EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er -
(article L.341-1 du code de l'aviation civile) -

Allégement de la tutelle de l'Etat sur Air France

1. Le droit en vigueur

Cet article modifie l'article L.341-1 du code de l'aviation civile, qui définit le statut de la compagnie nationale Air France et ses relations avec l'Etat.


Dans sa rédaction actuelle, l'article L.341-1 dispose que la société dite Compagnie nationale Air France est régie par le code de l'aviation civile et, dans tout ce qu'elles n'ont pas de contraire à celui-ci, par les lois sur les sociétés anonymes.

Il précise qu'Air France a pour objet d'assurer l'exploitation de transports aériens dans les conditions fixées par le ministre chargé de l'aviation civile après accord, s'il y a lieu, des autres ministres intéressés. Il prévoit, par ailleurs, qu'aucune subvention ne peut lui être allouée pour les lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien.

Cet article dispose, enfin, qu'Air France peut, après autorisation, créer ou gérer des entreprises présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale ou prendre des participations dans de telles entreprises. Il lui interdit toutefois de créer ou gérer des entreprises de fabrication de matériel aéronautique ou d'y prendre une participation.

2. Les dispositions du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale

Le I de cet article procède à une réécriture du deuxième alinéa de l'article L.341-1 . La rédaction proposée supprime, d'une part, la mention selon laquelle Air France a pour objet d'assurer l'exploitation de transports aériens dans les conditions fixées par le ministre chargé de l'aviation civile après accord, s'il y a lieu, des autres ministres intéressés et, d'autre part, les dispositions interdisant les subventions aux lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien.

La suppression de la référence à une intervention ministérielle pour la fixation des conditions de l'exploitation du transport aérien par Air France correspond tout d'abord à la traduction juridique d'une situation de fait.

Les conditions réglementaires de l'exploitation des transports aériens, qu'elles soient d'ordre technique, financier ou statutaire, ne relèvent, en effet, plus exclusivement du ministère chargé de l'aviation civile. L'institution d'un espace aérien européen a notamment conduit le droit communautaire à jouer un rôle croissant dans des domaines aussi étendus que divers, comme l'illustre la liste ci-après des directives intervenues dans ce secteur.

LES PRINCIPAUX RÈGLEMENTS ET DIRECTIVES
RELATIFS À L'AVIATION CIVILE

- le bruit (directives [CEE] n° 80/51 du Conseil du 20 décembre 1979 et n° 89/629/CEE du Conseil du 4 décembre 1989, relatives à la limitation des émissions sonores de certains avions) ;

- règlement n° 3975/87 [CEE] du Conseil du 14 décembre 1987 déterminant les modalités d'application des règles de concurrence applicables aux entreprises de transport aérien ;

- règlement n° 3976/87 [CEE] du Conseil du 14 décembre 1987 concernant l'application de l'article 85, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords et de pratiques concertées dans le domaine des transports aériens), des domaines aussi divers que :

. les systèmes informatisés de gestion (règlement [CEE] n° 2299/89 du Conseil du 24 juillet 1989 instaurant un code de conduite pour l'utilisation de systèmes informatisés de réservation) ;

. les tarifs (règlement [CEE] n° 2409/92 du Conseil du 23 juillet 1992 sur les tarifs des passagers et de fret des services aériens) ;

. l'accès aux marchés (règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires).

- les règles techniques (règlement [CEE] n° 3922/91 du Conseil du 16 décembre 1991 relatif à l'harmonisation des règles techniques et de procédures administratives dans le domaine de l'aviation civile) ;

- les licences des transporteurs aériens (règlement [CEE] n° 2407/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant les licences des transporteurs aériens) ;

- l'assistance à escale (directive [CEE] n° 96/97/CE du Conseil du 15 octobre 1996 relative à l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports de la Communauté) ;

- le personnel navigant (directive [CEE] n° 91/670 du Conseil du 16 décembre 1991 sur l'acceptation mutuelle des licences du personnel pour exercer des fonctions dans l'aviation civile).

