N° 365
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 1er avril 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN DEUXIÈME LECTURE, d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail,
Par M. Louis SOUVET,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean-Pierre Fourcade, président ; Jacques Bimbenet, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Bernard Seillier, Louis Souvet, vice-présidents ; Jean Chérioux, Charles Descours, Roland Huguet, Jacques Machet, secrétaires ; François Autain, Henri Belcour, Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Nicole Borvo, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Mme Dinah Derycke, M. Jacques Dominati, Mme Joëlle Dusseau, MM. Alfred Foy, Serge Franchis, Alain Gournac, Louis Grillot, André Jourdain, Jean-Pierre Lafond, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain , Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marquès, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Sosefo Makapé Papilio, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale (11
ème législ.)
:
Première lecture :
512, 652
et T.A.
81.
Deuxième lecture :
765
,
774
et T.A.
114.
Sénat :
Première lecture
: 286, 306
et T.A.
89
(1997-1998).
Deuxième lecture :
363
(1997-1998).
|
Travail. |
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Réunie le
mercredi 1
er
avril 1998
,
sous la
présidence de M. Jean-Pierre Fourcade,
président,
la commission a procédé à
l'examen, en deuxième lecture, du rapport de M. Louis Souvet
sur
le
projet de loi n° 363
(1997-1998), adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture
,
d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de
travail
.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que le
projet de
loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps
de travail, adopté le 10 février par l'Assemblée
nationale en première lecture, avait été
profondément remanié par le Sénat qui avait fait
prévaloir le dialogue social et une réduction
négociée et équilibrée de la durée effective
du travail.
Il a considéré que, dans un contexte d'urgence de fait,
l'Assemblée nationale avait choisi de revenir pour l'essentiel au texte
adopté par elle, en première lecture, y compris s'agissant de la
définition du temps de travail, alors que cette dernière
comporte, de l'aveu même du Gouvernement et de la commission saisie au
fond, bien des incertitudes.
Abordant l'examen des différents articles dans le texte adopté
par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, le rapporteur a
observé que le Gouvernement avait insisté sur la portée
politique de l'article premier dans sa réponse aux critiques qui avaient
pu lui être opposées ; il a constaté que l'abaissement
de la durée légale du travail effectif à 35 heures
à compter du 1
er
janvier 2002 et à compter du
1
er
janvier 2000 pour les entreprises de plus de vingt
salariés avait été rétabli par l'Assemblée
nationale malgré toutes les réserves qui avaient
été avancées par les différents intervenants. Il a
constaté également que l'Assemblée nationale avait
rétabli quasiment à l'identique les articles 2 et 3.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que l'Assemblée
nationale avait décidé de supprimer l'article 3 bis
introduit par le Sénat qui posait le principe d'une compensation
intégrale par l'Etat à la sécurité sociale des
exonérations de charges, conformément à l'article 5
de la loi du 25 juillet 1994, ainsi que l'article 3 ter,
introduit par le Sénat, relatif à l'application de la loi de
Robien aux entreprises du bâtiment et des travaux publics et qu'elle
avait rétabli intégralement son texte concernant les dispositions
restreignant le recours aux heures supplémentaires (article 5) et
au travail à temps partiel (articles 6 et 7).
Il a estimé que, dans ces conditions, le dispositif relatif à
l'abaissement de la durée du travail conservait ses principaux
défauts et que l'Assemblée nationale n'avait pas voulu saisir
l'opportunité de la deuxième lecture pour le rendre plus
compatible avec le fonctionnement d'une économie de marché
moderne.
Le rapporteur a ensuite considéré que la " chronique "
de l'article 4 bis du projet de loi, complétant la
définition du temps de travail effectif à l'article L. 212-4 du
code du travail, laissait penser que le Gouvernement avait ouvert une
" boîte de Pandore ", le projet de loi associant
désormais deux démarches : la réduction de la durée
légale et l'extension des activités ou des périodes
considérées comme temps de travail, c'est-à-dire une
réduction supplémentaire de la durée du travail productif.
