Répression des infractions sexuelles et protection des mineurs
JOLIBOIS (Charles)
Rapport 435 (97-98) - COMMISSION MIXTE PARITAIRE
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N°
906
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N°
435
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Enregistré à
la Présidence de
l'Assemblée nationale
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Annexe au
procès-verbal de la séance
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RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE
(1)
CHARGÉE DE
PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE
LOI
relatif à la
prévention
et à la
répression
des
infractions sexuelles
ainsi
qu'à la
protection des mineurs,
PAR MME FRÉDÉRIQUE BREDIN, PAR M. CHARLES JOLIBOIS,
Députée Sénateur
(I)
Cette commission est composée de
: M.
Jacques Larché,
sénateur, président ;
Mme
Catherine Tasca,
députée, vice-présidente ;
M.
Charles Jolibois
, sénateur,
Mme Frédérique
Bredin,
députée, rapporteurs.
Membres titulaires :
MM. Jacques Bimbenet, Patrice Gélard,
Jean-Jacques Hyest, Michel
Dreyfus-Schmidt, Robert Pagès,
sénateurs ;
Mme Christine Lazerges, MM. Jean-Luc Warsmann,
Renaud Dutreil,
Mmes Muguette Jacquaint, Gilberte Marin-Moskovitz,
députés.
Membres suppléants :
MM. Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry,
Christian Demuynck, Lucien Lanier, Jacques Mahéas, Georges Othily,
Jean-Pierre Schosteck,
sénateurs
; M. Jacques Floch,
Gérard Gouzes, François Colcombet, Arnaud Montebourg,
André Vallini, Olivier de Chazeaux, Pierre Albertini
,
députés.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
Première lecture :
202
,
228
et T.A.
9
.
Deuxième lecture :
397
,
622
et T.A.
74.
Troisième lecture :
812.
Sénat
: Première lecture :
11
,
49
,
51
et
T.A.
28
(1997-1998).
Deuxième lecture :
234
,
265
et T.A.
105
(1997-1998).
|
Droit pénal. |
MESDAMES, MESSIEURS,
La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la
prévention et à la répression des infractions sexuelles
ainsi qu'à la protection des mineurs s'est réunie le jeudi 14 mai
1998 au Sénat.
Elle a tout d'abord procédé à la désignation de son
bureau qui a été ainsi constitué :
-- M. Jacques Larché, sénateur,
vice-président ;
-- Mme Catherine Tasca, députée,
vice-présidente.
La Commission a ensuite désigné :
-- M. Charles Jolibois, sénateur,
-- Mme Frédérique Bredin, députée,
respectivement rapporteurs pour le Sénat et pour l'Assemblée
nationale.
M. Jacques Larché,
président, a tout d'abord
souligné que le texte examiné était
considéré comme utile et important par chacune des deux
assemblées. Il a estimé qu'une disposition, à savoir
l'introduction d'une répression spécifique du bizutage,
paraissait tout à fait redondante au Sénat, le droit actuel
permettant de réprimer les faits en cause. Il a souhaité que la
commission examine d'abord les dispositions considérées comme
utiles par les deux assemblées.
