CHAPITRE IV -
CONSOLIDER NOS ACQUIS DANS LE
NUCLÉAIRE
La
commission d'enquête en est convaincue : la maîtrise de
l'énergie doit impérativement redevenir une priorité de
façon à desserrer l'étau des contraintes ; les
énergies renouvelables méritent d'être
développées, mais il ne faut cependant pas cacher que, d'ici
2020, elles ne représenteront qu'un très faible pourcentage de
notre bilan énergétique. Au total, ni les unes et ni les autres
ne sauraient à elles seules nous permettre de répondre aux
défis énergétiques d'aujourd'hui et de demain.
Les fondements de notre politique -en tout cas dans un horizon de temps
à échelle humaine- resteront centrés sur les
énergies classiques que sont les énergies fossiles et
l'énergie nucléaire.
Il apparaît donc essentiel que la France continue à consolider ses
acquis dans ces secteurs. C'est une garantie essentielle de la
pérennité et de la sécurité tant de son
développement économique que du bien-être de ses citoyens.
Eu égard à l'évolution des contraintes et du paysage
énergétique mondial, ceci suppose d'abord que notre pays se donne
les moyens d'une politique nucléaire ambitieuse.
La France occupe une situation éminente dans un certain nombre de
secteurs de haute technologie. Avec des domaines d'excellence tels que
l'aéronautique, l'espace et la construction ferroviaire,
l'industrie
nucléaire constitue l'un des fers de lance de notre industrie.
Elle
participe à la compétitivité de notre économie,
tant sur le marché domestique que sur les marchés
extérieurs.
Mais, on le sait, en France comme ailleurs, le nucléaire ne peut
avoir d'avenir et l'opinion publique ne saurait l'accepter qu'à deux
conditions :
- que la technologie soit à la fois sûre et
compétitive ;
- et que soit maîtrisée la gestion de l'aval du cycle
nucléaire, notamment le sort des déchets
radioactifs.
I. LA FILIÈRE NUCLÉAIRE DOIT RESTER UN FER DE LANCE DE L'INDUSTRIE FRANÇAISE
La
filière nucléaire française représente un secteur
de haute technologie qui occupe une place essentielle dans notre
économie.
Il ne faudrait cependant pas croire, au motif qu'un certain nombre de pays
industrialisés ont ralenti, voire stoppé, leurs programmes
électronucléaires pour des raisons économiques ou
politiques, que l'énergie nucléaire serait inéluctablement
sans avenir et la France, le seul pays à persévérer dans
une voie que certains assimilent -à tort- à une impasse.
En réalité, ne nous y trompons pas : nos compétiteurs
poursuivent leurs avancées, notamment en direction des marchés
extérieurs, même lorsque leur marché intérieur leur
est interdit.
Or, dans le même temps, le Gouvernement français -au cours du
Conseil interministériel du 2 février 1998- a
adopté certaines mesures qui pourraient remettre en cause la
cohérence de la filière nucléaire et gravement handicaper
l'avenir de l'industrie électronucléaire française.
Est-ce raisonnable, alors qu'il y a tout lieu de penser que le nucléaire
est indispensable et qu'il paraît promis à un avenir
certain ?
A. LA FILIÈRE NUCLÉAIRE FRANÇAISE : UN RÔLE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL D'IMPORTANCE
Secteur
de très haute technologie, la filière
électronucléaire exerce, en France, un rôle essentiel tant
au plan économique qu'en termes d'emplois.
Il est aujourd'hui assez largement connu qu'elle est à l'origine de
30 % de l'énergie primaire et de plus de 80 % de
l'électricité (82 % en 1997) produites en France.
On connaît moins, en revanche, l'ampleur de ses investissements
(800 milliards de francs depuis 20 ans), l'importance de sa
recherche, de sa valeur ajoutée (104 milliards de francs en 1994),
du chiffre d'affaires de ses entreprises (environ 205 milliards de francs
au total) ou le poids de ses exportations dans notre balance commerciale
(32 milliards de francs en 1996). Enfin, et ce n'est pas le moindre, son
rôle dans l'emploi est majeur : en effet, environ
100.000 personnes travaillent directement dans le secteur
nucléaire
et ce dernier fournit, en outre,
100.000 emplois
indirects
.
Performante, l'industrie nucléaire française n'en est pas moins
confrontée à une concurrence croissante sur les marchés
tiers.