III. L'ÉVOLUTION DU CONTEXTE INTERNATIONAL ET COMMUNAUTAIRE
A. UNE POLITIQUE COMMUNE QUI POURSUIT SA MUTATION
1. Le bilan des programmes opérationnels pluriannuels
a) L'application du Pop III
La Commission européenne a publié son rapport annuel sur le résultat du Pop III pour les flottes de pêche de 1992 à 1996. Le rapport conclut que la mise en oeuvre du Pop III a réussi à réduire la surcapacité des flottes européennes puisque, durant la période 1991-1996, celles-ci ont été réduites de presque 300.000 tonnes de jauge brut (TJB) et de presque 790.000 kw. Pour la flotte européenne dans son ensemble, la capacité à la fin de l'année était de 11 % inférieure aux objectifs fixés par le programme Pop III en ce qui concerne le tonnage et de 5 % inférieure aux objectifs fixés pour la puissance.
POP III : DIFFÉRENCE ENTRE SITUATION ET OBJECTIFS
A l'exception de la Finlande et la Suède
TONNAGE (TJB)
Fin de l'année |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
|||||
Objectifs |
2 044 511 |
2 003 821 |
1 977 951 |
1 998 824 |
xxxx |
1 850 028 |
|||||
Situation fichier flotte |
2 010 183 |
1 934 811 |
1 843 750 |
1 777 083 |
1 710873 |
1 844 113 |
|||||
Etats-membres |
% Situation
globale/
|
Nombre des segments où les objectifs ont été atteints/nombre total des segments |
|||||||||
TJB |
KW |
TJB |
KW |
||||||||
Portugal |
64 % |
78 % |
9/9 |
9/9 |
|||||||
Espagne |
76 % |
85 % |
5/5 |
5/5 |
|||||||
Danemark |
77 % |
81 % |
5/5 |
5/5 |
|||||||
Allemagne |
79 % |
87 % |
8/9 |
9/9 |
|||||||
Finlande |
99 % |
98 % |
8/5 |
5/8 |
|||||||
Suède |
97 % |
97 % |
3/5 |
5/5 |
|||||||
Belgique |
98 % |
94 % |
1/2 |
1/2 |
|||||||
Irlande |
94 % |
99 % |
2/9 |
2/3 |
|||||||
Grèce |
96 % |
100 % |
2/3 |
2/3 |
|||||||
France |
99 % |
104 % |
4/6 |
2/6 |
|||||||
Royaume-Uni |
104 % |
102 % |
4/10 |
8/10 |
|||||||
Pays-Bas |
148 % |
109 % |
D/3 |
0/3 |
|||||||
Italie |
(98 %) |
(104 %) |
non disponible |
non disponible |
* Pourcentages basés sur des chiffres fournis par le rapport soumis par l'Italie
b) L'adoption du Pop IV
Votre rapporteur pour avis a longuement analysé le
déroulement de la préparation de ce programme opérationnel
dans son rapport sur le projet de loi d'orientation. Réunis en Conseil
" pêche " le 19 décembre, les Quinze ont
reporté à avril toute décision sur le Pop IV. En
novembre déjà, le compromis proposé par la
présidence irlandaise au cours de la session de novembre n'avait pu
recueillir le consensus entre les États membres de l'Union
européenne.
La proposition initiale de la Commission européenne, destinée
à réduire la flotte communautaire de 40 % sur une
période de six ans (à dater de janvier de cette année), a
été rejetée en bloc par les États membres.
Jugée en effet trop sévère, elle a été
critiquée pour son inclination à considérer la
réduction des flottes communautaires comme la garantie essentielle d'une
réduction de la capacité de pêche. Selon plusieurs
États membres, dont la France, les "
facteurs
socio-économiques n'étaient pas suffisamment pris en compte dans
la proposition de la Commission
". Le Parlement européen s'est
d'ailleurs exprimé en ce sens dans son avis sur le Pop IV, qui
révélait une indifférence à l'égard de
l'impact d'une telle démarche sur le sort des pêcheurs.
Lors du Conseil " pêche " de décembre, la Commission a
annoncé que l'aide aux programmes de restructuration financée par
les Fonds structurels de l'Union européenne serait suspendue
jusqu'à ce qu'une décision soit prise sur le Pop IV. L'aide
devant permettre aux pêcheurs de déclasser leurs navires
-placée sous l'égide de l'Instrument financier d'Orientation de
la Pêche de l'Union européenne- a sous-tendu le
précédent programme de restructuration, Pop III, venu à
échéance à la fin de l'année 1996.
