CHAPITRE II
DE QUELQUES COMPTES D'AFFECTATION
SPÉCIALE
La formule des comptes d'affectation spéciale est théoriquement destinée à lever les obstacles budgétaires à l'affirmation de politiques sectorielles. Mais, encore faut-il respecter les règles du jeu.
I. DEUX DÉBUDGÉTISATIONS PROBLÉMATIQUES : LE FONDS NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT DU SPORT (FNDS) ET LE FONDS NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT DE LA VIE ASSOCIATIVE (FNDVA)
Ces deux comptes, gérés par le ministère de la jeunesse et des sports, sont dotés l'un, le FNDS, de 1.014 millions de francs, l'autre, le FNDVA, de 24 millions de francs.
A. LE FONDS NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT DU SPORT (FNDS)
Evolution des recettes et des dépenses du FNDS entre 1997 et 1999
|
1997 |
1998 |
1999 |
Différence par rapport à 1998 |
Recettes |
916 |
1.014 |
1.014 |
0 |
Dépenses |
916 |
1.014 |
1.014 |
0 |
Charge nette |
0 |
0 |
0 |
0 |
Créé par la loi de finances pour 1976, le Fonds
national pour le sport de haut niveau est devenu depuis 1979 l'actuel Fonds
national de développement du sport. Il a pour objet d'assurer le
financement de l'aide aux sportifs de haut niveau, le soutien de diverses
actions d'animation et celui de l'aide au sport de masse.
Autant dire que ses missions ambitieuses sont définies avec un peu
d'imprécision si bien que l'une des critiques usuellement
adressées à l'encontre du fonds consiste à souligner
combien, dans son fonctionnement, ses interventions se sont
éloignées de celles que commandait sa vocation initiale.
Cela ne signifie pas que les actions qu'il finance soient dépourvues
d'intérêt. Mais, cela veut dire que le recours à un compte
d'affectation spéciale pour conduire les interventions à lui
confiées a, du fait de leur multiplication, perdu beaucoup de sa
justification.
De fait, le FNDS semble être devenu une variable d'ajustement à la
disposition du ministère gestionnaire pour se décharger
d'interventions qu'il aurait dû financer sur ses propres crédits.
En tout état de cause, avec 1.014 millions de francs de
crédits prévus en 1999, le fonds dispose de moyens
équivalents à environ 33,6 % de ceux confiés à
son ministère gestionnaire par le projet de loi de finances pour 1999.
C'est considérable et c'est peut-être trop.
1. Les recettes du FNDS
a) Spontanément, une progression modérée
Les
recettes du fonds
avaient été évaluées dans le
projet de loi de finances initiale pour 1998 à 916 millions de
francs. Elles ont été portées à
1.014 millions de francs
, après le vote d'un amendement
majorant le prélèvement sur la Française des jeux qui
s'était accompagné d'une réestimation des recettes de
98 millions de francs par rapport au projet initial du gouvernement.
Les recettes théoriques se répartissent en cinq catégories.
Le fonds reçoit d'abord une
partie du produit du
prélèvement sur les sommes engagées au pari mutuel
sur
les hippodromes et hors les hippodromes. Le taux du prélèvement
ainsi affecté au FNDS est de 0,1 %. Son produit, inchangé
par rapport à 1997 et 1998, est estimé à
32 millions de francs en 1999.
Le produit du prélèvement sur les sommes misées
sur les jeux exploités en France métropolitaine par la
Française des jeux
représente 93,6 % des recettes du
fonds. La "rentrée" évaluée, pour 1997, à
851 millions de francs
, après relèvement du taux de
0,1 point, était évaluée à une somme identique
dans le projet de loi de finances initial pour 1998 déposé par le
gouvernement. Compte tenu du relèvement du taux de
prélèvement de 0,3 point adopté après examen
par le Parlement, elle a été accrue de 98 millions de francs
en 1998 pour représenter 949 millions de francs. Pour 1999, une
évaluation semblable est retenue.
Trois catégories différentes de jeux étaient initialement
visées : les loteries instantanées, le loto national et le loto
sportif. En 1994, à ces prélèvements dont les taux avaient
évolué de façon contradictoire, s'est substitué
l'actuel prélèvement uniforme désormais
opéré sur les sommes misées sur les jeux exploités
par la Française des jeux.
L'excédent du produit de la taxe spéciale sur les
débits de boissons et sur les dépenses d'indemnisation
est
évalué à 33 millions de francs, sans modification
depuis 1996. Depuis, la progression spontanée des recettes fait
apparaître une marge de progression des ressources du compte somme toute
modeste.
