II - Une procédure inadaptée et obsolète
La
procédure administrative qui régit la mise en oeuvre de la
réquisition est particulièrement lourde et, en partie au moins,
devenue obsolète.
Elle s'appuie sur un système déclaratif auprès du service
municipal du logement. Ainsi, en vertu de l'article R. 641-5 du code
de la construction et de l'habitation, tout propriétaire, locataire,
sous-locataire, bénéficiaire d'une réquisition ou occupant
un local à usage d'habitation ou professionnel doit déclarer le
nombre total des pièces du logement dont il est détenteur ainsi
que le nom des personnes qui y résident à titre principal. Doit
également être déclaré tout logement dont la vacance
doit survenir à une date ferme en raison d'un congé ou de
l'expiration d'un bail, sauf dans le cas où l'occupant
bénéficie du droit au maintien dans les lieux. Toute fausse
déclaration tendant à dissimuler des locaux vacants soumis
à déclaration est passible d'un an d'emprisonnement et de
40.000 F d'amende (article L. 651-3 du code de la construction
et de l'habitation).
Toute décision de réquisition est précédée
d'une enquête par un contrôleur assermenté dont les
conclusions proposant une attribution d'office sont affichées à
la porte du local considéré. La décision de
réquisition est prise dans le délai d'un mois à compter de
cet affichage.
Ce dispositif datant de l'immédiat après-guerre, tombé en
désuétude pendant de longues années, a été
récemment réactivé, non sans difficultés, à
l'occasion de deux plans de réquisitions lancés respectivement en
août 1995 et en janvier 1996
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*
)
.
La réalisation de ces programmes a mis en évidence
d'épineuses questions juridiques et économiques liées
à l'application de l'ordonnance du 11 octobre 1945 qui s'est
révélée inadaptée au contexte actuel.
Les principaux écueils du dispositif existant, susceptibles d'emporter
l'illégalité des procédures de réquisition mises en
oeuvre, sont les suivants :
- l'encadrement administratif de la procédure incombe au service
municipal du logement. Or, ce service n'existe généralement
plus ;
- la réquisition est prononcée au bénéfice de
personnes nommément désignées si bien qu'en cas de
renoncement, la procédure doit être intégralement
recommencée ;
- l'indemnité due par le bénéficiaire est fixée par
référence aux loyers du marché. En réalité,
s'agissant de loger des personnes en grande difficulté incapables
d'assumer une telle charge financière, le montant de l'indemnité
mensuelle a été fixé à 25 francs le
mètre carré lors des réquisitions de 1995 et à
26 francs le mètre carré en 1996. Or, le fondement juridique
d'une telle indemnité est très contestable dans la mesure
où le prix ainsi fixé constitue une entorse évidente aux
conditions du marché et ne respecte pas le critère défini
par l'ordonnance de 1945 ;
- la durée de la réquisition est apparue trop brève pour
permettre l'amortissement des travaux effectués dans les immeubles
concernés
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*
)
.
Tirant les conséquences des inconvénients constatés, le
projet de loi propose d'instituer une nouvelle procédure de
réquisition sans pour autant supprimer celle résultant de
l'ordonnance de 1945 susceptible de permettre, le cas échéant, de
remédier à une pénurie de logements causée par la
survenance d'événements graves et exceptionnels. Il reste que ces
dispositions auraient nécessité un sérieux
" toilettage ", afin de les mettre en cohérence avec les
réalités administratives actuelles et de tenir compte, en
particulier, de l'inexistence d'un service municipal du logement.