II. OBSERVATIONS

A. LES PME NE CONSTITUENT PAS UNE PRIORITÉ BUDGÉTAIRE DU GOUVERNEMENT

Si le gouvernement a souhaité souligner ses priorités d'action par l'affichage de budgets en hausse, force est de constater dès lors que les PME, le commerce et l'artisanat ne figurent pas parmi ces priorités. Votre rapporteur spécial n'est pas de ceux qui considèrent qu'il existe un lien mécanique entre dépense et résultat. Il veut bien admettre qu'un budget sous tension soit synonyme de gains de productivité et d'une meilleure efficacité de la dépense publique. Il pense néanmoins que la baisse du budget du secrétariat d'Etat, à structure constante, de 3,1 % , est critiquable à double titre :

- Elle intervient alors que va venir en discussion devant le Parlement le projet de loi d'orientation pour les petites entreprises et les entreprises artisanales. La baisse des crédits du secrétariat d'Etat va ainsi à l'encontre du signal fort que doit représenter ce texte vis à vis des petites entreprises. Il est de plus probable que les dispositions que celui-ci contiendra ne pourront probablement pas être financées en 2002.

- La baisse du budget du secrétariat d'Etat doit être rapprochée des mesures proposées par l'article 13 du projet de loi de finances pour 2002 qui institue un prélèvement exceptionnel de 105 millions d'€ sur les excédents à la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA). Votre rapporteur spécial se borne à remarquer que le montant de prélèvement est largement supérieur au total du budget du secrétariat d'Etat (61 millions d'€).

Dans ce contexte, la baisse des crédits du secrétariat d'Etat est à tout le moins inopportune. Elle l'est d'autant plus qu'il n'est pas possible d'associer à ces chiffres en baisse des résultats en hausse.

Le secrétariat d'Etat présente en l'agrégat 25 un certain nombre d'objectifs qui sont loin d'être exhaustifs et ne se révèlent pas à la hauteur des enjeux ( part des cycles homologués au sein de l'offre globale de formation des IPC et de l'ICOFOP par exemple). Les indicateurs de performance retenus restent encore arbitraires et peu significatifs.

L'efficacité des mécanismes d'accès au crédit des PME n'est pas mesurée. S'il est indéniable que les politiques de bonification d'intérêt et de garantie de crédit ont un effet de levier, il n'est pas aujourd'hui quantifié. Ainsi, s'agissant des garanties d'emprunt gérées par la SOFARIS, il n'est pas possible de distinguer l'effet de levier des crédits inscrits sur la ligne du secrétariat d'Etat de celui des crédits inscrits sur la ligne de la direction du trésor.

Votre rapporteur spécial ne peut donc croire que la baisse du budget du secrétariat d'Etat puisse se conjuguer avec une plus grande efficacité de la dépense en l'absence d'indicateurs pertinents.

B. LE SECRÉTARIAT D'ETAT AUX PME, AU COMMERCE, À L'ARTISANAT ET À LA CONSOMMATION, RESTE EN MARGE DU MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES.

- Créer un grand pôle des PME

Malgré l'intégration du secrétariat d'Etat au sein du ministère de l'économie et des finances, sa principale direction, la direction des entreprises commerciales, artisanales et de services (DECAS) n'a pas pu bénéficier des synergies avec les autres directions de Bercy. Elle n'a pas réussi à constituer le grand pôle tourné vers les PME qu'elle devrait être.

Nombre d'entreprises dans le champ du secrétariat d'Etat

Taille

Nombre d'entreprises

%

0 salariés

1.346.646

47,3%

1 à 9 salariés

1.250.780

43,9%

10 à 19 salariés

122.712

4,3%

0 à 19 salariés

2.720.138

95,5%

20 à 49 salariés

83.026

2,9%

0 à 49 salariés

2.803.163

98,4%

Nombre d'emplois salariés dans le champ du secrétariat d'Etat

Taille

Nombre de salariés

%

1 à 9 salariés

3.781.878

25,4%

10 à 19 salariés

1.652.750

11,1%

1 à 19 salariés

5.434.628

36,5%

20 à 49 salariés

2.567.014

17,3%

1 à 49 salariés

8.001.642

53,8%

Alors que l'heure est à la segmentation du ministère en fonction des publics auxquels il s'adresse, les PME ne constituent pas une priorité dans l'organigramme du ministère. Si la Direction Générale des Impôts a mis en place, dans un délai remarquablement court, entre avril 1999 et septembre 2001, une direction des grandes entreprises, installée dans des locaux neufs et dotée de 200 agents très qualifiés, le ministère n'a pas investi de la même manière dans les directions en relation avec le public des petites entreprises.

