II. LES NOUVELLES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Votre rapporteur s'interroge en effet sur les motivations qui ont conduit le gouvernement à présenter son projet de loi d'orientation sur l'aménagement et de développement durable du territoire comme une simple "révision" de la loi d'orientation de 1995.

Même s'il se félicite de la confirmation de plusieurs dispositifs créés par la loi de 1995, il estime que les orientations définies par le gouvernement à l'issue du CIADT de décembre 1997, et leur traduction législative dans le projet de loi qu'il déposera en 1999, marquent un infléchissement très sensible dans les priorités et les outils de la politique d'aménagement du territoire.

A. UN PROBLÈME DE MÉTHODE

Certaines de ces nouvelles inflexions ont d'ailleurs, votre rapporteur tient à le rappeler, déjà trouvé leur traduction pratique avant même de pouvoir s'adosser à un fondement législatif.

Les procédés qui ont conduit à l'abandon du projet de canal Rhin-Rhône en ont l'illustration exemplaire : la réalisation de ce grand projet avait été inscrite dans l'article 36 de la loi d'orientation de 1995, et donc votée par le Parlement. Lorsque le gouvernement a voulu renoncer à ce projet, il a préféré se contenter d'en abroger par décret la déclaration d'utilité publique , plutôt que de revenir devant le Parlement comme l'eussent voulu le parallélisme des formes et la hiérarchie des normes juridiques. D'un point de vue strictement juridique, il est en effet "singulier" au regard de ces deux principes fondamentaux de notre droit d'annuler par un simple décret une décision posée par la loi, norme juridiquement supérieure. Sous l'angle politique, on peut s'interroger sur les raisons qui ont conduit le gouvernement à préférer faire -provisoirement au moins- l'économie d'un débat et d'un vote parlementaire.

Cet exemple, pour caractéristique qu'il soit, n'est cependant pas isolé, et l'on peut citer plusieurs dispositions prévues par la loi d'orientation de 1995 qui, n'entrant pas dans les nouvelles orientations du gouvernement, risquent, soit faute de décret d'application, soit faute de crédits, de se retrouver caduques sans même avoir été abrogées. On en citera ici deux illustrations significatives :

- le schéma national d'aménagement du territoire , prévu par l'article 21 de la loi d'orientation de 1995, avait été présenté au comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) d'Auch, et devait, conformément aux dispositions de la loi, faire l'objet d'un débat devant le Parlement avant son adoption définitive ; son élaboration est abandonnée , le gouvernement préférant s'orienter vers des schémas de services collectifs, couplés à des schémas régionaux qui, d'après les informations dont on dispose aujourd'hui, ne devraient pas donner lieu, avant adoption, à un débat parlementaire ;

- le Fonds de gestion de l'espace rural (FGER), créé par l'article 38 de la loi d'orientation de 1995 n'est pas positivement supprimé, mais ses dotations, dans le projet de loi de finances pour 1999, sont ramenées à zéro , où plutôt transférées sur les nouveaux "contrats territoriaux d'exploitation" dont la création est prévue dans le projet de loi d'orientation agricole, et qui sont loin de viser le même objectif.

Votre rapporteur tenait à rappeler ces exemples qui, tout comme le dépôt tardif du projet de loi d'orientation sur l'aménagement et le développement durable du territoire, ne témoignent pas d'un grand empressement du gouvernement à venir débattre avec le Parlement de ses grandes orientations en matière d'aménagement du territoire.

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