II. LA RÉFORME COMPORTE TROIS VOLETS, DONT LA RÉUSSITE DÉPENDRA EN GRANDE PARTIE DU PARAMÉTRAGE FINANCIER
Dans son principe, la réforme proposée est de nature à résoudre le problème posé : elle supprime la source principale des difficultés financières de la SNCF, ainsi à terme qu'une source non négligeable que sont les services régionaux, et elle laisse à la SNCF le soin de concentrer son effort sur la reconquête des usagers des transports.
Mais, pour que cette réforme réussisse, beaucoup dépend du contenu concret du schéma proposé, à savoir les modalités financières de sa mise en oeuvre. De quelque manière qu'on prenne le problème, la réforme ne peut réussir sans un apport financier nouveau et significatif de l'Etat .
A. LES TROIS VOLETS DE LA RÉFORME
Le présent projet de loi est une des pièces d'une réforme du transport ferroviaire en France articulée en trois volets : la création d'un établissement public propriétaire de l'infrastructure, Réseau ferré national ; l'octroi de la compétence d'organisation des services de transports régionaux aux régions ; enfin le projet industriel de la SNCF.
1. Réseau ferré national, propriétaire de l'infrastructure
L'élément majeur de la réforme, qui est le seul à dépendre exclusivement du présent projet de loi, est la création d'un établissement public d'Etat, industriel et commercial, Réseau ferré national (RFN). RFN récupère l'infrastructure du réseau national en pleine propriété. Le réseau est détenu par l'Etat aux termes de la loi d'orientation des transports intérieurs (LOTI) [11] et il n'est que concédé à la SNCF. La création de RFN ne fait, en quelque sorte, que donner un contenu concret, matériel, au contrôle de l'Etat sur l'infrastructure. Mais c'est une avancée fondamentale car l'Etat, abstraitement propriétaire de l'infrastructure, n'en avait tiré aucune conséquence, et donc n'en assumait pas les charges. La création d'un petit organisme [12] sous tutelle de l'Etat manifeste que celui-ci entend désormais assurer la charge du réseau, dont il continue de définir, comme aux termes de la LOTI, la consistance et les caractéristiques.
Le tableau suivant , qui retrace depuis 1991 les résultats de la SNCF en séparant le compte d'infrastructure du compte du transporteur [13] , permet de comprendre pourquoi la création de RFN est la condition indispensable du redressement de la SNCF.
Le déficit du compte d'infrastructure est le facteur principal du déficit de la SNCF et, par voie de conséquence, de l'accroissement inexorable de son endettement.
La question de savoir s'il est normal que le compte d'infrastructure soit gravement déficitaire et le problème de l'érosion des marges du transporteur restent certes importantes, mais elles sont secondaires à ce stade : en créant RFN, l'Etat supprime définitivement la principale source de difficultés financières de la SNCF. Et il le fait non seulement pour l'avenir, mais également pour le passé, puisque RFN doit reprendre à sa charge l'encours de la dette occasionné par l'infrastructure, qui se constitue des emprunts contractés pour la financer et des déficits passés du compte.
Des interrogations ont surgi sur la nécessité, pour réaliser cette opération, de créer un nouvel établissement public. On peut aisément répondre que sans cela le Gouvernement n'aurait en fait rien changé : l'Etat n'assume pas aujourd'hui ses responsabilités de propriétaire de l'infrastructure, pourquoi le ferait-il demain si on ne modifie rien à cette organisation ? Assume-t-il le financement de l'infrastructure ? Non, RFN le fera. Exerce-t-il ses prérogatives de maître d'ouvrage des investissements sur le réseau en les contrôlant, tant au plan technique qu'au plan des coûts ? Non. RFN le fera aussi et cette situation nouvelle accroîtra la qualité des réalisations et réduira les gaspillages.
RFN est l'instrument dont l'Etat a besoin pour jouer pleinement son rôle vis-à-vis de la SNCF . D'un côté, il ôte à celle-ci des charges indues qui entraînaient sa démoralisation ; de l'autre, RFN sera l'interlocuteur qui lui fait défaut pour la mise en place et la maintenance du réseau ferré national.