Votre rapporteur spécial constate en effet que les effectifs de la direction des entreprises commerciales, artisanales et de services stagnent depuis trois ans au sein du ministère et qu'aucun redéploiement de lignes budgétaires n'a été effectué en faveur du secrétariat d'Etat.

- Un budget pour les PME

Votre rapporteur spécial souhaite que l'on fasse de la direction des entreprises commerciales, artisanales et de services la direction de plein exercice pour l'action du ministère en faveur des PME, conjointement avec la Direction de l'Action Régionale et des PMI en ce qui concerne les PMI. Ceci suppose notamment un redéploiement des crédits affectés aux fonds de garantie des entreprises, inscrits au chapitre 44-95.

En effet, alors que 70 % des crédits garantis par la SOFARIS sont destinés aux Très Petites Entreprises (TPE), domaine de compétence par excellence du secrétariat d'Etat, celui-ci ne gèrera en 2002 que 9,15 millions d'€ sur les 160 millions d'€ inscrits au chapitre 44.95. Si un partage des crédits selon le secteur d'activité de l'entreprise, entre DECAS et DARPMI pourrait se comprendre, il est paradoxal de constater que c'est la direction du trésor qui gère la ligne budgétaire, le gouvernement privilégiant ainsi un objectif de régulation du secteur bancaire sur un objectif d'intervention financière.

Votre rapporteur spécial invite dès lors à des redéploiements budgétaires nouveaux, qui pourraient consister dans le reversement d'une partie de la ligne 44-95-10 « fonds de garantie d'emprunts accordés aux petites et moyennes entreprises » gérée par la direction du trésor à la ligne 44-95.20 gérée par le secrétariat d'Etat.

Votre rapporteur spécial ne peut qu'inviter par ailleurs à la rebudgétisation d'un certain nombre de fonds extra-budgétaires sur les crédits du secrétariat d'Etat.

C. LE SECRÉTARIAT D'ETAT AUX PME, AU COMMERCE, À L'ARTISANAT ET À LA CONSOMMATION DOIT ÉVITER LE RECOURS AUX INSTRUMENTS D'INTERVENTION EXTRA-BUDGÉTAIRES

Votre rapporteur spécial comprend mal l'existence d'un certain nombre d'instruments extra-budgétaires dont les dépenses sont aujourd'hui supérieures au budget du secrétariat d'Etat. Ces instruments conduisent à la fois à un éparpillement des actions et à des financements croisés. Ils ne bénéficient pas du contrôle du Parlement.

Si certains de ces fonds ou établissements publics sont gérés en liaison des élus ou des chefs d'entreprise, rien n'empêche cependant que les dotations à ces fonds figurent parmi les crédits du secrétariat d'Etat.

Cette question adviendra tôt ou tard. Il convient donc d'ores et déjà de s'y préparer.

Les instruments extra-budgétaires sont au nombre de deux :

- Le FNPCA, (fonds national de promotion et de communication de l'artisanat), doté de 7,62 millions d'€ pour 2002. Cet établissement public créé par le décret n° 97-1040 du 13 novembre 1997, financé par une majoration de 10% du droit fixe payé par les ressortissants des chambres des métiers, ne mène pas une action si éloignée de celle du secrétariat d'Etat qu'elle ne puisse être inscrite à son budget. Votre rapporteur spécial recommande vivement la budgétisation de ce fonds, d'autant que le secrétariat d'Etat mène de son côté également des actions de communication en faveur de l'artisanat.