Le rapporteur a constaté que l'article 4 bis avait
été ainsi au coeur du débat de la seconde lecture du
projet de loi à l'Assemblée nationale. Il a estimé que cet
article posait un véritable problème car il reprenait une
définition très extensive de la durée du travail effectif
susceptible d'évoluer étant donné son caractère
général.
Il a considéré que cette rédaction était une source
d'insécurité juridique qui pouvait constituer une menace pour
l'emploi et fragiliser les contrats de travail. Il a déclaré
qu'en définitive, l'Assemblée nationale avait
décidé, dans la confusion, de revenir au texte qu'elle avait
adopté en première lecture, dans l'attente
d'éclaircissements et en dépit de l'avis défavorable du
Gouvernement.
Le rapporteur a estimé au total que, loin de lever les
inquiétudes qui avaient surgi lors de la première lecture, le
débat de deuxième lecture à l'Assemblée nationale
semblait les avoir confirmées, voire amplifiées. Il a
mentionné à ce titre les incertitudes concernant l'impact du
projet de loi sur l'emploi, les incertitudes budgétaires concernant le
coût global de l'incitation financière et les incertitudes
juridiques concernant l'impact d'une baisse du salaire consécutive
à une réduction de la durée du travail sur les contrats de
travail individuels.
Le rapporteur s'est attaché en particulier à mettre en
évidence les incertitudes concernant la multiplicité des salaires
minima interprofessionnels de croissance (SMIC), le Gouvernement continuant
à déclarer vouloir conjuguer un SMIC horaire en l'état et
une rémunération mensuelle minimale correspondant à
l'actuel SMIC mensualisé ; il a fait observer que, dans ces conditions,
les salariés payés au SMIC qui passeraient à
35 heures seraient payés 39 heures.
Le rapporteur a considéré que les inquiétudes des
entreprises sur la compatibilité des 35 heures avec le
marché unique et l'euro n'avaient pas été levées
par le Gouvernement et que la question d'une extension des 35 heures
à la fonction publique n'avait pas reçu de réponse claire.
Le rapporteur a déclaré que toutes ces incertitudes, auxquelles
il fallait ajouter les craintes liées à la définition de
la durée légale du travail effectif, l'avaient amené
à proposer de rétablir globalement le texte adopté par le
Sénat en première lecture.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a ainsi proposé à la
commission de supprimer l'article premier qui prévoit l'abaissement de
la durée légale hebdomadaire du travail.
Il a proposé d'adopter un article additionnel après l'article
premier prévoyant un rapport sur les conséquences de
l'abaissement de la durée légale du travail sur le SMIC.
Il a proposé de rétablir l'article 2 qui invite à la
négociation et prévoit le principe d'une aide pour les
entreprises et certaines associations qui réduiraient la durée du
travail calculée en moyenne sur tout ou partie de l'année et
procéderaient à des embauches ou préserveraient des
emplois, ainsi que l'article 3 qui " reprofile " la
loi de
Robien. Le rapporteur a déclaré que le dispositif proposé
retenait le principe d'une aide non pas forfaitaire mais proportionnelle aux
salaires afin de ne pas pénaliser l'emploi qualifié,
l'exonération étant ainsi plafonnée, lissée,
limitée à cinq ans, plus incitative grâce à
l'introduction d'une date limite et plus facilement accessible quant aux
conditions posées pour les embauches.
Il a proposé à nouveau de réaffirmer le principe de la
compensation intégrale des exonérations de charges sociales et de
reprendre également une disposition adoptée par le Sénat
à l'initiative de M. Jean Arthuis permettant une application
complète de la loi de Robien aux entreprises du bâtiment et des
travaux publics.
Concernant l'important article 4 bis relatif à la durée
du travail effectif, il a proposé de revenir au texte adopté par
le Sénat en première lecture, qui reprenait littéralement
l'article 2 de la directive du 23 novembre 1993.
