6. M. Patrick Pierron, secrétaire fédéral de la fédération Chimie Énergie en charge des questions énergétiques
Il faut aborder tout d'abord la politique énergétique européenne avant de parler des moyens économiques. Pour la CFDT, l'énergie n'est pas différente des autres industries (chimie, pétrole...). Il ne suffit pas seulement d'ouvrir ou pas le capital, mais de définir une politique industrielle, économique et sociétale.
Il est donc nécessaire de poser un débat citoyen. Quelle est la meilleure solution pour les clients ? Et pour quoi faire ?
Un tel débat citoyen nous dirait que l'énergie n'est pas une marchandise comme une autre : elle doit permettre de réduire la fracture sociétale dans le monde. L'énergie facilite le développement des territoires, désenclave des régions, maintient une population rurale et structure nos sociétés. Avec des moyens de production décentralisés, la nature des réseaux, la nature des emplois et la façon de vivre vont changer. Nous sommes donc pour une politique énergétique européenne diversifiée et régulée, à ne pas confondre avec un mille-feuille de politiques nationales, avec des arbitrages et une optimisation des investissements.
Le premier pas d'une politique énergétique européenne est la sortie du Livre Vert qui pose les bonnes questions, même s'il ne reste qu'une étape dans l'élaboration de cette politique.
Une politique de développement durable respecte l'environnement, selon les critères de Kyoto, tend vers une plus grande indépendance énergétique, tient compte des ressources naturelles (géothermie, hydrogène, solaire, éolien...) et diversifie les moyens de production. Il y aura des choix à faire ; définir la part du nucléaire, celle du charbon propre, celle des énergies renouvelables.
Concernant la continuité des fournitures, seul un plan offensif communautaire sur la maîtrise de l'énergie peut promouvoir des appareils, des moyens de transport ou des isolations thermiques pour les habitations. Selon une enquête conjointe de la Commission européenne et de l'ADEME, une politique de maîtrise de l'énergie sur l'habitat résidentiel équivaudrait à l'économie d'une petite centrale nucléaire. Et d'après les perspectives européennes, la maîtrise de l'énergie réduirait la consommation de 15 % dans le tertiaire et de 20 % dans l'industrie.
Quelles peuvent être dans ce contexte les missions de service public ? Le citoyen doit avoir un droit à l'énergie et au chauffage. Ces deux concepts font partie des droits fondamentaux du citoyen et de la dignité humaine. Aux pouvoirs politiques d'établir les cahiers des charges. On peut ainsi imaginer une forme de péréquation communautaire qui régulerait les prix pour les usagers domestiques. Quant à la sécurité des installations intérieures électriques et gaz, il serait bon qu'elle relève des missions de service public.
Concernant l'emploi, quelles sont les compétences de demain, les qualifications par rapport aux nouvelles technologies ? C'est à l'Europe d'impulser une politique sociale.
Pour conclure, la politique énergétique de demain devra prendre en compte la dimension européenne et l'intérêt général. Elle devra être diversifiée, mixte et centralisée, répondre à la demande et non pas à l'offre.