2. Le débat était paradoxalement le grand absent de la conférence nationale du 10 octobre
L'état des lieux économique et social de la
France distribué aux partenaires sociaux n'était manifestement
pas susceptible d'ouvrir un grand débat national sur les causes du
chômage français. Il semble qu'il ait eu pour fonction de poser
sur le papier le diagnostic gouvernemental pour mieux préparer l'annonce
de ses décisions unilatérales.
Dans ces conditions, votre rapporteur en est venu à s'interroger sur
l'intérêt de la Conférence nationale du 10 octobre.
La
possibilité d'un véritable débat national sur les causes
du chômage ayant été largement amoindrie par l'absence
d'analyse contradictoire, la réunion des partenaires sociaux autour du
Gouvernement apparaissait finalement comme devant être essentiellement
une opération de communication, ayant pour vocation d'habiller une
décision politique unilatérale du sceau de la concertation
.
Les acteurs sociaux semblent avoir été ainsi mis en scène
par le Gouvernement. On en veut pour preuve les déclarations du Premier
ministre qui a pu déclarer paradoxalement dans son intervention
d'ouverture de la Conférence qu'une loi lancera le mouvement des 35
heures et que le Gouvernement avait toute confiance dans l'action des
partenaires sociaux. Cette dialectique curieuse qui associe constamment des
propositions contradictoires amoindrit considérablement la
crédibilité du discours gouvernemental
8(
*
)
.
Le résultat de cette stratégie ne s'est pas fait attendre
puisqu'au soir de la Conférence, le patronat a fait part de son
opposition résolue alors que plusieurs syndicats de salariés
dénonçaient mezza voce la méthode employée pour
atteindre un objectif qui par ailleurs les satisfaisait, mais qu'ils auraient
souhaité pouvoir conduire et initier eux-mêmes.
Si l'on examine le résultat de la Conférence nationale du 10
octobre 1997 -l'annonce d'un abaissement de la durée légale du
travail à 35 heures- à l'aune des accords interprofessionnels du
31 octobre 1995, on constate une rupture de l'équilibre entre les
partenaires : les employeurs n'ont plus grand chose à négocier.
Par ailleurs, l'Etat se substitue à nouveau à des partenaires
sociaux qu'il juge défaillants, ceci au nom d'une tradition historique
d'intervention dans le champ social.
Paradoxalement, la décision du Gouvernement se présente donc
comme une rupture (du dialogue social) dans la continuité (de
l'intervention de l'Etat).