Mme Catherine Tasca
, vice-présidente, a fait valoir que toutes
les dispositions du texte en discussion étaient sérieuses et
utiles.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a présenté les dispositions du projet de loi restant
en discussion. Elle a indiqué que l'Assemblée nationale
était très attachée à certains points,
considérant cependant que les désaccords devraient pouvoir
être surmontés. Elle a rappelé que l'Assemblée
nationale n'avait pas souhaité introduire une durée trop longue
du suivi socio-judiciaire, compte tenu du caractère expérimental
de ce dispositif. Elle a estimé utile que le juge de l'application des
peines propose très régulièrement aux personnes
condamnées de recevoir des soins, le projet de loi ayant notamment pour
objectif la réinsertion des personnes condamnées. Elle a
également insisté sur la nécessité de
compléter la définition du délit de harcèlement
sexuel. A propos des dispositions relatives à la motivation des
classements sans suite et à la notification de ces classements par
écrit, elle a observé que le Parlement pouvait saisir l'occasion
d'améliorer certaines dispositions de procédure pénale
sans attendre leur application générale à l'occasion des
textes relatifs à la réforme de la justice. Elle a enfin fait
valoir que l'Assemblée nationale était très
attachée à la nécessité de rendre
systématiques les enregistrements audiovisuels des dépositions
des victimes, afin de protéger au maximum l'enfant en ne lui imposant
pas de multiples auditions, y compris devant la juridiction de jugement.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a souligné
que les deux assemblées étaient déjà parvenues
à un texte commun sur les principes fondant cette réforme. Il a
estimé que nombre de désaccords portaient sur des questions de
procédure ou de durée des peines et étaient susceptibles
d'être surmontés. Il a fait valoir que les deux chambres
s'opposaient surtout sur le bizutage, la modification de la définition
du harcèlement sexuel et les articles relatifs au classement sans suite,
toutes ces dispositions sortant de l'objectif initial du texte.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a estimé qu'il convenait de rechercher un accord en
respectant l'équilibre du projet de loi.
M. Jacques Larché
, président, a fait valoir qu'aucun des
sujets restant à débattre n'était susceptible de porter
atteinte à l'équilibre général du texte.
La commission mixte paritaire a alors examiné les dispositions restant
en discussion.
A propos de l'
article premier
,
M. Charles Jolibois
, rapporteur
pour le Sénat, a indiqué que le Sénat avait
souhaité qualifier les mesures imposées dans le cadre du suivi
socio-judiciaire de mesures de contrôle et d'aide parce que ces termes
étaient déjà employés dans le code pénal.
Evoquant la durée du suivi socio-judiciaire, il a souligné que
les traitements actuellement administrés aux délinquants sexuels
n'étaient pas curatifs et que leurs effets cessaient lorsqu'on les
arrêtait. Il a ajouté qu'il serait utile de permettre au juge
d'imposer au condamné une longue période de suivi
socio-judiciaire, afin de l'inciter à ne pas prononcer des peines
d'emprisonnement trop lourdes par rapport à l'infraction commise. Il en
a déduit que les durées de dix ans en cas de délit et de
vingt ans en cas de crime, proposées par le Sénat, étaient
favorables à la protection de la société et ne
pénalisaient pas la personne condamnée.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a tout d'abord souligné que l'Assemblée nationale
avait proposé d'employer les termes d'assistance et de surveillance afin
de bien marquer le caractère entièrement novateur du dispositif.
A propos de la durée du suivi socio-judiciaire, elle a observé
que parmi les mesures qui pouvaient être imposées figuraient,
outre des soins, des mesures privatives de liberté, soulignant qu'il
était dès lors préférable de ne pas prévoir
des durées trop longues. Elle a convenu que les soins chimiques
n'avaient pas d'effet curatif, mais a rappelé que les soins
psychiatriques pouvaient en avoir. Elle a enfin insisté sur le
caractère expérimental de ce dispositif, faisant valoir que la
durée maximum du suivi socio-judiciaire pourrait être
allongée ultérieurement par le législateur.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a alors fait
valoir que le juge de l'application des peines pourrait toujours décider
pendant la période de suivi socio-judiciaire de réduire celle-ci,
quelle que soit la durée fixée initialement.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a observé que les mesures de relèvement étaient
rares et que faire reposer sur le juge de l'application des peines le soin de
prononcer régulièrement des relèvements de condamnations
modifiait quelque peu l'esprit du texte. Elle a insisté sur le fait que
le texte avait d'abord pour objectifs de prévenir la récidive et
de faciliter la réinsertion des personnes condamnées.
M. Jean-Jacques Hyest
a estimé que la solution
préconisée par le Sénat était conforme à
l'échelle des peines. Il a souligné que celle-ci avait beaucoup
été augmentée au cours des années récentes
et que la proposition du Sénat était intéressante en ce
qu'elle permettrait, dans certains cas, de prononcer une peine courte et
d'ordonner un suivi socio-judiciaire long.
