26. Audition de M. Jean-Louis Cazaubon, vice-président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA), accompagné de M. Sylvain Confida, conseiller (19 juin 2002)
M.
Jacques Blanc, Président -
Bonjour messieurs. Nous vous accueillons
avec plaisir. Nous connaissons un peu votre maison et je crois que vous
connaissez le motif de notre mission sur la montagne dans le cadre de
l'année internationale.
M. Jean-Paul Amoudry, Rapporteur -
Nous sommes heureux de vous
accueillir, messieurs, en vous remerciant d'avoir fait le déplacement de
Paris. Vous avez dû recevoir la grille de questions qui a
été préparée et qui nous permettra de vous entendre
sur les sujets importants et d'actualité que sont les contrats
territoriaux d'exploitation (CTE), les filières de transformation, etc.
Je vous propose de synthétiser le message le plus fort que vous
souhaitez nous adresser et de nous laisser le temps, au président,
à Auguste Cazalet à moi-même de vous demander des
précisions.
M. Jean-Louis Cazaubon -
Tout d'abord je vous remercie de nous
auditionner. Je suis ici au titre de l'Assemblée permanente des chambres
d'agriculture. Je suis président de la Chambre d'agriculture des
Hautes-Pyrénées et de la Chambre régionale des
Midi-Pyrénées. Je connais bien Auguste Cazalet puisque j'habite
le département voisin. Mon collaborateur est Sylvain Confida,
chargé des questions de montagne au niveau national pour le compte des
chambres d'agriculture. Nous allons vous donner le point de vue des chambres
d'agriculture et des agriculteurs. Je sais bien que la montagne n'appartient
pas qu'aux agriculteurs, mais il faut dire que la montagne aurait bien triste
mine sans eux. Je pense que vous en êtes conscients.
La première question concernait notre vision sur les perspectives de
l'agriculture de montagne. L'agriculture de montagne est fragile : d'une
part à cause de ses structures, qui sont plus petites que la moyenne
française, d'autre part à cause du relief, qui rend impossible la
mécanisation sur une grande partie du territoire. Elle part donc avec
plusieurs handicaps qui ont été corrigés par un certain
nombre de mesures qui sont nécessaires. Je pense notamment aux
indemnités compensatoires de handicap naturel (ICHN). Par ailleurs, les
règlements européens, qui mettent en place un soutien aux ovins,
aux bovins et aux productions herbagères, sont moins favorables qu'aux
grandes cultures. Nous nous posons donc des questions sur l'évolution
des débats concernant la politique agricole commune et de ses soutiens.
L'entrée des PECO et l'évolution du premier vers le
deuxième pilier nous préoccupe aussi : qu'adviendra-t-il de
la ligne de partage de ce deuxième pilier, en termes de
développement rural ? Si les financements servent à la
construction de la salle des fêtes ou du mur du cimetière, la
ligne de partage entre l'agricole et le rural pose problème. La montagne
devra avoir sa part dans ces politiques. L`avenir de la politique de montagne
dépendra aussi de cela. Nous avons aussi relevé un autre
point : nous n'avons pas de données spécifiques à la
montagne. Les statisticiens n'ont pas travaillé sur les
spécificités de la montagne. Nous n'avons donc pas de chiffres
propres à l'agriculture de montagne pour la dernière
décennie. Il nous est donc difficile de mettre en évidence les
évolutions qui ont caractérisé l'agriculture de montagne
depuis 1988.