Enfin, le fonds est censé bénéficier d'autres
recettes, mais ni la ligne
"remboursement des avances consenties aux
associations sportives"
ni celles relatives aux
recettes diverses et
accidentelles
ne font l'objet d'une évaluation en loi de finances
initiale.
Les prévisions de recettes donnaient lieu traditionnellement à
une certaine surévaluation. La volonté de présenter des
estimations réalistes explique la décrue transitoire des recettes
observée en 1996.
Depuis, la progression spontanée des recettes fait apparaître une
marge de progression des recettes affectées au FNDS somme toute
étroite.
En dépit de l'engouement de nos compatriotes pour les jeux, il
apparaissait presque systématiquement un décalage entre les
évaluations de recettes initiales et les recouvrements effectifs. Ainsi,
en 1995, les recettes effectives s'étaient élevées
à 817,5 millions de francs contre une estimation de
884 millions de francs en loi de finances initiale, soit une moins-value
de 7,5 %.
La modification de l'assiette des ressources du fonds adoptée en 1994
a permis d'enrayer un phénomène continu de baisse des recettes du
FNDS.
Le prélèvement uniforme sur les produits de la Française
des jeux qui a été mis en place a permis de lisser les
évolutions contradictoires des enjeux portant sur les diverses
catégories de jeux gérés par elle.
Mais, la progression des ressources est venue, elle, du fait des conditions
d'évolution de l'assiette de prélèvement sur la
Française des jeux, de l'alourdissement des prélèvements.
A taux constant, les évolutions d'assiette donnent un produit
inchangé, ce qu'on vérifie encore cette
année.
b) Les questions posées par l'alourdissement du prélèvement affecté au compte
L'aggravation du prélèvement affecté au
FNDS
qui se traduit par une hausse des prélèvements obligatoires ne va
pas d'ailleurs sans poser de problèmes.
Ainsi, le fonds bénéficie de recettes en excédent par
rapport à ses dépenses.
La mesure adoptée l'an dernier avec l'accord du gouvernement a conduit
à accroître les recettes de FNDS de 98 millions de francs et
les dotations du fonds à due concurrence. Or, le FNDS
bénéficie de moyens supérieurs à ses
dépenses, ce qui génère des opérations de report
pour un montant substantiel
. Le solde du compte au 31 décembre
1997 s'élevait ainsi à 351,8 millions de francs soit
près de 40 % des crédits consommés au cours de
l'exercice 1997.
Ainsi, les prélèvements affectés au FNDS apparaissent en
l'état excessifs par rapport à la consommation de ses
crédits. Leur accroissement en 1998 aggravera sans doute ce
phénomène à terme d'autant que le budget du fonds ne devra
plus supporter après 1998 des dépenses non reconductibles d'un
montant de 91,5 millions de francs. Il s'agit des crédits
nécessaires à l'agrandissement des stades de province
programmé dans la perspective de la Coupe du monde de football pour
1998. La majoration du prélèvement adoptée l'an dernier,
combinée à l'extinction de ces dépenses en 1999, a en
effet conduit à abonder les ressources réelles du compte de
189,5 millions de francs, soit plus de 20 % des dotations
initialement prévues pour 1998.
Dans ces conditions, il est loisible de s'attendre à une inflation du
montant des reports de crédits de 1998 vers 1999.
Le défaut d'évaluation en loi de finances initiale des
recettes tirées des remboursements des avances consenties aux
associations sportives
s'explique par la faiblesse des sommes en jeu
(régulièrement moins de 1 million de francs).
Il ne
paraît cependant pas entièrement justifié et semble
traduire une maîtrise incomplète des implications
financières des conventions passées avec le monde sportif.
Le prélèvement sur le PMU est enfin semble-t-il, quelque peu
dépourvu de justification compte tenu de la nature des dépenses
du fonds.
La fragilité du PMU doit ici être rappelée ainsi que le
fait qu'il supporte une série de prélèvements importants
qui constituent une source d'alimentation parfois décisive pour d'autres
comptes spéciaux.
Il en va ainsi s'agissant du FNDAE et du fonds national des haras et des
activités hippiques.
2. Les dépenses du FNDS : 1.014 millions de francs
Initialement évaluées à 916 millions
de
francs, les
dépenses
effectives du FNDS en 1997 se sont
élevées à 885,5 millions de francs, soit une
sous-exécution s'établissant à 69,9 millions de
francs par rapport aux crédits ouverts en loi de finances et en taux de
consommation de la ressource disponible de seulement 71 %.
Ce phénomène habituel a conforté les reports de
crédits disponibles en 1998. On rappelle que le solde positif du compte
à la fin 1997 s'élevait d'ailleurs à 351,8 millions
de francs.