Cette suppression traduit ensuite, selon l'exposé des motifs, un changement de nature de la tutelle de l'Etat . La volonté de conforter l'autonomie d'Air France conduit, en effet, à supprimer la référence à une tutelle réglementaire pour recentrer l'action de l'Etat sur son rôle d'actionnaire.

Le recentrage de la tutelle de l'Etat sur le conseil d'administration est cependant très partiel. Il convient, en effet, de souligner que le projet de loi ne modifie notamment pas l'article L.342-1, qui prévoit que la compagnie Air France est soumise au contrôle général du ministre chargé de l'aviation civile et à un contrôle économique et financier.

La portée du contrôle général du ministre chargé de l'aviation civile prévu par l'article L.342-1, est définie plus précisément par les articles R.342-5 et R.342-15 et un arrêté du 16 février 1954.

L'article R. 342-5 renvoie à un arrêté, pris le 16 février 1954, pour la fixation des conditions d'exercice du contrôle général du ministre chargé de l'aviation civile. Cet arrêté précise que ce contrôle est exercé, sous l'autorité du directeur général de l'aviation civile, par le directeur des transports aériens. Il porte " sur les opérations de toute nature " effectuées par la société Air France " qui doit communiquer à ces fonctionnaires, spontanément ou sur leur demande, tous documents et renseignements utiles et, d'une façon plus générale, leur donner toutes facilités pour leur permettre de se livrer aux investigations nécessaires à l'accomplissement de leur mission ".

Par ailleurs, l'article R.342-15 (décret n° 84-352 du 11 mai 1984) reprend les termes de l'article 1 er de l'arrêté du 16 février 1954, et dispose que " le directeur général de l'aviation civile et le directeur des transports aériens siègent, avec voix consultative, au conseil d'administration de la société Air  France, respectivement en qualité de commissaire du Gouvernement et de commissaire du Gouvernement adjoint ". Des fonctionnaires de la direction générale de l'aviation civile siègent également en tant que commissaires du Gouvernement au Conseil d'administration de filiales d'Air France.

Le contrôle économique et financier est, quant à lui, défini par les dispositions du décret n° 55-733 du 26 mai 1955, auxquelles Air France est soumis, l'Etat détenant plus de 50 % de son capital. Selon les termes de l'article 9 de ce décret, " le contrôle porte sur l'activité économique et la gestion financière de l'entreprise ; à cet effet, les contrôleurs d'Etat doivent faire connaître leur avis aux ministres chargés des Finances, des Affaires économiques et du Budget sur les projets de délibération ou de décision des organismes qu'ils contrôlent lorsque ces projets sont soumis à l'approbation de ces ministres. Ils rendent compte périodiquement de leur activité à ceux-ci et présentent un rapport annuel les informant de la situation économique et financière des établissements placés sous leur contrôle. "

La mission de contrôle auprès d'Air France est constituée de deux contrôleurs d'Etat disposant d'un pouvoir d'investigation étendu et présents à plein temps au sein du groupe ; le premier, qui exerce le contrôle économique et financier sur la société proprement dite, a entrée avec voix consultative aux séances du conseil d'administration ainsi qu'aux commissions et organes consultatifs d'Air France ; le second est chargé du contrôle des filiales de la société.

La suppression des dispositions interdisant les subventions aux lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aériens participe, quant à elle, d'un toilettage de dispositions aujourd'hui reprises et complétées par le droit communautaire.

L'article 4 du règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires dispose, en effet, que sur les liaisons intra-communautaires, ne peuvent donner lieu à subventions que les services aériens sur lesquels sont imposées des obligations de service public et pour lesquels, en l'absence de candidature de transporteur aérien, une compagnie peut être sélectionnée sur appel d'offres.

L'article L.341-1 dans sa rédaction actuelle ne visait en conséquence qu'un cas particulier parmi les liaisons visées par le règlement communautaire qui est, par ailleurs, obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable sur le territoire français.

Le II de cet article supprime la procédure d'autorisation préalable pour toute participation d'Air France à des activités présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale de transports aériens .