M. Jacques Bimbenet
a fait valoir que la rédaction du
Sénat permettrait plus sûrement d'éviter la récidive
que celle de l'Assemblée nationale.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a souligné que les durées
proposées par l'Assemblée nationale offraient une marge
suffisante au juge et que des progrès médicaux pourraient
permettre de rendre plus efficaces les soins administrés aux
condamnés.
M. Pierre Albertini
a constaté que le dispositif
créé était profondément novateur et qu'il devrait
faire l'objet d'une évaluation approfondie. Il a estimé que la
rédaction du Sénat n'imposait pas au juge d'ordonner un suivi
socio-judiciaire très long, mais qu'elle lui offrait simplement cette
possibilité.
M. Jacques Larché
, président, a alors proposé que
la commission retienne la rédaction de l'Assemblée nationale pour
la qualification des mesures et celle du Sénat sur la durée du
suivi socio-judiciaire. Il a estimé qu'une telle solution marquerait la
particularité du régime instauré comme le souhaitait
l'Assemblée nationale.
Mme Catherine Tasca
, vice-présidente, a indiqué qu'on ne
pouvait faire de pronostic sur l'efficacité du dispositif, qui avait
pour objectif de protéger la société tout en donnant une
chance au condamné. Elle a souhaité que le suivi socio-judiciaire
ne soit pas purement et simplement assimilé à une peine et a
déclaré qu'à cet égard le choix de
l'Assemblée nationale quant aux termes employés pour
désigner les mesures de suivi n'était pas neutre.
M. Jean-Luc Warsmann
s'est prononcé en faveur de la durée
proposée par le Sénat. Il a remarqué qu'une durée
de vingt ans en cas de crime ne paraissait pas choquante, soulignant que le
juge pourrait revenir pendant la durée du suivi sur les mesures
privatives de liberté.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, s'est déclaré prête à accepter la
proposition de M. Jacques Larché, président, dès lors que
les travaux parlementaires préciseraient très clairement le
caractère spécifique du suivi socio-judiciaire, dont l'objectif
est d'éviter la récidive et de faciliter la réinsertion du
condamné.
La commission mixte paritaire a adopté pour le suivi socio-judiciaire la
qualification de mesures de " surveillance et d'assistance " et les
durées maximales de dix ans pour les délits et de vingt ans pour
les crimes.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a ensuite
évoqué la durée de la peine qui pourrait être
prononcée en cas de non-respect du suivi socio-judiciaire. Il a
souligné que le Sénat proposait cinq ans en cas de délit
comme en cas de crime afin d'éviter qu'un condamné puisse choisir
de ne pas respecter le suivi socio-judiciaire en préférant une
peine d'emprisonnement moins longue.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a insisté sur la nécessité de dissocier les
peines prononcées en cas de délit et en cas de crime. Elle a
souhaité que les sanctions pénales ne soient pas
aggravées, l'objectif du texte n'étant pas celui-là.
La commission mixte paritaires a alors adopté les durées de deux
ans en cas de délit et de cinq ans en cas de crime.
A propos des expertises médicales mentionnées aux
articles 1er
et 5
du projet de loi,
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le
Sénat, a observé qu'il était inutile de préciser,
comme le proposait l'Assemblée nationale, que l'expertise était
réalisée par deux experts lorsque les circonstances de l'affaire
ou la personnalité de la personne poursuivie le justifiaient, dans la
mesure où cela était déjà possible.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a convenu qu'il était difficile de faire
référence à la personnalité de la personne
poursuivie avant que l'expertise ait eu lieu.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a estimé que, dans une matière
aussi grave, l'expertise par deux experts devrait être imposée
dans tous les cas.
La commission mixte paritaire a décidé de supprimer cette
précision dans le texte proposé pour les articles 131-36-2 du
code pénal, 763-5 et 763-8 du code de procédure pénale.
