- L'ESSENTIEL
- I. MAINTES FOIS REPORTÉE, LA SORTIE DU
CHARBON EST TOUJOURS ENVISAGÉE DANS LA PROGRAMMATION
ÉNERGÉTIQUE GOUVERNEMENTALE EN COURS DE RÉVISION
- II. SUSCITANT UN ACCUEIL FAVORABLE, LA PROPOSITION
ENTEND FAVORISER LA CONVERSION DES CENTRALES À CHARBON
DANS LE CADRE DU NOUVEAU MÉCANISME DE CAPACITÉ
- III. LA COMMISSION A ENTENDU CONSOLIDER LA
PROPOSITION
DE LOI À TRAVERS 3 AMENDEMENTS, RÉUNIS EN 2 AXES
- I. MAINTES FOIS REPORTÉE, LA SORTIE DU
CHARBON EST TOUJOURS ENVISAGÉE DANS LA PROGRAMMATION
ÉNERGÉTIQUE GOUVERNEMENTALE EN COURS DE RÉVISION
- EXAMEN DES ARTICLES
- Article 1er
Facilitation de l'éligibilité des centrales à charbon
faisant l'objet d'une conversion au mécanisme de capacité
- Article 2
Remplacement de l'autorisation d'exploiter
par la désignation comme lauréates du mécanisme de capacité
pour les centrales de production d'électricité
à partir du charbon faisant l'objet d'une conversion
- Article 3 (nouveau)
Introduction d'une date d'entrée en vigueur
pour la proposition de loi
- Article 4 (nouveau)
Obligation pour le groupe EDF de présenter un plan de conversion
pour sa centrale à charbon de Cordemais
- Article 1er
- EXAMEN EN COMMISSION
- RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE
L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU
RÈGLEMENT DU SÉNAT
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES
- LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 461
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025
Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 mars 2025
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires
économiques (1) sur la proposition de loi
visant à
convertir des centrales
à charbon vers des
combustibles moins
émetteurs
en
dioxyde de carbone pour
permettre une transition
écologique
plus
juste socialement
(procédure accélérée),
Par M. Patrick CHAUVET,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente ; MM. Alain Chatillon, Daniel Gremillet, Mme Viviane Artigalas, MM. Franck Montaugé, Franck Menonville, Bernard Buis, Fabien Gay, Pierre Médevielle, Mme Antoinette Guhl, M. Philippe Grosvalet, vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, M. Rémi Cardon, Mme Anne-Catherine Loisier, secrétaires ; Mme Martine Berthet, MM. Yves Bleunven, Michel Bonnus, Denis Bouad, Jean-Marc Boyer, Jean-Luc Brault, Frédéric Buval, Henri Cabanel, Alain Cadec, Guislain Cambier, Mme Anne Chain-Larché, MM. Patrick Chaize, Patrick Chauvet, Pierre Cuypers, Éric Dumoulin, Daniel Fargeot, Gilbert Favreau, Mmes Amel Gacquerre, Marie-Lise Housseau, Brigitte Hybert, Annick Jacquemet, Micheline Jacques, MM. Yannick Jadot, Gérard Lahellec, Vincent Louault, Mme Marianne Margaté, MM. Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Sebastien Pla, Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Lucien Stanzione, Jean-Claude Tissot.
Voir les numéros :
Sénat : |
324, 455 et 462 (2024-2025) |
L'ESSENTIEL
Le mercredi 19 mars 2025, la commission a adopté la proposition de loi déposée par le Sénateur Khalifé Khalifé visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement. Ce texte vise à faciliter l'éligibilité des centrales à charbon faisant l'objet d'un projet de conversion au mécanisme de capacité. Le rapporteur Patrick Chauvet a souhaité éviter tout « effet de bord » dans l'application de ce texte. C'est pourquoi il a fait adopter 3 amendements, réunis en 2 axes, afin d'en renforcer la neutralité technologique et la sécurité juridique.
I. MAINTES FOIS REPORTÉE, LA SORTIE DU CHARBON EST TOUJOURS ENVISAGÉE DANS LA PROGRAMMATION ÉNERGÉTIQUE GOUVERNEMENTALE EN COURS DE RÉVISION
A. INITIALEMENT, LA SORTIE DU CHARBON DEVAIT INTERVENIR D'ICI 2022
La loi « Énergie-Climat » du 8 novembre 2019 a eu pour objectif la sortie du recours aux 4 dernières centrales à charbon - Cordemais, Le Havre, Gardanne et Saint-Avold - d'ici 2022. Pour ce faire, son article 12 a appliqué un plafond d'émission de 0,55 tonne d'équivalent en dioxyde de carbone par mégawattheure (tCO2eq/MWh) aux installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles et autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour en tirer les conséquences sociales. Sur cette base, un décret, du 5 février 2022, de même qu'une ordonnance, du 29 juillet 2020, ont été pris.
Compte tenu de la crise des prix des énergies, intervenue en 2022 et 2023, la loi « Pouvoir d'achat », du 22 août 2022, a permis le maintien des centrales à charbon en cas de menace sur la sécurité d'approvisionnement. À cette fin, ses articles 32 et 36 ont ouvert la possibilité de rehausser ce plafond par décret, et d'autoriser une reprise temporaire de cette activité. Un décret du 14 septembre 2022 et un autre du 23 août 2023 ont ainsi modifié celui précité.
Dans ce contexte, deux centrales - Le Havre et Gardanne - ont été fermées en 2021, tandis que deux autres - Cordemais et Saint-Avold - ont été maintenues.
B. DÉSORMAIS, LA SORTIE DU CHARBON POURRAIT INTERVENIR D'ICI 2027
Dans le cadre de la révision de notre programmation énergétique, toujours en cours, le Gouvernement envisage un objectif de sortie ou de conversion des 2 dernières centrales à charbon d'ici 2027, ce qui laisserait davantage de temps et de marge qu'initialement envisagé.
Tout d'abord, le plan national intégré en matière d'énergie et de climat (Pniec), transmis à la Commission européenne, prévoit ainsi de « fixer les conditions de fermeture, ou de conversion avec un combustible décarboné des dernières centrales à charbon, qui doivent être effectives au plus tard en 2027 ».
De plus, le projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), soumis à consultation publique, comprend deux actions visant, d'une part, à « organiser et accompagner la fin de la production d'électricité à partir de charbon » et, d'autre part, à « accompagner le lancement d'études ou de sites pilotes, par les exploitants, pour la conversion de centrale thermique existante en ayant recours à des combustibles moins émetteurs en CO2 dans une perspective de décarbonation à 100 % avec une attention particulière aux enjeux de disponibilité de la biomasse ».
Dans cette perspective, une centrale - Saint-Avold - pourrait être convertie.
II. SUSCITANT UN ACCUEIL FAVORABLE, LA PROPOSITION ENTEND
FAVORISER LA CONVERSION DES CENTRALES À CHARBON
DANS LE CADRE DU
NOUVEAU MÉCANISME DE CAPACITÉ
A. LA PROPOSITION DE LOI OFFRE UNE ASSISE LÉGISLATIVE À CERTAINS PROJETS DE CONVERSION DES CENTRALES À CHARBON
Composée de 2 articles, la proposition de loi vise à favoriser la conversion des centrales à charbon dans le cadre du mécanisme de capacité.
Réformé par l'article 19 de la loi de finances initiale pour 2025, le mécanisme de capacité consiste en un dispositif de rémunération, par Réseau de transport d'électricité (RTE), des exploitants de capacités de production, de stockage et d'effacement en contrepartie de leur engagement de disponibilité. Pour financer cette rémunération, une taxe de répartition des coûts est prélevée sur les fournisseurs et les consommateurs d'électricité et affectée à RTE.
Comme le précédent dispositif, le nouveau mécanisme de capacité doit être notifié par la France à la Commission européenne au titre des aides d'État ; de plus, il est encadré par le règlement « Marché de l'électricité » du 5 juin 2019, révisé par le règlement « Marché de l'électricité » du 13 juillet 2024.
Dans ce contexte, l'article 1er de la proposition de loi entend faciliter l'éligibilité des centrales à charbon faisant l'objet d'un projet de conversion au mécanisme de capacité. Aussi, il permet que le seuil d'émission de 550 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheure (gCO2/KWh) de ce mécanisme puisse être apprécié dans le cadre de cette conversion. De plus, il prévoit que les centrales ainsi sélectionnées soient considérées comme de nouvelles installations dont la production commerciale débute à compter de cette sélection, à cette même fin de facilitation de leur éligibilité au mécanisme.
De son côté, l'article 2 vise à regrouper les autorisations des centrales à charbon faisant l'objet d'une conversion dans le cadre du mécanisme de capacité. Pour ce faire, il prévoit que la sélection par ce mécanisme tienne lieu d'autorisation d'exploiter.
B. LA PROPOSITION DE LOI FAIT L'OBJET D'UN ACCUEIL FAVORABLE PARMI LES PARTIES PRENANTES INTERROGÉES
En dépit d'un calendrier très contraint, le rapporteur a organisé 6 auditions1(*) et reçu 6 contributions2(*), recueillant le point de vue de l'ensemble des parties prenantes.
Il retient de ses auditions que GazelEnergie pourrait recourir à la proposition de loi pour la conversion de sa centrale à charbon de Saint-Avold. S'agissant d'EDF, le texte pourrait lui être utile, non pour sa centrale à charbon de Cordemais, mais pour ses autres centrales thermiques à flamme, puisqu'il dispose de 13 turbines à combustion (TAC) au fioul ou au gaz et de 4 centrales thermiques à cycles combinés gaz (CCG).
Au total, le Gouvernement a indiqué que la proposition de loi serait susceptible d'être appliquée, non seulement aux centrales à charbon mais aussi aux TAC fioul ou gaz. Quant aux CCG, elles affichent normalement un seuil d'émission moins élevé que celui prévu. Pourraient selon lui être concernées les centrales à charbon de Cordemais (1 200 mégawatts - MW) et de Saint-Avold (618 MW), de même que les TAC fioul ou gaz de Montereau (370 MW), Brennilis (295 MW), Arrighi (250 MW), Vaires-sur-Marne (555 MW), Dirinon (170 MW) et Gennevilliers (210 MW). Seul GazelEnergie a fait part au Gouvernement de son souhait de bénéficier de la proposition de loi pour sa centrale à charbon de Saint-Avold.