Cette dernière disposition de l'article L.341-1 concerne les activités autres que l'activité de transport aérien au sens de l'article L.310-1 du code précité, c'est-à-dire l'acheminement par un aéronef de passagers, marchandises ou de poste.

Actuellement, les principales entreprises filiales d'Air France dont l'activité a un caractère annexe par rapport à son activité principale exercent dans les domaines suivants :

- le commissariat aérien avec le groupe Servair, détenu par Air France à 75 % ;

- l'informatique commercial avec une participation de 29,2 % dans le groupe Amadeus Global Travel Distribution et des participations majoritaires dans Amadeus France (66 %) et Esterel (57 %) ;

- la maintenance aéronautique avec la société Construction et Réparation de Matériel Aéronautique (CRMA), détenue par Air France à 100 % ;

- l'activité de transitaire de fret avec Sodexi (détenue par Air France à 60 %) et Sodetair (détenue à 100 %) ;

- le transport de fret postal sur les liaisons intérieurs françaises avec la Société d'Exploitation Aéropostale détenue à parité par Air France et La Poste.

Actuellement, l'exercice de telles activités annexes par création, gestion ou prise de participation dans une entreprise est soumise à une double autorisation préalable : celle donnée par le Conseil d'administration et celle donnée par arrêté conjoint du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des finances.

Cette procédure est un frein à la " réactivité " de la compagnie, qui est en situation de concurrence non seulement pour le transport de passagers, mais également pour sa croissance externe. Lorsqu'apparaît une opportunité de prise de participation pour l'entreprise, celle-ci est généralement en concurrence avec d'autres transporteurs européens. Ne pouvoir faire d'offres sans réserves relatives à l'autorisation de ses ministres de tutelle pose à la direction de l'entreprise un problème de crédibilité vis-à-vis de ses interlocuteurs. Il faut donc se féliciter de la suppression d'une disposition devenue inadaptée.

Votre rapporteur observe, par ailleurs, que les dispositions de l'article L.341-1 du code de l'aviation civile interdisant Air France de créer ou de gérer des entreprises de fabrication de matériel aéronautique ou de prendre une participation dans une telle entreprise, dont la justification semble échapper aussi bien aux services de l'autorité de tutelle qu'aux dirigeants d'Air France, sont maintenues.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

3. Position de la Commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 2 -
(article L.342-2 du code de l'aviation civile) -

Suppression des dispositions relatives à la contrainte d'équilibre financier d'Air France et prise en compte des obligations de service public

1. Le droit en vigueur

Dans sa rédaction actuelle, l'article L.342-2 du code de l'aviation civile prévoit tout d'abord que " la Compagnie nationale Air France doit couvrir par ses ressources propres l'ensemble de ses dépenses d'exploitation, l'intérêt et l'amortissement des emprunts, l'amortissement du matériel et des installations et les provisions à constituer pour couvrir les risques de tout ordre ".

Issue de la loi n° 48-976 du 16 juillet 1948, cette rédaction tend à rappeler une obligation d'équilibre financier qui apparaît aujourd'hui, alors qu'Air France côté en Bourse évolue dans un environnement pleinement concurrentiel, marqué d'obsolescence.

Cet article dispose ensuite que " les obligations qui sont imposées à Air France dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la Compagnie, d'une part, l'Etat, les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part " . Cette disposition visait à l'origine à protéger les intérêts de la compagnie, afin que l'Etat ne puisse lui imposer des missions d'intérêt général sans que ces missions fassent l'objet d'un contrat précisant leur étendue et les compensations financières consenties à la compagnie en contrepartie.

2. Les dispositions du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale

L'article 2 du projet de loi procède à une réécriture de l'ensemble de l'article L.342-2 du code précité.

La rédaction proposée supprime la référence à une obligation d'équilibre financier qui, si elle avait une raison d'être lorsqu'Air France n'était pas soumise à la concurrence, ne semble plus aujourd'hui devoir figurer dans le code de l'aviation civile.

