B. DES EFFETS DISSEMBLABLES
Les effets des activités des différents opérateurs sont différents sur le plan économique, social et au niveau des finances publiques.
1. Un impact économique qui n'est pas le même sectoriellement comme territorialement
a) sur le plan sectoriel
Historiquement, les
activités des casinos
ont un
lien,
qui leur est propre, avec le développement du tourisme, la protection de
la santé ou la promotion de la culture.
La loi, encore en vigueur, du 15 juin 1907, autorise en effet
l'exploitation de ces établissements dans les stations classées,
balnéaires, thermales ou climatiques.
Le législateur a voulu que leurs activités concourent au
développement touristique des communes concernées.
C'est parce qu'il oblige l'exploitant d'un casino à contribuer à
l'animation culturelle ou touristique de sa commune d'implantation que son
cahier des charges, pris dans son ensemble, présente le caractère
d'une concession de service public
20(
*
)
.
Par la suite, le célèbre « amendement
Chaban » à une loi du 5 janvier 1988 est venu
subordonner l'autorisation d'ouverture de tels établissements de jeux
dans des villes centres d'agglomérations de plus de
500 000 habitants à la double condition, qu'elles :
- soient classées touristiques ;
- contribuent, pour plus de 40 %, au fonctionnement d'un
théâtre, d'un orchestre ou d'un opéra ayant une
activité régulière.
De fortes synergies existent entre le secteur des casinos et celui de
l'hôtellerie qui fondent la stratégie du groupe Barrière
(deuxième casinotier de France) ou l'intérêt pour ces
activités du groupe Accor.
Des trois domaines d'activité ludique étudiés par ce
rapport, c'est celui qui paraît avoir actuellement la croissance et la
rentabilité les plus fortes, en raison du développement des
machines à sous, du moins tant qu'aucun autre appareil ne viendra les
concurrencer par ailleurs.
Les
courses de chevaux
représentent un maillon essentiel de la
filière hippique, qu'elles financent quasi-exclusivement dans son
intégralité (voir plus loin). Cette filière est
diversifiée, importante et relativement bien structurée.
Si l'élevage représente, par lui-même, une activité
essentiellement agricole, ses débouchés sont variés et
pluridisciplinaires : sportifs, touristiques, éducatifs, voire
culturels et artistiques.
L'amélioration de la race chevaline représente l'objet social
exclusif des sociétés de courses et la condition, exigée
par la loi du 2 juin 1891, à l'autorisation de leur
création.
Les enjeux des paris mutuels, qu'elles seules ont le droit d'organiser,
assurent le financement non seulement de leurs propres activités mais
aussi de celles, qui leur sont liées, de l'administration des haras
nationaux en faveur de la filière en générale (et
notamment de l'élevage et de l'équitation).
La Française des Jeux se contente, pour sa part, de contribuer au
maintien de commerces de proximité sur tout le territoire, grâce
à son réseau de 42 500 détaillants qui
perçoivent, globalement, 326 millions d'euros (2,14 milliards
de francs) de commissions.
Le système de distribution du PMU ne comporte, lui, que
8 169 points de vente.
b) sur le plan territorial
Autorisés, comme on l'a vu, dans les stations
classées
balnéaires, thermales ou climatiques, les casinos sont très
inégalement répartis sur le territoire français(cf. carte
ci-après).
Les établissements concernés sont principalement
concentrés sur les côtes du littoral et dans les régions de
l'est.
Quelques uns se situent dans le centre.
La loi de finances du 31 juillet 1920 a exigé que tout casino
ouvrant des salles de jeux soit éloigné de Paris d'au moins
100 kilomètres (une dérogation, bénéficiant
à l'établissement d'Enghien-les-Bains, a ensuite
été prévue par la loi du 31 mars 1931 en faveur
des casinos des stations thermales n'exploitant pas de jeux de boule
21(
*
)
).