A propos de l'
article
5
,
M. Charles Jolibois
, rapporteur
pour le Sénat, a évoqué la question de la
périodicité des rappels à faire par le juge au
condamné de la possibilité qui lui est offerte de se faire
soigner. Il a souligné que le Sénat avait
préféré un an plutôt que six mois afin de ne pas
surcharger les juges de l'application des peines, mais qu'il ne s'agissait pas
d'une position de principe, le juge pouvant en tout état de cause
multiplier les rappels au-delà de l'obligation légale.
Mme Catherine Tasca
, vice-présidente, a souligné que le
renouvellement fréquent de l'offre de soins était conforme
à l'objectif d'assistance et de prévention du projet de loi.
La commission mixte paritaire a alors adopté la durée de six
mois.
Sur le texte proposé pour l'article 763-10 du code de procédure
pénale,
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le
Sénat, a indiqué que le Sénat avait souhaité que,
lorsque la mesure de suivi concernait des mineurs délinquants, le
dessaisissement du tribunal des enfants ne soit pas automatique dès que
la personne concernée atteignait l'âge de 21 ans, afin
d'éviter qu'un changement de juge intervienne en fin de peine.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, s'est déclarée sensible à la
préoccupation du Sénat et a proposé de rédiger le
texte en prévoyant que le juge des enfants, le tribunal pour enfants et
la chambre spéciale des mineurs sont compétents
" jusqu'à la fin de la mesure de suivi socio-judiciaire, sauf si le
juge des enfants se dessaisit au profit du juge de l'application des
peines ".
La commission mixte paritaire a adopté cette proposition.
Abordant l'
article
6
du projet de loi,
M. Charles
Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a indiqué qu'à
l'article L. 355-33 du code de la santé publique, le Sénat avait
estimé préférable que la liste sur laquelle serait choisie
le médecin coordonnateur soit établie par le procureur
plutôt que par le préfet.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a rappelé que cette mission revenait
déjà au procureur dans d'autres domaines, en particulier en
matière de tutelle.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a souligné que le médecin coordonnateur allait suivre
le malade pendant un temps très long et que l'administration d'Etat,
responsable de la santé publique, était plus compétente
que le procureur pour établir cette liste. Elle a proposé que
celle-ci soit établie par le préfet sur avis conforme du
procureur.
Mme Catherine Tasca
, vice-présidente, a observé que
l'administration chargée de la santé était sans doute la
mieux placée pour établir une liste de médecins.
M. Jacques Larché
, président, a remarqué que
l'établissement d'une telle liste n'entrait pas dans les
compétences du préfet et qu'en pratique il n'établirait
jamais cette liste lui-même.
La commission mixte paritaire a décidé de donner cette
compétence au procureur.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a alors
évoqué la question du choix du médecin traitant et
estimé que la solution proposée par l'Assemblée nationale
pouvait conduire à des blocages si le malade et le médecin
coordonnateur ne parvenaient pas à un accord.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a souligné que le médecin coordonnateur serait le
médecin référent et qu'il était souhaitable de lui
permettre de récuser des médecins, compte tenu de la
personnalité des malades concernés et de la
spécificité des traitements à mettre en oeuvre.
La commission mixte paritaire a décidé qu'en cas de
désaccord persistant sur le choix du médecin traitant, celui-ci
serait désigné par le juge de l'application des peines
" après avis du médecin coordonnateur ".
A propos du texte proposé pour l'article L.355-34 du code de
procédure pénale,
Mme Frédérique Bredin
,
rapporteur pour l'Assemblée nationale, a indiqué que
l'Assemblée nationale n'avait pas souhaité alourdir la
procédure en permettant au médecin traitant d'avoir accès
à toutes les pièces du dossier.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a fait valoir que
le Sénat avait souhaité ouvrir cette possibilité, dans la
mesure où le médecin était tenu par un secret
professionnel très fort.
La commission mixte paritaire a accepté la possibilité
donnée au médecin traitant d'avoir accès à toutes
les pièces du dossier.
A l'
article 7
du projet de loi modifiant la définition du
harcèlement sexuel,
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le
Sénat, a souligné que celui-ci était un délit
récent dont la définition avait été adoptée
de manière consensuelle. Il a estimé que la mention des
" pressions de toute nature " ajoutée par l'Assemblée
nationale ne définissait pas suffisamment l'infraction et revenait
à donner un pouvoir d'appréciation considérable au juge.