Cette nouvelle rédaction précise le cadre dans lequel des missions d'intérêt général et de service public peuvent être confiées à Air France, afin de tenir compte de l'évolution du droit communautaire .

La Communauté européenne a, en effet, défini dans le règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires, le cadre dans lequel les Etats membres peuvent imposer aux compagnies aériennes des obligations de service public. Ce texte étant, comme tous les règlements, obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable, il convenait, pour les liaisons intra-communautaires, de faire explicitement référence aux règles communautaires en la matière.

La rédaction proposée par l'article L.342-2 répond à cet objectif en prévoyant que " sous réserve des dispositions applicables aux obligations de service public imposées sur les services aériens réguliers intra-communautaires, les obligations qui sont imposées à la société Air France dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la société, d'une part, l'Etat, les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part " .

Cet article distingue ainsi les services aériens réguliers intra-communautaires, à qui il ne peut être imposé d'obligations de services publics qu'en application des règles fixées par le règlement n° 2408/92 et les autres services aériens extracommunautaires, à qui peuvent être imposées des obligations d'intérêt général dans les conditions fixées par le présent article, c'est-à-dire un contrat préalable assorti d'un cahier des charges.

Le régime communautaire relatif aux obligations de service public imposées aux services aériens réguliers intra-communautaires .

En droit communautaire, les obligations de service public imposées aux services intra-communautaires sont définis, aux termes de l'article 2 du règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires comme " des obligations imposées à un transporteur aérien en vue de prendre, à l'égard de toute liaison qu'il peut exploiter en vertu d'une licence qui lui a été délivrée par un Etat membre, toutes les mesures propres à assurer la prestation d'un service répondant à des normes fixes en matière de continuité, de régularité, de capacité et de prix, normes auxquelles le transporteur ne satisferait pas s'il ne devait considérer que son seul intérêt commercial ".

Ces obligations ne peuvent être, aux termes de l'article 3 du même règlement imposées par un Etat membre qu'à des services aériens réguliers desservant :

- " une zone périphérique ou de développement " situé sur son territoire ;

- " une liaison à faible trafic à destination d'un aéroport régional " situé sur son territoire.

Dans les deux cas, l'Etat doit justifier le fait que ces liaisons sont " vitales pour le développement économique de la région dans laquelle est situé l'aéroport ". En outre, les obligations de service public ne peuvent être imposées que " dans la mesure nécessaire pour assurer sur ces liaisons une prestation de service adéquate répondant à des normes de continuité, de régularité, de capacité et de prix auxquelles le transporteur ne satisferait pas s'il ne devait considérer que son seul intérêt commercial ". Le caractère adéquat du service doit être apprécié au regard de plusieurs critères : l'intérêt public, la possibilité de recourir à d'autres formes de transport et la capacité de ces formes de transport à répondre aux besoins considérés, les tarifs et les conditions de transport aérien qui peuvent être proposés aux usagers ainsi que l'effet de l'exploitation de la liaison par tous les transporteurs aériens l'exploitant ou comptant l'exploiter.

Le règlement précité prévoit que si d'autres formes de transport ne permettent pas d'assurer un service adéquat et continu, les Etats membres peuvent prévoir, dans le cadre des obligations de service public, que " tout transporteur qui compte exploiter la liaison doit garantir qu'il exploitera pendant une certaine période ". Si une liaison n'est exploitée par aucun transporteur aérien, l'Etat peut alors en limiter l'accès à une seule compagnie, pour une durée maximale de trois ans. Le droit d'exploitation est alors concédé après appel d'offres publié au Journal officiel des Communautés européennes. Il est également prévu que l'Etat puisse verser une compensation au transporteur aérien ainsi sélectionné, afin qu'il satisfasse aux normes précédemment citées et découlant des obligations de service public ; il est précisé que cette compensation doit tenir compte des dépenses et recettes engendrées par le service.

