3. Une politique marquée par un certain pragmatisme
a) Un contrôle étroit de la vie politique
Fondé sur des bases aussi solides, le pouvoir syrien a disposé des moyens nécessaires pour écarter toute opposition. Il n'a pas hésité à réprimer avec la dernière rigueur les troubles fomentés par les extrémistes islamiques dans la ville de Hama en 1982.
La détente indéniable observée depuis plusieurs années n'a toutefois pas conduit à remettre en cause l'état d'urgence toujours en vigueur depuis 1963 . Le droit d'association n'est pas reconnu. La liberté d'expression reste étroitement encadrée : les partis autres que ceux regroupés au sein du Front national sont interdits ; la presse elle-même dépend du pouvoir. Les procédures judiciaires laissent place à l'arbitraire.
La coercition, toutefois, ne pouvait seule garantir la pérennité du régime. Il convenait aussi de conforter la légitimité d'un pouvoir issu d'un coup de force et dominé par une minorité considérée de surcroît comme hérétique par les autres musulmans.
C'est pourquoi le président Hafez Al-Assad a cherché à conduire une politique qui lui concilie les différentes composantes de la population syrienne.
b) La recherche de certains équilibres
En premier lieu, les autorités se sont montré soucieuses de réaffirmer les valeurs de laïcité promues par le Baas. La constitution syrienne garantit la liberté de croyance et la célébration de tous les cultes religieux. Si, aux termes de la Charte fondamentale, le Chef de l'Etat doit impérativement être musulman, l'Islam n'est cependant pas considéré comme religion officielle. Les autorités ont ainsi gagné la confiance des différentes minorités religieuses. La détention du pouvoir par les Alaouites a été présentée comme un gage supplémentaire du caractère multiconfessionnel du pays.
Parallèlement, le chef de l'Etat a cherché à obtenir le soutien de la majorité sunnite. D'une part, il a toujours fait une place aux personnalités sunnites au sein du gouvernement. Il les a notamment associées, il faut le souligner, à la conduite de la politique extérieure (le vice-président Khaddam, le ministre des affaires étrangères, M. Charaa, le ministre de la défense, le général Tlass). C'est certainement là un atout pour mieux en faire accepter les évolutions par l'opinion syrienne.
D'autre part, le choix d'une libéralisation prudente de l'économie ne résulte pas seulement de considérations liées au développement du pays, elle répond aussi à des motivations d'ordre politique : satisfaire les intérêts d'une bourgeoisie sunnite particulièrement influente dans les milieux économiques.
Enfin, dans les dernières années de la présidence d'Hafez al-Assad, un Islam progouvernemental a été encouragé : développement de la pratique religieuse, organisation d'un réseau de confréries acquises au pouvoir (création d'un réseau d' " instituts Hafez al-Assad pour la mémorisation du Coran "). Il est d'ailleurs significatif qu'Hafez al-Assad ait été inhumé selon le rite sunnite et non alaouite... Cette orientation vise à canaliser les aspirations d'une partie de la population et à disqualifier les tentatives de subversion islamiste.
Comme l'ont souligné certains députés devant votre délégation, le président Assad a su consolider l'unité nationale et permettre ainsi le bon déroulement du processus de transition.