En ce qui concerne l'avenir, nous pensons qu'une carte à jouer est celle
de la diversification, car c'est là que la valeur ajoutée prend
tout son sens. Quelle est la définition, dans cette optique, de la
valeur ajoutée ? Dans les filières organisées, les
filières longues, je pense tout de suite au roquefort ou à la
transformation de lait en fromage dans le Pays Basque. Nous nous apercevons
qu'il y a une vie en montagne grâce à ces
phénomènes. Grâce à un troupeau de 100 à 150
brebis dont la production de lait est transformée en fromage, sur une
surface réduite, il est possible d'avoir des revenus suffisants pour
faire vivre une famille. Donc il faudrait arriver à
généraliser cela, notamment en mettant en place des ateliers
individuels ou collectifs. Ces ateliers de transformation - salles de
découpe, abattage de volaille, etc. - sont une carte à jouer. En
même temps, j'espère que vous nous aiderez à obtenir toutes
les aides aux équipements nécessaires. Je pourrais parler aussi
de la potabilité de l'eau en montagne, qui est un obstacle coûteux
que nous rencontrons souvent dans le cadre des fabrications fromagères.
Quant aux CTE, que faut-il en faire ? Faut-il des CTE
spécifiques ? Nous pensons que la panoplie, telle qu'elle nous
était proposée et après amendement, peut convenir aux
zones de montagne. Nous retrouvons de nombreuses problématiques
montagnardes. Une simplification serait peut-être nécessaire. Je
pense que les CTE sont quelque chose dont nous pouvons tirer parti. Il faudrait
quelques évolutions sur une des mesures du plan de développement
rural national (PDRN), la mesure J : qu'elle puisse s'ouvrir pour
pérenniser, animer et financer le fonctionnement des structures
collectives. Nous estimons qu'il faudrait quadrupler cette enveloppe, notamment
pour former, positionner et organiser les bergers, notamment dans les
Pyrénées où nous rencontrons le plus de problèmes.
Tout ce qui tend à entretenir et à valoriser le paysage est
bienvenu. Cette mesure devrait aussi favoriser les équipements, les
parcs de triage, les points d'abreuvement.
Dans plusieurs secteurs, les contrats de plan Etat-région permettaient
d'émarger. Des groupes se sont réunis, dans le cadre du
pastoralisme, et ont pensé que s'il serait avantageux de mettre en place
une dotation globale de fonctionnement spéciale à connotation
silvo-pastorale permettant de financer ce genre d'ouvrage. Le problème
des CTE est qu'il va y avoir des bagarres entre les zones de montagne et
les zones de plaine lorsque les enveloppes seront
départementalisées. Donc il faudrait pouvoir disposer d'une
enveloppe spéciale pour les premières. Les espaces montagnards se
situent, pour beaucoup d'entre eux dans les zones Natura 2000. Ce sont des
sites remarquables mais si nous ne maintenons pas le couple homme-animal dans
ces zones, qui sait ce qui en adviendra ?
L'autre question concernait les conditions et les moyens nécessaires
pour une meilleure restructuration des filières, notamment en ce qui
concerne la transformation, afin de valoriser les produits de montagne. Nous
manquons d'argent pour promouvoir tout cela, notamment au niveau du
marketing
et plus généralement, de l'accompagnement amont
et aval, des demandes technico-économiques d'appui aux
microfilières. L'avenir de l'agriculture de montagne se situe clairement
dans ces filières et dans ces niches de production. Sur mon
département, nous avons relancé une production de porc,
appelé porc gascon, qui est un porc noir car il vit dehors, un peu comme
les sangliers, dans un espace clôturé. Il y a 30 porcs à
l'hectare. Cela permet de valoriser les espaces à faible potentiel. Les
charcuteries sont positionnées sur un créneau haut de gamme,
à l'instar des charcuteries espagnoles. Après 12 ans de travail,
nous sommes arrivés à avoir 5000 ou 6000 porcs par an. C'est un
petit marché. Cela prouve néanmoins qu'en employant des
techniciens, vous pouvez sortir une race de l'oubli et monter une
filière, avec tous les aléas que cela implique. Mais avant d'y
arriver, il faut beaucoup d'argent et nous n'arrivons pas à nous
financer pour animer ces filières. Là est le vrai
problème.
