D. E. D.- LE CAS PARTICULIER DES PRÊTS BONIFIÉS AGRICOLES
Les agriculteurs demandent un prêt à une banque habilitée à en distribuer qui fait une pré instruction. Le Crédit agricole a perdu son monopole en 1990 mais distribuait encore 84 % des prêts en 2001 selon le CNASEA. Si la banque accepte d'accorder le prêt, après avoir vérifié le respect des conditions d'éligibilité, elle demande à la DDAF, qui est chargée de l'instruction proprement dite, une autorisation de financement puis débloque le prêt si elle l'obtient.
La banque adresse ensuite au CNASEA une facture correspondant à sa charge de bonification qui correspond au produit de l'encours de prêts par l'écart entre le taux demandé aux agriculteurs et le taux de rémunération total de la banque, cet écart étant fixé au moment de son habilitation à distribuer ces prêts. Le CNASEA a ainsi payé 228 M€ en 2001 dont 177 M€ sont remboursables par l'Etat et 51 M€ par le FEOGA.
Avant de payer cette charge, le CNASEA est chargé de certifier la facture de bonification que les banques lui adressent, tout au moins le solde de la facture définitive pour une année donnée car il verse d'abord des acomptes sur la base des factures définitives des années précédentes. Cette certification est faite au niveau du siège pour l'ensemble des prêts d'un même réseau bancaire. Le CNASEA n'effectue pas de contrôles administratifs ou sur place, sauf éventuellement au titre des aides que les prêts bonifiés accompagnent (DJA...). L'agent comptable a un rôle très limité car il ne dispose même pas de ces factures de bonification.
Jusqu'à 2000, le CNASEA procédait, pour effectuer cette certification, à une comparaison globale entre le montant de la facture reçue et une estimation de la charge de bonification obtenue grâce à un logiciel de simulation de cette charge alimenté par les informations transmises par les banques au moment du versement des prêts. En cas de discordance et faute d'explications convaincantes des banques, il pouvait vérifier l'exactitude de la facture sur la base d'un échantillon de dossiers et appliquer une réfaction proportionnelle à l'écart constaté sur cet échantillon.
En 1999, un rapport des inspections générales des finances et de l'agriculture a montré que les simulations du CNASEA n'étaient pas fiables, que la méthode suivie était inadaptée et que l'établissement ne pouvait pas exercer correctement sa mission de certification. Il notait aussi qu'un important réseau bancaire refusait de lui communiquer l'échantillon de dossiers demandé et que ses factures n'étaient pas certifiées depuis 1995, le CNASEA les payant tout de même en appliquant une réfaction forfaitaire de 5 %. Un autre réseau bénéficiant d'un traitement particulier, ce rapport concluait que « la certification ne produit pleinement ses effets que sur moins de 4 % des montants de bonifications facturées, ce qui suffit à mesurer l'inefficience du dispositif ».
Depuis 2000, les cahiers des charges des banques habilitées prévoient un audit systématique de leurs procédures internes par le CNASEA et un renforcement des sanctions en cas de refus de communication des informations demandées.
Son service d'audit interne n'en ayant pas les moyens, le CNASEA a confié à un cabinet privé le soin de définir les modalités de ces audits bancaires, de réaliser dans une large mesure l'audit de la facturation pour 2000 et 2001 et de former son personnel à cette nouvelle fonction. L'urgence d'une certification incontestable et l'impréparation du CNASEA l'ont conduit à passer ce marché dans des conditions qui ne permettaient pas vraiment de respecter l'égalité des candidats.
L'audit devant permettre la certification des factures de 2000 a été plus long et coûteux que prévu, le cabinet retenu ayant découvert de nombreuses anomalies dans les chaînes de traitement des banques. Il a rendu son rapport au début de 2002 mais certaines banques ont alors contesté les conclusions que le CNASEA entendait en tirer et ce dernier n'a pas certifié leurs factures. De nombreuses réunions entre le CNASEA, les ministères de tutelle, qui ne semblent pas avoir toujours soutenu l'établissement, et les banques ont eu lieu sans être conclusives et la procédure de certification des exercices 2000 à 2002 a été suspendue.
C'est seulement en juin 2003 que des conventions portant modification des cahiers des charges de 2000 à 2002 ont été signées et devraient permettre la reprise de cette procédure. Un accord aurait aussi été obtenu sur les factures des exercices 1995 à 1999. En attendant, la majeure partie des factures de bonification adressées par les banques depuis l'exercice 1995 n'était toujours pas certifiées en juin 2003 et le CNASEA versait toujours des acomptes, qu'il se fait rembourser par l'Etat et le FEOGA, sur des bases provisoires.
Il est nécessaire que cette certification qui présente un enjeu important pour les finances publiques, tant nationales que communautaires, soit assurée le plus rapidement possible.