LES RÉCEPTIONS DE PLAINTE : UNE ACTIVITÉ TRÈS CONSOMMATRICE DE TEMPS ET D'EFFECTIFS
Les éléments observés sur le terrain
Une activité qui nécessite organisation et compétence
La réception des plaintes est l'une des principales missions des forces de sécurité : il convient d'être en permanence en mesure de les recevoir. Dès lors, dans la constitution des emplois du temps et dans l'allocation des ressources humaines, est-il nécessaire de toujours garantir un nombre d'agents minimum pour pouvoir procéder à l'audition puis à l'enregistrement des plaintes 79 ( * ) .
Cette activité nécessite :
§ d'écouter le plaignant,
§ de qualifier la réclamation (nécessite-t-elle un traitement juridique réel ou bien suffit-il de donner quelques conseils pour régler un simple différend ?),
§ de saisir la plainte dans le logiciel (LRP ou ARPEGE),
§ de transmettre la plainte et d'assurer son suivi.
Des outils efficaces
Unanimement, les agents rencontrés considèrent qu'ils sont particulièrement bien assistés par les logiciels d'aide à la saisie. Ces outils permettent notamment d'éviter le rejet des dossiers pour vice de procédure, suite à une erreur dans la saisie de la plainte. Ils peuvent également être bien personnalisés en fonction des desiderata particuliers des Parquets. Toutefois, certains gendarmes développent leurs propres formulaires, comme il a pu être observé dans une compagnie.
Une seule remarque est formulée de façon récurrente : de nombreux officiers de police judiciaire estiment qu'il faudrait accélérer l'introduction des évolutions de la législation dans ces applications. La recherche des textes de loi est possible en gendarmerie grâce au « Mémorial », qui recense sous forme de CD-Rom l'ensemble des textes et circulaires ministérielles en vigueur.
Toutefois, comme en témoigne un commandant de brigade, la difficulté de mise à jour d'un tel support génère quelques retards par rapport à l'actualité judiciaire. Il faut donc obtenir les textes de loi auprès des interlocuteurs naturels de gendarmes : les autorités judiciaires. Il n'en reste pas moins que le « Mémorial » qui est intégré à la suite bureautique des gendarmes est considéré par tous comme un outil précieux d'aide à la procédure, facile d'emploi grâce au moteur de recherches par mots-clés.
Une activité consommatrice d'hommes et de temps
Malgré tout, cette activité a des conséquences importantes sur la vie d'une unité :
Tout d'abord elle consomme beaucoup d'effectifs : durant la journée, certains commissariats ont besoin, en permanence, de quatre gardiens de la paix uniquement pour recevoir les plaintes.
Exemple : dans une brigade, l'accueil est assuré par près de quatre gendarmes dont deux sont en permanence chargés de recevoir les plaintes.
A ce titre, la gendarmerie met à profit la réorganisation induite par les communautés de brigades pour aménager des plages d'accueil du public pour la prise de plainte en fonction des besoins réels de la population.
Ensuite, elle consomme un temps très important pour chaque agent. La durée d'une réception de plainte est très variable (de 10 minutes à 1 heure, voire plus). Tout dépend de la complexité de l'affaire, de l'habitude de l'agent, de la clarté du plaignant... Logiquement, le suivi des procédures nécessitera lui aussi un investissement horaire fonction de la complexité de la procédure.
Enfin, il ne faut pas oublier qu'elle est aussi une forte consommatrice d'espace. Pour recevoir les plaintes, les forces de sécurité ont, de plus en plus, tendance à aménager des espaces dédiés, parfois difficiles à installer dans des bâtiments vétustes. Les nouvelles brigades ou commissariats construits en partenariat avec les collectivités locales intègrent désormais cette préoccupation.
La recrudescence des plaintes de « faible enjeu » en termes d'enquête
Beaucoup déplorent la plainte déposée « pour l'assurance ». Ces dépôts de plaintes dans le seul but de répondre à la demande administrative de la compagnie d'assurance sont en forte augmentation.
Exemple : dans un commissariat central de Paris, le pourcentage de plaintes déposées pour l'assurance est évalué à plus de 50 %.
Cette explosion de plaintes pour de petits délits n'est que très rarement suivie d'une élucidation par les services de sécurité et participe de ce sentiment d'insécurité.
* 79 Nota : toutes les unités de police ou de gendarmerie au contact du public n'ont pas vocation à recevoir des plaintes. C'est notamment le cas des BAC et des PSIG qui renvoient systématiquement les usagers vers les commissariats ou brigades territorialement compétentes. Bien qu'équipés de BB 2000, les PSIG saisissent essentiellement les premiers PV de constatation.