II. LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES
Service de soutien indispensable à l'activité
des forces, le service de santé des armées se situe, à
plusieurs titres, au coeur de la réforme des armées. Il est
touché de plein fouet par la professionnalisation, qui implique la
disparition de l'apport important en personnel médical jusqu'alors
fourni par le contingent. Il doit mener une profonde restructuration, qui se
traduit notamment par la fermeture de plusieurs établissements
hospitaliers. Enfin, sa participation croissante aux opérations
extérieures souligne la réorientation de ses missions vers le
soutien de la projection des forces.
La période de transition allant jusqu'en 2002 exige donc de profondes
mutations et s'avérera particulièrement délicate pour le
service de santé.
Dans ce contexte, les crédits afférents au service de
santé pour 1998 connaissent une
diminution brutale de près de
15 %,
tant en moyens de fonctionnement que d'équipement. Rendue
possible, aux yeux du gouvernement, par l'évolution des ressources
provenant de l'activité hospitalière et dont le service de
santé dispose par ailleurs grâce à un fonds de concours,
cette contraction importante des crédits budgétaires risque
cependant de pénaliser le service au moment où il traverse une
phase d'adaptation complexe.
A. UN SERVICE CONFRONTÉ À UNE PROFONDE MUTATION
L'évolution du service de santé au cours des prochaines années sera marquée par une mutation profonde perceptible au niveau des effectifs, de l'organisation et des missions.
1. Les effectifs : la nécessité d'une politique active de recrutement
La loi de programmation militaire prévoit une
diminution de 27 % des effectifs du service de santé des armées,
qui doivent passer de 18 451 personnes en 1996 à 13 509 personnes en
2002, cette diminution résultant de la suppression du service national.
Le niveau d'effectifs prévu en 2002 doit permettre le soutien
simultané d'une force terrestre de 30 00 hommes, d'une base
aérienne projetée et d'un groupe aéronaval sur un
théâtre, alors que, sur un second théâtre, un
groupement de forces plus limité pourra être engagé.
Le tableau ci-dessous retrace les prévisions d'évolution des
effectifs d'ici 2002.
Prévision d'évolution des effectifs du service
de santé d'ici 2002
1996 |
1997 |
1998 |
2002 |
|
Officiers |
3 447 |
3 453 |
3 455 |
3 406 |
Sous-officiers |
3 798 |
3 935 |
4 049 |
3 914 |
MDR engagés |
10 |
50 |
100 |
240 |
Civils |
6 253 |
6 128 |
6 077 |
5 710 |
Appelés et volontaires |
4 943 |
4 050 |
3 000 |
239 |
TOTAL |
18 451 |
17 616 |
16 681 |
13 509 |
En ce qui concerne les effectifs d'officiers l'évolution est retracée par le tableau suivant.
Evolution des effectifs d'officiers du service de santé
1996 |
1997 |
1998 |
2002 |
|
Médecins |
2 303 |
2 330 |
2 356 |
2 412 |
Pharmaciens |
255 |
255 |
255 |
208 |
Vétérinaires |
48 |
53 |
59 |
83 |
Dentistes |
0 |
0 |
0 |
58 |
OCTA * |
398 |
390 |
384 |
339 |
MITHA officiers ** |
253 |
245 |
231 |
179 |
Aumôniers militaires |
183 |
173 |
163 |
120 |
Officiers de l'armée de terre |
7 |
7 |
7 |
7 |
Total officiers |
3 447 |
3 453 |
3 455 |
3 406 |
* officiers des corps technique et administratif de la
santé
** militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées
On rappellera qu'en 1996, les appelés du contingent fournissaient
38 % des emplois de niveau officier, soit 27 % des médecins, 63 %
des pharmaciens, 75 % des vétérinaires et 92 % des dentistes (24
chirurgiens dentistes officiers d'active étaient employés sur des
postes de pharmacien).
La suppression du service national implique donc la mise en oeuvre d'une
nouvelle politique de recrutement.
La
création d'un corps de chirurgiens dentistes
est rendue
indispensable par la disparition des 256 postes budgétaires des
dentistes du contingent. Aux 24 postes d'officiers de réserve en
situation d'activité (ORSA) actuellement réalisés dans le
cadre du statut des pharmaciens, qui seront transformés, s'ajouteront 34
postes supplémentaires pour porter à 58 l'effectif du nouveau
corps en 2002. Un plan de recrutement prévoit l'étalement des
recrutements jusqu'en 2002, à raison de 5 à 6 postes par an, ces
postes étant partagés entre les établissements
hospitaliers et les forces. La santé dentaire dans les armées
sera prise en charge à la fois par les chirurgiens dentistes des forces
et des hôpitaux sur une base territoriale. Le recrutement s'effectuera
prioritairement par le biais des officiers de réserve servant en
situation d'activité (ORSA), avec possibilité
d'intégration ultérieure, ainsi que parmi les
élèves des écoles du service de santé.
Les fonctions de vétérinaire-biologiste sont elles aussi
largement assurées par les appelés, si bien qu'un recrutement
sera opéré soit auprès de volontaires
diplômés, soit en école de formation initiale pour
compléter les effectifs du corps d'officiers d'active déjà
existant.