Il faut savoir aussi que c'est dans les zones de montagne que nous avons
installé le plus de jeunes. Notre économiste à l'APCA a
constaté que c'était dans ces régions où l'emploi
avait le moins baissé, notamment dans l'Aveyron et les
Pyrénées-Atlantiques. Certains départements ont
énormément restructuré et ont des exploitations de 200
hectares et plus, mais la valeur ajoutée n'est pas là : elle
se trouve là où il y a des hommes. Dans ces régions de
montagne, ce n'est qu'en jouant cette carte que nous pourrons favoriser
l'agriculture. Dès qu'il devient possible de transformer le lait en
fromage, comme dans les Alpes avec le beaufort, dès que des gens se
battent contre vents et marées, il est possible d'arriver à fixer
de la vie sur des territoires difficiles. Il faut travailler mais si c'est
rentable ce sera toujours possible. Une autre difficulté est celle des
aides au transport. Vous savez qu'en montagne des surcoûts existent et
qu'ils ne sont pas financés.
Au sujet de la répartition des volumes des quotas laitiers, la question
était de savoir s'il était possible de mettre en place des
mesures plus favorables à la montagne. Je veux bien mais nous aurons un
mal fou à en convaincre nos collègues bretons.
M. Jacques Blanc -
Soyons sans complexes. En Bretagne, ils produisent 8
000 ou 9 000 kilos par bête, tandis qu'en montagne, ça tourne
autour de 4 000 ou 5 000.
M. Jean-Louis Cazaubon -
Tout dépend du cahier des charges. Pour
le Beaufort, ils sont à 4 000. C'est une économie de cueillette.
M. Jacques Blanc -
Et à l'époque, la taxe de
coresponsabilité n'était pas appliquée à la
montagne. Lorsque j'étais secrétaire d'Etat à
l'agriculture, nous avions négocié pour que la taxe de
coresponsabilité soit appliquée ailleurs. Mais ensuite les quotas
ont été appliqués alors que les niveaux de production
n'étaient pas comparables. Quand vous alliez dans une exploitation
hollandaise où il y avait 80 bêtes sur 20 hectares et que
chaque bête produisait 9 000 kilos, c'était pour la transformation
du soja en lait. Et je pense que nous ne devrions pas être limités
dans l'installation des jeunes en montagne.
M. Jean-Louis Cazaubon
- Je suis d'accord. Mais quand nous allons
soulever ce problème au niveau national au sein des sections
spécialisées, il y aura un débat. Prenez la Mayenne :
elle a plus de producteurs laitiers que toute l'Aquitaine et tout le
Midi-Pyrénées réunis avec leurs 13 départements. Ce
sont pourtant deux régions assez vastes. Il faut absolument qu'il y ait
assez de droits à produire. Je crois comme vous que c'est une
nécessité d'installer des jeunes mais il y aura des oppositions.
Il faut que vous le sachiez.
M. Jacques Blanc -
Dans certaines zones, les quotas ne sont pas
utilisés. Pouvons-nous espérer qu'une réserve de droit
soit mise en place pour les zones de montagne afin de favoriser l'installation
de jeunes agriculteurs ?
M. Jean-Louis Cazaubon -
Dans les zones de montagne, pour aller dans ce
sens, les quotas morts et les sous-réalisations devraient pouvoir
être régionalisés. Il faudrait pouvoir les faire basculer
et ne pas les perdre, que la réserve nationale ne les prenne pas. Il
faut qu'à un moment donné une mutualisation de la campagne
laitière soit mise en place. Quand arrive le mois de décembre et
qu'il reste un trimestre, si Pierre n'utilise pas son quota, il faudrait qu'il
soit possible de procéder à une mutualisation à
l'intérieur du département, et que Paul en dispose, pour ne pas
sous-réaliser.
M. Jacques Blanc -
C'est idiot parfois parce que vous n'avez pas le
droit de produire et donc le jeune ne peut pas s'installer.
M. Jean-Louis Cazaubon -
S'il existait un régime
spécifique pour les zones de montagne dans l'utilisation des
quantités, nous pourrions arriver à faire quelque chose.
M. Jacques Blanc -
C'est une idée. Et c'est vrai pour le lait
mais aussi pour l'ensemble des droits à produire.