Les chiffres clés de la proposition de loi |
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Une sortie ou une conversion des centrales à charbon pour la production d'électricité d'ici |
Un seuil d'émission de dioxyde de carbone qualifiant au mécanisme d'ajustement de |
||
grammes de dioxyde de carbone par
kilowattheure |
Centrale ayant demandé au Gouvernement de bénéficier de la proposition de loi |
Autres centrales pouvant entrer dans le champ de la proposition de loi selon le Gouvernement |
III. LA COMMISSION A ENTENDU
CONSOLIDER LA PROPOSITION
DE LOI À TRAVERS 3 AMENDEMENTS,
RÉUNIS EN 2 AXES
Approuvant la proposition de loi sur le principe, le rapporteur a entendu en consolider les modalités. Pour ce faire, il a présenté 3 amendements, réunis en 2 axes.
A. GARANTIR LA NEUTRALITÉ TECHNOLOGIQUE
En premier lieu, le rapporteur a souhaité garantir la neutralité technologique entre les différentes sources d'énergie éligibles au dispositif. C'est la raison pour laquelle il a voulu préciser le champ de la proposition de loi.
D'autre part, il a proposé deux amendements aux articles 1er et 2 tendant à préciser que cette éligibilité concerne les centrales thermiques à flamme existantes. L'objectif de la proposition de loi est de faciliter la conversion des installations existantes, non de déroger à l'article 8 du décret du 21 avril 2020, relatif à l'actuelle PPE, qui prohibe de nouvelles installations.
D'autre part, ses amendements aux articles 1er et 2 ont permis de veiller à ce que cette éligibilité concerne toutes les centrales thermiques à flamme, et non les seules centrales à charbon. Dans l'éligibilité au mécanisme de capacité, il n'y a pas lieu de différencier le charbon du fioul ou du gaz, dès lors que le seuil d'émission précité est respecté.
B. CONFORTER LA SÉCURITÉ JURIDIQUE
En second lieu, le rapporteur a entendu conforter la sécurité juridique entre les différentes législations applicables au dispositif. C'est pourquoi il a voulu ajouter plusieurs coordinations à la proposition de loi.
Tout d'abord, il a présenté un amendement créant un article 3, afin d'y préciser que l'application du texte intervient selon les mêmes modalités que le mécanisme d'ajustement auquel il se rattache, c'est-à-dire à une date fixée par décret à compter de la réponse de la commission quant à sa compatibilité avec le droit de l'Union européenne.
Plus encore, son amendement à l'article 2 est venu préciser que le remplacement de l'autorisation d'exploiter par la sélection au mécanisme de capacité laisse inchangée l'autorisation environnementale, qui peut valoir autorisation d'exploiter dans certains cas.
Hormis les amendements proposés par le rapporteur, la commission a également adopté, avec l'avis favorable de ce dernier, un amendement créant un article 4, présenté par la sénatrice Karine Daniel et les sénateurs Philippe Grosvalet, Fabien Gay et Ronan Dantec : il vise à ce qu'EDF présente un plan de conversion pour sa centrale à charbon de Cordemais, d'ici fin 2026.
Les apports essentiels de la commission
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Facilitation de
l'éligibilité des centrales à charbon
faisant l'objet
d'une conversion au mécanisme de capacité
Cet article vise à faciliter l'éligibilité des centrales de production d'électricité à partir du charbon, faisant l'objet d'une conversion, au mécanisme de capacité.
Le rapporteur approuve dans l'ensemble le dispositif proposé, tout en suggérant des compléments et des ajustements.
C'est pourquoi la commission a adopté un amendement ( COM-5), présenté par le rapporteur, visant à modifier l'article 1er.
Ainsi, il applique le dispositif proposé aux seules centrales existantes de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, à l'exclusion de celles nouvelles.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Un nouveau mécanisme de capacité ne permettant pas l'éligibilité des centrales de production d'électricité à partir du charbon, même lorsqu'elles font l'objet d'une conversion
A. Les installations de production d'électricité sont subordonnées, sauf exception, à autorisation administrative en application du code de l'énergie, depuis la loi « Service public de l'électricité » de 2000
1) Depuis la loi « Service public de l'électricité », du 10 février 20003(*), codifiée par l'ordonnance « Codification du code de l'énergie », du 9 mai 20114(*), l'article L. 311-1 du code de l'énergie dispose que l'exploitation de toute nouvelle installation de production d'électricité est subordonnée à l'obtention d'une autorisation administrative. Sont considérées comme de nouvelles installations de production celles dont la puissance installée est augmentée d'au moins 20 %.
Avec la loi « Climat-Résilience », du 22 août 20215(*), ce seuil a été relevé à au moins 25 % pour l'énergie hydraulique, dans un souci de simplification des normes applicables à ce secteur, à l'initiative de la commission des affaires économiques.
2) De plus, depuis la loi « Service public de l'électricité », du 10 février 20006(*), l'article L. 311-5 du même code dispose que l'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité est délivrée par l'autorité administrative en tenant compte de :
- l'impact de l'installation sur l'équilibre entre l'offre et la demande et sur la sécurité d'approvisionnement ;
- la nature et l'origine des sources d'énergie primaire ;
- l'efficacité énergétique de l'installation, comparée aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable ;
- les capacités techniques, économiques et financières du candidat ou du demandeur ;
- l'impact de l'installation sur les objectifs de lutte contre l'aggravation de l'effet de serre.
Cette autorisation d'exploiter doit aussi être compatible avec la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).
C'est la loi « Transition énergétique », du 17 août 20157(*), qui a fixé les critères relatifs à l'origine des sources d'énergie, à l'impact sur le changement climatique, à la compatibilité avec la PPE ainsi qu'aux capacités techniques, économiques et financières.
3) Quant à l'article L. 311-6 du code de l'énergie, depuis la loi « Service public de l'électricité », du 10 février 20008(*), il dispose que les installations dont la puissance installée par site de production est inférieure ou égale à un seuil, dépendant du type d'énergie utilisée et fixé par décret en Conseil d'État, sont réputées autorisées.
Les installations existantes, régulièrement établies au 11 février 2000, sont également réputées autorisées.
En application de l'article L. 311-6 du code de l'énergie, l'article R. 331-2 du même code précise ainsi que sont réputées autorisées :
- les installations utilisant l'énergie radiative du soleil jusqu'à 50 mégawatts (MW) ;
- les installations utilisant l'énergie mécanique du vent jusqu'à 50 MW ;
- les installations utilisant, à titre principal, l'énergie dégagée par la combustion ou l'explosion de matières non fossiles d'origine animale ou végétale, jusqu'à 50 MW ;
- les installations utilisant, à titre principal, l'énergie dégagée par la combustion ou l'explosion de biogaz, jusqu'à 50 MW ;
- les installations utilisant l'énergie des nappes aquifères ou des roches souterraines, jusqu'à 50 MW ;
- les installations valorisant les déchets ménagers ou assimilés, à l'exception de celles utilisant du biogaz, jusqu'à 50 MW ;
- les installations utilisant l'énergie houlomotrice, hydrothermique ou hydrocinétique implantées sur le domaine public maritime, jusqu'à 50 MW ;
- les installations utilisant, à titre principal, du gaz naturel, jusqu'à 20 MW ;
- les installations utilisant, à titre principal, d'autres combustibles fossiles que le gaz naturel et le charbon, jusqu'à 10 MW ;
- les installations de production d'électricité en mer utilisant l'énergie mécanique du vent, jusqu'à 1 MW.
B. La sortie des centrales de production d'électricité à partir du charbon d'ici 2022 a été prévue par la loi « Énergie-Climat » de 2019 mais modifiée par la loi « Pouvoir d'achat » de 2022
La loi « Énergie-Climat », du 8 novembre 20199(*), a eu pour objectif la sortie du recours aux 4 dernières centrales à charbon - de Cordemais, Le Havre, Gardanne et Saint-Avold - d'ici 2022.
Pour ce faire, elle a appliqué, à l'article L. 311-5-3 du code de l'énergie, un plafond d'émissions, à compter du 1er janvier 2022, pour les installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles situées sur le territoire métropolitain continental émettant plus de 0,55 tonne d'équivalents dioxyde de carbone par mégawattheure (tCO2eq/MWh). Un décret n° 2022-123 du 5 février 202210(*) a été pris en ce sens.
De plus, la loi a prévu une habilitation à légiférer par ordonnance afin de tirer les conséquences, sur le plan du droit social, de cette sortie. Sur ce fondement a été prise l'ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 202011(*). Un projet de loi de ratification n° 680 (2021-2022) a été déposé au Sénat le 15 juin 2022.
Cependant, en 2022 et 2023, la guerre russe en Ukraine a lourdement impacté les marchés gaziers et pétroliers internationaux, tandis que le phénomène de corrosion sous contrainte a lourdement impacté la production nationale d'électricité nucléaire. C'est pourquoi la loi « Pouvoir d'achat » du 22 août 202212(*) a consacré la possibilité de rehausser par décret ce plafond d'émissions, en cas de menace sur la sécurité d'approvisionnement, et a permis une reprise temporaire d'activité pour ces installations de production, s'agissant du droit social. Aussi le décret précité a-t-il été modifié à deux reprises13(*),14(*).
Dans ce contexte, les centrales à charbon du Havre et de Gardanne ont fermé en 2021, tandis que celles de Cordemais et de Saint-Avold ont été maintenues.
C. Une sortie ou une conversion des centrales de production d'électricité à partir du charbon d'ici 2027 est envisagée par le Gouvernement, dans le cadre de la nouvelle programmation énergétique
Le Gouvernement envisage désormais la sortie ou la conversion des deux dernières centrales à charbon encore en fonctionnement d'ici 2027, dans le cadre de documents programmatiques, dont la publication règlementaire est réalisée ou attendue.
Tout d'abord, le plan national intégré en matière d'énergie et de climat (Pniec), présenté à la Commission européenne le 11 novembre 2023, prévoit de « fixer les conditions de fermeture, ou de conversion avec un combustible décarboné des dernières centrales à charbon, qui doivent être effectives au plus tard en 2027 ».
