III. UNE NOUVELLE ORIENTATION POUR LES CONSTRUCTIONS UNIVERSITAIRES : DU PLAN " U 2000 " AU PLAN " U3M "
Après avoir rappelé les dispositifs successifs qui ont permis de mener à bien l'effort de rénovation et de construction universitaire sur l'ensemble du territoire national, il conviendra de consacrer quelques développements à la mise en sécurité des bâtiments universitaires.
A. LA POLITIQUE MENÉE DANS LE DOMAINE DES CONSTRUCTIONS UNIVERSITAIRES
1. Le bilan du plan Université 2000 et des contrats de plan Etat-régions
Le plan Université 2000 prévu pour s'achever en
1995 a été relayé et complété dès
1994 dans le cadre du XIe plan par les contrats de plan Etat-régions.
Leur exécution, d'abord envisagée sur cinq ans (1994-1998),
courra jusqu'en 1999, les compléments envisagés aux actuels
contrats de plan Etat-régions restant à définir.
Le schéma de développement des enseignements supérieurs
" Université 2000 " était un programme quinquennal
(1991-1995) de construction et d'aménagement des établissements
d'enseignement supérieur. Le rythme d'investissement a été
un peu inférieur à ce qu'il aurait dû être pour que
le schéma soit entièrement réalisé à la fin
de l'année 1995, c'est-à-dire à l'échéance
initialement prévue.
Les contrats Etat-régions du XIe plan, qui ont été
négociés au premier trimestre de l'année 1994,
intègrent le solde du schéma calculé à la fin de
1993 et prévoient, en général, des opérations
nouvelles, dans une proportion variable d'une région à l'autre.
Dans ces contrats, l'Etat et les collectivités s'engagent à
apporter 22 milliards de francs, sensiblement à parité, ces
crédits devant être complétés par les fonds
européens, pour un montant approximatif de 1,4 milliard de francs
pour la période 1994-1996. Les crédits de maintenance et ceux
destinés au logement des étudiants ne figurent pas dans la base
du XIe plan, alors qu'ils étaient intégrés au
schéma Université 2000.
2. L'exécution financière des contrats Etat-régions par l'Etat
De 1994 à 1997, l'Etat a apporté
7,313 milliards de francs en autorisations de programme pour les
opérations de construction de premier équipement et d'un reliquat
de maintenance du schéma Université 2000. Il a ainsi
supporté 68,1 % du financement de l'investissement auquel il
s'était engagé dans les contrats Etat-régions.
Les variations observées d'une région à l'autre dans le
rythme de réalisation financière tiennent au fait que le budget
global voté en loi de finances n'est pas réparti
mécaniquement au prorata des engagements contractés région
par région. En effet, le ministère détermine le niveau de
l'enveloppe annuelle qu'il attribue aux préfets de région en
tenant compte de la nature des opérations, de leur caractère
prioritaire et éventuellement de la programmation du financement de
l'Etat avec celui des collectivités locales.
L'Etat a par ailleurs apporté 705 millions de francs
d'autorisations de programme en 1994 et 1995 au titre d'opérations de
construction ou de premier équipement inscrites au schéma
" Université 2000 ", et non reprises dans les contrats
Etat-régions, bien que non financées avant 1994, soit 6,5 %
de l'enveloppe contractualisée.
3. L'exécution financière des contrats Etat-régions par les collectivités locales
De 1994 à 1996, les collectivités locales ont
apporté 6,3 milliards de francs au financement des
opérations de construction et de premier équipement. Elles ont
financé 57 % des crédits inscrits aux contrats
Etat-régions. Hors Ile-de-France et hors DOM-TOM, le taux
d'exécution financière est de 61 % tandis qu'il est de
68 % dans les DOM-TOM et seulement de 48 % en Ile-de-France.
Le rythme de mise en place des financement varie de 20 % à
88 % selon les régions.
Les collectivités locales ont par ailleurs apporté
997 millions de francs de 1994 à 1996 au titre d'autres
opérations de construction ou de premier équipement au
bénéfice des établissements d'enseignement
supérieur publics, soit 9 % de l'enveloppe contractualisée.
La presque totalité de celles-ci correspondent à des
opérations inscrites au schéma Université 2000 mais non
reprises dans les contrats Etat-régions, bien que non financées
avant 1994.
Enfin, de 1994 à 1996, les partenaires institutionnels de l'Etat et des
collectivités locales -fonds européen de développement
économique des régions, fonds national d'aménagement du
territoire (FNADT)- et les établissements d'enseignement
supérieur eux-mêmes ont apporté 838 millions de francs
supplémentaires au financement des opérations des contrats
Etat-régions. Le principal financement a été
supporté par le FEDER.