M. Jean-Louis Cazaubon -
En effet, c'est pareil. Il faut à tout
prix que cela n'échappe pas de ces zones. La difficulté est que
lorsque vous avez un département qui représente à lui seul
plus que 13 autres, lui ne va pas sous-réaliser, parce qu'il peut
piloter les choses de manière plus fine. Mais il ne faut pas les laisser
prendre sinon nous allons fabriquer des déserts.
M. Jacques Blanc -
Le problème de l'installation des jeunes est
lié, d'une part, au problème foncier, et d'autre part au
problème des sectionaux.
M. Jean-Louis Cazaubon -
Ce n'est pas un problème chez nous. Nous
avons des commissions syndicales et des réglementations qui permettent
une indivision sur plusieurs communes. Au sujet de la diversification et des
perspectives de diversification de l'agriculture de montagne, je dirais que
l`avenir ne peut pas s'envisager sur les productions de masse. Nous avons
parlé de la transformation. Mais il y a aussi la
multifonctionnalité, qui est une forme de diversification. Il y a aussi
une carte à jouer avec l'agritourisme et les chambres d'hôte,
notamment dans les Hautes-Pyrénées. Un gîte rural est
loué 30 semaines par an. Certaines exploitations en vivent.
Quand les technocrates parlent des externalités positives, je demande
à voir. Qu'est-ce qu'elles amènent à l'agriculture ?
Les paysans ne perçoivent pas un franc là-dessus. Or le
thermalisme, le ski, l'industrie du tourisme, les ballades, ne sont pas
possibles si le couple homme-animal n'est pas présent et si les espaces
ne sont pas entretenus. L'agriculture n'est pas seulement un état de vie
et il faudrait donc que la prestation de l'agriculteur soit reconnue. Il faut
être imaginatif. La présence de l'agriculteur en montagne est
nécessaire. Ce ne sont pas les brigades vertes qui maintiendront tout
cela en place. Cela rentre dans le cadre de la diversification.
En France, je pense que l'expérience de Valadier avec le Laguiole, dans
l'Aveyron, est une expérience réussie. Il n'a fait que recopier
ce qui a été fait avec le beaufort : cahier des charges
très rigoureux, fixé dans une zone où la production,
accrochée à un territoire, permet de le valoriser. Je connais
moins les expériences réussies à l'étranger, mais
je sais qu'en Autriche, l'entretien du territoire et l'accueil des touristes se
sont développés et ce sont sans doute des actions susceptibles
d'être reproduites dans nos massifs montagneux. Il y a ensuite la
valorisation de la biomasse, des déchets ménagers, l'entretien du
paysage tel qu'il est pratiqué en Allemagne. La reconnaissance qu'ont
ces agriculteurs de montagne résulte du fait que tout le monde sait que
ce sont eux qui valorisent et entretiennent le paysage.
Nous avons un problème avec le plan de maîtrise des pollutions
d'origine agricole (PMPOA) en montagne. Il y a plusieurs niveaux. Aujourd'hui,
pour bénéficier des aides pour la maîtrise de la pollution
d'origine agricole, il faut être situé en zone vulnérable.
Le plus souvent, les zones de montagne ne sont pas classées en zones
vulnérables. Cela veut sûrement dire qu'il n'y a pas de
problème. Pourtant, les mêmes contraintes existent. Si vous voulez
investir de façon à avoir un label - un produit de qualité
- par l'intermédiaire d'une filière territorialisée, il
faut être aux normes. L'agriculteur dans la plaine, en zone
vulnérable, va pouvoir bénéficier des aides. Mais
l'agriculteur éleveur en zone de montagne ne le pourra pas, parce qu'il
n'est pas en zone vulnérable. Il existe donc une disparité de
traitement. Par ailleurs, dans l'épandage, il existe un critère
de pente : il est interdit d'épendre du lisier s'il y a plus de
7 % de pente. Vu de Paris, tout va bien. Mais quand vous êtes dans
une zone de montagne, même si le bâtiment est sur du plat, le
terrain est souvent à plus de 7 %. Pourquoi est-ce idiot ?