Plus encore, le projet de stratégie française pour l'énergie et le climat (Sfec), mis en consultation le 22 novembre 2023, mentionne le défi de la « fin de la production d'électricité à partir de charbon en 2027 » et la nécessité de « fixer les conditions de reconversion des dernières centrales à charbon d'ici 2027 ».
Dans le même esprit, le projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), mis en consultation le 4 novembre 2024, comprend deux actions visant, d'une part, à « organiser et accompagner la fin de la production d'électricité à partir de charbon » et, d'autre part, à « arrêter la production d'électricité à partir de charbon d'ici 2027, en étudiant, le cas échéant, les opportunités de conversion à des combustibles décarbonnés (biomasse par exemple) »15(*).
Quant au projet de stratégie nationale bas-carbone (SNBC)16(*), mis en consultation la même date, il prévoit comme une hypothèse la « sortie des énergies thermiques fossiles », définie comme la « fin de la production d'électricité à partir de charbon en 2027 et [la] sortie de la dépendance aux énergies fossiles en 2050, contre un mix énergétique composé à près de 60 % d'énergies fossiles en 2021 ».
D. Un mécanisme de capacité a été institué par le projet de loi de finances initiale pour 2025
Conformément à la loi « Service public de l'électricité », du 10 février 200017(*), codifiée par l'ordonnance « Codification du code de l'énergie », du 9 mai 201118(*), les articles L. 335-1 à L. 335-6 du code de l'énergie ont institué l'actuel mécanisme de capacité : il s'agit d'un dispositif décentralisé, fondé sur l'obligation d'achat, par les fournisseurs d'électricité, de certificats de capacité émis par les producteurs d'électricité, certifiés par le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, Réseau de transport d'électricité (RTE).
Ce mécanisme a fait l'objet d'une notification à la Commission européenne au titre du régime des aides d'État, qui l'a autorisé pour une période de 10 ans, dans sa décision du 8 novembre 201619(*).
Depuis la loi de finances initiale pour 202520(*), les articles L. 316-1 à 316-13 du code de l'énergie déterminent le nouveau mécanisme de capacité : il s'agit désormais d'un dispositif centralisé, fondé sur l'acquisition directe par RTE de capacités auprès des producteurs, en contrepartie d'un prélèvement annuel sur les fournisseurs et les consommateurs d'électricité.
Ce mécanisme consiste donc en une rémunération versée par le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité aux exploitants de capacités de production, de stockage et d'effacement de consommation, en contrepartie de leur engagement de disponibilité (article L. 316-1). Pour le financement de cette rémunération, une taxe de répartition des coûts du mécanisme de capacité est affectée au gestionnaire (article L. 316-2).
Le ministre chargé de l'énergie peut suspendre l'application du mécanisme (article L. 316-3) ou arrêter des périodes de livraison ou de tension (article L. 316-4).
Le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité peut sélectionner les installations de production, de stockage et d'effacement (article L. 316-6) et procéder à la certification des capacités de production, de stockage et d'effacement, à la comptabilité des engagements de disponibilité, à la constatation et au recouvrement de la taxe de répartition des coûts (articles L. 321-16, 321-16-1 et 321-17).
La Commission de régulation de l'énergie (CRE) peut estimer les quantités d'électricité consommées (article L. 316-5) et prononcer des sanctions sur les exploitants de capacités de production, de stockage et d'effacement et les acteurs des marchés sur lesquels sont négociés les produits du mécanisme de capacité (articles 316-10 et 316-11).
Ne peuvent voir leurs capacités certifiées les installations de production dont la production commerciale a débuté à compter du 4 juillet 2019 et qui émettent, soit plus de 550 grammes de dioxyde de carbone issu de carburant fossile par kilowattheure (gCO2/KWh) d'électricité, soit plus de 550 grammes issus de carburant fossile et plus de 350 kilogrammes issus de carburant fossile par kilowatt (kgCO2/kW) de puissance électrique. Les modalités de calcul des émissions pour l'atteinte des plafonds sont déterminées par décret (article L. 316-9).
Tout comme le mécanisme précédent, ce mécanisme doit faire l'objet d'une notification à la Commission européenne au titre des aides d'État.
E. Les règlements « Marché de l'électricité », du 5 juin 2019 et du 13 juin 2024, déterminent les principes d'organisation du mécanisme de capacité à l'échelon européen
Le règlement « Marché de l'électricité », du 5 juin 201921(*), définit les principes généraux (article 21) et les principes de conception (article 22) du mécanisme de capacité.
Parmi ces principes, sont précisées les conditions suivantes en matière d'émissions CO2 :
« Les mécanismes de capacité incorporent les exigences énumérées ci-après concernant les limites en matière d'émissions de CO2 :
a) à partir du 4 juillet 2019 au plus tard, une capacité de production dont la production commerciale a débuté à cette date ou après cette date et qui émet plus de 550 g de CO2 issu de carburant fossile par kWh d'électricité n'est pas engagée ni ne reçoit de paiement ou d'engagements pour des paiements futurs dans le cadre d'un mécanisme de capacité ;
b) à partir du 1er juillet 2025 au plus tard, une capacité de production dont la production commerciale a débuté avant le 4 juillet 2019 et qui émet plus de 550 gr de CO2 issu de carburant fossile par kWh d'électricité et plus de 350 kg de CO2 issu de carburant fossile en moyenne par an et par kWe installé n'est pas engagée ni ne reçoit de paiements ou d'engagements pour des paiements futurs dans le cadre d'un mécanisme de capacité.
La limite d'émissions de 550 gr de CO2 issu de carburant fossile par kWh d'électricité et la limite de 350 kg de CO2 issu de carburant fossile en moyenne par an par kWe installé visées au premier alinéa, points a) et b), sont calculées sur la base de l'efficacité de la conception de l'unité de production, à savoir le rendement net à capacité nominale selon les normes pertinentes prévues par l'Organisation internationale de normalisation. »
Le règlement « Marché de l'électricité », du 13 juin 202422(*), a modifié le règlement précité du 5 juin 2019, dont les principes généraux et les principes de conception du mécanisme de capacité
D'une part, un article 19 octies a prévu que les États membres appliquant un mécanisme de capacité envisagent les adaptations nécessaires pour promouvoir la participation de la flexibilité d'origine non fossile.
D'autre part, un article 19 nonies a supprimé la condition selon laquelle les mécanismes de capacité sont temporaires mais maintenu celle selon laquelle ils sont approuvés par la Commission européenne pour une durée de dix ans.
Autre point, le même article 19 nonies a introduit la dérogation suivante aux conditions susmentionnées en matière d'émissions de CO2 (paragraphe 2 ter de l'article 64 du règlement du 5 juin 2019) :
« Les États membres peuvent demander qu'une capacité de production dont la production commerciale a débuté avant le 4 juillet 2019 et qui émet plus de 550 g de CO2 issu de carburant fossile par kWh d'électricité et plus de 350 kg de CO2 issu de carburant fossile en moyenne par an et par kWe installé soit soumise au respect des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, exceptionnellement, soit engagée ou reçoivent des paiements ou des engagements pour des paiements futurs après le 1er juillet 2025 dans le cadre d'un mécanisme de capacité approuvé par la Commission avant le 4 juillet 2019. »
Enfin, le même article 19 nonies a prévu que la Commission soumette un rapport au Parlement européen et au Conseil, d'ici le 17 janvier 2025, puis des propositions après concertation avec les États membres, d'ici le 17 avril 2025, en vue de rationaliser et de simplifier le processus d'évaluation des mécanismes de capacité, le cas échéant.
II. Le dispositif envisagé - Une modification visant à faciliter l'éligibilité des centrales de production d'électricité à partir de charbon faisant l'objet d'une conversion au mécanisme de capacité
L'article premier vise à compléter l'article L. 311-1 du code de l'énergie, en précisant que :
- les nouvelles installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles émettant plus de 550 gCO2/KWh converties pour atteindre un niveau inférieur à ce seuil sont considérées comme de nouvelles installations de production ;
- la date de début de production commerciale est réputée intervenir à compter de la date à laquelle la nouvelle installation de production est autorisée.
III. La position de la commission - Une évolution pertinente mais perfectible des conditions d'éligibilité au mécanisme de capacité des centrales de production d'électricité à partir du charbon faisant l'objet d'un projet de conversion
A. Le rapporteur s'est penché sur l'opportunité juridique du dispositif proposé
Interrogée par le rapporteur, la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a indiqué que la proposition de loi permet de déroger à l'article 8 du décret du 21 avril 202023(*) fixant l'actuelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui prévoit qu'aucune nouvelle autorisation d'exploiter ne peut être octroyée à des installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles selon un seuil de puissance.
De plus, la DGEC a ajouté que la proposition de loi permet de lever toute ambiguïté dans l'éligibilité des centrales à charbon converties au mécanisme de capacité, et la possibilité d'un soutien pluriannuel qu'il prévoit, d'une part, en les qualifiant de nouvelles installations et, d'autre part, en faisant démarrer leur production commerciale à cette date.
Le premier point (le caractère réputé nouveau de l'installation) permet de déroger à l'article L. 316-6 du code de l'énergie, tel que créé par la loi de finances initiale pour 2025, qui dispose que les procédures concurrentielles instituées par le gestionnaire du réseau de transport public d'électricité « peuvent prévoir des modalités spécifiques pour les nouvelles capacités de production, de stockage ou d'effacement, y compris en intégrant une rémunération pluriannuelle pour leur disponibilité ».
Le second point (le caractère nouveau de la production) permet de déroger à l'article L. 316-9 du même code, tel que créé par la même loi précitée, qui dispose qu'« une installation de production dont la production commerciale a débuté à compter du 4 juillet 2019 et qui émet plus de 550 grammes de dioxyde de carbone issu de carburant fossile par kilowattheure d'électricité ne peut voir sa capacité certifiée » et qu'« une installation de production dont la production commerciale a débuté avant le 4 juillet 2019 et qui émet plus de 550 grammes de dioxyde de carbone issu de carburant fossile par kilowattheure d'électricité et plus de 350 kilogrammes de dioxyde de carbone issu de carburant fossile en moyenne par kilowatt de puissance électrique installée ne peut voir sa capacité certifiée. »
B. Le rapporteur s'est également interrogé sur l'application pratique du dispositif proposé
Sollicitée par le rapporteur, la DGEC a indiqué que la proposition de loi serait susceptible d'être appliquée, non seulement aux centrales à charbon mais aussi aux turbines à combustion (TAC) fioul ou gaz. Quant aux centrales thermiques à cycle combiné gaz (CCG), elles affichent normalement un seuil d'émission moins élevé que celui prévu.