Les crédits d'investissement
s'élevaient en 1998 à
175,5 millions de francs
-17,2 % du total-,
ceux de
fonctionnement à 838,5 millions de francs
-82,8 % du total.
611,5 millions de francs de crédits de fonctionnement devaient
être consacrés à l'aide au sport de masse
tandis que
les subventions en faveur du sport de haut niveau s'établissaient
à 227 millions de francs.
Les documents budgétaires usuels paralysent tout effort d'analyse des
dépenses.
Par exemple, l'action en faveur du sport de masse y est
agrégée dans une ligne de subventions de fonctionnement qui,
à elle seule, regroupe plus de 60 % des crédits de
fonctionnement du fonds.
Aucune individualisation des frais de gestion n'apparaît.
Seul un examen approfondi permettrait d'évaluer la pertinence de la
dépense et sa conformité avec les principes parfois un peu vagues
qui sont censés la gouverner.
Il faut cependant se féliciter que, sur ce plan, des mesures aient
été prises pour améliorer la situation.
Au nombre de ces dernières, on peut citer :
- la clarification des rôles respectifs des crédits
d'intervention budgétaire du ministère et des crédits de
subvention du FNDS intervenue lors de la réunion de son conseil le
1er février 1994. Ne sont théoriquement plus
financées sur le FNDS les actions suivantes qui incombent donc aux
crédits du ministère :
• "profession sport",
• subventions aux CREPS pour les centres permanents
d'entraînement et de "formation pour l'évaluation des sportifs de
haut niveau" (SIC),
• formations aménagées et conventions d'emploi des
sportifs de haut niveau,
• recherche,
• actions déconcentrées de médecine et
lutte contre le dopage.
- Le souci de renforcer le contrôle des subventions versées
qui s'appuie sur le dispositif du décret du 10 mars 1972 relatif
aux subventions d'investissement de l'Etat et passe par un contrôle du
respect des engagements pris par les fédérations dans les
conventions d'objectifs conclues par elles et de la situation financière
de celles-ci.
En ce qui concerne les subventions versées pour soutenir le sport de
masse, une moitié est attribuée aux fédérations au
plan national et l'autre est répartie par les comités locaux du
FNDS sous l'autorité du préfet de région.
Il convient de rester très vigilants sur l'utilisation des
crédits du fonds.
En particulier, il faut veiller à ce que le compte ne soit pas le
support de la débudgétisation de certaines dépenses
régaliennes telles que les dépenses de la nécessaire lutte
contre le dopage dont l'efficacité mériterait sans doute
d'être renforcée.
Mais d'autres mesures de clarification s'imposent, et qui concernent notamment
les critères d'attribution des subventions dans un contexte où
l'équilibre financier de certaines grandes fédérations
nationales apparaît profondément dégradé tandis que,
pour d'autres, leur situation financière favorable devrait permettre
à l'Etat de constater des allégements de charges si
nécessaires au rétablissement de ses propres comptes.
Pour 1999, l'architecture des interventions du fonds serait la suivante :
les parts respectives des dépenses d'investissement et de
fonctionnement seraient, pour les premières, de 17,3 %
(175,5 millions de francs) et, pour les secondes, de 82,7 %
(838,5 millions de francs) ;
pour les dépenses d'investissement, la suppression
programmée de la dotation affectée à l'organisation de la
Coupe du Monde de football (91,5 millions de francs) serait partiellement,
à hauteur de 50,5 millions de francs, destinée à
abonder les moyens consacrés aux équipements de l'Etat et les
subventions pour la réalisation d'équipements sportifs qui
s'élèveraient à 115 millions de francs ;
s'agissant des crédits de fonctionnement, leur structure
privilégierait les subventions pour l'aide au sport de masse
(72,8 % du total) par rapport aux subventions pour l'aide au sport de haut
niveau.
Les crédits de fonctionnement sont gérés pour une part
prépondérante au niveau national (475,5 millions de francs
en 1998), le reste des crédits (290 millions en 1998) étant
affecté au niveau régional.
La part nationale est consacrée pour la quasi-totalité au
financement des conventions d'objectifs conclues entre le ministère de
la Jeunesse et des Sports et les fédérations sportives. Il
apparaît nécessaire de disposer d'une meilleure information sur
les résultats du suivi des conventions.
Quant à la part régionale, son utilisation aura été
la suivante en 1997 : 48 % des crédits auront
été attribués après de 30.000 clubs et
associations, 22 % aux ligues et comités régionaux,
23 % aux comités départementaux, 5 % aux comités
régionaux et départementaux olympiques et sportifs et 2 %
à des organismes divers.
Là également, une évaluation d'ensemble du dispositif
s'impose.