Parce que le jour où la terre est sèche, il n'y a pas de
ruissellement, même au-delà de 7 %. Ça
pénètre aussitôt. Et si c'est mouillé et que vous
êtes en pente, c'est simple : vous laissez le tracteur et la tonne
de lisier sous le hangar, sans quoi vous finissez au fond du talus. Il faudrait
donc éliminer ce critère. Le problème se pose avec
très peu d'acuité, car les animaux passent six à sept mois
dehors et ensuite les déjections sont épandues sur les
pâturages. Voilà le problème. Je crois qu'il faut le placer
parmi les priorités dans votre rapport.
M. Jean-Paul Amoudry -
Merci beaucoup pour cet exposé très
riche. Je voulais simplement vous demander si la pluriactivité est pour
vous un élément important dans les perspectives d'avenir de
l'agriculture ? Ou est-ce que c'est un peu désuet ?
Deuxièmement, je voudrais avoir votre avis sur le décret du 15
avril 2000 sur la provenance montagne et ses conditions d'application au regard
des signes de qualité et des traditions françaises de production.
Enfin, vous avez évoqué un groupe de travail pastoralisme qui
avançait l'idée d'une DGF pour les équipements
sylvo-pastoraux. Est-ce que vous avez des choses à nous dire sur ce
travail ? Est-ce que les propositions de ce rapport vous paraissent
valables ?
M. Auguste Cazalet -
Jean-Louis Cazaubon a bien posé les
questions et donné des réponses. Nous avons souvent parlé
de ces sujets avec les organisations professionnelles. Il a bien
rapporté les problèmes que nous avons. Il est impossible de dire
que les bêtes doivent faire leurs excréments sur le plat pour ne
pas que ça descende dans la rivière. Certaines choses qui nous
sont demandées sont impossibles à mettre en oeuvre, sauf à
faire fuir des populations entières de la montagne. Il faut quand
même que les gens y vivent. Les hommes de la montagne sont vaillants et
se sont toujours accrochés à la montagne. J'ai fait du fromage
jusqu'à l'âge de 35 ans et je sais que c'est du travail dans des
conditions difficiles.
M. Jean-Louis Cazaubon -
Nous allons nous répartir les
tâches. Je parlerai de la pluriactivité et Sylvain Confida parlera
du décret montagne et du pastoralisme.
La pluriactivité existait en montagne mais aussi en plaine, notamment
dans la périphérie tarbaise. Il était possible de
travailler à l'usine et à la ferme. Il a toujours existé,
à ce propos, une jalousie entre agriculteurs, qui a perduré au
sein des organisations professionnelles. Aujourd'hui nous n'avons plus
d'états d'âme : dans les zones de montagne, la
pluriactivité est une réalité, un fait. Elle est de
plusieurs sortes. Cela peut consister en un emploi, en hiver, dans une station
de ski. Je pense que c'est une bonne chose parce que ça permet d'avoir
un complément de revenu pour faire bouillir la marmite. C'est souvent
lié au pastoralisme. Un jeune peut occuper un poste de berger en
été et en hiver un poste à la remontée
mécanique. Il est aussi possible d'offrir des prestations de services,
de valoriser le bâti ou les granges en les transformant en chambres
d'hôte. Une demande importante existe. La qualité de l'accueil est
réelle et elle initie aux métiers de la communication. La
pluriactivité est donc souvent une nécessité en zone de
montagne et je crois que nous avons tout intérêt à
l'encourager, surtout si ça permet de pérenniser un emploi et une
exploitation agricole.
M. Sylvain Confida -
Je dirais un mot pour compléter ce qui vient
d'être dit. La pluriactivité est quand même un choix subi et
non un choix volontaire. C'est parce que les agriculteurs ne peuvent pas vivre
de leur métier qu'ils vont chercher un complément de revenu dans
une autre activité. Deuxièmement, pour qu'il y ait
pluriactivité, il faut qu'il existe des possibilités d'emploi.