Selon elle, pourraient ainsi être concernées par la proposition de loi les centrales charbon de Cordemais (1200 mégawatts - MW) et de Saint-Avold (618 MW), de même que les TAC fioul ou gaz de Montereau (370 MW), Brennilis (295 MW), Arrighi (250 MW), Vaires-sur-Marne (555 MW), Dirinon (170 MW) et Gennevilliers (210 MW). Elle a ajouté que seul l'exploitant de la centrale de Saint-Avold a fait part de son souhait de bénéficier de la proposition de loi.
Au reste, RTE n'a relevé l'intérêt que du seul exploitant de la centrale de Saint-Avold, GazelEnergie, et non de celui de Cordemais, EDF.
C. Le rapporteur s'est aussi penché sur l'articulation entre le dispositif proposé et le droit de l'Union européenne
À la demande du rapporteur, la DGEC a fait part de son analyse au sujet de la conformité de la proposition de loi au droit de l'Union européenne.
Tout d'abord, elle a rappelé que le mécanisme de capacité est régi par le régime des aides d'État. Dans sa décision du 8 novembre 2016 susmentionnée, la Commission européenne a autorisé l'actuel mécanisme, dont la validation s'achève fin 2026. Une nouvelle notification est donc nécessaire. Des échanges de pré-notification sont en cours, afin d'aboutir courant 2025.
Plus encore, elle a indiqué que depuis sa création, le mécanisme de capacité est également encadré par le règlement « Marché de l'électricité », du 5 juin 2019, tel que modifié par le règlement du 13 juin 2024. Ces évolutions ont été réalisées dans le respect du principe de subsidiarité et n'ont pas eu d'impact sur l'actuel mécanisme.
RTE a confirmé avoir procédé à plusieurs évolutions conformément au droit européen entre 2015 et 2016 : renforcement de la concurrence ; renforcement de la transparence ; introduction d'une participation transfrontalière ; introduction d'un mécanisme budgétaire.
S'agissant de la proposition de loi, la DGEC a affirmé qu'elle n'a pas interrogé la Commission européenne spécifiquement sur ce texte puisqu'elle n'en est pas à l'initiative, en ces termes : « La DGEC n'est pas à l'initiative de la proposition de loi visant à convertir les centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement. Elle n'a pas interrogé la Commission européenne spécifiquement sur les dispositions prévues par la proposition de loi ».
Pour autant, interrogée sur les seuils d'émission et date d'exploitation choisis par la proposition de loi, elle a indiqué que l'article premier « ne semble pas poser de difficulté particulière » et que l'article 2 « est donc admissible en droit européen ».
En particulier, elle a précisé que l'atteinte du seuil d'émission peut être appréciée, non dès le dépôt de la candidature, au cours de la période contractuelle, ainsi : « Les échanges que la DGEC entretient avec la Commission européenne sur la thématique générale des mécanismes de capacité confirment que le respect du seuil d'émission de 550 kgCO2e/MWh [...] est vérifié ex-post après la période d'engagement du contrat liant la centrale au mécanisme de capacité et que ce seuil ne constitue pas un critère à respecter lors de l'année de candidature à l'enchère du mécanisme de capacité mais uniquement lors de la période d'engagement contractuel du mécanisme de capacité. »
D. Le rapporteur s'est enfin interrogé sur plusieurs modalités d'application du dispositif proposé
À la demande du rapporteur, la DGEC a fait part de son point de vue sur plusieurs ajustements ou compléments pouvant être apportés à la proposition de loi.
S'agissant des technologies de conversion, elle a estimé préférable de ne pas les préciser, la référence au seuil d'émission étant suffisante dans un souci de neutralité technologique.
Concernant les modalités de conversion, elle a également jugé préférable de ne pas les préciser, un contrôle ex-post dans le cadre du mécanisme de capacité devant déjà faire peser une obligation de résultat.
De son côté, RTE a précisé qu'il vérifiera le respect des seuils d'émission par les capacités participantes, sur la base d'éléments déclaratifs transmis.
Au sujet de la rédaction en tant que telle de la proposition de loi, la DGEC n'a pas émis d'avis sur l'éventualité d'une meilleure codification. En revanche, elle n'a pas estimé nécessaire d'introduire des coordinations, tant dans le code de l'énergie que dans celui de l'environnement, y compris s'agissant de l'autorisation environnementale qui peut tenir lieu d'autorisation d'exploiter, selon l'article L. 181-2 du code de l'environnement. Elle n'a pas non plus jugé utile de prévoir une application dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental (ZNI)24(*), considérant que les centrales fossiles y sont en phase finale de conversion et que le mécanisme de capacité n'a pas vocation à s'y appliquer.
Ainsi la direction a-t-elle indiqué s'agissant de l'articulation avec l'autorisation environnementale : « Il pourrait donc être considéré que, dans le cas où l'installation serait lauréate du mécanisme de capacité, l'autorisation environnementale n'aurait pas besoin de porter l'autorisation d'exploiter. A contrario, il serait impossible d'octroyer une autorisation environnementale tant que l'installation n'aura pas été lauréate du mécanisme de capacité, puisqu'en l'absence de cette désignation comme lauréat, les autres critères fixés par le code de l'énergie s'agissant de l'autorisation d'exploiter trouveraient à s'appliquer et ne seraient pas respectés. »
Pour ce qui le concerne, RTE a confirmé l'absence d'application du mécanisme de capacité aux ZNI mais s'est interrogé sur l'articulation de la proposition de loi avec l'article L. 311-5 du code de l'énergie, relatif à l'autorisation d'exploiter des installations de production d'électricité. Il a ajouté la possibilité de préciser les technologies et les modalités de conversion envisagées.
Quant à la date d'entrée en vigueur de la proposition de loi, la DGEC a reconnu la nécessité de l'ajuster, afin que ce texte s'applique au même moment que le mécanisme de capacité, en application du V de l'article 19 de la loi de finances pour 2025, c'est-à-dire à une date fixée par décret ne pouvant être postérieure de plus de six mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État.
Aussi la direction a-t-elle indiqué au sujet de la précision de la date d'entrée en vigueur : « La loi de finances prévoit que les évolutions du mécanisme de capacité entrent en vigueur à une date fixée par décret et n'intervenant pas plus de six mois après l'approbation du dispositif par la Commission. Il serait en effet préférable que cette proposition de loi entre en vigueur à la même date que les évolutions du mécanisme de capacité, c'est-à-dire à la date prévue par décret, d'autant plus que cette proposition de loi renvoie à des articles qui ne seront créés qu'à cette date-là (notamment, il n'y a actuellement pas d'article L. 316-6 et L. 316-9 dans le code de l'énergie). »
Enfin, RTE a confirmé la nécessité d'appliquer la proposition de loi à la même date que celle prévue par le mécanisme de capacité.
E. Plusieurs acteurs économiques ont fait part d'observations ou de demandes au rapporteur
L'ensemble des acteurs interrogés par le rapporteur25(*) ont salué, sur le principe, le dispositif proposé.
GazelEnergie s'est félicité de ce dispositif, utile à la centrale de Saint-Avold. Avec une puissance de 600 MW et une production d'un mois par an environ, cette centrale représente 500 emplois directs et indirects locaux et 5,5 millions d'euros de recettes fiscales locales. Sa conversion vers du gaz ou du biogaz est envisagée par l'exploitant.
Le graphique ci-dessous, fourni par l'exploitant, compare les émissions de la centrale de Saint-Avold ainsi convertie au gaz ou au biogaz avec les autres types de centrales thermiques à flamme.
De son côté, le groupe EDF a estimé le dispositif positif sous réserve d'être encadré. Il a rappelé que ce dispositif n'est pas utile à la centrale de Cordemais, dont la puissance représente 1,2 GW, puisque le groupe a annoncé son intention d'arrêter cette centrale d'ici 2027, la conversion vers les pellets ou le gaz ayant été étudiée puis écartée pour des raisons technico-économiques. En revanche, il pourrait être utile pour les autres centrales thermiques à flamme du groupe, qui dispose de 13 TAC affichant une puissance de 1,8 GW - dont 573 MW au gaz et 1 270 MW au fioul - et de 4 CCG présentant une puissance de 1,9 GW. Au total, le parc thermique à flamme du groupe représente 5 GW, soit 6 % de la capacité du parc national, 1 % de la production nationale mais 20 % des services système fréquence puissance.
Le groupe a précisé que la possibilité faite par la proposition de loi d'autoriser des actifs existants de production d'électricité fonctionnant à partir de combustibles fossiles ne doit pas être ouverte à de nouveaux actifs. De plus, il a plaidé pour laisser inchangées les exigences prévues par le code de l'environnement, mobiliser les seuls actifs nécessaires à la sécurité d'approvisionnement et prohiber le subventionnement en complément de la rémunération. Il a aussi proposé d'ajouter un jalon de décarbonation, des parts de gaz renouvelable ou encore des conditions du recours au biométhane.
Quant à la CRE, elle a suggéré de clarifier la notion de conversion, afin que les projets soient admis dans le cadre des procédures concurrentielles du mécanisme de capacité.
Pour ce qui le concerne, le rapporteur approuve dans l'ensemble le dispositif proposé, tout en suggérant des compléments et des ajustements.
C'est pourquoi la commission a adopté un amendement (COM-5), présenté par le rapporteur, visant à modifier l'article 1er.
Ainsi, il applique le dispositif proposé aux seules centrales existantes de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, à l'exclusion de celles nouvelles.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 2
Remplacement de l'autorisation
d'exploiter
par la désignation comme lauréates du
mécanisme de capacité
pour les centrales de production
d'électricité
à partir du charbon faisant l'objet d'une
conversion
Cet article tend à prévoir que la désignation comme lauréates du mécanisme de capacité vaut autorisation d'exploiter, s'agissant des centrales de production d'électricité à partir du charbon faisant l'objet d'une conversion.