Le rapporteur a également proposé d'adopter une disposition
identique à l'amendement, fort opportun, adopté par la commission
des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée
nationale mais non appelé en séance publique, qui limitait le
champ d'application des articles 4 bis et 4 ter à celui
de la directive du 23 novembre 1993.
Il a proposé de supprimer l'article 5 qui contraint le recours aux
heures supplémentaires et de revenir sur l'ensemble des dispositions qui
limitaient le recours au travail à temps partiel (articles 6 et 7).
Concernant les bilans (articles 9 et 10), il a proposé de tirer à
nouveau les conséquences de la suppression de l'article premier et de
son refus d'envisager le développement des 35 heures dans la
fonction publique.
Le rapporteur a souligné que ses propositions visaient à nouveau
à faire en sorte que le projet de loi ne compromette ni le dialogue
social, ni l'équilibre des comptes publics, mais parvienne à la
fois à une réduction progressive du temps de travail effectif et
à une amélioration durable de l'emploi.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a constaté la difficulté
rencontrée pour définir la notion de temps de travail effectif au
regard de la multiplicité des situations et observé que le
dispositif proposé par le rapporteur à l'article 3 n'était
pas favorable aux bas salaires.
M. Guy Fischer
a noté que le rapporteur n'avait pas choisi de
s'opposer sans débat au projet de loi et a insisté sur le niveau
élevé des résultats enregistrés par les entreprises
permettant un effort supplémentaire en faveur de l'emploi.
M. Alain Vasselle
a rappelé les principales critiques
qu'encourait le projet du Gouvernement et s'est félicité des
propositions faites par le rapporteur ; rappelant son expérience de
rapporteur pour avis sur le projet de loi relatif à l'entrée et
au séjour des étrangers en France, il a fait part de son regret
que les propositions du Sénat, même d'ordre technique, soient
écartées systématiquement par le Gouvernement et
l'Assemblée nationale.
M. André Jourdain
a émis de forts doutes quant à
l'impact du projet de loi sur l'emploi ; il a estimé que le texte aurait
pour effet plus probable d'accroître la mécanisation et
l'automatisation.
M. Alain Gournac
s'est inquiété de la confusion et de la
légèreté qui ont marqué la discussion à deux
reprises à l'Assemblée nationale de l'article 4 bis du
projet de loi et a estimé que le texte du Gouvernement avait pour
premier effet de placer l'ensemble des partenaires sociaux dans une position
d'attente.
M. Serge Franchis
a déclaré qu'il était favorable
au partage du temps de travail mais que le texte du Gouvernement avait pour
effet de réduire le nombre d'heures travaillées, ce qui
était en contradiction avec l'objectif recherché.
M. Jean Chérioux
a souligné la situation spécifique
des cadres en matière de temps de travail.
Répondant aux intervenants,
M. Louis Souvet, rapporteur,
a
considéré qu'on ne pouvait entièrement s'en remettre
à la négociation collective et qu'il convenait d'adopter une
définition législative précise de la durée du
travail effectif.
Il a également considéré que l'objectif de ce texte sur la
réduction du travail n'était pas de favoriser le
développement d'emplois peu qualifiés, cette dernière
question relevant à l'évidence d'un autre dispositif. Il a par
ailleurs déclaré que la multiplicité des SMIC,
l'article 4 bis et les contraintes sur le temps partiel, introduits
par le Gouvernement, ne pourraient que pénaliser l'emploi peu
qualifié.
A l'issue du débat,
M. Jean-Pierre Fourcade, président
, a
souhaité formuler quatre observations.
Il a tout d'abord considéré que l'expérience du texte
" emploi jeunes " démontrait a posteriori que le
Gouvernement
avait tort de ne pas prendre en compte les propositions du Sénat,
puisqu'on observait un blocage de l'application sur le terrain du fait
notamment d'une absence de formation et d'encadrement.
Il a estimé que le débat sur la question des seuils était
dépassé depuis que M. Emile Zuccarelli, ministre de la
fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation, s'était référé au seuil de
250 salariés retenu par la recommandation de la commission
européenne du 13 avril 1996 pour la définition des petites et
moyennes entreprises.