L'imposition d'une obligation de service public doit enfin, aux termes de l'article 4 du même règlement, respecter une procédure en plusieurs étapes : consultation par l'Etat des autres Etats membres concernés, c'est-à-dire ceux entre lesquels ou à l'intérieur desquels est exploitée la liaison aérienne visée par l'obligation de service public, information préalable de la Commission et des transporteurs aériens qui exploitent la liaison, imposition des obligations de service public à la compagnie aérienne et enfin publication de ces obligations par la Commission au Journal officiel des Communautés européennes.

Comme le montre l'encadré ci-avant, les conditions d'imposition d'obligation de service public sur les liaisons intra-communautaires prévues par le droit communautaire sont donc beaucoup plus précises que le régime prévu actuellement par l'article L.342-2 du Code de l'aviation civile.

Le texte proposé ne maintient en conséquence le régime actuel que pour :

- les obligations imposées sur des services aériens extracommunautaires (n'entrant pas dans le champ d'application du règlement CEE n° 2408/92 du 23 juillet 1992) ;

- toute autre obligation d'intérêt général portant sur la société ; par exemple pour les besoins relatifs à l'action internationale de la France (dans les domaines diplomatique, humanitaire ou relevant de la défense nationale).

Dans la mesure où aucune des liaisons d'Air France ne fait l'objet d'une telle obligation, il s'agit d'une hypothèse que le projet de loi n'a pas souhaité exclure.

Les liaisons extracommunautaires vers les territoires et collectivités territoriales d'outre-mer pourraient, en effet, faire l'objet d'obligations d'intérêt général. Les liaisons existantes vers ces territoires peuvent être dépendantes des relations aériennes bilatérales de la France ou de compagnies étrangères. Des liaisons directes pourraient dans certaines situations être considérées indispensables pour relier ces collectivités à la métropole, tout en ne pouvant, dans certains cas (Mayotte, Saint-Pierre et Miquelon, Wallis et Futuna...), générer qu'un trafic modeste ne permettant pas l'établissement de liaisons aériennes rentables avec la métropole ou d'autres points du territoire national... Des liaisons purement internationales, non rentables commercialement, ont également pu ou pourront apparaître comme indispensables ou répondre à des intérêts vitaux, comme ce fut le cas il y a quelques années de la ligne vers les Comores.

L'Assemblée nationale a adopté ce texte sans modification.

3. Position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 3 -
(article L.342-3 du code de l'aviation civile) -

Elargissement du Conseil d'administration de la société Air France

1. Le droit en vigueur

Cet article supprime les dispositions actuelles de l'article L.342-3 du code de l'aviation civile et les remplace par de nouvelles dispositions.


Dans sa rédaction actuelle, l'article L.342-3 dispose qu'en vue de financer ses immobilisations et d'augmenter son fonds de roulement, la société Air France est habilitée à émettre dans le public des emprunts qui peuvent bénéficier de la garantie de l'Etat. Cette disposition apparaît aujourd'hui clairement en contradiction avec les règles européennes proscrivant les aides d'Etat, et notamment avec l'article 92 du Traité instituant la Communauté européenne. En outre, l'Etat n'a pas apporté sa garantie à un emprunt émis par Air France depuis près de 25 ans. La suppression de ces dispositions permet en conséquence une mise en conformité du droit national avec le droit communautaire .

Le présent article propose de remplacer ces dispositions par des mesures précisant la composition du Conseil d'administration d'Air France.

Actuellement, les règles relatives à la composition et au fonctionnement du conseil d'administration d'Air France sont fixées par des dispositions de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public et du code de l'aviation civile et, dans tout ce qu'elles n'ont pas de contraire au code et aux lois précitées, par la loi de 24 juillet 1966 sur les sociétés.

Comme le souligne le tableau suivant, les règles applicables à Air France diffèrent sensiblement du droit commun des sociétés.

CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE





 

Loi du 24 juillet 1966

Dispositions relatives à Air France de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public et du code de l'aviation civile

Composition

3 à 24 administrateurs actionnaires (leur nombre est fixé par les statuts de la société).

Les administrateurs élus par les salariés ne sont pas pris en compte pour la détermination du nombre des administrateurs liés à la société par un contrat de travail.