Il a fait valoir qu'une telle évolution était contraire aux
principes constitutionnels spécifiques au droit pénal que le
législateur avait souhaité respecter lors de la réforme du
code pénal.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a souligné que la rédaction de l'Assemblée
nationale avait notamment pour but d'harmoniser les définitions existant
dans le code pénal et dans le code du travail. Elle a observé que
cet article 7 n'était pas sans rapport avec le projet de loi, qui
concerne les infractions sexuelles. Elle a ajouté que, dans certains
cas, les notions d'ordres, de menaces et de contraintes n'étaient pas
suffisantes pour poursuivre.
Mme Catherine Tasca
, vice-présidente, a observé qu'il y
avait parfois des rapports d'autorité ou de dépendance affective
entre deux personnes, et que la notion de pressions permettrait
d'appréhender ce type de situations.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a souligné
que le législateur devait définir les éléments
constitutifs d'une infraction pénale et qu'il ne pouvait être
question de donner au juge une marge d'appréciation sans limites. Il a
estimé que certains comportements devaient à l'évidence
être sanctionnés dans le cadre du droit du travail, mais n'avaient
pas vocation à donner lieu à des poursuites pénales. Il a
ajouté que si la définition devenait trop générale,
le contrôle par la Cour de cassation deviendrait impossible.
M. Jean-Jacques Hyest
a estimé que le législateur devait
envisager de modifier le code pénal s'il estimait que la jurisprudence
avait interprété certaines dispositions de manière
erronée, mais que tel ne semblait pas être le cas. Il a
observé que si l'on alignait systématiquement les dispositions du
code pénal sur celles du code du travail, on perdrait de vue la
spécificité du droit pénal.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a mis l'accent sur les relations complexes qui existent souvent
entre la victime et l'auteur de l'infraction. Elle a fait valoir que certaines
situations n'étaient pas couvertes par la rédaction actuelle.
M. Jacques Larché
, président, a indiqué que
certains textes pénaux faisaient référence à
l'autorité d'une personne sur une autre et que cette notion
d'autorité était claire, contrairement à celle de
pressions de toute nature. Il a demandé si des cas précis
pouvaient être mentionnés, justifiant la modification
proposée.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a fait valoir qu'une rédaction
identique du code pénal et du code du travail présentait le
risque que le pénal ne tienne les prud'hommes en l'état, ces
derniers attendant que la juridiction pénale ait constaté
l'infraction avant de se prononcer sur une indemnisation éventuelle.
M. Pierre Albertini
a estimé qu'il était souhaitable de
faire confiance aux juges.
M. Jacques Larché
, président, et
M. Charles
Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, ont insisté pour
éviter toute confusion entre la définition de l'infraction
pénale et l'indemnisation par les conseils de prud'hommes.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a alors proposé de faire référence à des
" pressions graves " en soulignant que de nombreuses femmes
percevaient parfaitement ce que pouvaient recouvrir ces pressions dans le monde
professionnel.
La commission mixte paritaire a alors adopté l'article 7 dans cette
rédaction.
La commission a alors examiné, par priorité, à la demande
du rapporteur pour le Sénat, l'
article
10
relatif à
la création d'un délit réprimant le bizutage,
adopté par l'Assemblée nationale et supprimé par le
Sénat.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a proposé
de rédiger l'article 225-16-1 du code pénal de la
manière suivante : "
Hors les cas de violences, de menaces
ou d'atteintes sexuelles, le fait pour une personne d'amener autrui, contre son
gré ou non, à subir ou à commettre des actes humiliants ou
dégradants lors de manifestations ou de réunions liées aux
milieux scolaire et éducatif est puni de six mois d'emprisonnement et de
50.000 F d'amende
". A l'initiative de
Mme Catherine
Tasca
, vice-présidente, cette rédaction a été
étendue au milieu socio-éducatif afin de couvrir certaines
structures telles que les centres aérés.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a souhaité que les travaux
parlementaires précisent bien que cette rédaction incluait les
écoles militaires.
