B. LA CONTINUITÉ A PRÉVALU
1. Une ambition réformatrice continue
Un des facteurs essentiels qui concourt à la réussite de la réforme de l'Etat tient dans la continuité et dans l'étalement des réformes entreprises. Cette continuité a notamment été politique, les changements de gouvernements n'entamant généralement pas la détermination réformatrice.
• Ainsi, en Finlande , les réformes ont été introduites en 1987 et se sont poursuivies jusqu'en 1995, les différents gouvernements qui se sont succédés sur la période ne remettant pas en cause les réformes engagées précédemment et les complétant même. La méthode retenue - choisir quelques secteurs pilotes puis généraliser les réformes - a largement contribué au succès de la démarche d'ensemble.
• Au Danemark , le processus de réforme de l'Etat est engagé depuis les années 1970. En dépit d'alternances politiques, ce processus n'a pas été interrompu, les difficultés ou tensions apparues à certains moments ayant même contribué au mûrissement de certaines idées et propositions de réformes. Ainsi, au cours des années 1980, d'importants conflits sociaux ont bloqué les velléités du gouvernement de réformer en profondeur la fonction publique. Cette situation n'a pas empêché la conduite de véritables réformes au cours de la décennie suivante, le gouvernement ayant obtenu le soutien des syndicats pour mettre en place une gestion plus managériale des fonctionnaires.
Les grands axes de la réforme de l'Etat au Danemark Années 1970 - réforme de la structure et des fonctions des communes - décentralisation - rationalisation et programmation Années 1980 - réforme budgétaire - gestion des services - modernisation et réforme de la réglementation Années 1990 - contrats et résultats - rémunération liée à la performance - gestion de la qualité |
• La Nouvelle-Zélande , on l'a vu, présente la spécificité d'avoir engagé des réformes d'inspiration libérale décidées par un gouvernement travailliste, et poursuivies par un gouvernement conservateur qui a su rendre ces réformes consensuelles ! Les travaillistes ont ainsi entamé le processus de réduction des effectifs des fonctionnaires. Puis ce sont les conservateurs qui ont voté la loi de 1991 sur les relations contractuelles et syndicales au sein des entreprises, qui tend à limiter le pouvoir syndical. Enfin, ce sont les travaillistes, revenus au pouvoir, qui ont complété cette loi en juin 2000.
• En Australie , les réformes ont été engagées au début des années 1980, avec l'arrivée au pouvoir des travaillistes en 1982, puis un accord bipartisan est peu à peu apparu, si bien que le mouvement de réforme a été poursuivi et amplifié par les libéraux à partir de 1996, un système de budget d'exercice ayant été introduit à partir de l'exercice 1999-2000. Au cours de ce processus de réforme, les gouvernements ont bénéficié de l'appui constant de l'opinion publique, traditionnellement méfiante à l'égard de l'administration, et qui souhaitait que soit mesuré le « retour » obtenu sur les dépenses publiques réalisées.
2. La poursuite de la réforme de l'Etat
Le mouvement de réforme de l'Etat n'est actuellement pas, le plus souvent, à un point mort. Au contraire, les projets ne manquent pas pour rendre l'administration plus efficace.
• En Finlande , après une pause de deux ans due à la préparation de la présidence finlandaise de l'Union européenne, au cours du deuxième semestre 1999, la réflexion sur la réforme de l'Etat a repris, à tel point que treize projets visant à réformer le mode de travail du gouvernement sont actuellement à l'étude. Une attention particulière sera portée à cinq projets ayant pour but de renforcer la coordination du travail gouvernemental, notamment le rôle du cabinet du Premier ministre. En outre, le ministère des finances souhaiterait également améliorer la répartition des tâches entre les ministères, un même secteur relevant encore aujourd'hui de la compétence de plusieurs ministères, la société de l'information ou les conséquences du vieillissement de la population par exemple.
• Au Royaume-Uni , où les réformes avaient un contenu idéologique beaucoup plus prononcé, le gouvernement travailliste n'a toutefois pas rompu avec l'orientation générale du processus enclenché par les conservateurs même s'il en a atténué certains points. En mars 1999, il a ainsi présenté un livre blanc pour la modernisation du gouvernement ( Modernising Government ) qui contient les principes et les actions sous-tendant le projet de réforme à long terme de modernisation du service public. Il propose notamment de privilégier le long terme, d'orienter l'action des services publics vers l'usager plutôt que vers le fournisseur de service ; d'améliorer l'efficacité et la qualité des services publics, de développer les nouvelles technologies de l'information au profit des citoyens, de valoriser les agents du service public. Ce projet continue ainsi de mettre l'accent sur l'efficacité et la qualité des services publics.
• La population norvégienne étant extrêmement critique sur les prestations de certains services publics, notamment la santé, les soins aux personnes âgées et l'éducation, il est très probable que l'amélioration de leur fonctionnement sera au centre de la campagne électorale en vue des élections législatives de septembre 2001. Quels que soient leurs résultats, la poursuite des réformes est donc d'ores et déjà assurée.
• Au Japon , les réformes vont se poursuivre dans trois directions principales :
- la carrière et les rémunérations des fonctionnaires devraient être modernisées grâce à l'introduction de critères liés au mérite, tandis qu'il est envisagé d'en réduire les effectifs de 25 % sur dix ans ;
- les « institutions spécialisées », qui sont des organismes publics au statut souvent dérogatoire 10 ( * ) , devraient faire l'objet d'une rationalisation : elles seront ramenées au sein des ministères, transformées en organismes administratifs indépendants, privatisées, voire supprimées ;
- l'administration électronique constitue une priorité forte.
• Aux Etats-Unis , le nouveau président Bush a fait du renforcement de l'efficacité de l'Etat fédéral l'une des priorités de son mandat, le projet de budget pour 2002 reprenant du reste, pour l'essentiel, la philosophie des réformes Clinton-Gore.
Il s'agit d'abord de continuer d'améliorer les relations entre l'administration et ses usagers. Le développement de l'administration électronique devrait y contribuer. En outre, la sédimentation des niveaux hiérarchiques éloignant les cadres de la fonction publique du terrain sera combattue par une élimination de certains postes et une réorientation générale vers le contact avec les usagers. Les outils de gestion des ressources humaines seront aussi renforcés.
En second lieu, la nouvelle administration souhaite renforcer l'évaluation des programmes fédéraux et lier davantage la reconduction des crédits aux résultats obtenus, tandis que certaines fonctions fédérales, les missions de nature commerciale en particulier, seront ouvertes à la concurrence et donneront lieu à un appel d'offres, ouvert tant aux opérateurs publics qu'aux opérateurs privés.
* 10 Les griefs adressés aux « institutions spécialisées » sont nombreux : multiplication anarchique de leur nombre, nombreux cas de doublon fonctionnel, personnels importants non comptabilisés dans les effectifs de fonctionnaires, dépenses de fonctionnement importantes, financement public non contrôlé...