2. La réforme institutionnelle : une clarification des responsabilités
Les
décisions relatives à la réalisation des infrastructures
ferroviaires sont désormais prises en vertu de la loi du 13
février 1997, selon des modalités qui distinguent plus clairement
les responsabilités des collectivités publiques et celles des
gestionnaires du réseau.
La loi du 13 février 1997
La réforme introduite par la loi du 13 février 1997 est
apparue, selon l'expression utilisée par notre collègue
François Gerbaud, rapporteur du texte au nom de la commission des
affaires économiques, comme la "
quatrième mue de
l'organisation ferroviaire en France
". Elle résulte à
la fois de la crise financière qui a frappé la SNCF à
partir de 1991 et de la nécessité d'adapter les structures
d'exploitation du réseau ferré aux exigences européennes
contenues dans la directive n° 91-440 du 29 juillet 1991. En
effet, la séparation entre les activités relatives à
l'exploitation de l'infrastructure et celles relatives à sa gestion
imposée par la directive ont permis de clarifier la situation
financière de la SNCF par inscription au passif de RFF,
établissement public chargé de l'infrastructure, de l'endettement
de la SNCF à hauteur de 134,2 milliards de francs auxquels se sont
ajoutés, en juillet 1997, 20 milliards de francs.
Cette réforme, si elle n'a pas eu pour objet d'effacer la dette de la
SNCF puisque cette dernière a été transférée
à Réseau ferré de France a permis d'alléger la
contrainte financière pesant sur la SNCF et de la dégager d'un
endettement qui relevait pour partie de la puissance publique.
Un tel objectif satisfait à l'exigence posée par l'article 9
de la directive du 29 juillet 1991 qui précise que "
les
États membres mettent en place, conjointement avec les entreprises
ferroviaires publiques existantes, des mécanismes adéquats pour
contribuer à réduire l'endettement de ces entreprises
jusqu'à un niveau qui n'entrave pas une gestion financière saine
et pour réaliser l'harmonisation de la situation financière de
celles-ci
".
Si le Gouvernement a annoncé son intention de procéder à
un réexamen de la réforme introduite par la loi du
13 février 1997, il est apparu à votre commission qu'il ne
souhaitait plus remettre en cause ni le désendettement de la SNCF ni la
séparation de la maîtrise d'ouvrage et de la maîtrise
d'oeuvre. On ne peut que s'en féliciter : ces deux
éléments sont, en effet, des points essentiels car ils
permettent, d'une part, d'éviter une reconstitution de l'endettement de
la SNCF et, d'autre part, d'espérer pour l'avenir que les travaux
d'infrastructures soient conduits dans des conditions plus satisfaisantes.
Néanmoins, la dette ferroviaire n'a pas disparu pour autant ; elle
pèse désormais sur Réseau ferré de France dont
l'objet est, aux termes de l'article premier de la loi du
13 février 1997, "
l'aménagement, le
développement, la cohérence et la mise en valeur de
l'infrastructure du réseau ferré national
" et qui,
à ce titre, "
met en oeuvre, sous le contrôle de l'Etat,
le schéma du réseau ferroviaire prévu au II de
l'article 17 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995
d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire
".
De nouvelles règles de financement
Les modifications structurelles introduites par la loi du
13 février 1997 ont été l'occasion de poser les
nouvelles règles du financement des infrastructures ferroviaires.
Le décret n° 97-444 du 15 mai 1997 relatif aux missions et aux
statuts de Réseau ferré de France a fixé les conditions
dans lesquelles l'établissement public exerce ses responsabilités
en matière de gestion de l'infrastructure. Afin de prévenir toute
dérive non maîtrisée de l'endettement du gestionnaire de
l'infrastructure, son article 4 précise que "
RFF ne peut
accepter un projet d'investissement sur le réseau ferré national,
inscrit à un programme à la demande de l'Etat, d'une
collectivité locale ou d'un organisme public local ou national que s'il
fait l'objet de la part des demandeurs d'un concours financier propre à
éviter
toute conséquence négative sur les comptes de
RFF sur la période d'amortissement de cet investissement
".
Cet article formalise un impératif de rentabilité. Il apporte
donc sur ce point une réponse très claire à la question
posée par le rapport Rouvillois sur la participation des
collectivités publiques au financement des infrastructures ferroviaires.
Cette règle signifie, en effet, que RFF ne financera les nouvelles
infrastructures ferroviaires que dans la mesure où elles auront une
rentabilité financière suffisante pour permettre un
autofinancement des travaux envisagés, le reste du financement devant
être assuré par les collectivités publiques.
Votre commission ne peut qu'approuver la rigueur de ce dispositif qui vise
à éviter les ambiguïtés qui ont conduit au niveau
d'endettement actuel du secteur ferroviaire français par une
véritable fuite en avant consistant à financer par l'emprunt des
investissements non rentables au strict plan comptable.
Ce nouveau système de financement
souligne les
responsabilités des collectivités publiques -y compris celles des
collectivités territoriales- dans la politique ferroviaire et
permet
de
distinguer dans un projet d'infrastructure ce qui ressort
de la logique de la rentabilité financière et ce qui ressort de
préoccupations socio-économiques telles que la poursuite d'une
politique d'aménagement du territoire
. Il s'agit sans doute
là d'une des ruptures les plus importantes introduites par la
réforme de 1997.