Le rapporteur soutient sur son principe le dispositif proposé, tout en présentant des compléments et des ajustements.
C'est pourquoi la commission a adopté un amendement ( COM-6), présenté par le rapporteur, visant à modifier l'article 2.
Tout d'abord, il applique le dispositif proposé aux seules centrales existantes de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, à l'exclusion de celles nouvelles.
Plus encore, il laisse inchangée l'autorité environnementale, notamment lorsqu'elle tient lieu de l'autorisation d'exploiter précitée, dans le cadre de ce regroupement de procédures.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Des possibilités de dérogation à l'autorisation d'exploiter ne bénéficiant pas aux installations de production d'électricité à partir du charbon, même lorsqu'elles font l'objet d'une conversion
Le commentaire d'article précédent présente en détail le régime d'autorisation des installations de production d'électricité, l'objectif de sortie ou de conversion des installations de production d'électricité à partir du charbon ainsi que les modalités d'application du mécanisme de capacité.
Comme indiqué plus haut, depuis la loi « Service public de l'électricité », du 10 février 200026(*), codifiée par l'ordonnance « Codification du code de l'énergie », du 9 mai 201127(*), l'article L. 311-6 du code de l'énergie dispose que les installations dont la puissance installée par site de production est inférieure ou égale à un seuil, dépendant du type d'énergie utilisée et fixé par décret en Conseil d'État, sont réputées autorisées.
Les installations existantes, régulièrement établies au 11 février 2000, sont également réputées autorisées.
Selon l'article R. 331-2 du code de l'énergie, plusieurs catégories d'installations sont réputées autorisées28(*), en application de l'article L. 311-6 du même code.
De plus, les codes de l'énergie et de l'environnement prévoient quelques hypothèses dans lesquelles l'autorisation d'exploiter n'est pas requise :
· Tout d'abord, l'article L. 311-5-6 du code de l'énergie dispose que l'autorisation de création d'une installation nucléaire de base (INB) tient lieu de l'autorisation d'exploiter mentionnée à l'article L. 311-5 du code même code ;
· S'agissant de l'article L. 311-11 du même code, il dispose que la désignation à la procédure de mise en concurrence prévue pour les projets d'électricité renouvelable à l'article L. 311-10 dudit code emporte l'attribution de l'autorisation d'exploiter précitée ;
· Concernant l'article L. 312-2 du même code de l'énergie, il dispose que les titres relatifs à l'utilisation de l'énergie hydraulique valent l'autorisation d'exploiter susmentionnée ;
· Enfin, dans le même esprit, les articles L. 181-2 et L. 181-3 du code de l'environnement prévoient le cas dans lequel l'autorisation environnementale tient lieu de l'autorisation d'exploiter précitée.
II. Le dispositif envisagé - Un remplacement de l'autorisation d'exploiter par la désignation comme lauréates du mécanisme de capacité pour les centrales de production d'électricité à partir du charbon fait l'objet d'une conversion
L'article 2 tend à compléter l'article L. 311-6 du code de l'énergie, en ajoutant que, pour les installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles émettant plus de 550 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheures (gCO2/KWh) converties pour atteindre un niveau inférieur à ce seuil, la désignation en tant que lauréates des procédures concurrentielles des capacités de production, de stockage et d'effacement emporte l'attribution de l'autorisation d'exploiter.
III. La position de la commission - Un remplacement utile mais améliorable de l'autorisation d'exploiter par la désignation comme lauréates du mécanisme de capacité pour les centrales de production d'électricité à partir du charbon fait l'objet d'une conversion
A. Le rapporteur rappelle que les autorités administratives ont largement approuvé le dispositif proposé
Le commentaire d'article précédent présente ainsi en détail leur position sur la proposition de loi.
On rappellera simplement que, pour la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), le dispositif proposé :
- a pour effet de lever l'interdiction de délivrance de nouvelles autorisations d'exploiter aux installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles selon un seuil de puissance, figurant dans le décret du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE)29(*) ;
- comporte un seuil d'émission admissible au regard du règlement « Marché de l'électricité », du 5 juin 2019, tel que modifié par celui du 13 juin 202430(*) ;
- ne nécessite pas de coordination s'agissant des contrôles et des sanctions, comme la suspension ou le retrait, prévus par le mécanisme de capacité ou l'autorisation d'exploiter, ni avec l'autorisation environnementale, pouvant tenir lieu de cette autorisation d'exploiter, selon les articles L. 181-2 et L. 181-3 du code de l'environnement ;
- suppose une entrée en vigueur au même moment que celle du mécanisme de capacité, c'est-à-dire à une date fixée par décret ne pouvant être postérieure de plus de six mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État, en application de l'application de la loi de finances pour 202531(*).
B. Le rapporteur rappelle également que les acteurs économiques ont globalement soutenu le dispositif proposé
Le commentaire d'article précédent présente ainsi en détail leur position sur la proposition de loi.
On rappellera simplement que, sur le fond, GazelEnergie pourrait recourir au dispositif proposé pour sa centrale au charbon de Saint-Avold et le groupe EDF pour ses TAC au fioul ou au gaz ou ses CCG au gaz, mais non pour sa centrale au charbon de Cordemais.
De plus, sur la forme, la CRE a plaidé pour préciser la notion de conversion, afin que les projets soient admis dans le cadre des procédures concurrentielles du mécanisme de capacité, et le groupe EDF pour laisser inchangées les exigences prévues par le code de l'environnement.
Pour ce qui le concerne, le rapporteur soutient sur son principe le dispositif proposé, tout en présentant des compléments et des ajustements.
C'est pourquoi la commission a adopté un amendement (COM-6), présenté par le rapporteur, visant à modifier l'article 2.
Tout d'abord, il applique le dispositif proposé aux seules centrales existantes de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, à l'exclusion de celles nouvelles.
Plus encore, il laisse inchangée l'autorité environnementale, notamment lorsqu'elle tient lieu de l'autorisation d'exploiter précitée, dans le cadre de ce regroupement de procédures.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 3
(nouveau)
Introduction d'une date d'entrée en vigueur
pour la
proposition de loi
Créé par un amendement ( COM-7) présenté par le rapporteur, cet article additionnel a pour objet d'introduire une date d'entrée en vigueur pour les articles 1er et 2 de la proposition de loi.
La commission a adopté l'article ainsi rédigé.
Créé par un amendement (COM-7) présenté par le rapporteur, cet article additionnel a pour objet d'appliquer la proposition de loi à compter de la réponse de la Commission européenne quant à la compatibilité du mécanisme de capacité avec le droit de l'Union européenne en matière d'aide d'État, ainsi que le prévoit le IV de l'article 19 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025.
Cette date d'entrée en vigueur a été jugée préférable par la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), en ces termes : « La loi de finances prévoit que les évolutions du mécanisme de capacité entrent en vigueur à une date fixée par décret et n'intervenant pas plus de six mois après l'approbation du dispositif par la Commission. Il serait en effet préférable que cette proposition de loi entre en vigueur à la même date que les évolutions du mécanisme de capacité, c'est-à-dire à la date prévue par décret, d'autant plus que cette proposition de loi renvoie à des articles qui ne seront créés qu'à cette date-là (notamment, il n'y a actuellement pas d'article L. 316-6 et L. 316-9 dans le code de l'énergie). »
Elle a également été considérée comme pertinente par Réseau de transport d'électricité (RTE), ainsi : « cela semblerait pertinent dans le cas où cette proposition de loi aurait vocation à être votée ».
La commission a adopté l'article ainsi rédigé.
Article 4
(nouveau)
Obligation pour le groupe EDF de présenter un plan de
conversion
pour sa centrale à charbon de Cordemais
Introduit par un amendement de la sénatrice Karine Daniel et des sénateurs Ronan Dantec, Fabien Gay et Philippe Grosvalet ( COM-4), ayant reçu l'avis favorable du rapporteur, il vise à obliger le groupe EDF à présenter un plan de conversion permettant d'atteindre un seuil d'émission de moins de 550 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheure (gCO2/KWh) pour sa centrale à charbon de Cordemais d'ici le 31 décembre 2026.
La commission a adopté l'article ainsi rédigé.
Introduit par un amendement de la sénatrice Karine Daniel et des sénateurs Ronan Dantec, Fabien Gay et Philippe Grosvallet (COM-4), ayant reçu l'avis favorable du rapporteur, il vise à obliger le groupe EDF à présenter un plan de conversion permettant d'atteindre un seuil d'émissions de moins de 550 gCO2/KWh pour sa centrale à charbon de Cordemais d'ici le 31 décembre 2026.
Dans le cadre de ses auditions, le groupe EDF a indiqué au rapporteur qu'il pourrait recourir à la proposition de loi pour ses turbines à combustion (TAC) au fioul ou gaz ou ses centrales thermiques à cycle combiné gaz (CCG), mais non pour sa centrale à charbon de Cordemais. En effet, le groupe a annoncé son intention d'arrêter cette centrale d'ici 2027, la conversion vers les pellets ou le gaz ayant été étudiée puis écartée pour des raisons technico-économiques.
Dans ce contexte, le rapporteur a émis un avis de favorable sur l'amendement précité, considérant qu'il donnerait l'occasion au groupe d'indiquer, de manière plus précise et plus détaillée, son intention sur le devenir de cette centrale à charbon. Ayant invité les auteurs a rectifié leur amendement initialement déposé, il a veillé à ce que la rédaction adoptée in fine ne s'applique qu'aux centrales à charbon (et non à celles au fioul ou au gaz) et ne comporte pas de mentions superfétatoires, s'agissant des technologies à utiliser (production ou stockage d'énergie) ou des conditions à respecter (maintien de 50 % de la puissance installée).
La commission a adopté l'article ainsi rédigé.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 19 mars 2025, la commission a examiné le rapport de M. Patrick Chauvet sur la proposition de loi n° 324 (2024-2025) visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous examinons ce matin la proposition de loi visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement, dont Patrick Chauvet est le rapporteur.
Je remercie de leur présence l'auteur de la proposition de loi, notre collègue Khalifé Khalifé, ainsi que la rapporteure pour avis pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, Christine Herzog.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - À mon tour, je tiens à saluer l'auteur de la proposition de loi, que j'ai auditionné, et la rapporteure pour avis pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, que j'ai associée à mes auditions et à qui j'ai présenté mes amendements. Je veux leur dire ma conviction quant à l'intérêt de ce texte localement bien sûr, pour le projet qu'il permet, mais aussi nationalement. Soyez assurés de ma détermination sans faille à faire aboutir la proposition de loi dans le cadre de la navette qui s'ouvre aujourd'hui.