Mais l'amendement Chaban pourrait conduire un jour à l'ouverture de
salles de jeux accessibles au public dans la capitale.
S'agissant des
courses de chevaux
, on constate :
• une importante activité en région parisienne concernant
les
compétitions
(8 hippodromes, 401 réunions en 2000
et plus d'un million d'entrées) et l'
entraînement
(le tiers
des entraîneurs au galop y exercent leur métier, principalement
à Chantilly et Maisons-Laffitte ; une concentration importante
d'écuries de trot existe au centre de Grosbois, près de
Boissy-Saint-Léger).
Cependant, les activités de courses en province sont, elles aussi,
très appréciables (elles représentent une part notable des
4.249 réunions PMH
22(
*
)
de galop et d'obstacles et des
2.135 réunions PMU qui ont eu lieu en 2000). La France compte
autant d'hippodromes (257) que tous les autres pays de l'Union
européenne réunis (voir ci-après).
• pour l'élevage et la production , la Normandie se distingue en ce qui concerne les pur sang, les trotteurs (avec les régions de l'ouest en général) et les chevaux de selle français 23( * ) . L'anglo-arabe est plutôt une spécialité du sud-ouest (de même que les poulinières de chevaux arabes dont les étalons, sont, en revanche, assez bien répartis sur tout le territoire).
2. Des disproportions en terme de nombre d'emplois
a) les effectifs des casinos et de la Française des Jeux...
Ainsi
qu'il a été indiqué dans la première partie de ce
rapport, les
casinos
français employaient à la fin de 1998
(total qui pourrait être aujourd'hui supérieur, étant
donné la croissance de ce secteur) 12 600 salariés, en
métropole et dans les départements et territoires d'outre-mer.
La grande majorité (près de 90 %) travaillent à plein
temps, selon des contrats à durée indéterminée (il
s'agit donc d'emplois stables) et un peu plus de la moitié (51 %)
est affectée à des activités autres que les jeux
(restaurations, spectacles...).
Les casinos ne sont plus autant qu'autrefois une industrie de main d'oeuvre, du
fait du déclin des jeux traditionnels.
Pour sa part, la Française des Jeux n'emploie que
818 personnes
24(
*
)
.
188 courtiers-mandataires assurent la promotion et la diffusion de ses
produits auprès d'un réseau de
42 417 détaillants qui encaissent des commissions dont le
montant (voir ci-avant) équivaut à 19 300 emplois
rémunérés au SMIC.
b) ... sans commune mesure avec le total de personnes que font vivre les courses de chevaux
Les
courses de chevaux peuvent, elles, se targuer de faire vivre une filière
économique complète qui représente, selon l'UNIC (Union
Nationale Interprofessionnelle du Cheval), plus de 50.000 emplois, dont
40.000 emplois directs
25(
*
)
d'après la Fédération nationale des courses
françaises.
Un peu plus de 1.000 personnes (1.065) sont affectées à
l'organisation des courses et de l'entraînement, à l'exclusion des
paris qui en mobilisent près de 18.000 (17.648 emplois ou
équivalents temps plein).
Dans les écuries de courses, les effectifs sont les
suivants :
ECURIES DE COURSES |
|||
|
Galop |
Trot |
Total |
- Entraîneurs |
1 087 |
1 847 |
2 934 |
(dont professionnels) |
(455) |
(1314) |
(1769) |
- Jockeys |
857 |
1 572 |
2 429 |
- Salariés |
2 050 |
1 446 |
3 496 |
- Cadres (Total) |
-- |
-- |
120 |
|
3 994 |
4 865 |
8 979 |
En ce
qui concerne l'élevage (plus de 28 000 emplois en 1999), il
est difficile de distinguer les activités concernant les chevaux de
courses de celles relatives à des équidés destinés
à d'autres usages (loisirs...).
On recense près d'un millier d'éleveurs
« professionnels » (plus de neuf juments) de chevaux de
sang dans notre pays.