Les
pêcheurs sont cependant en mesure de bénéficier
rétroactivement de l'aide, un nouveau programme ayant été
adopté le 30 avril 1997.
Le taux de réduction prévu par le Pop IV est de 30 %
jusqu'en 2001 pour les espèces menacées d'extinction (le
cabillaud, le saumon, la sardine, la sole, le maquereau et le hareng de mer du
Nord) et de 20 % pour celles qui sont surexploitées
(l'églefin, le lieu noir, le merlu, la lotte, la plie, l'espadon et le
thon rouge).
La France, à l'instar de la Grande-Bretagne, ont voté contre
ces propositions
estimant que "
malgré des avancées
importantes, les taux de réduction demeurent trop élevés
par rapport aux équilibres atteints par les différentes
flottilles françaises
".
La diminution de l'effort de pêche peut être obtenue au choix des
États membres, soit par une baisse des capacités des flottes,
soit par la réduction du temps en mer, soit enfin par une combinaison
des deux mesures. Les navires de pêche côtière mesurant
moins de 12 mètres -à l'exception des chalutiers- sont
exemptés de ces mesures.
Cet accord sur le Programme d'orientation pluriannuel (POP) va permettre le
déblocage des fonds communautaires pour la modernisation des flottes de
pêche. Pour les pays qui en sont les plus grands utilisateurs comme
l'Espagne et la France, ils représentent des sommes de plus de
10 millions de dollars par an.
Ce programme représente une réduction d'environ 6 % sur cinq
ans de la capacité de pêche française, soit 60.000 kW
sans cependant préjuger des moyens retenus.
Chaque État membre a présenté son " Pop
national " à Bruxelles avant le 30 juin pour une adoption
définitive au plus tard le 30 novembre.
c) Le plan français
Après l'adoption par le Conseil des ministres de
l'Union européenne de la décision cadre relative au POP IV, les
États membres ont dû présenter un plan de réduction
national qui devrait être adopté d'ici la fin novembre 1997.
La France a donc proposé un plan qui prévoit
pour la
métropole
une segmentation fondée sur la distinction entre
façades : Atlantique Manche Mer du Nord d'une part et
Méditerranée d'autre part.
Au sein de la façade Atlantique Manche Mer du Nord
, la
segmentation porte d'une part sur les chalutiers de 0 à
30 mètres et d'autre part sur les chalutiers de plus de
30 mètres. Au sein de ce segment, une pêcherie
spécifique correspondant à de gros chalutiers pélagiques
pêchant surtout le hareng, le maquereau et le chinchard a
été identifiée.
Pour les non-chalutiers, les moins de 12 mètres sont
exonérés des contraintes de réduction. A partir de
12 mètres, 2 segments ont été
déterminés avec une césure à 25 mètres.
Pour la façade méditerranéenne
, 3 segments
sont prévus. Les chalutiers d'une part, les senneurs d'autre part et
enfin les petits métiers.
Dans les eaux internationales
, deux segments ont été
identifiés pour les thoniers océaniques et pour les canneurs de
Dakar. Pour ces deux segments ainsi que pour les segments spécifiques
à chacun des DOM, des augmentations de capacités ont
été demandées afin de pouvoir mettre en oeuvre de
nouvelles unités si les potentialités offertes par la ressource
le permettent.
Ces objectifs de réductions ont été calculés
à partir des captures de 1996 sur lesquelles les taux pilotes de
réduction ont été appliqués en fonction de la part
relative des captures de stocks critiques au sein des segments.
En fonction de la souplesse de la Commission quant à l'utilisation de la
gestion par l'effort de pêche pour atteindre les objectifs de
réduction fixés, la réduction de la flotte de pêche
devrait être de l'ordre de 50.000 kw.
Dans l'état actuel des négociations, la Commission devrait
accepter le projet de segmentation proposé.
Le principal
problème qui reste à traiter est celui du retard subsistant au
titre du POP III.
En effet, début septembre, un reliquat de
20.000 Kw de retard subsiste par rapport aux objectifs de réduction
du POP III, malgré tous les efforts mis en oeuvre. La Commission a
donc signifié à la France la suspension des aides à la
construction et à la modernisation, entraînant augmentation de
capacité.
Il est donc essentiel, pour que les aides au secteur soient rétablies,
que la France puisse apurer ce retard dans les meilleurs délais. Il a
donc été proposé que le premier objectif
intermédiaire au titre du POP IV soit celui du
31 décembre 1998 compte tenu de l'adoption des
décisions nationales par la Commission à la fin novembre.