- Le FISAC, (Fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce), doté de 67,08 millions d'€ en 2000. Le budget de ce fonds, créé par l'article 4 de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989, excède celui du secrétariat d'Etat et finance des actions extrêmement variées. Il est alimenté par prélèvement sur l'excédent de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat. Cette taxe, créée par la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, est assise sur la superficie des grandes surfaces construites depuis le 1er janvier 1960 (surface de vente supérieure à 400 m²).

La gestion des produits de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat est particulièrement opaque. L'objet premier de la taxe, le financement de l'indemnité de départ des commerçants, ne représente plus qu'une infime partie des dépenses. D'autres objectifs, structurels, comme le soutien à l'artisanat et au commerce par le FISAC, ou conjoncturels, comme la création d'un fonds « tempêtes », se sont superposés, en raison de la persistance d'excédents de taxe importants. Ces excédents ne sont toutefois jamais épuisés en fin d'année ce qui permet au gouvernement, en l'article 13 du projet de loi de finances pour 2002 d'instaurer un prélèvement exceptionnel de 105 millions d'€.

Sans remettre en cause les actions du FISAC, il paraît nécessaire à votre rapporteur spécial de procéder à la réforme de la gestion financière de ce fonds, en gardant à l'esprit :

- La nécessité d'un contrôle du Parlement,

- L'attachement des petites entreprises de distribution à une péréquation avec les grandes surfaces et à l'affectation de la contribution versée par celles-ci au soutien au commerce et à l'artisanat,

- La nécessité de faire bénéficier le commerce et l'artisanat des éventuels reports de crédits de fin d'année.

Tous ces éléments plaident, selon votre rapporteur spécial, pour l'adoption de la formule du compte d'affectation spéciale. Celle-ci autorise l'affectation d'une recette à une dépense dés lors qu'un lien existe entre l'une et l'autre, accepte le report de crédits en fin d'année, permet le cas échéant une contribution positive du solde du compte au budget de l'Etat et respecte le principe du contrôle du Parlement sur les fonds publics.

La création d'un compte d'affectation spéciale dédié aux produits de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat paraît ainsi plus conforme à l'orthodoxie budgétaire que la solution actuelle.

D. LE SECRÉTARIAT D'ETAT AUX PME, AU COMMERCE, À L'ARTISANAT ET À LA CONSOMMATION POURSUIT DE MANIÈRE PLUTOT ENCOURAGEANTE UN PLAN DE SIMPLIFICATION DES MESURES ADMINISTRATIVES DES PME.

Votre rapporteur spécial se félicite que le secrétariat d'Etat se soit lancé dans une action forte et résolue de simplification administrative pour les entreprises. La simplification des formalités constitue en effet la première demande des PME. Un certain nombre de progrès méritent donc d'être relevés. Parmi les mesures décidées entre 1998 et 2000 et déjà mises en oeuvre, il est possible de citer le relèvement du seuil d'application du régime fiscal de la micro-entreprise, la suppression de plusieurs taxes, la simplification des formalités fiscales pour les entreprises exportatrices et la suppression totale des frais et droits d'enregistrement perçus par l'Etat lors de la création d'entreprise.

Votre rapporteur spécial fera deux remarques s'agissant des mesures de simplification décidées lors de la commission pour les simplifications administratives du 17 avril 2001. Il constate que la portée des décisions prises est plus limitée que les années précédentes, et que la priorité est désormais accordée aux téléprocédures.

- La portée limitée des actions entreprises en 2001

Parmi les décisions prises le 17 avril 2001, votre rapporteur spécial constate qu'un certain nombre d'entre elles ne consiste qu'en des mesures expérimentales. Il en est ainsi de la mise en place d'une aide à l'établissement des fiches de paie pour les très petites entreprises ou du correspondant fiscal spécial pour les « jeunes pousses ». D'autres ne s'adressent qu'aux moyennes entreprises comme l'allégement des formalités et du dossier fourni dans le cadre de la création ou de l'extension de petites surfaces commerciales (moins de 2 000 m 2 ).

On peut simplement noter parmi les mesures significatives la simplification de l'accès des petites entreprises aux marchés publics et la possibilité pour les personnes physiques de domicilier leur entreprise à leur adresse personnelle.

