II. ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE EN 1995 A. LE BILAN DU COSIP EN 1995 - 1996

1. Le bilan en 1995

a) Un financement de plus en plus franco-français

En 1995, le Compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP) a financé 1 604 heures de programmes de stocks. Il a accordé 594 millions de francs d'aides, alors que le total des devis s'élève à 4,1 milliards. Les diffuseurs ont apporté 2 milliards de francs et financent davantage les oeuvres de fiction et les documentaires. Les apports de l'étranger sont de 559 millions de francs .

Pour une vision exhaustive du financement international de la production française, il convient cependant d'additionner aux exportations (453 millions de francs en 1995) les volumes financiers apportés en amont par les coproductions (464 millions de francs) et les préventes (73 millions de francs) réalisées auprès de nos partenaires étrangers. La baisse observée depuis 1991 se poursuit et les échanges internationaux (1,643 milliard de francs en 1991) sont passés l'an passé en dessous de la barre symbolique du milliard de francs (990 millions de francs en 1995).

Ce déclin s'explique par les décrets de 1991 et leurs fameux quotas imposant le tournage en langue française aux oeuvres dites « d'expression originale française ». La conséquence de ces décrets a été immédiate : les coproductions ont chuté de 62 % entre 1991 et 1995 . Depuis deux ans, un palier semble atteint et les échanges, qui étaient au plus bas en 1994, ont repris avec l'Europe alors que l'Amérique confirme son désintérêt. Toutefois les coproductions, qui finançaient 30 % de la production française il y a cinq ans, n'interviennent plus qu'à hauteur de 10 %.

On ne peut ignorer ce déficit de financement et l'on pourrait envisager une modification de la réglementation afin de tourner en langue étrangère des films du patrimoine français .

Les préventes se sont effondrées en 1995 pour tomber à 73 millions de francs, contre 282 millions de francs en 1993, les étrangers préférant bénéficier de leur part coproducteur. Quant aux ventes, certes en progression de 50% depuis 1991, mais relativement étales depuis trois ans, elles ne compensent pas ces baisses. L'année 1996 pourrait toutefois constituer une Meilleure année.

b) La production de fiction en hausse

Les résultats présentés ci-après concernent les seules oeuvres qui ont obtenu un soutien financier du CNC au titre de l'année 1995. Les commandes de La Cinquième ont été prises en compte pour la première fois.

Production audiovisuelle soutenue par le CNC en 1994-1995

Durée

(En heures)

Devis

(En millions de fr.)

Diffuseurs (En millions de fr.)

COSIP

(En millions de fr.)

1994

1995

1994

1995

1994

1995

1994

1995

Fiction

597

641

3 037,65

2 750,94

1 413,78

1 498,25

500,83

399,28

Animation

253

96

985,14

359,73

179,10

77,57

139,27

44,61

Documentaire

414

739

617,69

865,39

216,64

359,72

94,36

139,28

Magazine

41

98

31,29

51,16

15.92

27,76

3,35

5,3

Spectacle

14

30

40,73

47,40

30,89

16,92

2,20

5,92

Total

1 319

1 604

4 712,50

4 074,62

1 856,63

1 980,22

740,01

594,42

Source : CNC

En 1995, le volume horaire de fiction a progressé de 7 %. Ces oeuvres restent le genre prédominant dans les commandes des chaînes : elles représentent 40 % des durées et les deux tiers des devis présentés au COSIP. Trois quarts des apports des diffuseurs et deux tiers des apports du COSIP s'orientent vers les oeuvres de fiction. Depuis deux ans, les fictions devancent les longs métrages en terme d'audience : en 1995, téléfilms, séries et feuilletons occupent 41 des 100 premières places.

Principale cause de la hausse de la production de fiction, les séries jeunesse sont également responsables de la baisse du coût horaire moyen de la fiction. Le coût horaire moyen des fictions de 90 minutes reste stable à 6,2 millions, celui des « sitcoms » à 1,5 million. Seul le coût moyen des séries jeunesse baisse nettement : 4,2 millions en 1994, 1,9 million en 1995.

Les oeuvres chères constituent toujours l'essentiel de la production : plus de la moitié des heures produites ont un coût horaire qui dépasse 4,5 millions de francs par heure.

Les diffuseurs apportent désormais 55 % du montant total des devis contre 47 % en 1994 et 43 % en 1993. La hausse de cette participation est due à l'effort de certains diffuseurs et au taux de financement élevé des programmes par La Cinquième.

La part des apports producteurs dans les devis baisse fortement : 17 % contre 28 % en 1994. C'est une conséquence directe de la réforme du COSIP, puisque l'apport minimal du producteur imposé par la réglementation n'est plus fixé à 15 % mais à 5 % du montant du devis.

Les apports étrangers en coproductions et préachats sont en légère hausse : ils représentent 12 % des devis contre 10 % en 1994. Le quart des oeuvres de fiction sont des coproductions internationales (un cinquième en 1994). Neuf dixièmes de ces coproductions sont des oeuvres majoritairement françaises. Les oeuvres commandées par M6 et Canal + ont un niveau de financement étranger plus important que la moyenne.

c) TF1 est le principal investisseur

Parmi les diffuseurs, TF1 se distingue nettement. Cette chaîne a commandé, en premier diffuseur, 40 % des heures de fiction produites en 1995 . Elle a investi 678 millions de francs , soit près de 50 % des investissements des diffuseurs dans la fiction en 1995 (la part de TF1 était de 35 % en 1994). Ses investissements dans ce type de programme ont augmenté de 40 % en 1995.