18 membres :

- 5 représentants de l'Etat ;

- 6 personnalités qualifiées en raison soit de leur compétence technique, scientifique ou technologique, soit de leur connaissance du transport aérien, soit de leur qualité de représentant des usagers ;

- 1 représentant des salariés actionnaires ;

- 6 représentants des salariés.

En outre, siègent avec voix consultative :

- 3 censeurs, nommés pour 5 ans ;

- le directeur général de l'aviation civile (en qualité de commissaire du gouvernement) ;

- le directeur des transports aériens (en qualité de commissaire du gouvernement adjoint).

Représentation des salariés

Leur nombre ne peut être supérieur à 4 ou, dans les sociétés cotées, à 5, ni excéder le tiers du nombre des autres administrateurs.

Lorsqu'il y en a plus de 2, les ingénieurs, cadres et assimilés ont un siège au moins (vote selon 2 collèges).

Ils doivent avoir un contrat de travail avec la société depuis au moins 2 ans, mais aucune condition d'ancienneté n'est exigée quand la société est constituée depuis moins de 2 ans.

Mandat incompatible avec un mandat de délégué syndical.

6 représentants des salariés sur 18 membres.

Durée du mandat

Déterminée par les statuts.

Ne peut excéder 6 ans en cas de nomination par les assemblées générales ou 3 ans en cas de nomination dans les statuts.

Renouvelable sans limite sauf stipulation contraire des statuts.

5 ans

Nomination des membres

Par l'assemblée générale ordinaire.

Les premiers administrateurs sont nommés dans les statuts.

Les 5 représentants de l'Etat : nommés par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile, dont :

- 1 sur proposition du Premier ministre ;

- 2 sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- 1 sur proposition du ministre chargé de l'économie ;

- 1 sur proposition du ministre chargé du budget.

Les 6 personnalités qualifiées : nommées par décret.

Le représentant des salariés actionnaires : désigné parmi ceux-ci par l'assemblée générale sur proposition d'une section de l'assemblée générale composée de ces seuls actionnaires.

Les 6 représentants des salariés : élus par les salariés d'Air France et de ses filiales dans le cadre de 3 collèges électoraux à raison de :

- 1 élu par le personnel navigant technique ;

- 1 élu par le personnel navigant commercial ;

- 4 élus, dont 1 représentant des cadres, par les autres salariés.

Parmi les 3 censeurs :

- 2 sont nommés par décret, l'un sur proposition du ministre chargé de la défense, l'autre sur celle du ministre chargé du tourisme ;

- le 3 ème est nommé par l'assemblée générale ordinaire.

Nomination du Président-directeur général

Par le conseil d'administration.

Par décret, sur proposition du conseil d'administration.

Révocation :

des membres actionnaires

du PDG

des représentants des salariés

A tout moment, par l'assemblée générale ordinaire

A tout moment, par le conseil d'administration

Rupture du contrat de travail, ou faute dans l'exercice du mandat, par décision du président du tribunal de grande instance rendue en la forme des référés à la demande de la majorité des membres du conseil.

Les membres du conseil doivent être remplacés lorsqu'ils ont perdu la qualité en raison de laquelle ils ont été nommés, ou qu'ils ne remplissent plus les conditions d'éligibilité.

Les membres nommés par décret peuvent être révoqués par décret.

Le PDG peut être révoqué par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile.

L'article 4 de la loi du 24 juillet 1983 prévoit que les conseils d'administration des sociétés énumérées dans son annexe II, dont Air France, comprennent 9 à 18 membres. Il dispose également que les conseils d'administration concernés comprennent des représentants des salariés dont le nombre peut être fixé par la loi ou en l'absence de disposition législative par décret. Il est précisé que ce décret pourra si les spécificités de l'entreprise le justifie organiser la représentation de catégorie particulière de salariés au moyen de collèges électoraux distincts.

En application de ces dispositions, l'article R.342-1 du code de l'aviation civile, issu du décret n° 97-755 du 21 août 1997, prévoit un conseil d'administration de 18 membres répartis en quatre catégories comme indiqué ci-après.

