2. Les exemples français
a) Un réseau de chaleur alimenté par le bois-énergie et la géothermie en bassin aquitain : l'exemple de Jonzac (Charente-Maritime)
Depuis 1980, la commune de Jonzac s'emploie à développer l'exploitation des sources d'énergies locales.
Après le second « choc » pétrolier, la ville a mis en oeuvre, de 1980 à 1984, un réseau de chaleur destiné à satisfaire une grande partie des besoins thermiques de l'agglomération, aussi bien ceux des services publics que ceux des particuliers et des entreprises industrielles ou commerciales. Bien que la collectivité ait laissé le libre choix aux divers usagers potentiels de se raccorder au réseau lorsqu'il passait devant chez eux, la majorité a demandé ce raccordement. Pour alimenter ce réseau de chaleur, la ville de Jonzac a exploité différentes sources d'énergie. Un premier forage géothermique, réalisé en 1979, a révélé l'existence d'eau géothermique à environ 65°C et à 1700-1900 mètres de profondeur.
Par ailleurs, la commune a créé une chaufferie polyénergétique en variant au fil du temps les sources d'alimentation (fioul lourd, paille, sarments de vigne...). De plus, une unité d'incinération d'ordures ménagères a été mise en service le 20 janvier 1981.
Des analyses effectuées sur l'eau du forage ayant révélé des qualités thérapeutiques intéressantes, une station thermale a vu le jour en 1986 et la chaleur issue du forage lui a été entièrement dédiée. Un second forage a été réalisé en 1993 pour sécuriser l'approvisionnement en eau géothermale des thermes, retrouver une ressource géothermique bon marché, et chauffer le futur centre aquatique, ludique et de remise en forme appelé « Les Antilles de Jonzac », centre qui a ouvert ses portes en 2002.
En 2002 , l'usine d'incinération d'ordures ménagères a fermé pour des raisons de normes de protection de l'air. L'usine a été remplacée par deux chaudières bois d'une puissance respective de 3 MW. Ainsi, ce sont plus de 10.000 tonnes de combustibles biomasses, sous forme de bois de rebut déchiquetés, qui sont brûlées chaque année pour assurer les besoins thermiques des 250 abonnés au réseaux de chaleur : infrastructures publiques (hôpital, lycée, collège, écoles, gymnase, sous-préfecture, annexe du conseil général, mairie), entreprises et particuliers. Au total, ce sont 1.800 équivalents logements qui sont raccordés à ce réseau.
Celui-ci s'organise de la manière suivante : l'eau chaude sort de la centrale à une température de 80°C à 105°C et un débit variant entre 320 et 400 m 3 /heure. Son transport s'effectue par un réseau calorifugé (30 kilomètres de canalisations se déployant dans l'agglomération) aboutissant aux échangeurs des différents utilisateurs où l'eau abandonne sa chaleur aux réseaux de distribution intérieure. L'eau, refroidie dans les échangeurs, retourne à l'usine par un tuyau pour y être à nouveau réchauffée.
Ce réseau de chaleur présente un bilan extrêmement positif à tous points de vue :
- sur le plan environnemental , ce système permet d'éviter le rejet de près de 9.000 tonnes de CO2 dans l'atmosphère ;
- sur le plan social , il a permis la création nette directe d'une dizaine d'emplois . Considérant que la chaufferie consomme 3.000 tep, on retrouve le ratio donné par de nombreux spécialistes : pour chaque millier de tep que nous n'importons pas, plus de trois emplois durables directs sont créés dans les territoires. Il faut y ajouter les emplois induits (hôtellerie, restauration, thermes, casino...), dont le nombre s'élève aujourd'hui à 165 ;
- sur le plan financier , l'opération s'est révélée réussie et le remboursement du réseau de chaleur est quasi-achevé. Quant aux activités touristiques induites, elles assurent le tiers des recettes de fonctionnement de la commune. Par ailleurs, s'agissant de la facture énergétique , elle est inférieure de 5 à 10 % à celle d'une facture de chauffage au gaz dans des conditions équivalentes, ce qui représente des économies tant pour la commune que pour les clients raccordés au réseau de chaleur. Surtout, le réseau de chaleur met les usagers à l'abri d'une forte hausse du coût des énergies fossiles dans les années à venir.
Les élus locaux cherchent actuellement à améliorer encore le bilan financier en réfléchissant à une diversification de l'approvisionnement en bois. La communauté de communes de Haute Saintonge prévoit ainsi, à titre expérimental, de développer des cultures énergétiques (pins taeda, eucalyptus gunni, saules...) sur des terrains qu'elle possède.