Maintes fois reportée, la sortie du charbon est toujours prévue par le Gouvernement. Comme vous le savez, la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat a eu pour objectif la sortie du recours aux quatre dernières centrales à charbon - Cordemais, Le Havre, Gardanne et Saint-Avold - d'ici à 2022. Pour ce faire, son article 12 a appliqué un plafond d'émission aux installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles et a autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour en tirer les conséquences sociales. Sur cette base, un décret, du 5 février 2022, et une ordonnance, du 29 juillet 2020, ont été pris.
Compte tenu de la crise des prix des énergies, intervenue en 2022 et 2023, la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat a permis le maintien de ces installations en cas de menace sur la sécurité d'approvisionnement. À cette fin, ses articles 32 et 36 ont prévu de rehausser le plafond dont je viens de parler par décret et d'autoriser une reprise temporaire de cette activité. Un décret, du 14 septembre 2022, et un autre, du 23 août 2023, ont ainsi modifié celui précité.
Dans ce contexte, deux centrales - Le Havre et Gardanne - ont été fermées en 2021, tandis que deux autres - Cordemais et Saint-Avold - ont été maintenues.
Dans le cadre de la révision de notre programmation énergétique, toujours en cours, le Gouvernement envisage un objectif de sortie ou de conversion des deux dernières centrales à charbon d'ici 2027, ce qui laisserait davantage de temps et de marge qu'initialement envisagé.
Tout d'abord, le plan national intégré en matière d'énergie et de climat (Pniec), transmis à la Commission européenne, prévoit de « fixer les conditions de fermeture ou de conversion avec un combustible décarboné des dernières centrales à charbon, qui doivent être effectives au plus tard en 2027 ».
De plus, le projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), soumis à consultation publique, vise d'une part, à « organiser et accompagner la fin de la production d'électricité à partir de charbon » et, d'autre part, à « accompagner le lancement d'études ou de sites pilotes, par les exploitants, pour la conversion de centrales thermiques existantes ».
La proposition de loi vise à favoriser la conversion des centrales à charbon dans le cadre du mécanisme de capacité.
Réformé par la loi de finances initiale pour 2025, le mécanisme de capacité consiste en un dispositif de rémunération, par Réseau de transport d'électricité (RTE), des exploitants de capacités de production en contrepartie de leur engagement de disponibilité. Pour financer ce mécanisme, une taxe est prélevée sur les fournisseurs et les consommateurs d'électricité et affectée à RTE.
Comme le précédent dispositif, le nouveau mécanisme de capacité doit être notifié par la France à la Commission européenne au titre des aides d'État. De plus, il est encadré par le règlement « Marché de l'électricité » de 2019, tel que révisé en 2024.
Dans ce contexte, l'article 1er de la proposition de loi entend faciliter l'éligibilité des centrales à charbon faisant l'objet d'un projet de conversion au mécanisme de capacité. Aussi, il permet que le seuil d'émission de 550 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheure (gCO2/KWh) de ce mécanisme puisse être apprécié dans le cadre de cette conversion. De plus, il prévoit que les centrales ainsi sélectionnées soient considérées comme de nouvelles installations dont la production commerciale débute à compter de cette sélection, à cette même fin de facilitation de leur éligibilité au mécanisme.
De son côté, l'article 2 vise à regrouper les autorisations des centrales à charbon faisant l'objet d'une conversion dans le cadre du mécanisme de capacité. Pour ce faire, il prévoit que la sélection par ce mécanisme tienne lieu de l'autorisation d'exploiter.
En dépit d'un calendrier contraint, j'ai organisé six auditions et reçu six contributions, recueillant le point de vue de l'ensemble des parties prenantes. Je retiens de mes auditions un accueil favorable au texte.
GazelEnergie entend y recourir pour la conversion de sa centrale à charbon de Saint-Avold.
Au total, pour le Gouvernement, le texte serait susceptible d'être appliqué non seulement aux centrales à charbon, mais aussi aux turbines à combustion (TAC) fioul ou gaz. Quant aux centrales à cycle combiné gaz (CCG), elles affichent normalement un seuil d'émission moins élevé que celui prévu. Une seule centrale - Saint-Avold - lui a fait part de son souhait de bénéficier du texte, tandis que sept autres centrales pourraient potentiellement être éligibles.
Si j'approuve sur le principe la proposition de loi, je crois utile de lui apporter des compléments et des ajustements. Aussi, je vous présenterai trois amendements, réunis en deux axes, qui ont pour objectif de fiabiliser le texte.
En premier lieu, je souhaite garantir la neutralité technologique entre les différentes sources d'énergie éligibles au dispositif. C'est la raison pour laquelle je veux préciser son champ.
D'une part, je proposerai deux amendements aux articles 1er et 2 tendant à préciser que cette éligibilité concerne les centrales thermiques à flamme existantes. L'objectif de la proposition de loi est de faciliter la conversion des installations existantes, non de déroger à l'article 8 du décret du 21 avril 2020 relatif à l'actuelle PPE, qui prohibe de nouvelles installations.
D'autre part, mes amendements aux articles 1er et 2 visent à ce que cette éligibilité concerne toutes les centrales thermiques à flamme, et non les seules centrales à charbon. Dans l'éligibilité au mécanisme de capacité, il n'y a pas lieu de différencier le charbon du fioul ou du gaz dès lors que le seuil d'émission précité est respecté.
En second lieu, j'entends conforter la sécurité juridique entre les différentes législations applicables au dispositif. C'est pourquoi je veux ajouter plusieurs coordinations.
Tout d'abord, je présenterai un amendement créant un article 3, afin d'y préciser que l'application de la proposition loi intervient selon les mêmes modalités que le mécanisme d'ajustement auquel elle se rattache, c'est-à-dire à une date fixée par décret à compter de la réponse de la Commission européenne quant à sa compatibilité avec le droit de l'Union européenne.
Plus encore, mon amendement à l'article 2 viendra préciser que le remplacement de l'autorisation d'exploiter par la sélection au mécanisme de capacité laisse inchangée l'autorisation environnementale, qui peut valoir autorisation d'exploiter dans certains cas.
Mes amendements ont pour seul objet de fiabiliser juridiquement ce texte.
Pour conclure, l'objectif de cette proposition de loi est de corriger un texte précédent, ce qui n'est malheureusement pas une première... Je le redis, nous avons besoin des outils de production que sont ces centrales, ne serait-ce que marginalement pour gérer les pointes de consommation.
M. Khalifé Khalifé, auteur de la proposition de loi. - Si je suis le premier signataire de cette proposition de loi, déposée par les cinq sénateurs mosellans, c'est que je suis le plus âgé...
Après l'excellente présentation faite par le rapporteur de votre commission, je veux d'abord insister sur l'urgence. La procédure accélérée a été décidée par le Gouvernement sur ce texte, parce que nous sommes pressés : les contrats des salariés de la centrale de Saint-Avold, qui n'a pas fermé à la demande du Gouvernement de l'époque, se terminent en avril.
Ce texte fait l'objet d'un consensus sur notre territoire, la Moselle, et plus largement en Lorraine, mais il ne concerne pas que la centrale de Saint-Avold : celle de Cordemais pourrait également être concernée. Nous devons minimiser les freins à la reconversion des centrales ; en ce sens, je remercie le rapporteur de ne pas avoir proposé de modifier l'intitulé du texte.
En revanche, j'ai été étonné, puis inquiet à la lecture de certains amendements. C'est pour cela que j'ai déposé des sous-amendements. Je souhaite sécuriser le dispositif et aller vite pour son application.
Enfin, je veux de nouveau insister sur l'aspect social : cent cinquante familles sont directement concernées, cinq cents au total en incluant les emplois indirects, alors que notre territoire a déjà connu, comme dans le nord de la France, la fermeture des mines de charbon. D'ailleurs, nous étions obligés d'importer du charbon d'Afrique du Sud pour faire fonctionner la centrale...
Mme Christine Herzog, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Madame la présidente, je vous remercie de m'avoir invitée à m'exprimer en tant que rapporteure pour avis, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, sur cette proposition de loi qui me tient particulièrement à coeur.
J'en ai pris l'initiative, avec mes collègues sénateurs de Moselle, pour permettre une production d'électricité moins polluante pour l'environnement et pour préserver la vitalité économique de notre département.
Je souhaite dire quelques mots sur la situation de la centaine de salariés de la centrale de Saint-Avold. Depuis l'annonce en 2019 de la fermeture progressive des centrales à charbon, ces travailleurs vivent dans une incertitude permanente. Cette situation est inacceptable.
Ils ont tout connu : une fermeture en février 2022 ; une réouverture quelques mois plus tard ; l'échec d'un projet de conversion à la biomasse ; et enfin, un projet de conversion au gaz et au biogaz porteur de beaucoup d'espérance. Dans ce contexte, il est de notre responsabilité d'envoyer un signal clair à ces salariés, trop souvent soumis aux aléas des décisions politiques.
Face aux difficultés de la conversion à la biomasse, l'exploitant GazelEnergie a proposé une conversion au gaz naturel et au biogaz, soutenue par le ministre de l'économie, Éric Lombard, le 12 février dernier.
Nous en convenons, le gaz naturel reste une énergie fossile et n'est pas la solution optimale, mais il constitue un progrès notable : le gaz naturel émet trois fois moins de gaz à effet de serre (GES) que le charbon. De plus, la centrale n'a pas vocation à fonctionner en continu : elle interviendra en période de pointe, garantissant ainsi la stabilité du réseau électrique. Enfin, nous devons toujours concilier écologie et justice sociale.
Ce projet est une solution de compromis qui assure la préservation des emplois, tout en réduisant l'empreinte carbone de la production électrique. Il mérite donc notre soutien. C'est dans cette logique que nous avons déposé cette proposition de loi transpartisane avec mes collègues sénateurs mosellans : Khalifé Khalifé, Jean-Marie Mizzon, Catherine Belrhiti et Michaël Weber.