- Une priorité accordée aux nouvelles technologies

L'accent est désormais mis sur la dématérialisation des formalités administratives à travers la mise en ligne de formulaires administratifs et la création de téléprocédures.

540 formulaires administratifs essentiels peuvent être téléchargés sur le portail de l'administration « service-public.fr ».

Un grand nombre de télé-procédures sont ou vont être mises en place :

- Possibilité de déclarer et de payer la TVA par internet

- Possibilité de déclarer ses embauches (DUE)

- Possibilité de fournir par voie électronique la déclaration annuelle de données sociales (DADS)

- Possibilité de fournir par voie électronique la déclaration unifiée de cotisations sociales (DUCS)

- Possibilité de déclarer la contribution sociale de solidarité des sociétés

Votre rapporteur spécial souhaite formuler plusieurs remarques sur la priorité accordée à la dématérialisation des formalités :

1) Les actions entreprises dans ce domaine préparent l'avenir et sont porteuse de grands espoirs pour les professionnels.

2) Il convient toutefois de ne pas confondre dématérialisation des formalités et suppression des formalités. L'une n'entraîne pas mécaniquement l'autre. C'est uniquement si un lien peut être fait entre dématérialisation et réduction des formalités que les actions entreprises en faveur des nouvelles technologies ont un sens.

3) L'adoption des téléprocédures par les petites entreprises ne sera possible que si un effort important de sensibilisation, de formation et d'incitation à l'équipement informatique est entrepris. Votre rapporteur invite également le gouvernement, dans la mise en place du PAGSI (programme d'action gouvernemental pour la société de l'information) à insister davantage sur la simplicité d'utilisation et l'ergonomie des applications mises en place. Il le met en garde contre la multiplication de sites internet gouvernementaux concurrents ou redondants.

A titre d'exemple, votre rapporteur spécial signale que la téléTVA (déclaration et paiement par voie électronique), obligatoire pour les entreprises de plus de 15 millions d'€ de chiffre d'affaires connaît des difficultés dans sa mise en place. Prévue au premier mai 2001, puis au 1 er septembre 2001, l'obligation de déclaration et de paiement a encore été repoussée au premier janvier 2002. En effet, sur les 17.000 entreprises concernées, 5000 avaient au premier septembre entamé la démarche mais seules 929 avaient effectivement fait leur première télédéclaration et 562 un télépaiement...

E. LE SECRÉTARIAT D'ETAT AUX PME, AU COMMERCE, À L'ARTISANAT ET À LA CONSOMMATION N'EST PAS ENCORE PARVENU À MOBILISER LE COMMERCE ET L'ARTISANAT AUTOUR DU PASSAGE À L'EURO.

Votre rapporteur spécial discerne une grande inquiétude des artisans et des commerçants liée à la mise en place de l'€. Cette inquiétude s'exprime notamment dans la relative impréparation de ce secteur, pourtant tout à fait déterminant dans la réussite du passage de notre économie à l'€. Les commerçants et artisans seront en effet amenés à jouer un rôle pédagogique d'accompagnement. Ils ont à ce titre à mener une véritable mission de service public qui sera compliquée par le passage au même moment aux trente-cinq heures.

Aucune action spécifique n'a été financée par le secrétariat d'Etat en 2001. Aucune n'est prévue pour 2002. Le secrétariat d'Etat s'est inscrit dans un campagne de communication plus globale menée par le ministère de l'économie et des finances, soit à destination du grand public, soit à destination de publics en difficulté.

Ce sont donc aujourd'hui les chambres de commerce, les chambres de métiers et les confédérations professionnelles qui sont en première ligne pour accompagner les petites entreprises dans le passage à l'€, aussi bien pour la conversion des prix que pour la gestion de la caisse lors de la durée transitoire.

Votre rapporteur spécial invite cependant le secrétariat d'Etat, en redéployant ses crédits existants, à travailler davantage en direction du public prioritaire des commerçants et artisans. Si une indemnité spécifique n'aurait sans doute pas de véritable intérêt, il est encore temps pour le secrétariat d'Etat de financer des actions de sensibilisation ciblées et des sessions de formation-conseil.