Ceci permettra à la France d'effacer son retard d'ici la fin du premier
trimestre 1998, par la mise en oeuvre d'un plan de sortie de flotte
d'envergure et donc d'établir les aides à ce moment là.
Par ailleurs, pour le retard spécifique des chalutiers
méditerranéens, il a été proposé un lissage
complet sur la durée du POP IV avec remplacement d'une à
deux unités par an pour renouveler ce segment de flotte vieillissant
(moyenne d'âge 28 ans).
Votre rapporteur pour avis
, tout en étant très
préoccupé par l'effet du Pop au-delà de 1999, lorsque
prendra fin la programmation financière des fonds structurels,
souhaite que la Commission européenne fasse preuve de toute la
compréhension nécessaire
lorsqu'elle devra négocier
les décisions nationales relatives aux programmes d'orientation
pluriannuels pour la période considérée.
Il insiste en
outre sur une approche transparente et des mesures contrôlables
permettant d'adopter une attitude flexible pays par pays
.
2. Un accord sur la détection par satellite
La décision d'introduire un
système de
contrôle par satellite
pour les navires européens a
été prise au mois de décembre 1996.
Ce nouveau système instaure un contrôle des activités de
pêche en temps réel. Il permettra aux autorités de
contrôle, d'une part de superviser, d'identifier et de localiser les
navires de pêche, d'autre part de coordonner les activités de
surveillance.
Cet instrument devrait offrir les avantages suivants au secteur
européen de la pêche :
- une navigation moins aléatoire,
- une sûreté des navires de pêche renforcée dans
la mesure où les appels de détresse sont transmis rapidement et
que le positionnement du navire est automatique,
- un fardeau moindre pour les opérateurs, qui tentent parfois de
contrôler leurs navires avec des systèmes radiophoniques
coûteux.
Ainsi ce nouveau système de détection par satellite devrait
freiner substantiellement les pratiques illicites dans les eaux territoriales
de l'Union européenne et permettre un contrôle plus
cohérent et plus large des navires de pêche européens.
Il
sera mis en oeuvre en deux phases
: la première, qui prendra
effet le 1er juillet 1998, couvrira la pêche dans les eaux
territoriales non européennes et la pêche industrielle. La seconde
couvrira l'ensemble des activités de pêche à partir du
1er janvier 2000. Des exemptions spécifiques s'appliqueront
aux navires sortant moins de 24 heures en mer et pêchant
en-deçà de la limite de 12 miles des côtes. Par
ailleurs, il est prévu, au niveau national, d'instaurer des centres de
contrôle des pêcheries chargés de recueillir toutes les
informations relatives à leur flotte respective, quelles que soient les
eaux territoriales dans lesquelles ils opèrent ou le port dont ils
relèvent, qui seront chargés de contrôler les navires de
pêche communautaires battant pavillon d'autres États membres
(pratique que les Britanniques baptisent " transfert de
quotas "),
ainsi que les navires non européens dotés de systèmes
similaires, pêchant dans les eaux territoriales de la Communauté.
L'Union européenne dispose d'un budget de 205 millions d'écus
(sur cinq ans) pour aider les pêcheurs à financer
l'investissement que représente l'usage d'une technologie nouvelle, bien
que la priorité soit accordée à l'équipement
à bord -les " boîtes bleues- et aux centres de contrôle
de pêche. Le système sera révisé dans deux ans,
après le début de la seconde étape.
3. Un nouveau programme communautaire pour la pêche côtière
La Commission européenne a lancé, le
8 juillet dernier, un programme pilote doté d'un budget de
4 millions d'écus pour examiner les possibilités d'une
action ultérieure plus vaste d'aide à la pêche
côtière. Le programme pilote visera à améliorer la
formation des pêcheurs, à renforcer les structures de
représentation des pêcheurs et à développer des
programmes d'échange. Il a aussi pour but d'améliorer le sort des
femmes de pêcheurs souvent partie prenante dans l'activité
économique de la petite pêche côtière, en mettant sur
pied des organisations d'économie sociale et en dispensant une formation
à la comptabilité, à la commercialisation et à la
gestion.
Les bénéficiaires des concours (maximum 200.000 écus
par projet individuel) pourront être des entreprises ou associations, des
organisations professionnelles ou d'économie sociale, des
collectivités territoriales ou régionales, des agences de
développement local, des chambres de commerce ou des instituts de
formation. Deux appels à proposition seront publiés au Journal
officiel de l'Union européenne, la sélection des projets se
faisant avant la fin 1997.