3.1. la sûreté maximale est-elle apportée par le stockage en couche profonde ?

Le problème posé par les déchets radioactifs à haute activité et à vie longue est simple à formuler mais évidemment complexe à résoudre. Certains radioéléments présents dans les déchets, émetteurs radiotoxiques ayant une période de 7 380 années comme l'américium 243 ou de 2 millions d'années comme le neptunium 237, comment concevoir un stockage assurant leur immobilisation sur une telle durée dont l'échelle dépasse en réalité notre entendement ?

Le principe de sûreté du stockage profond est l'interposition, entre le colis de déchets et les populations environnantes, d'une barrière dont la dimension est telle que la migration des radioéléments est très peu probable vers la surface.

Le sens commun veut que plus le stockage est profond et plus grande est la sûreté. Avec un dispositif de stockage en couche géologique profonde, des durées extrêmement longues, de plusieurs centaines de milliers d'années, peuvent être envisagées, en termes de stabilité de la présence des radioéléments en profondeur.

Ceci est vrai à condition qu'aucun lien, artificiel ou naturel n'existe ou n'apparaisse entre les cavités et la surface. Les eaux souterraines peuvent éventuellement parvenir sur les longues durées étudiées à dissoudre les radioéléments. La circulation naturelle ou provoquée par l'Homme peut alors assurer la diffusion ou la remontée de ces éléments toxiques. De même, des forages intempestifs peuvent entraîner une rupture du confinement. Enfin, des mouvements géologiques doivent être envisagés sur la durée de référence, entraînant une remontée voire une mise à jour du centre de stockage.

En réalité, des techniques existent pour maximiser la sûreté des colis. La première méthode est la multiplication des barrières. La deuxième consiste en l'utilisation de matrices d'immobilisation d'une durabilité étendue.

La multiplication des barrières

Les colis de déchets radioactifs à haute activité et à vie longue se présentent sous la forme de lingots de verre coulés dans un container en inox.

La méthode retenue est d'opposer des barrières successives à la migration éventuelle, par lixiviation, des radioéléments retenus dans les verres. La figure suivante indique la forme physique d'un dispositif étudié par le CEA 102( * ) .

Figure 18 : schéma simplifié du confinement d'un colis de verres contenant des déchets C

Pour piéger avec plus de sûreté les radioéléments, on place le conteneur en inox dans une deuxième enveloppe, un cylindre extérieur en acier noir. Puis cet ensemble est placé dans une enveloppe de béton de dimension largement supérieure, le volume étant rempli avec de l'argile. Le schéma ci-après récapitule le système de barrières.

Figure 19 : les barrières successives garantissant le confinement des radioéléments à haute activité et à vie longue 103( * )

colis de verre acier acier argile milieu

40 cm de diamètre inoxydable noir géologique

1m30 de hauteur épaisseur : épaisseur : épaisseur épaisseur :

2 cm 7 cm 30 cm

- 1m centaine de m



1 ère barrière 2 ème barrière 3 ème barrière

L'approche est de considérer qu'avec un tel dispositif, l'on dispose de 3 barrières. La première est celle du cylindre d'acier noir ou surconteneur. La 2 ème est celle de l'argile remplissant l'enveloppe de béton. La troisième est celle du milieu géologique. Cette approche est très conservative, puisqu'elle conduit à ne pas tenir compte du pouvoir d'immobilisation des verres, de la barrière représentée par le conteneur d'inox, non plus que celle de l'enveloppe de béton.

La même approche est retenue en Suède par les responsables de SKB pour leurs études du confinement des combustibles irradiés non retraités. Les assemblages combustibles sont en effet dans un conteneur en acier inox. Ce conteneur est lui-même placé dans un surconteneur en cuivre dont les parois font 5 centimètres d'épaisseur. Le surconteneur est alors enfoui dans un trou que l'on comble avec de la bentonite, un matériau qui s'expanse rapidement en présence d'eau et devient imperméable.

La multiplication des barrières permet de lutter efficacement contre le phénomène le plus contraignant vis-à-vis de la sûreté, à savoir la corrosion par les eaux souterraines. Celles-ci, basiques et réductrices dans la plupart des cas, ne sont pas une source de corrosion majeure. La modélisation permet en tout état de cause de vérifier l'étanchéité à très longue échéance du stockage.