COMPOSITION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE

Cinq représentants de l'Etat , nommés par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile, dont :

- un sur proposition du Premier ministre ;

- deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- un sur proposition du ministre chargé de l'économie ;

- un sur proposition du ministre chargé du budget ;

six personnalités qualifiées , nommées par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile et choisies soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou technologique, soit en raison de leur connaissance du transport aérien, soit en raison de leur qualité de représentant des usagers ;

un représentant des salariés actionnaires désigné, parmi ceux-ci, par l'assemblée générale sur proposition d'une section de l'assemblée générale composée de ces seuls actionnaires. Aux termes des statuts d'Air France, il peut être procédé, en vue de la nomination de ce représentant, à la désignation des candidats par une consultation écrite des salariés actionnaires. Les trois salariés actionnaires ayant recueilli le plus grand nombre de voix à l'issue de cette consultation sont seuls autorisés à présenter leur candidature à la section de l'assemblée générale ;

six représentants des salariés , élus par les salariés d'Air France et de ses filiales, dans le cadre de trois collèges électoraux distincts, à raison de :

- un élu par le personnel navigant technique ;

- un élu par le personnel navigant commercial ;

- quatre élus, dont un représentant des cadres, par les autres salariés 3( * ) .

2. Les dispositions du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale

La rédaction proposée par cet article prévoit une augmentation du nombre des membres du conseil d'administration, qui passe de 18 à 21 :


" Art. L.342-3. - Par dérogation à l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public, le conseil d'administration de la société Air France compte ving-et-un membres ".

L'augmentation du nombre d'administrateur est destinée, selon l'exposé des motifs du projet de loi, à permettre l'arrivée au sein du Conseil d'administration de représentants d'actionnaires autres que l'Etat et les salariés et d'accroître la représentation des salariés actionnaires afin de tenir compte de la nouvelle structure de son actionnariat résultant de l'ouverture du capital d'Air France.

L'ouverture du capital d'Air France a, en effet, modifié l'équilibre de son actionnariat. Alors que l'Etat détenait début 1998 94,5 % du capital d'Air France, il n'en détient au 1 er janvier 2000 qu'environ 57 %, les salariés en détenant 11 % et les autres investisseurs privés 32 %. Cette évolution imposait donc une modification de l'équilibre du Conseil d'administration.

Le maintien à 18 du nombre d'administrateurs de la société Air France permettait d'attribuer deux postes d'administrateurs aux nouveaux actionnaires de la société (personnels navigants techniques dans le cadre de l'échange salaire contre actions et investisseurs privés et institutionnels), mais supposait la diminution du nombre de personnalités qualifiées.

Mais le nombre ainsi obtenu d'administrateurs représentant les actionnaires autres que l'Etat ne refléterait guère la nouvelle structure de l'actionnariat née de l'ouverture du capital d'Air France et donnerait un poids très important aux salariés, qui détiendraient au total 8 sièges d'administrateurs (un nouvel administrateur représentant les personnels navigants techniques venant s'ajouter aux 6 administrateurs élus par l'ensemble des salariés ainsi qu'à l'administrateur représentant l'ensemble des salariés actionnaires), contre un siège pour les actionnaires autres que l'Etat et les salariés : or, les actionnaires " privés " représentent désormais plus de 30 % du capital contre environ 11 % pour les salariés actionnaires.

En outre, le nombre de voix délibératives que détiendrait l'Etat dans ces conditions (administrateurs représentant l'Etat et personnalités qualifiées) deviendrait identique à celui des autres administrateurs. L'Etat ne détiendrait donc la majorité absolue des voix que dans la mesure où celle du Président est prépondérante. Ce choix a cependant été écarté par le gouvernement, qui souhaitait que l'Etat puisse disposer d'une majorité plus large.