M. Jean-Luc Warsmann
a déclaré qu'il ne pouvait accepter
un tel texte, la suppression pure et simple de cette disposition lui paraissant
préférable.
La commission mixte paritaire a alors adopté, compte tenu de la nouvelle
rédaction de l'article 225-16-1, l'article 10 du projet de loi.
Evoquant l'
article
9
du projet de loi,
M. Charles
Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a rappelé que le
Sénat avait estimé que la circonstance aggravante liée au
fait que la victime d'une infraction sexuelle avait été mise en
contact avec son agresseur par la voie d'un réseau de
télécommunications ne devait s'appliquer qu'aux victimes
mineures. Il a souligné que ce contact pouvait avoir lieu par
téléphone et qu'il paraissait excessif de
généraliser la circonstance aggravante. Il a ajouté qu'il
était très difficile de contrôler les réseaux de
télécommunications et qu'une réflexion globale devait
être menée sur cette question.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a fait valoir que le minitel pouvait permettre à l'agresseur
d'entrer facilement en contact avec sa victime. Elle a souligné que tout
contrôle a priori était impossible, les échanges
étant instantanés, et qu'il convenait de renforcer la menace
d'une sanction lourde. Elle a estimé que l'on pouvait certes attendre
l'intervention d'une loi générale sur les
télécommunications, mais qu'il pouvait être
préférable d'agir ponctuellement.
La commission mixte paritaire a accepté l'application de la circonstance
aggravante aux infractions concernant des victimes majeures.
Sur l'
article
18 A
du projet de loi,
M. Charles Jolibois
,
rapporteur pour le Sénat, s'est déclaré très
sceptique sur la proposition de l'Assemblée nationale relative aux
conditions dans lesquelles les associations de lutte contre les violences
sexuelles pourraient se constituer partie civile. Il a estimé difficile
de demander à un mineur, même âgé de plus de 13 ans,
de donner son accord à une démarche directe et a estimé
que cet accord devait être donné par le représentant
légal.
M. Jacques Larché
, président, a constaté la
multiplication des interventions autour de l'enfant et la difficulté
d'interroger celui-ci sur une question de ce type.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a souligné que cette disposition tendait à renforcer
les droits de l'enfant.
La commission mixte paritaire a souhaité que l'accord soit donné
par le représentant légal pour tous les mineurs.
Abordant alors les
articles 18 quater
et
18 quinquies
du projet
de loi, insérés par l'Assemblée nationale et
supprimés par le Sénat,
M. Charles Jolibois
,
rapporteur pour le Sénat, a estimé que la modification des
règles du classement sans suite nécessitait une réflexion
de principe approfondie qui ne pouvait être menée dans le cadre
d'un texte relatif aux seules infractions sexuelles.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a jugé préférable de
prévoir immédiatement la motivation des classements sans suite
ainsi que leur notification par écrit sans attendre les textes relatifs
à la réforme de la justice.
M. Jacques Larché
, président, a souligné que
l'idée de motiver les classements sans suite était lourde de
conséquences et qu'une telle question ne pouvait être
abordée de manière générale au détour de ce
projet de loi. Il a observé que ces articles pouvaient mettre en cause
le fonctionnement de l'ensemble du parquet.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a fait valoir qu'il s'agissait d'un élément essentiel
de la protection des mineurs, soulignant que certaines victimes ignoraient trop
longtemps le sort réservé aux procédures les concernant.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a remarqué
que le projet de loi contenait de nombreuses dispositions destinées
à protéger la victime mineure, que celle-ci pouvait se constituer
partie civile et qu'elle bénéficiait d'une assistance.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a observé que la motivation succincte
existait déjà dans les dossiers, mais que les parties ne
pouvaient en être informées qu'en prenant un avocat.
Mme Catherine Tasca
, vice-présidente, a alors proposé que
la commission adopte l'article 18 quinquies relatif à certaines
infractions commises sur des mineurs et qu'elle maintienne la suppression de
l'article 18 quater.