4. Le prolongement du schéma Université 2000 : le plan " Université du 3e millénaire " (U3M)
Compte tenu des efforts effectués depuis le
début des années 90, les besoins en locaux supplémentaires
devraient être peu importants, à l'exception notable toutefois des
universités parisiennes (intra muros et couronne ).
En revanche, l'effort de construction de surfaces documentaires nouvelles devra
être poursuivi. A la démarche ouverte par le plan
Université 2000 d'un accroissement du patrimoine devra succéder
une politique de maintien et d'évolution du bâti qui impliquera la
couverture de besoins de maintenance et de mise en sécurité ainsi
que le financement d'opérations de restructuration et de
réaménagement.
Pour la vie étudiante, d'importants besoins n'ont été que
peu pris en compte par le plan Université 2000 et le XIe plan,
axés principalement sur les locaux d'enseignement. Une
réhabilitation massive du parc de logement étudiant, la
réalisation d'installations sportives et culturelles et des
aménagements de sites devront être privilégiés.
Devant la commission, le ministre a indiqué que le Plan
" U3M " devrait permettre de relancer l'investissement
universitaire
alors que les crédits d'investissement inscrits dans les lois de
finances précédentes n'avaient pas été
dépensés du fait notamment de la lourdeur des procédures
concernant les constructions universitaires.
Il a précisé que l'ouverture d'un milliard de francs
supplémentaire d'autorisations de programme serait consacrée au
démarrage du plan U3M.
Il a rappelé que, grâce au plan Université 2000 et à
l'effort financier des collectivités locales, la province se trouvait
désormais très en avance sur la capitale pour la qualité
de ses équipements universitaires, la région Ile-de-France
n'ayant financé que les universités nouvelles
périphériques.
Il a également souligné que le schéma Université
2000 ne constituait pas un plan de développement complet des
universités françaises mais n'était destiné
qu'à remettre à niveau les constructions universitaires. Ce plan
peut être considéré comme un succès, notamment pour
les universités nouvelles de la région parisienne dont le
principe avait pourtant été condamné par la DATAR et dont
le développement a eu pour conséquence heureuse de réduire
pour la première fois le nombre des étudiants dans Paris intra
muros.
Ce plan a enfin permis d'engager un dialogue entre les universitaires et les
élus locaux, les responsables universitaires étant
désormais prêts à accepter que les conseils des
universités comportent un conseil d'orientation.
Le ministre a enfin souhaité que les élus et les hommes de
terrain soient associés à l'élaboration du nouveau plan
" U3M " et que les régions participent davantage au
développement des universités comme elles l'ont fait pour les
lycées, ce qui implique notamment un allégement des
procédures actuelles de construction et sans doute un réexamen de
l'implantation de certains sites universitaires compte tenu de la
réduction prévisible des effectifs étudiants.
5. L'implantation des sites universitaires envisagée dans le cadre de l'aménagement du territoire
a) La recherche d'une répartition équilibrée des sites universitaires sur le territoire national
La recherche d'une répartition équilibrée
des formations d'enseignement supérieur sur le territoire national
constitue une priorité pour le schéma sectoriel de l'enseignement
supérieur et de la recherche prévu par la loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire du
4 février 1995, comme pour les schémas régionaux de
l'enseignement supérieur et de la recherche.
Cette répartition devra tenir compte de la double évolution qui
marque d'ores et déjà le système universitaire et qui va
s'accentuer dans les dix prochaines années :
- arrêt de la pression démographique qui poussait à
l'expansion du système universitaire ;
- constitution d'un espace éducatif européen qui crée une
concurrence accrue entre les établissements universitaires les
contraignant à développer des sites attractifs et bien
équipés pour l'accueil des étudiants.
Si la création d'universités constitue un outil à prendre
en considération pour une répartition équilibrée de
l'enseignement supérieur sur le territoire national, d'autres
perspectives peuvent également être envisagées dans
certaines villes moyennes :
- le modèle des universités multipolaires déjà
retenu par exemple pour les universités nouvelles de l'Artois, du
Littoral, de Vannes-Lorient ;
- la création de structures administratives adaptées comme celles
mises en place à Valence ou Bayonne.
Rappelant que le Sénat, lors de l'examen du projet de loi d'orientation
pour l'aménagement et le développement du territoire avait
souhaité que toutes les villes moyennes puissent accueillir une
université de plein exercice, le ministre a indiqué devant la
commission qu'une réflexion pourrait s'engager sur la place des
universités dans l'aménagement du territoire prenant en compte
notamment la dimension européenne et le rôle des
collectivités locales.
Le souci de développement des villes moyennes doit en effet être
pris en compte, mais ce développement devrait plutôt s'appuyer sur
la délocalisation d'universités technologiques ou de
" petites grandes écoles " regroupées débouchant
sur des emplois.
Il a dénoncé, à cet égard, le coût de ces
" petites grandes écoles ", leur nombre excessif, leur
sous-utilisation et leur sous-équipement.