Dans les Vosges, c'était le textile. Chez vous, dans les
Pyrénées, c'était un certain nombre d'industries, et dans
le Massif Central, c'était le charbon, etc. De ce point de vue, il faut
donc prendre en compte le côté social des choses et s'interroger
sur la façon dont les pluriactifs vivent ces situations. Mais il est
vrai que les réserves qu'exprimaient autrefois les agriculteurs à
l'encontre des pluriactifs se sont bien estompées.
Au sujet du décret appellation montagne, nous manquons de recul pour
dire des choses sensées sur la façon dont il est appliqué.
Il est trop récent, même s'il s'inscrit dans la lignée de
la loi montagne de 1985. Nous pouvons dire néanmoins qu'il est
protecteur de produits français. Mais il est possible que des produits
venant de l'étranger et portant le mot montagne ne répondent pas
aux cahiers des charges tels qu'ils sont définis par le décret et
arrivent sur le marché national. C'est une distorsion de concurrence.
Je ferais remarquer qu'il existe aussi une ambiguïté sur le sens de
l'appellation montagne. L'ambition du législateur était sans
aucun doute de protéger un mot et de valoriser la provenance d'un
produit agricole ou agroalimentaire. Or ce sont deux démarches
différentes et qui visent des objectifs différents. Aujourd'hui,
le mot montagne est certes valorisant auprès du consommateur, mais il y
a une ambiguïté vis-à-vis des autres signes de
qualité comme les indications de provenance, les AOC, les labels, etc.
Je crois qu'un travail de promotion et de clarification doit donc être
entrepris pour que ce décret joue pleinement le rôle pour lequel
il a été prévu.
Au sujet du pastoralisme, j'étais chargé d'animer le groupe de
travail sur la valorisation des produits et des espaces pastoraux. Il y a
beaucoup de choses à dire et qui s'appliquent aussi bien aux espaces
pastoraux qu'à ceux qui ne le sont pas. Pour des raisons de calendrier,
le rapport que nous avons établi n'a pas pu être remis au
précédent ministre. Je crois que l'actuel ministre sait qu'il
existe et qu'il contient de très nombreuses propositions. Notre travail
à tous maintenant est d'essayer de transformer l'essai.
M. Jean-Louis Cazaubon -
Je voudrais aborder un point qui n'a pas encore
été abordé : les prédateurs. Vous en avez
entendu parler et ce n'est pas terminé. La convention de Berne demande
que les prédateurs soient protégés tandis que les hommes
sur le terrain demandent qu'ils soient éliminés. Il y a aussi le
programme de réintroduction. Je dirais que nous pouvons les
protéger, mais pas les réintroduire, parce que culturellement,
les populations qui se sont battues pendant des décennies contre l'ours,
ou encore le loup, et vivaient constamment dans cette hantise, n'en veulent
pas. Vous imaginez le choc des cultures lorsque nous leur disons que nous
allons les réintroduire. C'est un réel problème.
Au sujet du pastoralisme, nous devons organiser et rationaliser pour adapter le
pastoralisme aux méthodes d'élevage moderne d'aujourd'hui. La
transhumance est sauvage aujourd'hui. Il y a une estive, un contrôle
sanitaire, dont la profession et les services vétérinaires se
sont occupés et qui fonctionnent. Le problème est qu'il n'y a pas
de gardiennage. Il nous faut voir comment nous pouvons favoriser ce
gardiennage. Une estive est très fréquentée parce qu'il y
a une route. Elle est donc surpâturée. Mais s'il faut marcher
plusieurs heures, au contraire, elle a tendance à être
abandonnée. Dès qu'elle est sous-pâturée, la flore
se détériore et il y a problème. C'est un vaste sujet
qu'il faut prendre en compte.
M. Jean-Paul Amoudry -
Merci infiniment messieurs.