TF1 se distingue également par le niveau élevé de financement de ses commandes : la chaîne apporte en moyenne 63 % des devis. En contrepartie, c'est le diffuseur qui investit le plus en coproduction (la part coproduction représente en moyenne 67 % de l'apport de la chaîne) : TF1 exploite en tout ou partie les droits de diffusion télévisuels des oeuvres qu'elle coproduit et se réserve presque l'intégralité des droits dérivés.

France 2 reste le deuxième principal investisseur dans la fiction (20 % des apports, 17 % des durées). La forte baisse des investissements de la chaîne en 1995 (- 40 %) s'explique en partie par la comptabilisation en 1994 des investissements dans la « Rivière Espérance ». Les investissements de France 3 sont, en revanche, en hausse de 16 % : ils représentent 204 millions, soit 14 % des investissements des diffuseurs dans la fiction et 9 % des durées commandées.

Avec 136 millions de francs investis. M6 est en très forte progression (+ 54 %), alors que les durées commandées sont équivalentes à celles de 1994. Le coût moyen des fictions commandées par cette chaîne augmente. C'est encore plus net pour les apports horaires qui passent de moins de 0,9 million de francs à environ 1,5 million de francs. La chaîne finance désormais plus du tiers de ses commandes contre le quart en 1994.

Avec 78 millions de francs investis, les apports de Canal + sont en légère hausse. Les apports de La Cinquième sont de 25 millions pour 57 heures commandées. La Cinquième apporte près de 70 % du financement des oeuvres commandées. Le coût horaire moyen des oeuvres commandées est beaucoup plus faible que pour les autres chaînes.

Sur un volume de production estimé à près de 5 milliards de francs en 1995, les ventes à l'étranger des programmes français ont représenté environ 450 millions de francs . Après la forte progression des chaînes thématiques en Europe, la marge de progression des exportations est désormais étroite. Depuis trois ans. le volume des ventes est relativement étale, en attendant le prochain saut quantitatif, celui du numérique. La France bénéficie de bons résultats, comparés à ceux des autres pays européens. Ainsi l'Allemagne, qui produit plus de mille deux cents heures par an. ne dépasse-t-elle pas 150 millions de francs de chiffre d'affaires à l'exportation, tous genres confondus.

Deux tiers des ventes sont dans les mains de dix sociétés, et 45 % sont le fait des cinq premières . La concentration du secteur est effective avec une prédominance des chaînes qui sont à la fois diffuseurs et distributeurs, ce qui n'est pas sans poser problème à l'heure où la détention de catalogues de droits devient un enjeu.

Les ventes à l'étranger des programmes français ont progressé d'environ 5 % entre 1994 et 1995 et représentent en volume 430 millions de francs pour l'INA et de 453 millions de francs pour TV France International.

Ces statistiques sont à prendre avec précaution, puisqu'elles ne sont que le fruit des déclarations de soixante-huit sociétés. La différence de 20 millions de francs qui oppose l'INA et TV France International concerne le secteur de l'animation. Selon l'INA, certains producteurs auraient gonflé leurs résultats. Un désaccord semblable avait eu lieu sur les chiffres de l'an passé (les ventes 1994 se seraient élevées à 405 millions de francs pour l'INA et à 430 millions de francs pour TVFI). En 1995, des filiales de diffuseurs auraient comptabilisé dans l'export leur catalogue de programmes français et étrangers, voire leurs longs métrages.

Les chiffres publiés reflètent toutefois assez bien les grandes tendances qui se dégagent dans le domaine des échanges internationaux. À périmètre constant, les exportations semblent avoir atteint un palier depuis trois ans. Les marges d'évolution sont du coup très étroites.

Si la fiction reste prédominante, l'animation est le secteur le plus en pointe sur le marché international, tandis que les documentaires émergent. L'Europe assure 70% de nos débouchés - 76% en ajoutant l'Est de l'Europe -, alors que les pays anglo-saxons sont difficiles à pénétrer : les échanges avec l'Amérique du Nord demeurent faibles (7 % des ventes). L'expansion la plus significative de nos exportations concerne le reste du monde, mais les ventes demeurent faibles en valeur absolue.

Malgré un recul du secteur en 1995, l'animation reste le genre le plus exporté. Environ le tiers des séries animées produites en France (devis total 1995 : 340 millions de francs) connaît une carrière internationale. L'animation française a bénéficié du savoir-faire de la culture BD et des aides publiques. Elle est aujourd'hui demandée dans toute l'Europe, et même au-delà, pour un chiffre d'affaires de 100 millions de francs en 1995. La Grande-Bretagne est notre premier client européen, devant l'Allemagne. Les pays asiatiques (la Corée surtout) sont, hors Europe, nos meilleurs clients.

Si la fiction reste le genre prédominant en termes de recettes à l'export (171 millions de francs en 1995). ces dernières ne représentent guère plus de 8% du volume total de la production de fiction en France (2.7 milliards de francs).

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