M. Jean-Pierre Fourcade, président
, a déclaré que
l'ensemble des simulations prenait pour hypothèse une modération
salariale alors que, dans le même temps, le Gouvernement accordait aux
fonctionnaires des augmentations de salaires significatives. Il a
insisté sur cette contradiction en considérant que ce texte
était très défavorable aux salariés du secteur
privé.
M. Jean-Pierre Fourcade, président
, a enfin
considéré que la réduction du temps de travail
créait un problème spécifique pour les cadres. Il a
estimé que cette catégorie de personnel était
confrontée à une profonde transformation de l'exercice de son
activité, à travers une augmentation de la mobilité et
l'introduction de nouvelles méthodes de travail liées aux
nouvelles technologies. Il a déclaré qu'on ne pouvait par
conséquent leur appliquer le cadre rigide de ce projet de loi.
Abordant l'examen des articles, la commission, sur proposition de son
rapporteur, a adopté un amendement de suppression de
l'article
premier
et,
après l'article premier,
un amendement
créant un article additionnel prévoyant que le Gouvernement
présentera au Parlement un rapport établissant les
conséquences de la réduction du temps de travail sur la
rémunération mensuelle minimale des salariés.
Toujours sur proposition de son rapporteur, la commission a adopté
respectivement aux
articles 2, 3, 3 bis, 3 ter, 4 bis
,
cinq amendements tendant à revenir au texte voté par le
Sénat en première lecture.
Après l'article 4 ter
, la commission a adopté, sur
proposition de
M. Louis Souvet, rapporteur,
un amendement
créant un article additionnel prévoyant que les dispositions des
articles 4 bis et 4 ter ont pour champ d'application celui de la
directive européenne du 23 novembre 1993, ce qui revient à
exclure le secteur des transports routiers.
Egalement sur proposition de son rapporteur, la commission a adopté un
amendement de suppression de
l'article 5
.
Aux
articles 6, 7, 9 et 10
elle a, sur proposition de son rapporteur,
adopté quatre amendements tendant à rétablir le texte
voté en première lecture par le Sénat. Puis, elle a
adopté le projet de loi ainsi amendé.
Mesdames, Messieurs,
Le projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la
réduction du temps de travail, adopté le 10 février par
l'Assemblée nationale, a été profondément
remanié par le Sénat en première lecture le 4 mars dernier.
La Haute assemblée a souhaité, en effet, faire prévaloir
le dialogue social et une réduction négociée et
équilibrée de la durée effective du travail. Ce faisant,
elle s'est opposée à une baisse générale et
autoritaire de la durée légale du travail.
Cette dernière démarche lui a semblé en effet
néfaste pour la compétitivité des entreprises et par
conséquent pour l'emploi, dangereuse quant à ses
conséquences sur le SMIC, porteuse enfin de dérives
coûteuses quant à son extension probable à l'ensemble des
fonctions publiques.
Tout en renonçant à demander l'urgence sur le projet de loi, le
Gouvernement a souhaité hâter le déroulement du
débat puisqu'il a inscrit le texte à l'ordre du jour de
l'Assemblée nationale, en deuxième lecture dès le 24 mars.
Dans ce contexte d'urgence de fait, l'Assemblée nationale a choisi de
revenir pour l'essentiel au texte adopté par elle, en première
lecture, y compris s'agissant de la définition du temps de travail
effectif.
Quand bien même cette dernière disposition, introduite par
l'Assemblée nationale en première lecture et maintenue
ne
varietur
en deuxième lecture, comporte, de l'aveu même du
Gouvernement et de la commission saisie au fond, bien des incertitudes et, du
point de vue de votre rapporteur, des conséquences graves et non
maîtrisées.
Désormais, à l'intérieur d'une durée légale
du travail que le projet de loi ambitionne d'abaisser, la part du travail
productif serait elle-même réduite.
Face à ce constat, votre commission propose de rétablir le texte
voté en première lecture par le Sénat à l'issue
d'un débat qui a permis d'enrichir et de compléter les
propositions qu'elle avait elle-même formulées.