Alertée il y a quelques mois par GazelEnergie sur l'urgence de cette reconversion, j'avais interpellé le Gouvernement, qui m'avait encouragée à légiférer sur le sujet. Le choix d'un dépôt collectif, dans l'ordre décroissant de nos âges respectifs, traduit notre engagement commun.
Enfin, je tiens à saluer la qualité du travail réalisé par le rapporteur de votre commission, Patrick Chauvet. Grâce aux auditions conjointes que nous avons conduites dans des délais très courts, nous avons pu entendre les principaux acteurs concernés par ce dossier, crucial pour la Moselle et pour le mix énergétique national.
Hier, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable à l'adoption de cette proposition de loi.
Je forme le voeu que le Parlement l'adopte rapidement afin de répondre aux attentes légitimes des salariés de Saint-Avold et de contribuer efficacement à la transition énergétique de ce site.
M. Fabien Gay. - Je remercie les auteurs de cette proposition de loi de l'avoir déposée : cela nous permet d'évoquer la question de la gestion des pointes de consommation d'électricité. Lorsque le Parlement a débattu de la fermeture des dernières centrales à charbon, le groupe CRCE-K avait marqué son accord, mais nous avions soulevé deux questions importantes : le sort des salariés et la gestion de ces pointes. Nous n'avons pas reçu de réponses satisfaisantes de la part du Gouvernement. Or, pour la pérennité de notre système électrique, nous avons besoin, durant un certain temps, de centrales pilotables.
Nous regrettons d'ailleurs que le projet de conversion en biomasse de la centrale de Cordemais, gérée par EDF, n'ait pas été soutenu par l'État et ait été abandonné. Saint-Avold est un projet privé, ce qui pose quand même une question : l'État ne soutient-il que les projets privés et pas les projets publics ? Je ne comprendrais pas qu'on accorde davantage de crédit aux projets privés qu'à ceux du secteur public ; c'est pourquoi l'amendement commun des sénateurs de Loire-Atlantique est important.
Par ailleurs, nous nous interrogeons sur le choix d'une conversion au gaz et pas à la biomasse, même si le gaz est moins émetteur que le charbon.
Nous voterons cette proposition de loi, si l'amendement commun dont je viens de parler, l'amendement COM-4 rectifié, est adopté. Mais nous interrogerons le Gouvernement sur plusieurs questions pendantes : quels investissements sont prévus pour passer les pointes de consommation ? Compte-t-il soutenir uniquement les projets privés ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Chacun reconnaît, me semble-t-il, qu'au-delà de l'aspect public ou privé des projets, les dynamiques économiques de la Moselle et de la Loire-Atlantique sont différentes.
M. Philippe Grosvalet. - Je remercie à mon tour les auteurs de cette proposition de loi : ils nous permettent de parler de nouveau de Cordemais, un projet enterré par le Gouvernement. Le projet Écocombust permettait de gérer dans le temps la transition énergétique.
À Cordemais, nous connaissons la même situation sociale qu'à Saint-Avold : les salariés sont menacés en permanence depuis cinq ans. Nous avons encore deux fours à charbon, les deux fours à fioul ayant été fermés. La transition s'est donc plutôt faite à sens unique pour l'instant.
Ce texte s'inscrit dans le cadre, dont nous avons déjà beaucoup parlé, de notre capacité à gérer les pointes de consommation et je rappelle, de ce point de vue, que l'ouest de la France ne dispose pas de centrale nucléaire. EDF a garanti au Gouvernement qu'il n'y aurait plus de problème pour ces pointes, mais je n'y crois absolument pas. Face à ce risque, nous avons besoin d'une centrale pilotable.
Se pose aussi une question sociale : à Cordemais, ce sont des énergéticiens, pas des métallurgistes ! Qui plus est, nous avons déjà une industrie métallurgique sur notre territoire. C'est pourquoi les sénateurs de Loire-Atlantique, sur l'initiative de Karine Daniel, ont déposé l'amendement COM-4 rectifié pour mettre la pression sur EDF, une entreprise publique.
Je termine en vous disant que les salariés de Cordemais - j'y étais encore la semaine dernière - sont totalement démobilisés.
M. Yannick Jadot. - Le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires est partagé sur ce texte.
Il révèle d'abord la situation de territoires délaissés et l'incapacité de l'État à anticiper les choses, alors que la fermeture de ces centrales est inscrite dans la loi. Cette incapacité récurrente de l'État est un véritable problème : elle affecte directement les salariés, qui sont pourtant engagés dans le processus de transition, comme le territoire. Je rappelle que c'est l'effondrement de la production nucléaire qui a obligé à rouvrir ces centrales.
J'ajoute qu'on peut quand même douter des engagements de M. Kretinsky, le propriétaire de GazelEnergie ; il suffit de voir ce qui se passe à Gardanne : ce n'est pas un grand succès...
Dans ce contexte, nous devons accompagner les salariés dans le processus de transition énergétique et veiller à ce que ce processus crée de l'emploi.
D'un autre côté, prévoir une centrale fonctionnant au gaz dans le contexte géopolitique actuel n'est pas un merveilleux signal en termes de souveraineté, qu'on s'approvisionne en gaz russe ou en gaz américain... Certes, j'entends la volonté d'utiliser du biogaz, mais ce procédé ne marche pas en termes d'efficacité énergétique : le biogaz n'est pas fait pour produire de l'électricité ! Il serait mieux utilisé pour un autre usage. Il y a là une forme de paradoxe, voire d'aberration.
Nous nous abstiendrons sur ce texte : nous comprenons l'enjeu social et de développement du territoire, mais le projet énergétique ne tient tout simplement pas : il n'est pas performant et nous continuerons ainsi de dépendre du gaz importé.
M. Franck Montaugé. - Je voudrais d'abord dire un mot de la prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie, la PPE 3. Il est pour le moins incongru que la représentation nationale ne puisse pas en débattre, alors que c'est une question très importante pour notre avenir collectif, notamment pour la transformation de l'économie. Le Conseil supérieur de l'énergie (CSE), dont Daniel Gremillet et moi-même sommes membres, sera amené à se prononcer très prochainement après une consultation publique, ce qui est normal, mais le Parlement non. C'est le monde à l'envers !
J'en viens à ce texte. Au-delà de la contribution de ces centrales au mécanisme de capacité se pose la question de la nature de l'énergie totalement décarbonée qui fixera le coût marginal du dernier KWh, qui permettra donc d'organiser l'ordre d'appel des unités de production électrique. Cette question majeure n'est pas traitée dans la PPE 3. Comment est-elle prise en compte dans cette proposition de loi ?
Nous soutiendrons ce texte, mais il ne constitue qu'une première étape : je le redis, quelle énergie totalement décarbonée pour répondre aux pointes de consommation ? Cette question concerne les unités de production dont nous parlons ce matin, mais elle pourrait en concerner d'autres. Une telle réflexion doit également se tenir au plan européen et en prenant en compte, bien évidemment, le contexte géopolitique qui est extrêmement préoccupant. Ce contexte nous commande d'aller vers une autonomie énergétique complète reposant sur des sources décarbonées. Je souhaite d'ailleurs que le service public, en particulier EDF, prenne toute sa part dans ces évolutions.
M. Daniel Gremillet. - En 2019, sous la pression de lobbys, la France a voulu laver plus blanc que blanc et a soudainement décidé de fermer ses dernières centrales à charbon - je rappelle quand même que certaines de ces centrales étaient détenues par des acteurs privés et qu'elles étaient aux normes. Le message était : on décarbone, on est exemplaire...
Mais lors des débats parlementaires, différentes choses avaient été actées.
Premièrement, nous avions acté que le Parlement devait débattre. Or ce n'est pas le cas, en tout cas pour l'Assemblée nationale, le Sénat ayant lui-même pris l'initiative d'un tel débat. Adopter un décret - je prolonge les propos de Franck Montaugé sur la PPE3 - dans ces conditions est surréaliste et bafoue les droits du Parlement.
Deuxièmement, notre commission a été très offensive sur plusieurs questions et nombre de nos collègues nous ont soutenus. Ainsi, le Sénat a demandé au Gouvernement des engagements très clairs vis-à-vis des salariés comme des territoires, avec la création de fonds d'accompagnement et de revitalisation. D'ailleurs, notre commission dépose tous les ans le même amendement sur le projet de loi de finances initiale visant à revaloriser ces fonds et le Gouvernement répond systématiquement qu'une rallonge n'est pas nécessaire.
Depuis 2019, nous nous rendons bien compte que le monde idéal qu'on nous avait vanté n'existe pas. Lors des tensions entre la consommation et la production, la France a été bien contente de s'approvisionner en Allemagne à partir de centrales à charbon, parce qu'elle n'était pas capable de disposer de suffisamment de capacités en énergie pilotable - cet adjectif est essentiel tant notre capacité de répondre à la demande dépend de notre capacité à piloter la production. Nous avons fermé des centrales, puis nous avons dû demander aux salariés de bien vouloir revenir en raison de l'urgence et j'insiste sur le fait que ces salariés ont été au rendez-vous.
Nous avons besoin d'appoint en matière de production énergétique et il y a urgence à savoir ce qui peut être mobilisé en la matière, notamment en termes de capacités pilotables. Les travaux réalisés par le rapporteur et les auteurs de cette proposition de loi permettent de prolonger ceux du Sénat, en cohérence avec ce que nous avons déjà fait, notamment en termes d'accompagnement des salariés et de revitalisation des territoires. L'appauvrissement des territoires touchés par la fermeture de ces centrales répond, selon les tenants de cette thèse, à l'intérêt général lié à la décarbonation, mais nous avons en tout état de cause le devoir d'être au rendez-vous et d'être cohérents avec les choix faits à cette époque.
La France a besoin d'un débat approfondi pour établir sa vision énergétique. Une telle vision est essentielle pour la réindustrialisation de notre pays. Je rappelle aussi que le Médiateur national de l'énergie (MNE) estime que nous n'avons jamais connu autant de personnes touchées par la précarité énergétique.
M. Fabien Gay. - Je crois que nous sommes tous d'accord pour déplorer que la prochaine PPE soit approuvée par décret. Les différents Gouvernements nous ont baladés depuis trois ans. Alors, arrêtons de déplorer, bousculons nos agendas et convoquons le ministre en charge de ces questions pour exiger, de manière unanime, qu'un projet de loi soit déposé !
