2. Au niveau communautaire
a) Réaffirmer la nécessité d'un engagement communautaire
Avec l'achèvement de la désignation des sites Natura 2000, la question de son financement est une condition sine qua non de sa réussite. Les sites proposés à ce titre par les Etats membres représente environ 15 % du territoire de l'Union Européenne, il est donc essentiel que celle-ci s'engage à travers le cofinancement de certains coûts liés à la gestion des sites du réseau. Force est cependant de constater qu'aucun cadre précis n'a encore été établi pour gérer la programmation de ce financement et les seules mesures positives proviennent des instruments financiers existant.
Un groupe de travail formé d'experts nationaux et de représentants des parties concernées a été chargé d'étudier les coûts prévisionnels de la gestion de Natura 2000 afin de faire des recommandations à la commission. Celle-ci devrait adopter une communication sur le cofinancement de Natura 2000 avant la fin 2003.
Dans cette perspective, il convient de rappeler ici la position défendue par la France qui souhaite que la voie contractuelle qu'elle a privilégié soit soutenue financièrement par l'Union Européenne à travers des politiques sectorielles bien identifiées.
b) Les politiques sectorielles immédiatement concernées
La première piste retenue est l'évolution de la politique agricole commune qui doit permettre d'une part une meilleure « écoconditionnalité » du premier pilier et, d'autre part, en ce qui concerne le règlement de développement rural en cours de modification (second pilier), l'inscription du cofinancement à ce titre de Natura 2000 comme une obligation des Etats Membres.
Pour le cofinancement de Natura 2000, le deuxième pilier pourrait se concentrer sur le cofinancement des mesures de conservation (contrats de gestion), non seulement avec les agriculteurs et mais aussi avec une grande partie des acteurs du monde rural (forestiers, chasseurs propriétaires). Ceci reviendrait, pour la France, à amplifier les modalités actuelles en vigueur dans le plan de développement rural national 2000-2006, qui prévoit d'ores et déjà le cofinancement des mesures contractuelles pour la mise en oeuvre de Natura 2000, tous types de bénéficiaires confondus .
L'impact des fonds structurels au cours de la période de programmation actuelle (2000-2006) sur les financements des politiques environnementales et en particulier Natura 2000 ne peut être négligé. Selon toute probabilité, au delà de 2006, les interventions de ces politiques sur le territoire français ne pourraient être possibles que selon des objectifs thématiques.
En conséquence, la détermination future des interventions thématiques non territorialisées des fonds structurels doit inclure des objectifs prioritaires de protection de l'environnement et notamment Natura 2000 Cela pourrait également se faire au sein d'une thématique "aménagement du territoire" ou "développement durable". La politique des fonds structurels révisée devrait ainsi aboutir à un nouvel outil applicable sur tout le territoire, assurant le cofinancement communautaire des autres types de dépenses d'investissement liées à la gestion du réseau Natura 2000 notamment en ce qui concerne l'élaboration des plans de gestion, l'animation et la concertation, le suivi et l'évaluation.
En ce qui concerne la politique communautaire de la pêche, même si la désignation des sites en milieux marins est encore très peu avancée, il importe d'anticiper les besoins de financement pour la gestion des futurs sites marins Natura 2000, en prévoyant dès maintenant, à l'occasion de sa révision, les dispositions ad hoc dans les outils concernés (IFOP notamment), sous la forme de l'intégration d'une condition spécifique, pour l'obliger à prendre en compte les impératifs de protection de l'environnement, en particulier Natura 2000.
Enfin, en tant qu'outil complémentaire, LIFE-Nature pourrait utilement se combiner aux précédents instruments en intervenant de manière strictement complémentaire par rapport aux champs couverts par les autres politiques sectorielles, notamment lorsque la mobilisation des fonds existants ou leur évolution ne permet pas d'intervenir rapidement et spécifiquement : en particulier suivi et évaluation du réseau Natura 2000.
Tous ces instruments devront être améliorés et assouplis pour permettre un financement approprié aux besoins du réseau Natura 2000, en particulier en encourageant le développement de programmes de gestion pluriannuels, et en veillant à laisser une marge de manoeuvre nécessaire aux Etats Membres selon le principe de subsidiarité.
Compte tenu du contexte budgétaire très contraint pour les années à venir, il nous faut collectivement veiller à l'utilisation rationnelle et responsable des deniers publics, y compris s'agissant de la préservation de nos espaces naturels : les bonnes pratiques sont à encourager, mais ne sont pas rémunérées, et les contrats Natura 2000 sont ciblés sur les mesures de génie écologique.
CONCLUSION
Natura 2000 s'inscrit dans une démarche de développement qui doit s'incarner dans une politique territoriale ambitieuse.
Il s'agit d'un outil, certes défini au plan communautaire, mais qui doit se construire sur nos territoires. Ceci ne sera possible que si les acteurs et les gestionnaires locaux peuvent s'approprier cette démarche, en agissant pour une meilleure identification de leur patrimoine naturel et pour la reconstruction de leurs paysages. Il s'agit « de rendre aux habitants la fierté d'être d'ici ».
Plus généralement, la construction de ce réseau écologique européen privilégie une approche territoriale intégrée pour sa gestion, et fait appel à la gouvernance locale.
Les orientations préconisées dans ce rapport s'intègrent à la réflexion en cours sur la rénovation de la politique nationale de protection et de valorisation du patrimoine naturel.
Les principes qui guident cette réforme peuvent se décliner ainsi : l'Etat garant, plutôt que gérant, des territoires « labellisés », une gestion concertée et contractualisée.
L'intégration des enjeux patrimoniaux dans les projets de territoires doit permettre également de redonner plus de cohérence aux politiques publiques . Ceci doit se traduire par des mesures de simplification et d'harmonisation entre les différentes réglementations existantes en matière de protection du patrimoine naturel tant sur les règles de délimitations et les périmètres que sur les procédures utilisées.
Il s'agit d'une démarche ambitieuse mais essentielle si la politique de préservation du patrimoine naturel veut traduire les objectifs du développement durable, à savoir concilier les activités économiques et humaines avec la nécessaire préservation de notre environnement .