Outre l'augmentation du nombre d'administrateur , le présent article tend également à inscrire dans la loi les différentes catégories d'administrateurs auparavant prévues par décret . Ainsi, le texte proposé prévoit : " indépendamment des représentants de l'Etat, des salariés, des salariés actionnaires ainsi que des actionnaires autres que l'Etat et les salariés, le conseil peut comprendre des personnalités choisies soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou économique, soit en raison de leur connaissance du transport aérien " .

Par rapport à l'article R.342-1 du code, cette rédaction introduit au sein du conseil d'administration des actionnaires autres que l'Etat et les salariés .

On peut, en outre, observer parmi les critères présidant au choix des personnalités qualifiées, la suppression de la référence à la compétence technologique au profit d'une connaissance économique . Cette modification serait motivée par la volonté de renforcer le poids de l'analyse économique dans les choix stratégiques d'une société qui évolue dans un marché de plus en plus concurrentiel. Il faut également relever la suppression de la référence aux personnalités choisies " en raison de leur qualité de représentant des usagers ".

La répartition des sièges entre les différentes catégories d'administrateur n'est pas précisée dans la rédaction proposée qui, de ce fait, laisse au décret le soin de préciser la composition exacte du conseil d'administration.

Le Gouvernement a cependant tenu à préciser à votre rapporteur ce que devrait être la structure du nouveau conseil d'administration si le texte était adopté.


COMPOSITION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE

Composition actuelle

Composition envisagée

Cinq représentants de l'Etat , nommés par décret, dont :

- un sur proposition du Premier ministre ;

- deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- un sur proposition du ministre chargé de l'économie

- un sur proposition du ministre chargé du budget ;

Six représentants de l'Etat , nommés par décret, dont :

- un sur proposition du Premier ministre ;

- deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- un sur proposition du ministre chargé de l'économie

- un sur proposition du ministre chargé du budget ;

- un sur proposition du ministre chargé du tourisme.

Six personnalités qualifiées , nommées par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile.

Cinq personnalités qualifiées , nommées par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé de l'économie ;

 

Deux représentants d'actionnaires autres que l'Etat et les salariés, nommés par l'assemblée générale ;

Un représentant des salariés actionnaires ;

Deux représentants des salariés actionnaires ;

Six représentants des salariés élus dont :

- un élu par le personnel navigant technique ;

- un élu par le personnel navigant commercial ;

- quatre élus, dont un représentant des cadres, par les autres salariés

Six représentants des salariés élus dont :

- un représentant du personnel navigant technique ;

- un représentant du personnel navigant commercial ;

- quatre représentants du personnel au sol, dont un cadre

Si ce projet était confirmé, la composition du conseil d'administration ne serait en conséquence modifiée qu'à la marge . La réforme permettrait , en effet, outre les modifications précitées, d'introduire deux administrateurs représentant les investisseurs privés autres que les salariés, d'ajouter un administrateur -représentant les salariés actionnaires et un représentant de l'Etat, en l'occurrence un représentant du ministre du tourisme- et de réduire de 6 à 5 le nombre des personnes qualifiées nommés par L'Etat.

En ce qui concerne le mode de désignation des salariés actionnaires
, le présent article précise, en outre, que la " représentation des salariés actionnaires peut se faire par catégories. Elle peut être subordonnée à la détention par l'ensemble des salariés actionnaires ou par chaque catégorie d'une part minimale du capital social " .

Sur le fondement de ces dispositions, le Gouvernement envisagerait, d'après les informations communiquées à votre rapporteur, d'organiser un premier tour d'élection au sein de deux sections de l'assemblée générale composées respectivement du personnel navigant technique actionnaire et des autres salariés actionnaires, les candidats détenant le plus grand nombre de voix au sein de chaque section étant proposés à l'assemblée générale à laquelle il reviendra de désigner les deux représentants.

La représentation des salariés actionnaires devrait, en outre, être subordonnée à la détention par chaque catégorie d'au moins 2 % du capital social de la société. Si elle était confirmée, cette disposition devrait permettre la présence au sein du conseil d'administration d'un représentant des pilotes et d'un représentant des autres salariés, ces catégories détenant respectivement 7 % et 6 % du capital selon les dernières estimations.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

3. Position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

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