La commission mixte paritaire a accepté cette solution et a
décidé de compléter l'article 18 quinquies en
précisant, à la demande de
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour
l'Assemblée nationale, que l'avis de classement devait être
notifié par écrit.
A l'
article 19
du projet de loi,
M. Charles Jolibois
, rapporteur
pour le Sénat, a indiqué à propos du texte proposé
pour l'article 706-50 du code de procédure pénale, qu'il
n'était pas utile de préciser que le procureur appréciait
l'opportunité de requérir du juge des enfants l'application des
dispositions du code civil relatives à l'assistance éducative. La
commission mixte paritaire a adopté ce point de vue.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a indiqué
que le texte proposé pour l'article 706-52 du code de procédure
pénale par l'Assemblée nationale avait été
supprimé par le Sénat, dans la mesure où il était
évident que le juge ne devait procéder qu'aux auditions
nécessaires.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a souligné qu'il s'agissait d'essayer de modifier certaines
habitudes afin de protéger au maximum les mineurs victimes. Elle a
ajouté que, parfois, la parole d'un enfant se fragilisait au fil
d'auditions successives et que ces procédures peu faites pour des
enfants pouvaient être difficiles à supporter par eux.
M. Jean-Luc Warsmann
a estimé que le problème
résidait dans les multiples auditions pratiquées avant le
début de l'instruction plus que dans celles organisées par le
juge d'instruction.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a rappelé qu'il fallait protéger
l'enfant, mais qu'il fallait également préserver les droits de la
défense. Il a souligné que le juge d'instruction devait pouvoir
procéder à toutes les auditions et confrontations
nécessaires.
M. Jacques Larché
, président, a souligné que cette
disposition partait du présupposé que le juge d'instruction
pourrait faire des confrontations inutiles à la manifestation de
vérité. Il a ajouté qu'il serait difficile de
démontrer qu'une audition n'était pas strictement
nécessaire et qu'en l'absence de sanction cette disposition n'aurait
aucune portée.
La commission mixte paritaire a décidé de maintenir la
suppression du texte proposé pour l'article 706-52.
Dans le texte proposé pour l'article 706-53 du code de procédure
pénale, la commission a adopté le premier alinéa dans la
rédaction proposée par l'Assemblée nationale, mais en
supprimant la mention " autant que possible " ;
Mme
Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a indiqué que, comme le souhaitait le Sénat,
l'enregistrement ne ferait en tout état de cause pas obstacle à
des auditions ou confrontations ultérieures du mineur, même si
cette précision ne figurait pas dans la loi.
Au cinquième alinéa,
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour
le Sénat, et
M. Michel Dreyfus-Schmidt
ont souligné
que la transcription d'un enregistrement ne correspondrait jamais au contenu de
l'enregistrement lui-même et qu'il existerait un procès-verbal de
l'audition des mineurs victimes.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a fait valoir que le projet de loi permettrait de faire
évoluer certaines pratiques de manière expérimentale,
à partir du droit des victimes mineures. Elle a ajouté que cette
transcription serait plus complète que le procès-verbal.
M. Jacques Larché
, président, a souligné
l'inévitable décalage entre l'enregistrement et sa transcription
écrite.
La commission mixte paritaire a décidé de supprimer la
possibilité d'une transcription écrite de l'enregistrement.
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a alors
évoqué l'utilisation de l'enregistrement devant la juridiction de
jugement, souhaitée par l'Assemblée nationale et refusée
par le Sénat, pour souligner qu'une telle possibilité modifierait
profondément la nature de l'audience et remettrait en cause le principe
de l'oralité des débats.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a souligné qu'il ne s'agissait que d'une possibilité
qui pourrait parfois éviter de soumettre le mineur victime à un
nouvel interrogatoire.