Quant au remplacement des
médecins
appelés du contingent,
il impliquera un recrutement diversifié. Le recrutement sur concours
interviendra tant après le baccalauréat, qu'au début de
chaque cycle et, enfin, auprès de médecins déjà
diplômés d'Etat. Le recrutement sur titre, soit sous contrat, soit
sous statut d'ORSA, sera également maintenu car il permet de pourvoir
rapidement aux besoins spécifiques du service.
Votre rapporteur tient à souligner que ces recrutements doivent
être suffisamment ciblés pour atteindre deux objectifs :
- assurer le soutien des forces en maintenant l'encadrement médical des
forces et en renforçant les spécialités
hospitalières nécessaires au soutien de la projection, en premier
lieu la chirurgie et l'anesthésie-réanimation,
- garantir le maintien du niveau des hôpitaux des armées, tant
pour des exigences de qualité des soins et de sécurité que
pour conserver la clientèle libre qui apporte au service de santé
des ressources financières à peu près équivalentes
aux ressources budgétaires.
Enfin, la disparition du service national impose une augmentation des
personnels paramédicaux, ceux-ci étant désormais
formés dans une école unique, l'école des personnels
paramédicaux des armées.
2. L'organisation : un format profondément remanié
La restructuration du service de santé concerne tant sa
présence au sein des forces, que l'organisation hospitalière et
le ravitaillement sanitaire.
En ce qui concerne le
soutien sanitaire intégré aux
armées
, les nouvelles orientations sont les suivantes :
.
dans l'armée de terre, les services médicaux des
régiments projetables comporteront un médecin par unité
élémentaire de combat, et le soutien médical en
opérations se traduira par la professionnalisation du 1er
régiment médical, renforcé de deux hôpitaux mobiles
de campagne, et par la création d'une unité composée de
quatre bataillons médicaux.
.
dans l'armée de l'air, de trois à cinq médecins
sont planifiés par base, selon l'importance de celles-ci et leurs
charges spécifiques (aptitude du personnel navigant,
sécurité des vols, médicalisation des évacuations
sanitaires par voie aérienne),
.
dans la Marine, les conditions d'isolement du soutien médical
détermineront les plans d'armement des bâtiments en personnels
médicaux.
S'agissant des
hôpitaux des armées
, le modèle retenu
pour 2002 prévoit une réduction de 4 500 à 3 400 du nombre
de lits en métropole, ces lits se répartissant entre 9 centres
hospitaliers et un centre de rééducation.
Après la fermeture du centre hospitalier des armées de Bourges en
1993, le service de santé compte actuellement 17 établissements,
dont 9 hôpitaux d'instruction. Le nombre d'établissements sera
ramené à 14 d'ici la fin 1999, avec la fermeture des centres
hospitaliers des armées de Lille en 1998 et de Dijon et Strasbourg en
1999.
Enfin, la
réorganisation du ravitaillement sanitaire
a
été engagée, avec la fermeture en 1997 de la pharmacie
magasin du port de Toulon et de l'établissement de matériels de
mobilisation de Lyon. L'établissement central des matériels de
mobilisation de Bordeaux sera fermé en 1998.
3. Les missions : une priorité au soutien des forces de projection
Le service de santé des armées doit
prioritairement répondre aux besoins générés par le
soutien des forces en opérations.
La participation aux opérations extérieures au cours des
années récentes témoigne de l'importance de cette nouvelle
orientation mais aussi des difficultés auxquelles elle se heurte.
Au cours de l'année 1997, le soutien médical des forces
françaises engagées en opérations extérieures a
nécessité, en moyenne, près de 300 personnels
médicaux et paramédicaux.
Ce chiffre est certes sensiblement inférieur à l'engagement
requis en 1996 et l'optimisation des ressources constitue l'un des objectifs
recherchés par le service en liaison avec l'état-major des
armées. De même, le caractère multinational des
opérations doit permettre de jouer sur la complémentarité
des moyens des différents pays, ainsi que l'illustre
l'intégration d'une équipe chirurgicale française au sein
de l'hôpital allemand de Sarajevo et le déploiement d'un poste de
secours allemand à Mostar, avec la compagnie chirurgicale mobile
française.
Toutefois, le soutien des unités engagées dans des
opérations extérieures n'est possible que par
prélèvement de personnels sur les forces et sur les organismes
relevant du service de santé, notamment les hôpitaux.
On
considère en effet que le départ en mission d'une antenne
chirurgicale correspond à la mise en sommeil de l'équivalent d'un
centre hospitalier des armées. L'engagement simultané et durable
de plusieurs antennes chirurgicales réduit d'autant la capacité
des hôpitaux des armées à assurer leur mission de temps de
paix en métropole. Ainsi, au coût direct des opérations
extérieures en termes de rémunérations des personnels, de
dépenses de matériel, de médicaments, de transport et de
mise en condition des personnels, s'ajoute pour le service de santé un
coût indirect, lié à la réduction de son
activité hospitalière lorsque ses établissements se
trouvent privés d'une partie de leurs équipes chirurgicales.