II. LES INCERTITUDES NE SONT PAS LEVÉES
A. LE NOUVEAU CONTEXTE DE LA POLITIQUE FERROVIAIRE
1. L'abandon du " tout-TGV "
Le
rapport remis à M. Bernard Pons et à Mme Anne-Marie Idrac par M.
Philippe Rouvillois en juillet 1996 a consacré le caractère
irréaliste du schéma directeur national des lignes à
grande vitesse. Sa conclusion était, en effet, la suivante :
"
Compte tenu de l'état des finances publiques, il est donc
malheureusement très probable qu'il ne sera pas possible de
réaliser dans les 15 à 20 prochaines années l'ensemble des
infrastructures inscrites au schéma directeur, ni même
l'intégralité de celles qui ont déjà donné
lieu au lancement d'études préliminaires
".
M. Jean-Claude Gayssot, le 24 octobre 1997, lors de l'examen des dispositions
du projet de loi de finances pour 1998 relatif à son ministère
à l'Assemblée nationale, indiquait sous forme de boutade que
"
pour réaliser 2.300 kilomètres de TGV, il faut à
peu près 200 milliards de francs de fonds publics
(et que
compte tenu des sommes disponibles)
il faudrait quatre
siècles
" pour réaliser le programme prévu par le
schéma directeur.
Cependant, votre commission observe que si l'idée d'une
réalisation dans un délai de 10 à 15 ans du schéma
de 1992 a été abandonnée, les lignes inscrites au
schéma demeurent des objectifs auxquels se réfèrent le
Gouvernement comme les collectivités locales. Il y a donc une
pérennité des projets de tracés, ceci s'expliquant par la
poursuite des études et des consultations.
Le schéma directeur de 1992, comme nous l'avons souligné plus
haut, est doté d'une force d'inertie qui constitue incontestablement un
obstacle aux remises en cause nécessaires à l'élaboration
d'une programmation plus réaliste et, pour cette raison, plus dynamique
des investissements ferroviaires.
Il apparaît, à l'évidence, nécessaire que les
priorités en ce domaine soient redéfinies afin de tenir compte
des difficultés de financement et de réalisation des projets mais
également d'éviter que la contrainte budgétaire devienne
le seul critère de planification des investissements ferroviaires.
Pour l'heure, en dépit des annonces relatives au TGV-Est et au
TGV-Rhin-Rhône faites à l'issue de la réunion
interministérielle du 4 février 1998,
il n'existe pas de
nouveau programme TGV
.
Le développement de la grande vitesse n'est pas pour autant
exclu.
Le ministre de l'Équipement, des transports et du logement,
par lettre en date du 27 août 1998 adressée aux présidents
des conseils d'administration de la SNCF et de Réseau Ferré de
France (RFF), a, en effet, indiqué qu'il était "
tout
particulièrement attaché à ce que la grande vitesse, qui a
donné une nouvelle jeunesse au chemin de fer, poursuive sa progression,
compte tenu de ses avantages en matière de service, de
sécurité et d'environnement
" mais a souligné que
"
cette politique
(devait)
rester réaliste, pour pouvoir
effectivement être mise en oeuvre
".
A la suite de la réunion interministérielle du 4 février
1998, le Gouvernement a donné mission à RFF, en concertation avec
la SNCF, pour dresser un état des besoins et formuler des propositions.
Les orientations qui ressortent du communiqué gouvernemental sont celles
qui avaient été définies par le ministre dans sa lettre de
l'été : RFF et la SNCF devront définir des
priorités "
à partir de
l'intérêt
socio-économique des projets, (de) leurs enjeux en terme
d'environnement, d'aménagement du territoire et de liaisons
européennes
". Le communiqué précise, par
ailleurs, que "
la capacité des projets à permettre des
phasages, en assurant une utilisation optimale des ressources publiques devra
être prise en compte
".
L'abandon du " tout-TGV " est consacré par la
référence à la technique pendulaire
faite par le
communiqué gouvernemental : "
les moyens dégagés
en faveur du réseau classique permettront d'engager des actions
d'amélioration de l'offre, utilisant éventuellement la
technologie pendulaire, au bénéfice notamment de régions
qui ne seraient pas concernées à court terme par des projets de
lignes nouvelles à grande vitesse
".
Les résultats de cette mission sont attendus pour la fin du premier
semestre 1998. Sur cette base, le Gouvernement devrait définir les
conditions techniques et financières de la poursuite d'un
"
programme maîtrisé des lignes à grande
vitesse
" respectant les engagements internationaux de la France.
Cette réflexion s'inscrira au sein de la démarche
concertée d'élaboration, qui reste à préciser, des
schémas multimodaux de transports prévus par le projet de loi
d'orientation d'aménagement durable du territoire en préparation.
Ses conclusions devraient être connues avant la fin de l'année
1998.