Il a indiqué que certaines universités de plein exercice
délocalisées étaient confrontées à de
grandes difficultés et que deux missions ont été
confiées à l'Inspection générale pour
établir un bilan des centres universitaires délocalisés.
Il a ainsi estimé que la délocalisation des premiers cycles
universitaires n'était pas souhaitable tandis que la
décentralisation des IUT peut être considérée comme
une réussite lorsque les diplômes débouchent sur des
emplois de proximité. En revanche, les IUT implantés dans de
grands centres universitaires se caractérisent par un fort taux de
poursuite d'études et peuvent être considérées comme
des DEUG déguisés mais coûteux.
Il a enfin rappelé que la vocation de l'enseignement supérieur
est de créer un savoir et de le transmettre, ce qui implique une
capacité de recherche et d'innovation : le " maillage "
universitaire ne doit donc pas être trop éclaté sauf
à faire disparaître cette spécificité.
b) Le développement de l'enseignement supérieur dans les villes moyennes : des formations courtes pour des étudiants d'origine modeste
L'étude récente effectuée par
l'association française des villes moyennes (AFVM) rappelle que les
villes moyennes accueillent désormais plus de 10 % de la population
étudiante dans 162 villes.
Depuis trois ans, le nombre des étudiants en villes moyennes a
augmenté de 10 % alors que la croissance des effectifs au niveau
national n'a été que de 3 %.
L'étude révèle que la moitié de ces
étudiants optent pour des formations supérieures courtes, les STS
et les IUT y représentant 47,5 % des effectifs étudiants.
Sur les 92 IUT existants, 24 sont situés dans des villes moyennes et les
STS accueillent le tiers de la population étudiante de ces villes contre
10,7 % au niveau national.
Par ailleurs, plus du tiers de ces étudiants souhaitent arrêter
leurs études à bac + 2 et 47 % d'entre eux
envisagent leur avenir professionnel dans le cadre de la région.
Il convient de rappeler que 41 villes moyennes seulement accueillent des 2e
cycles et 15 et des 3e cycles.
Ces étudiants sont plus jeunes que la moyenne nationale (64 % ont
vingt ans ou moins) et vivent le plus souvent chez leurs parents :
50 % de ces étudiants cohabitent avec leur famille contre
38,4 % sur l'ensemble du territoire.
Leur origine sociale est plus modeste : leurs parents sont deux fois moins
nombreux à posséder un diplôme de l'enseignement
supérieur, à disposer d'un revenu mensuel supérieur
à 20.000 F, et à appartenir à la catégorie des
cadres.
Ces résultats flatteurs constituent autant d'acquis pour que s'engage
une réflexion sur l'avenir de l'enseignement supérieur dans les
villes moyennes.
RÉPARTITION DES EFFECTIFS ÉTUDIANTS
Formations |
Effectifs nationaux |
Effectifs |
Répartition |
Villes moyennes |
|||
Enseignement supérieur universitaire | 1 359 000 | 72 372 | 35,0 % |
IUT | 99 000 | 28 048 | 13,5 % |
Ingénieurs * | 25 980 | 5 938 | 2,9 % |
IUFM | 86 000 | 12 743 | 6,0 % |
Classes préparatoires aux grandes écoles | 76 500 | 9 460 | 4,6 % |
Sections de techniciens supérieurs | 231 000 | 89 817 | 34,0 % |
Autres ** | 285 780 | 8 292 | 4,0 % |
Total | 2 163 260 | 206 670 | 100,0 % |
* Formation relevant du ministère de l'enseignement
supérieur.
** Ecoles de commerce, facultés privées, écoles
d'ingénieurs ne relevant pas du ministère de l'enseignement
supérieur
c) Les observations de la commission
La commission tient d'abord à saluer les efforts
accomplis par les collectivités pour financer la construction des
bâtiments universitaires et même parfois pour indemniser les
enseignants qui y sont affectés : si de grands centres
universitaires se sont tenus à l'écart du plan
Université 2000, certaines villes petites et moyennes ont
financé avec difficulté un établissement universitaire ou
para-universitaire qui pourrait contribuer à leur développement.
Elle souhaiterait également signaler une certaine ambivalence dans
l'attitude de l'Etat qui, à la fois, sollicite la participation des
collectivités locales à l'effort de construction des
bâtiments universitaires et s'oppose par ailleurs à la
création d'un certain type d'université, comme
l'université thématique d'Agen, pourtant souhaité par les
collectivités. Elle constate également que le plan
Université 2000 appliqué aux villes moyennes s'est traduit
souvent par un taux de réussite satisfaisant d'étudiants qui
n'étaient pas spécialement préparés à
entreprendre des études supérieures, ce qui pourrait inciter les
présidents d'université à prendre en compte les souhaits
des villes moyennes pour diversifier l'implantation de sites universitaires.