Proposition de résolution sur les propositions de règlements (CE) du Conseil relatifs à la réforme de la politique agricole commune (n° E-1052)
FRANÇOIS (Philippe)
RAPPORT 101 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES
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N°
101
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 9 décembre 1998
RAPPORT
FAIT
au
nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur la
proposition de résolution présentée en application de
l'article 73
bis
du Règlement par MM. Philippe FRANÇOIS,
Marcel DENEUX, Jean-Paul EMORINE, Mme Janine BARDOU,
MM. Michel BARNIER,
Bernard BARRAUX, Georges BERCHET, Jean BIZET, Roland COURTEAU,
Désiré DEBAVELAERE, Mme Josette DURRIEU, MM. Jean
FRANÇOIS-PONCET, Jean HUCHON,
Jacques de MENOU
,
Louis MINETTI
, Louis MOINARD, Jean-Marc PASTOR, Bernard PIRAS, Paul
RAOULT, Charles REVET et
Roger RIGAUDIÈRE
sur les propositions de
règlements (CE) du Conseil relatifs à la réforme de la
politique agricole commune
(n° E-1052).
Par M.
Philippe FRANÇOIS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Bernard Murat, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.
Voir le
numéro
:
Sénat
:
488
(1997-1998).
Union européenne.
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
La proposition de résolution n° 488, dont vous êtes
saisis, porte sur les propositions de règlements (CE) du Conseil
relatifs à la réforme de la politique agricole commune (cultures
arables, viande bovine, lait et produits laitiers, développement rural,
règlement financier et autres questions à caractère
horizontal).
Cette proposition d'acte communautaire, transmise au Sénat le
7 avril 1998 sous le numéro E-1052, constitue un des volets du
document appelé communément " Agenda 2000 "
présenté par la Commission européenne en juillet 1997, qui
s'efforce de définir une approche globale pour préparer l'Union
à son élargissement.
La réforme de la PAC est conçue comme un élément
de cet ensemble,
qui comprend également une réforme des fonds
structurels et une révision des perspectives financières -la
question de la réforme des institutions restant pendante, quant à
elle, compte tenu des décisions du Conseil Européen d'Amsterdam-.
La démarche de la Commission européenne ne doit donc pas
être comprise seulement par référence à
l'état et aux perspectives des marchés agricoles, et en fonction
des négociations commerciales à venir : ces facteurs sont certes
essentiels, mais ils ne sont pas les seuls, ce qui distingue la nouvelle
réforme de celle de 1992. Pour la première fois dans l'histoire
de la politique agricole commune, on est en présence d'une tentative de
réforme " à froid " : la ligne directrice
agricole laisse une marge importante, et la Communauté n'a pas à
gérer d'importants excédents par de coûteuses
opérations de stockage ou d'exportations subventionnées.
Il
s'agit de prévenir les difficultés plus que de les
résoudre.
Les objectifs poursuivis par la Commission sont donc, à moyen terme,
d'empêcher la réapparition d'excédents non exportables,
de rendre la PAC plus facile à défendre dans les futures
négociations de l'OMC, de la concilier avec le processus
d'élargissement à l'Est, de garantir durablement son financement,
enfin de désarmer l'hostilité de certaines fractions des opinions
publiques, notamment en mettant l'accent sur l'effort de développement
rural. Autant d'objectifs louables, que bien peu contesteraient. Mais les
moyens retenus sont-ils vraiment de nature à les atteindre ?
Le Sénat, à l'initiative de sa Commission des affaires
économiques, a constitué, dès le mois de décembre
1997, une mission d'information sur l'avenir de la PAC pour examiner ces
propositions.
Rendu public au moment de la parution du rapport de la Commission de
l'agriculture du Parlement européen présenté par
M. Arlindo Cuntra qui propose " de donner corps à un
véritable modèle agricole européen " et s'oppose
à tout démantèlement de la PAC, le rapport de la mission
sénatoriale a été transmis au Chef de l'Etat et au Premier
ministre avant le sommet de Cardiff.
Les Chefs d'Etat et de Gouvernement des Quinze, réunis les 15 et
16 juin à Cardiff, ont manifesté leur volonté de
parvenir à un " accord politique " sur l'ensemble des mesures
" de l'agenda 2000 " au plus tard en mars 1999, sous
présidence allemande de l'Union européenne et avant la campagne
des élections européennes qui auront lieu en juin 1999.
Dans le domaine agricole, les Chefs d'Etat et de Gouvernement ont pris
connaissance du rapport d'étape des experts du Comité
spécial agricole -selon lequel sept Etats membres sont en principe
favorables à l'approche de la Commission européenne (baisse des
prix de soutien et compensation par des aides directes)-.
L'Autriche qui, le 1er juillet et pour six mois, a succédé
au Royaume-Uni à la présidence de l'Union européenne a
souhaité, selon M. Wolgang Schüssel, ministre des affaires
étrangères, présenter au Conseil européen des 11 et
12 décembre à Vienne, les " éléments
clé pour une solution " sur l'Agenda 2000 et ainsi
" défricher le terrain " afin de " permettre une
décision en mars 1999 ".
Au mois de septembre, alors que la Commission avait indiqué que les
effets de la crise financière russe seraient limités,
M. Jacques Santer a reconnu que cet événement aurait
des conséquences sérieuses sur l'équilibre des
marchés agricoles de l'Union européenne, surtout sur ceux des
viandes bovine et porcine pour lesquelles la Russie représente le
premier débouché à l'exportation de l'Union. Dans une
analyse du marché mondial, la FAO prévoit elle aussi des
conséquences graves de cette crise, sur les marchés avicoles
principalement. Cette crise vient s'ajouter à celle qui sévit en
Asie et dont les conséquences sont réelles sur les
économies émergentes en Amérique Latine.
