J. LA MISE EN PLACE DE L'AESA (AUTORITÉ EUROPÉENNE DE SÉCURITÉ DES ALIMENTS)

L'AESA qui constituait une proposition essentielle du livre blanc a été instituée en janvier 2002 par le règlement n° 178/2002 du Parlement Européen et du Conseil, mais sa mise en place a, logiquement, exigé un délai nécessité, notamment par les nominations des différents responsables et instances :

-- le conseil d'administration en septembre 2002,

-- le directeur exécutif, M. Geoffrey Podger, britannique issu de la Food Standards Agency, en octobre 2002 qui a pris ses fonctions au début de l'année 2003.

C'est en mai 2003 que l'Autorité a pu démarrer ses activités. La fixation de la composition du conseil d'administration (14 membres) ne s'est pas faite sans difficulté et qu'elle a pris presque un an. Tous les Etats-membres d'alors y sont représentés à l'exception du Luxembourg. Le Britannique qui y siège est le (seul) représentant des associations de consommateurs. La Commission, quant à elle, dispose d'un siège qui s'ajoute aux 14 qui se recrutent « de manière à assurer le niveau de compétence le plus élevé, une expertise diversifiée ainsi que la plus large représentation géographique ».

Les tâches de l'Autorité ont ainsi été précisées par l'art. 23 du Règlement 178/2002 :

« a) fournir aux institutions de la Communauté et aux Etats-membres les meilleurs avis scientifiques possibles dans tous les cas prévus par la législation communautaire ainsi que sur toute question qui relève de sa mission ;

b) promouvoir et coordonner la mise au point de méthodes uniformes d'évaluation des risques dans les domaines relevant de sa mission ;

c) fournir une assistance scientifique et technique à la Commission dans les domaines relevant de sa mission et, lorsqu'elle en fait la demande, pour l'interprétation et l'examen des avis sur l'évaluation des risques ;

d) commander les études scientifiques nécessaires à l'accomplissement de sa mission ;

e) rechercher, recueillir, rassembler, analyser et résumer les données scientifiques et techniques dans les domaines qui relèvent de sa mission ;

f) mener une action d'identification et de caractérisation des risques émergents, dans les domaines qui relèvent de sa mission ;

g) établir un système de réseaux des organismes opérant dans les domaines qui relèvent de sa mission et en assurer le fonctionnement ;

h) fournir une assistance scientifique et technique, lorsque la demande lui en est faite par la Commission, dans le cadre des procédures de gestion des risques mises en oeuvre par la Commission en matière de sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux ;

i) apporter, lorsque la demande lui en est faite par la Commission, un soutien scientifique et technique en vue d'améliorer la coopération entre la Communauté, les pays ayant introduit une demande d'adhésion, les organisations internationales et les pays tiers, dans les domaines qui relèvent de sa mission ;

j) veiller à ce que le public et les parties intéressées reçoivent rapidement une information fiable, objective et compréhensible dans les domaines qui relèvent de sa mission ;

k) exprimer de manière autonome ses propres conclusions et orientations sur les questions qui relèvent de sa mission ;

l) effectuer toute tâche qui lui est assignée par la Commission dans le domaine qui relève de sa mission ».

Il apparaît que les compétences de l'AESA sont déterminées de façon tout à fait comparable à celles de l'AFSSA, compte tenu des différences structurelles et fonctionnelles de principe entre une agence nationale et une agence communautaire. L'AESA a la compétence complète en matière d'évaluation du risque (y compris sur les OGM où pour les raisons historiques que l'on a signalées, l'AFSSA n'a qu'une compétence partielle) et la gestion du risque est du ressort de la Commission européenne. La préexistence de l'AFSSA n'y est sans doute pas étrangère et les législateurs français de 1998 souhaitaient d'ailleurs que cette antériorité puisse servir de référence à l'instance européenne à créer.

Cette similitude de situations doit d'autant plus être remarquée que cette configuration des compétences est nettement minoritaire parmi les Etats-membres qui ne disposent pas tous d'une agence autonome dans le domaine de la sécurité des aliments. Le directeur exécutif de l'AESA a fait part d'une perception quelque peu différente des situations, estimant qu'il y avait une partie de la gestion du risque qui en France relevait de l'AFSSA.

Le décalage dans l'appréciation des réalités a peut être pour origine « l'évaluation de la gestion du risque », notamment par la transmission des plans de contrôles et des réalisations qui incombe à la DGAL ET la DGCCRF principalement. Par ailleurs, l'AESA ne dispose pas du tout de laboratoire et en outre, elle n'a pas de compétence dans le domaine du médicament vétérinaire qui est du ressort de l'Agence européenne du médicament de Londres.

L'AESA, et c'est aussi une différence qui peut expliquer ce décalage, n'a pas davantage de compétence en matière de recherche, contrairement à l'AFSSA. A travers la Direction générale recherche, la Commission dispose, elle, d'importants moyens, notamment d'orientation. Parmi les 13 directions que compte les D.G., l'existence de la direction « Sécurité des systèmes de production alimentaire » a montré l'intérêt apporté à ces questions ainsi que les moyens mobilisés avec 685 millions d'euros pour le domaine thématique prioritaire « qualité et sécurité alimentaire » au titre du 6° PCRD (2002-2005). Parmi les 12 programmes que comporte ce domaine, l'AFSSA a été retenue comme coordinateur du programme Medvetnet (réseau médecine vétérinaire) sur les zoonoses. C'est là une illustration de la valeur de l'activité de l'AFSSA dans le domaine de la recherche.

Si la mise en place institutionnelle de l'AESA est maintenant acquise, depuis qu'elle a commencé à rendre des avis il y a un peu moins d'un an, son installation matérielle et fonctionnelle est loin d'être achevée. Matériellement, l'AESA compte un peu moins d'une centaine d'agents ; elle devrait atteindre un effectif de 250 à 300 une fois complètement déployée dans deux à trois ans. Mais ce déploiement passe d'abord par l'installation, donc le déménagement depuis Bruxelles jusqu'à Parme en Italie. De préférence à Helsinki, et plus lointainement Lille et Barcelone, Parme a en effet été choisie en décembre 2003 comme siège définitif, en même temps qu'étaient effectués les choix des sièges d'une douzaine d'agences européennes.

La mise en place fonctionnelle sera plus avancée lorsque, le mouvement se prouvant en marchant, les mécanismes d'évaluation auront suffisamment fonctionné avec des résultats tangibles dans un domaine où les autres acteurs étant nombreux et attentifs, l'évaluation du risque sera courante et réalisée si possible dans un paysage européen coordonnée où les rôles de chacun seront utilement articulés. C'est là la plus grande question qui se pose à la fois pour l'AESA et pour l'AFSSA elle-même.

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