Elle souhaite, ce faisant, donner à l'Assemblée nationale la
possibilité de revenir sur les dispositions du projet de loi les plus
néfastes au dynamisme de notre économie.
I. LE TEXTE VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE MAINTIENT LES INCERTITUDES SUR LES 35 HEURES ET SUR LA DÉFINITION DE LA DURÉE DU TRAVAIL EFFECTIF.
A. L'ASSEMBLÉE NATIONALE EST REVENUE POUR L'ESSENTIEL AU TEXTE ADOPTÉ PAR ELLE EN PREMIÈRE LECTURE
Les débats qui ont eu lieu à l'Assemblée
nationale ont mis en évidence la cohérence du texte
sénatorial et le refus
a contrario
de se rapprocher d'une logique
d'abaissement de la durée du travail fondée sur le volontariat,
la souplesse et la progressivité.
L'ensemble des intervenants a reconnu que l'abaissement de la durée du
travail pouvait permettre dans certains cas la création d'emplois.
Toutefois, la majorité en a fait la principale mesure de sa politique de
l'emploi en insistant sur les vertus de la contrainte et de l'obligation mais
sans afficher d'objectifs chiffrés alors que l'opposition mettait en
exergue l'impact limité de ce dispositif, son coût et ses effets
pervers s'il devait reposer sur la contrainte.
A cet égard, le rétablissement de l'article premier a
concentré les critiques que n'a pas atténué l'introduction
d'un report de la date d'application de la nouvelle durée légale
aux entreprises qui auront franchi l'effectif de vingt salariés entre le
1
er
janvier 2000 et le 31 décembre 2001. L'ensemble des
amendements d'assouplissement, pourtant très mesurés,
déposés par l'opposition, a été repoussé par
le Gouvernement et la majorité. C'est donc une attitude intransigeante
qui l'a emporté.
Le principe d'un abaissement de la durée légale du travail
effectif à 35 heures à compter du 1
er
janvier 2002 et
à compter du 1
er
janvier 2000 pour les entreprises de plus de
vingt salariés est donc maintenu, ceci malgré toutes les
réserves qui ont été avancées par les
différents intervenants.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a rétabli quasiment à
l'identique les articles 2 et 3 en ajoutant simplement quelques
précisions ou en réparant des oublis. L'article 3 qui
définit le dispositif financier incitatif conserve les défauts
que lui a reconnus le Sénat :
- une aide forfaitaire qui pénalise l'emploi qualifié ;
- un dispositif permanent qui institue durablement des distorsions de
concurrence ;
- des incertitudes budgétaires sur le coût du dispositif ;
- des incertitudes juridiques sur l'avenir des contrats de travail
individuels ;
- une complexité accrue du fait de la multiplicité des
majorations.
L'Assemblée nationale a décidé de supprimer l'article 3
bis introduit par le Sénat qui posait le principe d'une compensation
intégrale par l'Etat à la sécurité sociale des
exonérations de charges, conformément à l'article 5 de la
loi du 25 juillet 1994. Cette suppression, si elle était maintenue,
constituerait une grave menace pour l'avenir des finances sociales.
L'Assemblée nationale a également supprimé l'article 3
ter, introduit par le Sénat, relatif à l'application de la loi de
Robien aux entreprises du bâtiment et des travaux publics.
L'Assemblée nationale a rétabli intégralement son texte
concernant les dispositions relatives au durcissement des conditions de recours
aux heures supplémentaires (art. 5) et au travail à temps
partiel (art. 6 et 7). Elle a également rétabli les rapports
(art. 9 et 10) dans leur rédaction votée par elle en
première lecture.
Dans ces conditions, le dispositif relatif à l'abaissement de la
durée du travail conserve ses principaux défauts,
l'Assemblée nationale n'ayant pas voulu saisir l'opportunité de
la deuxième lecture pour le rendre plus compatible avec le
fonctionnement d'une économie de marché moderne.