(2) La préservation d'un modèle agricole
La
mondialisation a surtout concerné les biens industriels et, dans la
période récente, les services. Le secteur agricole est
resté relativement à l'écart de la croissance des
échanges : 10 % seulement de la production agricole mondiale
fait l'objet d'échanges internationaux.
Le choix de tenir l'agriculture à l'écart du mouvement de
libéralisation s'explique par les spécificités de ce
secteur d'activité :
- les activités agricoles sont soumises à d'importants
aléas climatiques ; l'évolution du revenu des agriculteurs
serait donc très erratique et imprévisible en l'absence de
mécanisme de soutien public ;
- le maintien d'un important secteur agricole sur notre territoire est
indispensable pour préserver la sécurité alimentaire du
pays ;
- l'agriculture est une activité qui présente des
bénéfices « multifonctionnels »
:
elle est un élément important d'aménagement du territoire,
et les agriculteurs contribuent à l'entretien des paysages et des
milieux naturels. La suppression de toute aide à l'agriculture
conduirait à la désertification de vastes territoires en Europe.
Ces considérations plaident pour un traitement spécifique de
l'agriculture dans le commerce international. Cela ne signifie cependant pas
que toutes les pratiques soient également recommandées en
matière de soutien public. Les négociateurs à l'OMC
classent les mesures de soutien à l'agriculture en trois
catégories :
- la « boîte orange » : elle rassemble les
mesures qui ont les effets distorsifs les plus importants en matière
commerciale ; il s'agit des aides directement couplées à la
production, ou des subventions à l'exportation ;
- la « boîte verte » rassemble les aides qui n'ont
pas d'effet distorsif en matière commerciale ; il s'agit, par
exemple, de subventions versées en contrepartie de bonnes pratiques
écologiques ou d'actions d'entretien du patrimoine naturel ;
- la « boîte bleue » rassemble les mesures de
portée intermédiaire, c'est-à-dire des aides qui ne sont
qu'indirectement liées au niveau de la production ; il peut s'agir,
par exemple, d'une aide versée par hectare cultivé.
Dans la mesure où les pays en développement souffrent souvent des
subventions agricoles versées par les pays du Nord, il est souhaitable
de faire passer une part plus importante des aides agricoles de la
« boîte orange » vers les « boîtes
bleues » et « vertes ». C'est l'orientation
retenue par la réforme de la Politique agricole commune
décidée en juin 2003. On reviendra sur ce point
ultérieurement.