2. Le développement de structures adaptées aux besoins des personnes âgées dépendantes
a) Un besoin de structures plus diversifiées
Les
déplacements effectués par la mission d'information et les
rencontres qu'elle a pu effectuer ont révélé la
nécessité de structures diversifiées pour accueillir les
personnes âgées.
Outre les maisons de retraite classiques, il conviendra de développer
les foyers-logements, les hébergements temporaires, les accueils de
jour, ainsi que les établissements permettant une prise en charge
appropriée des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer.
Un gros effort doit être réalisé en la matière,
comme l'a souligné devant la mission d'information M. Hubert Falco,
secrétaire d'Etat aux personnes âgées :
«
Oui, notre pays manque de lits médicalisés, parce
qu'on n'a pas su anticiper ni accompagner ce phénomène du
vieillissement. On manque d'environ 25 000 à 30 000 lits. Oui,
20 % des lits sont encore inadaptés dans les 10 000 maisons de
retraite publiques, privées, associatives, locales. On ne peut pas dire
qu'on ne fait pas ce qu'il faut pour bien y accueillir les personnes
âgées, mais il existe encore des établissements où
on retrouve des chambres à 5-6 lits, avec un sanitaire par étage.
On a, dans ce secteur, un effort très important à faire pour la
rénovation et la construction de nouveaux
établissements
».
Le taux d'encadrement des personnels dans les établissements accueillant
des personnes âgées doit également être revu à
la hausse, ce qui nécessitera en parallèle, on l'a vu
précédemment, qu'un effort de formation et de revalorisation de
ces métiers soit mené. Les taux d'encadrement des personnels sont
en effet insuffisants, comme l'a rappelé M. Hubert Falco :
«
On parle beaucoup des pays qui nous entourent. Nous ne sommes
pas les meilleurs, mais on n'a pas non plus à rougir, contrairement
à ce qu'on a dit, par rapport à l'ensemble des pays
européens. Le ratio d'encadrement des personnels dans les
établissements accueillant des personnes âgées, en Belgique
et au Royaume-Uni, est de 0,4. En Espagne, il est de 0,5. En Finlande, il est
de 0,6, en Allemagne de 1,2. (...) En France, le ratio est
de 0,4
».
SYNTHÈSE DU RAPPORT DE L'IGAS
LE
RAPPORT DE L'IGAS RELATIF À LA PRISE EN CHARGE SOCIALE ET
MÉDICOSOCIALE DES PERSONNES ÂGÉES FACE À LA CANICULE
DE L'ÉTÉ 2003
Le rapport remis au ministre des affaires sociales, du travail et de la
solidarité confirme les observations et les préconisations de la
mission.
Il relève que le phénomène exceptionnel de la canicule
« a confirmé un certain nombre d'insuffisances dans une
politique en faveur des personnes âgées dépendantes qui
reste en construction
». Il souligne ainsi l'écart
croissant entre les besoins et les capacités des structures d'accueil ou
d'aide à domicile et relève que «
les années
1990 se caractérisent par une croissance très ralentie de la
capacité d'accueil des établissements pour personnes
âgées
».
Tout en constatant le dévouement des équipes de terrain, le
rapport énumère les nombreuses causes de la surmortalité
constatée dans les établissements : âge et
fragilité des résidents ; médicalisation insuffisante
des établissements ; responsables «
encore
éloignés d'une culture du risque et de
l'anticipation
» ; personnels qualifiés en nombre
insuffisant en période de congés.
Il insiste également sur l'inadéquation des prescriptions
architecturales et des structures de certains établissements, soulignant
que, «
dans nombre de cas, la rénovation des
bâtiments inadaptés est inenvisageable
»
et
que
«
la modernisation passe par des opérations
lourdes de reconstruction
». Il relève par ailleurs
l'insuffisante capacité des services de soins infirmiers à
domicile au regard des besoins croissants.
L'IGAS préconise de clarifier les responsabilités. Elle
suggère de conforter la place du président du conseil
général dans les dispositifs de prévention et en cas de
déclenchement du « plan Vermeil » d'alerte. Elle
invite ensuite les différents acteurs à entrer dans des
réseaux de coordination gérontologique et préconise de
mieux former les personnels et de dynamiser la rénovation des
établissements sociaux.
Outre des propositions concrètes, l'IGAS propose également de
mieux identifier les personnes vulnérables et souhaite associer les
services publics de proximité ainsi que l'environnement local à
des actions de vigilance à l'égard des personnes isolées.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la
solidarité, a indiqué à la mission d'information que la
mise en oeuvre du plan vieillissement et solidarité serait notamment
«
destiné à renforcer la médicalisation des
établissements aux personnes âgées et à créer
de nouvelles places. Il servira aussi à accentuer l'effort en faveur de
la vie à domicile pour parvenir à environ
100 000 places de services de soins infirmiers à domicile en
2007 et à une augmentation significative des places en
hébergement temporaire ou en accueil de jour
».
