % par de la biomasse, déchets et géothermie.
M. Nicolas Garnier a salué le vote, dans le cadre de la seconde lecture de la loi portant engagement national pour le logement, de cette mesure importante de discrimination positive en faveur des énergies locales, soulignant toutefois qu'Amorce aurait préféré que le législateur fixe le seuil à 50 % et non 60 %.