Quoiqu'il en soit, c'est l'ensemble de la filière équestre,
à travers tous ses métiers, et pas seulement les courses de
chevaux, qui se trouve financée par le système complexe actuel de
répartition des mises des parieurs.
Jusqu'en 2002, 6,75 % du prélèvement sur les enjeux (et
2,07 % de ces derniers) étaient affectés au
« Fonds national des haras et des activités
hippiques » : (soit 770,6 MF en 1999), qui vient
d'être budgétisé par la dernière loi de
finances
26(
*
)
.
Ce fonds finançait :
- d'une part, l'exécution des missions de service public des haras et de
l'équitation (1 068 emplois), établissement public
à caractère administratif (depuis 2000) qui concourt non
seulement à l'amélioration de la race chevaline, en assurant la
tutelle de l'élevage, mais aussi au développement de
l'équitation en général ;
- d'autre part, une dotation (de 522,8 MF en 1999) à un autre
fonds, commun à l'élevage et aux courses.
3. Des degrés de pression fiscale disparates
a) aperçu d'ensemble
Le tableau d'ensemble qui suit permet de mesurer les écarts entre les taux des prélèvements subis par les différents opérateurs et leur rendement pour les finances publiques.
Taux de
prélèvement
|
Montant
des recettes
|
|
FDJ |
26,0 % |
11,5Mds |
PMU |
15,7 % |
6,25 Mds |
Casinos (1) |
53 % |
7,3 Mds |
(1) Estimation de casinos de France, y compris prélèvements sociaux (CSG et CRDS) mais hors fiscalité de droit commun
b) des contributions variables
La
Française des jeux apparaît comme une entreprise
particulièrement rentable pour l'Etat : c'est le résultat
d'une gestion efficace et d'un effort de publicité et de
créativité qui explique que ses produits soient les plus connus,
les mieux diffusés et davantage consommés que ceux des autres
opérateurs. Mais c'est aussi la conséquence d'un plus faible taux
de redistribution (voir ci-avant).
Les frais d'organisation des courses de chevaux sont, inévitablement,
plus lourds que ceux des jeux de la Française (transport des animaux,
contrôles, notamment antidopages, rémunérations des
jockeys, entretien des hippodromes). Aussi près de 15 % des enjeux
reviennent à l'institution
27(
*
)
.
Par ailleurs, cette activité fait vivre, on l'a vu, une filière
importante pour l'agriculture, l'environnement et l'aménagement du
territoire.
Sans doute, est-ce pour ces raisons que l'Etat se contente d'un taux
d'imposition plus modéré, ce qui permet de verser aux parieurs
gagnants près de 70 % des enjeux.
Les casinos apparaissent, bien que redistribuant aux joueurs la part de leurs
mises la plus importante, comme les plus taxés.
Ils procurent, en effet, des recettes importantes non seulement à l'Etat
mais aussi aux communes (qui bénéficient d'environ 20 % du
montant des prélèvements considérés).
Il est cependant très difficile d'effectuer des comparaisons avec les
autres opérateurs :
- d'une part, parce que la notion de produit brut des jeux (qui constitue
l'assiette des prélèvements) diffère de celle de chiffre
d'affaires. Le réinvestissement des mises (notamment dans les machines
à sous) rend, par ailleurs, leur appréciation globale
délicate ;
- d'autre part, parce que l'Etat néglige (voir plus loin) de tenir un
compte consolidé des différents prélèvements et
taxes (y compris les impôts de droit commun) que subit ce secteur.
La croissance des activités en cause du fait, principalement des
machines à sous, et leur rentabilité très
élevée, attisent, à leur encontre, la convoitise fiscale
28(
*
)
et conduit la majeure
partie de la population, des élus et des autorités à ne
pas s'apitoyer outre mesure sur leur sort.
Il importe pourtant (voir plus loin) de pas casser la dynamique
économique de cette branche.