B. UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE À INSCRIRE DANS LE CADRE D'UN RENFORCEMENT DE L'ÉVALUATION INTERNE AU CSA

1. L'importance d'une évaluation interne de ses activités par le CSA

Une évaluation interne, et non par les corps d'inspection des ministères, apparaît comme conforme à l'autonomie administrative du CSA souhaitée par le législateur.

Certains outils ont été développés en interne par le CSA mais doivent encore être approfondis. Des réunions de diagnostic et prospectives et pour effectuer des bilans se tiennent ainsi traditionnellement en janvier et en septembre. Elles permettent notamment la préparation des rapports annuels.

A cet égard, le rapport annuel remis aux Présidents de la République, de l'Assemblée nationale et du Sénat offre un panorama complet de l'activité du CSA , non intégralement mesurable en termes quantitatifs, mais qui, par nature, obéit à une fréquence seulement annuelle. Le CSA reconnaît d'ailleurs les limites d'une évaluation que retracerait le seul rapport annuel d'activité.

Le rapport annuel : un outil reconnu par le CSA comme nécessaire mais non suffisant pour évaluer l'accomplissement de ses missions

« Le principal instrument susceptible de permettre d'évaluer de manière régulière l'action du CSA est le rapport d'activité que le Conseil rend public chaque année après l'avoir remis au président de la République ainsi qu'aux présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale.

« Ce document, qui retrace et met en perspective les interventions du CSA en présentant de manière détaillée tous les avis, les recommandations et les principales décisions adoptés au cours de l'exercice écoulé, livre également un certain nombre de statistiques relatives à l'activité déployée par l'instance de régulation : nombre des assemblées plénières, nombre des avis rendus au gouvernement et au Conseil de la concurrence, nombre des recommandations édictées, nombre des autorisations délivrées à des stations de radio ou à des chaînes de télévision, nombre des conventions signées par le Conseil avec des chaînes thématiques du câble et du satellite, nombre des mises en demeure adressées aux opérateurs, nombre des procédures de sanction engagées à leur encontre, nombre des auditions auxquelles le Conseil a procédé, nombre des délégations étrangères reçues.

« Il convient cependant de souligner que pour intéressants et informatifs qu'ils soient, tant les développements du rapport d'activité du Conseil sur l'exercice de ses différentes missions durant l'année précédente que les indicateurs quantitatifs susmentionnés qui y figurent, n'autorisent que très imparfaitement l'évaluation d'une action au quotidien qui, en raison même de sa nature, de son caractère protéiforme et des multiples tâches qu'elle implique, se prête avec difficulté à une mesure précise de son ampleur et a fortiori de son efficacité ».

« Au-delà de la description qui en est faite dans le rapport d'activité, si l'on souhaite être à même d'approcher l'exacte dimension de l'action du Conseil et tenter, en dépit de la complexité certaine de l'exercice, d'évaluer les résultats obtenus par celui-ci dans sa politique de régulation, sans doute serait-il nécessaire de prendre en compte une série d'autres éléments ».

Source : CSA

La démarche d'évaluation interne reste donc très frustre . S'il appartient au CSA de définir lui-même ses instruments d'évaluation, sans que ceux-ci ne soient imposés par le législateur ou le gouvernement, votre rapporteur spécial estime souhaitable, au minimum, que des indicateurs d'activité puissent être renseignés et suivis régulièrement (par exemple, le nombre de dossiers instruits ou d'autorisations) afin de pouvoir, le cas échéant, adapter les objectifs et l'organisation des services aux rythmes d'activité. Ces outils internes doivent pouvoir correspondre aux objectifs et aux indicateurs de performance prévus par la LOLF.

Le suivi de ces indicateurs devrait obéir à quelques règles d'organisation : définition d'une périodicité ainsi que du rôle incombant à des responsables de haut niveau pour recueillir cette information et procéder à d'éventuelles adaptations des tâches .

Proposition n° 13 : encourager le développement d'une organisation interne au CSA pour son évaluation, en vue de définir les indicateurs et les objectifs de performance prévus par la LOLF.

2. L'activité du CSA peut donner lieu à l'établissement d'indicateurs fiables

Compte tenu des limites que présente le rapport d'activité annuelle, le CSA reconnaît « nécessaire de prendre en compte une série d'éléments jusqu'à présent peu usités » dans la perspective de définir les objectifs et les indicateurs de performance prévus par la LOLF.

Le CSA suggère d'abord de retenir le respect des délais de procédure légaux , d'une part, et des délais de traitement des plaintes d'autre part :

« Ainsi, l'usage d'un critère portant sur le respect par le CSA des délais fixés, soit par la loi, soit par le Conseil lui-même, dans les procédures de délivrance d'autorisations aux opérateurs, pourrait être retenu. Au demeurant, le Conseil a jusqu'à présent régulièrement respecté ces délais. L'observation des délais de présentation au gouvernement ou au Conseil de la concurrence des avis et observations qu'ils sollicitent régulièrement du CSA pourrait également constituer un indicateur, tout comme le délai de traitement des plaintes dont le Conseil est saisi pour trouble de la réception des émissions de radio ou de télévision, ou le délai de planification des fréquences ».

Votre rapporteur spécial n'est pas entièrement convaincu par le critère du respect des délais légaux, dans la mesure où il s'agit d'une obligation juridique que le CSA doit nécessairement respecter. En revanche, les délais de traitement des plaintes - qui devraient tenir compte de leur volume - sont un critère habituel de mesure de l'efficacité de l'action administrative.