Dans le même sens, la mission estime nécessaire de
privilégier le développement des services de soins infirmiers
à domicile, et plus largement des dispositifs permettant le maintien
à domicile des personnes âgées.
b) Une première réponse: le plan « vieillissement et solidarités »
On
rappellera que le Premier ministre a présenté, le 6 novembre
2003, une réforme de solidarité en faveur des personnes
dépendantes -personnes handicapées et personnes
âgées- qui devrait être mise en oeuvre sur quatre ans. Cette
réforme répond à certaines attentes de la mission.
La première partie du plan, qui fait l'objet d'un projet de loi pour
l'égalité des droits et des chances, la participation et la
citoyenneté des personnes handicapées, devrait consacrer un
«
droit à la compensation du handicap
» et
prévoit la prise en charge personnalisée des personnes
handicapées et de leur intégration dans la cité.
La seconde partie du plan est consacrée à la solidarité
envers les personnes âgées.
Ainsi que l'a indiqué lors de son audition M. François Fillon, ce
programme en faveur des personnes âgées s'articule autour de
plusieurs orientations : «
La première -nous sommes
là au coeur des difficultés que nous avons connues cet
été- consiste à réduire autant que possible la
coupure entre le secteur social et le secteur médical. C'est pourquoi
elle associe prévention et médicalisation prises en charge par
les travailleurs sociaux, les professionnels de l'aide à domicile et les
personnels médicaux et paramédicaux. La deuxième
orientation répond à l'attente prioritaire des personnes
âgées et a pour but de développer l'autonomie personnelle
en favorisant le plus longtemps possible la vie à domicile. La
troisième vise à accroître la responsabilité des
principaux acteurs publics ou associatifs de la prise en charge. Elle a
notamment pour but d'organiser une meilleure coordination des interventions en
cas d'alerte et de favoriser le pilotage de proximité, notamment par les
conseils généraux
».
Le plan annoncé par le Premier ministre vise en effet à
privilégier le maintien à domicile de ces personnes pour vaincre
l'isolement, à moderniser les maisons de retraite en renforçant
leur médicalisation -15 000 personnels soignants seraient
recrutés d'ici 2007, 10 000 places seraient créées en
maisons de retraite-, et enfin à améliorer les soins
gériatriques.
Le gouvernement mobiliserait ainsi sur quatre ans 9 milliards d'euros
supplémentaires pour les personnes dépendantes, ce qui devrait
notamment permettre d'assurer la pérennité du financement de
l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). M. François Fillon
a précisé à cet égard devant la mission
d'information que 850 millions d'euros par an seraient mobilisés en
faveur des personnes âgées, financement de l'APA mis à
part.
Le projet de loi relatif au dispositif de solidarité pour l'autonomie
des personnes âgées et des personnes handicapées, qui met
en oeuvre une partie du plan annoncé, prévoit des mesures
correspondant à la
mise en place d'un dispositif de veille et
d'alerte
au profit de ces personnes et destiné à
prévenir les risques exceptionnels, climatiques ou non. Ce dispositif
sera arrêté conjointement par le préfet du
département et par le président du conseil général.
Il sera mis en oeuvre sous l'autorité des préfets pour venir en
aide, dans le cadre communal, aux personnes âgées ou
handicapées qui en auront préalablement fait la demande et dont
la situation le justifie.
Le projet de loi propose ensuite la
création d'une
«
caisse nationale de solidarité pour
l'autonomie
», qui aurait pour mission de contribuer au
financement de la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes
âgées et handicapées.
Le dispositif retenu serait national, mais sa gestion serait
décentralisée au niveau du département. Le plan
prévoit que la nouvelle caisse devrait être opérationnelle
avant la fin 2004.
Le financement de ces dépenses serait notamment assuré par une
journée de travail supplémentaire
. Celle-ci devrait permettre
d'augmenter la production nationale de 0,3 % environ. En contrepartie, la
caisse nationale de solidarité pour l'autonomie recevrait le produit
d'une contribution de 0,3 % acquittée par tous les employeurs,
privés et publics. Pour simplifier son prélèvement, cette
contribution serait assise et recouvrée comme le sont les cotisations
patronales affectées au financement des régimes de base de
l'assurance maladie. Elle recevrait également le produit d'une
contribution de 0,3 % portant sur les revenus du patrimoine et sur les
revenus des placements, définie comme une contribution additionnelle au
prélèvement social de 2 % et portant sur ces mêmes
revenus. En année pleine, cette nouvelle contribution de
solidarité devrait rapporter 1,9 milliard d'euros.
Au total, le plan « vieillissement et solidarité »
devrait ainsi permettre de combler une partie des insuffisances de notre
système.
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