Or, c'est sur une vision optimiste des débouchés asiatiques que
la Commission européenne a bâti son projet " Agenda
2000 ", avec des baisses de prix généralisées et
compensées partiellement.
Votre rapporteur considère que l'environnement international actuel
remet, provisoirement du moins, en cause les perspectives de
développement des marchés mondiaux envisagées.
A ces difficultés, s'ajoutent les revendications de plus en plus
pressantes de certains Etats-membres qui estiment que leur contribution au
budget européen est trop élevée. Afin d'éviter tout
" cofinancement " national des aides directes de la PAC, d'aucuns
considèrent qu'une stabilisation des dépenses de l'Union
européenne, et notamment celles relatives à la PAC, pourrait
s'imposer. Le problème du financement de la future politique agricole
commune apparaît donc crucial.
A la fin du mois de novembre, un rapport adopté par le Conseil des
ministres de l'agriculture, et qui doit être transmis au Conseil
européen de Vienne en décembre, dresse l'état d'avancement
des discussions sur la réforme de la PAC.
Un accord semble se dégager sur l'opportunité de poursuivre et
d'approfondir le processus de réforme dans le secteur des cultures
arables. C'est notamment le cas pour la réduction du prix d'intervention
dont le niveau et le montant restent à fixer. En viande bovine, il
existe également un accord sur la nécessité et l'urgence
de poursuivre et d'approfondir le processus de réforme. L'accord est
" assez large " sur le principe d'une réduction des prix de
soutien, " sans préjudice de son niveau ". Dans le secteur
laitier, des divergences de vues importantes apparaissent tant sur l'avenir des
quotas laitiers que sur la réforme proposée par la Commission,
fondée notamment sur une baisse des prix avec le versement d'aides
directes.
Ainsi, de larges efforts doivent encore être accomplis pour
aboutir à un compromis sur l'ensemble des mesures.
C'est pourquoi, il est aujourd'hui indispensable que le Gouvernement
français puisse, dans les semaines à venir, se prévaloir
pour la PAC d'un document permettant d'affirmer à ces partenaires
européens et à la Commission européenne les principes sur
lesquels la France ne doit pas transiger.
La proposition de résolution n° 488 adoptée à
l'unanimité des membres de la mission d'information sur l'avenir de la
PAC au mois de juin dernier répond à cette
nécessité.
Telles sont, Mesdames et Messieurs, les raisons qui justifient la proposition
de résolution que vous soumet votre commission des affaires
économiques dans la rédaction qu'elle a adoptée lors de sa
réunion du mercredi 9 décembre 1998.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Le
Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la proposition d'acte communautaire E.1052,
Considérant que la Commission européenne a proposé en
juillet 1997 dans le document " Agenda 2000 " et en
mars 1998 dans les propositions de règlements du Conseil relatifs
à la réforme de la politique agricole commune une nouvelle
réforme de cette politique ;
Considérant que la France est attachée à la politique
agricole commune qui a joué un rôle moteur dans la construction
européenne et qui représente aujourd'hui encore la moitié
du budget de la Communauté ;
Considérant que la mission d'information relative à l'avenir de
la politique agricole commune, constituée au sein de la Commission des
Affaires économiques du Sénat, a présenté en juin
1998, dans son rapport n° 466, son analyse de la réforme
envisagée et son projet pour l'avenir de l'agriculture européenne
;
Demande au Gouvernement d'agir au sein du Conseil pour que la réforme de
la politique agricole commune soit l'occasion de définir une vision
moderne et dynamique de l'agriculture européenne à l'aube de
l'an 2000 ;
Estime tout d'abord nécessaire de consolider l'unité du
marché commun agricole et :
- rappelle l'importance de la mise en place de l'Euro pour l'agriculture ;
- souhaite l'établissement d'une véritable
égalité des conditions de concurrence entre les producteurs
européens ;
- invite le Gouvernement à veiller à ce que la
réforme de la politique agricole commune prenne en compte l'ensemble des
productions agricoles, notamment les productions méditerranéennes
et celles d'Outre-mer ;
- préconise le développement des débouchés non
alimentaires des produits agricoles ;
Souligne, ensuite, la nécessité d'une approche de l'agriculture
européenne pragmatique et différenciée selon les
productions et :
- observe qu'il serait nécessaire de renforcer la
compétitivité des céréales en baissant
raisonnablement le prix d'intervention communautaire, sous réserve d'une
compensation ;
- s'inquiète de l'insuffisante prise en compte de
l'impératif d'indépendance protéique ;
- appelle à une gestion plus efficace des marchés de la
viande bovine, porcine et ovine ;
- souhaite que soient préservées les
spécificités de la filière laitière ;
Juge, en outre, indispensable de replacer l'emploi et l'espace au coeur de la
réforme, ce qui suppose entre autres une politique ambitieuse de
développement rural -notamment en zone de montagne- et une action
réaliste et déterminée en faveur de l'installation de
jeunes agriculteurs ;
Demande, enfin, au Gouvernement de veiller à une redéfinition du
mode de participation de l'Union européenne aux négociations
internationales et :
- propose de dialoguer dans un cadre clairement établi, celui de
l'Organisation mondiale du commerce ;
- considère l'harmonisation et le respect des mesures sanitaires,
ainsi que la claire information du consommateur, comme des
préoccupations fondamentales.
Souligne, d'une part, l'importance d'un financement communautaire pour la
politique agricole européenne et, d'autre part, les risques d'une
renationalisation de la politique agricole commune.