M. Jacques Larché
, président, s'est interrogé sur
les réactions que pourraient avoir des jurés face à un tel
document. Il a remarqué que l'enregistrement daterait dans certains cas
de plusieurs mois et que des faits nouveaux seraient peut-être intervenus
entre temps. Il a estimé qu'une telle disposition remettait en cause les
droits de la défense.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a souligné le caractère traumatisant que pouvait avoir
pour un enfant le fait de témoigner dans un procès et a
cité le cas d'une victime de cinq ans pour laquelle les parents
n'avaient pas demandé que l'audience se tienne à huis clos. Elle
a ajouté qu'il paraissait conforme aux évolutions de notre
société que les techniques modernes puissent être
utilisées dans le cadre de procédures judiciaires.
Mme Catherine Tasca
, vice-présidente, a rappelé que le but
était d'épargner l'enfant.
M. Jacques Larché
, président, et
M. Charles
Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, ont souligné que l'enfant
ne serait pas nécessairement épargné puisque la diffusion
de l'enregistrement devant la juridiction de jugement n'interdirait pas la
comparution, mais qu'en revanche le Président de la juridiction pourrait
être tenté de refuser la comparution après la diffusion de
l'enregistrement, ce qui créerait un déséquilibre
très important au détriment de la défense.
M. Michel
Dreyfus-Schmidt
a rappelé que le président ne pouvait pas
lire à l'audience la déposition écrite avant la fin de la
déposition orale.
La commission mixte paritaire a décidé d'écarter
l'utilisation de l'enregistrement devant la juridiction de jugement.
Après que
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour
l'Assemblée nationale, eut souligné que cette formalité
risquait de poser des problèmes pratiques, la commission a
néanmoins décidé que la consultation de la copie de
l'enregistrement vidéo par les parties, les avocats ou les experts ne
pourrait être faite qu'en présence du juge d'instruction ou d'un
greffier. Elle a également décidé que l'enregistrement
serait détruit cinq ans après l'extinction de l'action publique.
La commission mixte paritaire a ensuite adopté l'
article
19
bis
du projet de loi et a décidé la suppression de
l'
article 31 bis
.
A propos de l'
article
31 quater
,
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a estimé très grave qu'on puisse apporter la preuve d'un fait
diffamatoire prescrit, amnistié ou ayant fait l'objet d'une
révision, même dans des matières aussi sensibles que celles
visées par le projet de loi. Il a souligné que le projet de loi
tendait à allonger la durée de la prescription afin de
libérer la parole et que cet allongement de la durée de la
prescription devait permettre de régler les problèmes qui se
posaient.
Mme Frédérique Bredin
, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, a indiqué que certaines personnes ayant raconté au
cours d'émissions de télévision les sévices
qu'elles avaient subi dans leur enfance avaient été poursuivies
et condamnées pour diffamation, faute d'avoir le droit de faire la
preuve du fait prescrit.
M. Jacques Larché
, président,
M. Charles Jolibois
,
rapporteur pour le Sénat, et
M. Michel Dreyfus-Schmidt
ont
souligné que les dispositions générales relatives aux
effets de la prescription, de l'amnistie et de la révision
étaient nécessaires à la paix publique.
La commission mixte paritaire a adopté ce point de vue.
A propos de l'
article 32 bis
du projet de loi relatif à la fin de
l'hospitalisation d'office des délinquants en état de
démence,
M. Charles Jolibois
, rapporteur pour le Sénat, a
estimé difficile de faire intervenir, comme le proposait
l'Assemblée nationale par cet article additionnel, un magistrat dans une
procédure essentiellement médicale.
M. Jean-Luc Warsmann
s'est déclaré très
attaché à cette disposition. Il a fait valoir qu'il
n'était pas anormal qu'un magistrat intervienne, dans la mesure
où, si les personnes concernées n'avaient pas été
déclarées en état de démence, elles auraient dans
bien des cas encouru de lourdes peines d'emprisonnement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt
a estimé que l'article L.348-1 du code
de la santé publique prévoyait l'intervention de deux psychiatres
extérieurs à l'établissement, ce qui paraissait
adapté à la décision à prendre.
La commission mixte paritaire a décidé de supprimer
l'article 32 bis du projet de loi.
*
* *
La commission mixte paritaire a ensuite adopté l'ensemble du texte élaboré par elle et figurant à la suite du tableau comparatif ci-après.