Le critère du nombre de dossiers est ensuite avancé par le CSA :

« De même serait-il possible de faire appel à un critère comme celui du nombre de dossiers dont le Conseil se saisit, d'une part de son propre chef, d'autre part à la demande de tiers, pour les examiner en groupe de travail puis en assemblée plénière, en matière de publicité, de pluralisme de l'information, de déontologie de l'information ou de programmation ».

Une série de critères quantitatifs est ensuite avancée :

- le nombre d'heures de programmes télévisés ou radiophoniques visionnés ou écoutés exhaustivement ou par sondage ;

- le nombre et la nature des manquements des opérateurs à la législation ou à la réglementation relevés ;

- les sanctions, et notamment le montant des sanctions pécuniaires prononcées par le CSA ;

- le nombre de décisions du CSA annulées par le Conseil d'Etat.

Il convient d'observer que certaines de ces données sont déjà disponibles, comme le nombre annuel d'autorisations et de sanctions, et qu'elles ne sont pas corrélées, en l'état, aux moyens budgétaires et humains dont dispose le CSA.

Les autorisations délivrées par le CSA

 

1998

1999

2000

2001

2002

TOTAL

Fréquences TV

278

116

167

61

14

636

Fréquences MF

453

61

118

563

482

1.677

TV locales permanentes

 

2

4

1

3

10

TV temporaires

10

10

16

22

30

88

Radios temporaires

270

271

287

276

282

1.386

Conventions
avec les chaînes thématiques

23

18

24

18

19

102

Autorisations d'exploitation
de réseaux câblés

52

40

50

38

15

195

Canaux locaux
du câble

-

11

27

7

8

53

Source : CSA

Les sanctions mises en oeuvre par le CSA

 

1998

1999

2000

2001

2002

TOTAL

Mises en demeure

150

116

157

122

131

676

Procédures de sanction engagées

2

13

13

17

16

61

Sanctions prononcées

-

-

3

-

11

14

Saisines du parquet pour émissions non autorisées

-

2

7

1

-

10

Source : CSA

L'interprétation de ces indicateurs est toutefois source d'ambiguïtés : par exemple, les sanctions infligées par le CSA sont-elles réellement significatives d'une action efficace, ou dénotent-elles, au contraire, un accroissement des manquements des opérateurs, des défaillances dans l'élaboration des conventions et, par voie de conséquence, un échec de la régulation ?

Si ces indicateurs présentent un intérêt réel pour mesurer l'activité du CSA, votre rapporteur spécial déplore que, à ce stade, le CSA ne soit pas encore en mesure de définir des objectifs. La réflexion à mener doit associer à chaque mission des objectifs, qui seront ensuite déclinés en indicateurs significatifs, fiables et quantifiables. Sans cette étape préalable de définition de priorités, le CSA n'est conduit qu'à collecter les données dont il dispose déjà .

Ces observations rejoignent celles développées par le président de notre commission dans son rapport d'information sur l'état d'avancement de la mise en oeuvre de la LOLF 13 ( * ) :

« Le document relatif au contrôle de gestion dans les administrations de l'Etat élaboré par la Délégation interministérielle à la réforme de l'Etat en juin 2002 rappelle que « la logique de la LOLF incite à commencer par fixer des objectifs. Ces objectifs doivent refléter les priorités du gestionnaire concerné.

« Les objectifs doivent être mesurables, c'est-à-dire qu'à chaque objectif est associé une cible de résultat, à laquelle la réalisation en fin d'exercice pourra être comparée.

« Ces objectifs de performance sont déclinés de manière équilibrée en fonction des axes qui seront retenus pour la définition de la performance, par exemple :

- le résultat final de l'action de l'Etat (ou impact) ;

- la qualité du service rendu à l'usager ;

- l'efficience, c'est-à-dire le rapport entre les moyens et les réalisations.

« A chaque objectif doit être associé un indicateur permettant de mesurer effectivement le niveau de performance atteint ».

« S'agissant des indicateurs, ceux-ci doivent respecter un certain nombre de critères. Les critères suivants sont issus du rapport du groupe de travail sur l'amélioration de la gestion publique ; ces indicateurs doivent être :

« -  lisibles, compréhensibles, clairs, immédiatement interprétables ;

«  - pertinents ;

« - disponibles à un coût compatible avec les bénéfices attendus de leur usage ;

« - fiables, précis, contrôlables ou « auditables » ;

« - disponibles au cours du temps dans les mêmes conditions ;

« - être synthétiques et sélectifs ».

Le rapport d'information précité de notre commission concluait :

« Il convient de souligner que les indicateurs doivent découler d'une réflexion approfondie sur les objectifs de l'action publique. En effet, un indicateur n'a pas de sens en tant que tel, mais doit être lié à la définition d'une stratégie et de priorités clairement établies ».

Dans le cas du CSA, des objectifs mesurables semblent pouvoir être clairement établis . S'agissant par exemple du pluralisme, celui-ci pourrait supposer un accès équitable à l'ensemble des forces politiques aux médias audiovisuels. Un indicateur fiable serait constitué par le décompte régulier des temps de parole consacré aux différents partis politiques. Cet indicateur devrait être rapporté aux moyens utilisés, notamment en personnels.

Votre rapporteur spécial est ainsi convaincu de la possibilité pour le CSA d'opérer la construction de ses propres objectifs et indicateurs de performance prévus par la LOLF, à condition d'y consacrer les moyens nécessaires et en identifiant au préalable les objectifs mesurables.

Proposition n° 14 : engager avec l'ensemble des services une démarche de définition préalable d'objectifs de performance associés à chacune des missions, mesurables par des indicateurs lisibles, pertinents et disponibles.

* 13 Sénat, rapport d'information n° 388 (2002-2003). Citations p. 65-66.

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