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous avons bien cela en tête et nous avons prévu d'auditionner le ministre en charge de l'énergie, M. Ferracci. Le calendrier n'est pas simple, mais cette audition devrait avoir lieu au plus tard début mai.
M. Bernard Buis. - Cette proposition de loi, dont l'objectif est que les centrales à charbon puissent être converties pour participer au mécanisme de capacité, dont la refonte doit intervenir fin 2026 ou début 2027, est un texte juridique nécessaire pour la transformation de la centrale de Saint-Avold. Cela permettra de maintenir, d'une part, notre disponibilité électrique en période de pointe, d'autre part, les emplois sur les sites des anciennes centrales à charbon.
Le groupe RDPI votera ce texte et remercie ses auteurs de l'avoir déposé.
Mme Anne-Catherine Loisier. - Je crois que nous partageons tous la nécessité d'interroger le Gouvernement sur la nouvelle PPE. Je rappelle que celui-ci s'était engagé à venir devant le Parlement pour en débattre.
J'aurai deux questions sur cette proposition de loi.
Quelle sera la part du biogaz ou de la biomasse dans l'approvisionnement du projet ?
Ce dossier, éminemment complexe, pose la question de la capacité des territoires à évoluer et je mesure toute la difficulté de la situation, en particulier d'un point de vue social. Nous devons toutefois nous assurer qu'il existe une ressource de proximité. Or le Grand Est dispose de plus de 2 millions d'hectares de forêts. En Loire-Atlantique, il n'y en a qu'à peine 60 000 hectares. Des centaines de camions seront peut-être amenés à traverser la région pour alimenter la centrale ; nous devons alors nous poser la question du bilan carbone global.
M. Laurent Duplomb. - Voilà un exemple supplémentaire des déboires de l'écologie punitive ! Quand le dogme efface le bon sens...
Nous le voyons ce matin à propos de l'énergie et de l'électricité, puisque ces centrales étaient essentielles pour gérer les pointes de consommation. C'est vrai aussi pour les barrages et pour beaucoup d'autres secteurs qui subissent déjà ou subiront demain ce dogme.
Quelques exemples : le ZAN, ruralicide ; les ZFE, antisociales ; le malus écologique, confiscatoire, voire carrément débile - une voiture de 70 000 euros peut subir 75 000 euros de malus ! Je pourrais aussi citer l'acétamipride : la cinquième famille des néonicotinoïdes est interdite uniquement en France, cette interdiction met des filières dans une impasse et nous allons importer des noisettes de Turquie, qui auront été traitées avec toutes sortes de molécules interdites chez nous...
Tout cela me fait penser à une chose : petit à petit, « grâce » à cette écologie punitive, nous transformons la devise de la République - liberté, égalité, fraternité - en un autre triptyque : peur, culpabilité, interdit ! Rappelons-nous la phrase de Tocqueville : « Cet État se veut si bienveillant qu'il entend se substituer à eux dans l'organisation de leur propre vie. Ira-t-il jusqu'à les empêcher de vivre pour mieux les protéger d'eux-mêmes ? Le plus grand soin d'un bon gouvernement devrait être d'habituer peu à peu les peuples à se passer de lui. »
M. Daniel Salmon. - C'est un réel plaisir d'intervenir après Laurent Duplomb qui s'exprime toujours tout en nuances...
M. Laurent Duplomb. - C'est plus compréhensible ainsi !
M. Daniel Salmon. - On peut naturellement tomber dans la facilité, mais il me semble que le sujet est nettement plus complexe.
Si la France a décidé de fermer les centrales à charbon, ce n'est pas pour rien. Nous savons notamment que le charbon est un puissant émetteur de GES.
Pour autant, cela ne résout évidemment pas la question. Si nous voulons limiter les problèmes liés à la crête, nous devons d'abord procéder à des rénovations thermiques. Or nous savons que la France n'est pas au rendez-vous de ce point de vue.
S'agissant des centrales à charbon, dont Saint-Avold, l'anticipation n'est pas non plus au rendez-vous. On a laissé sur le carreau des salariés, dont on doit s'inquiéter. Cette situation est complexe et difficile à traiter.
Pendant ce temps, un projet de décret va mettre des dizaines de milliers de personnes au chômage dans le secteur du photovoltaïque et on entend beaucoup moins d'interventions à ce sujet... Regardons les choses dans leur globalité et évitons de faire deux poids deux mesures !
En séance, nous reviendrons sur les questions d'efficacité et de sobriété énergétiques, ainsi que sur celle de l'emploi du biométhane. Ce produit doit être utilisé là où il est le plus efficient.
M. Khalifé Khalifé. - Je veux simplement rappeler quelques éléments.
La société qui exploite la centrale de Saint-Avold ne demande pas de subventions. Elle demande d'être autorisée à travailler et de vendre l'électricité qu'elle produit.
On a parlé de l'électricité que nous devons acheter à l'Allemagne, juste à côté de Saint-Avold. Elle est largement produite à partir du charbon et nous achetons ainsi 3 gigawatts (GW) tous les ans pour passer les pointes de consommation.
Une étude a été commandée au cabinet Carbone 4 pour le site de Saint-Avold : elle fournit des prévisions en termes d'émissions.
Enfin, le pourcentage entre gaz naturel et biogaz est en cours de définition. Une évaluation a été faite à partir de 40 % de gaz et 60 % de biogaz. Une autre étude a été menée sur l'utilisation du seul biométhane.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - En ce qui concerne la part du gaz, du biogaz ou de la biomasse, nous avons eu connaissance d'éléments à l'étude mais cela n'entre pas dans le champ de la proposition de loi.
À la lecture de cette proposition de loi, on peut comprendre qu'elle est également susceptible de concerner d'autres sites que Saint-Avold. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai à un moment envisagé de changer l'intitulé du texte, le mécanisme étant en effet ouvert par exemple aux centrales à fioul. De ce fait, l'intitulé pouvait être ambigu, puisqu'il ne cite que les centrales à charbon. Nous avons pris de soin de vérifier que la rédaction permet bien de toucher d'autres sites de production existants - j'insiste sur cet adjectif - et que conserver l'intitulé actuel ne pose pas de problème de ce point de vue.
Sans entrer dans le débat public-privé, Saint-Avold est dans une situation spécifique : cette proposition de loi offre une alternative à l'arrêt et le volet humain et social est déterminant. Il reste treize centrales à fioul ou à gaz au sein du groupe EDF qui servent aussi à écrêter les pics, mais le temps de production est marginal. Ainsi que nous l'a indiqué le Gouvernement, les centrales fossiles, dès lors qu'elles respectent le seuil d'émission, entrent dans le champ de la proposition de loi : des investisseurs voulant s'engager dans une conversion vers une production plus décarbonée pourraient se servir de ce dispositif. Je rappelle que le Gouvernement nous a indiqué qu'une centrale - Saint-Avold - a demandé à bénéficier de ce texte, tandis que sept autres pourraient être potentiellement éligibles.
Je le redis, nous avons besoin de telles centrales pour couvrir les pointes de consommation.
Enfin, il me revient de définir le périmètre de l'article 45 de la Constitution pour la présente proposition de loi.
Sont susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé les dispositions relatives : aux conditions de mise en oeuvre des autorisations applicables aux installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles prévues par le code de l'énergie ou le code de l'environnement, ainsi qu'aux dérogations afférentes ; aux conditions de mise en oeuvre du mécanisme de capacité institué au sein du code de l'énergie par l'article 19 de la loi de finances initiale pour 2025.
M. Khalifé Khalifé. - Si nous incluons les centrales à fioul, voire d'autres centrales, dans le champ de la proposition de loi, autant nous arrêter là tout de suite ! En effet, passer du fioul au gaz est très rapide et simple, ce qui n'est pas le cas pour les centrales au charbon comme Saint-Avold. Pour ces dernières, cela coûte de l'argent et nécessite six à huit mois de travaux. Inclure toutes les centrales signifierait la mort de Saint-Avold !
M. Fabien Gay. - Je ne veux pas rallonger le débat, mais il y a tout de même quelques observations à faire. D'abord GazelEnergie, c'est M. Kretinsky, qui - nous le savons - est friand de subventions publiques et liquide ensuite les emplois. Sachant le coût d'une conversion de centrale à charbon au gaz ou au biogaz - c'est ce qui a fait chuter le deuxième projet de Cordemais -, je ne crois pas qu'une telle opération ne donnera pas lieu à un engagement financier de l'État. Et je ne crois pas non plus que M. Kretinsky investira de l'argent sur un projet peu rentable. Enfin, je précise que le projet de Cordemais était bien plus ambitieux et, de surcroît, construit par les salariés.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Monsieur Khalifé, le texte initial que vous avez déposé concerne les combustibles « fossiles », et non uniquement ceux « solides ». Il est donc plus ouvert que ce que vous indiquez ; c'est pourquoi, lorsque j'ai pris connaissance de son intitulé, je l'ai trouvé ambigu. Pour autant, par pragmatisme, je ne propose pas de modifier cet intitulé.
Un mot sur les projets de conversion des centrales à fioul, qui restent marginaux : à Vaires-sur-Marne, un projet est expérimenté par le groupe EDF, non au moyen du gaz mais d'huiles végétales hydrotraitées (HVO).
Le périmètre est adopté.
EXAMEN DES ARTICLES
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Mon amendement COM-5 vise à préciser que le dispositif proposé concerne seulement les centrales existantes de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, à l'exclusion des nouvelles.
Avis défavorable sur le sous-amendement COM-8, qui vise à ajouter le mot : « solides » après le mot : « combustibles ». Cela dérogerait au texte initial, comme je l'ai déjà indiqué.
M. Franck Menonville. - Quelle serait la conséquence de l'adoption d'un tel sous-amendement sur les deux dossiers qui nous préoccupent, en Loire-Atlantique et en Moselle ?
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Si le texte était restreint aux seuls combustibles fossiles « solides », nous finirions dans un « mouchoir de poche » : seule serait éligible la centrale à charbon de Saint-Avold, puisque le groupe EDF a annoncé la fermeture de la centrale à charbon de Cordemais. Le projet de conversion aux HVO de Vaires-sur-Marne, que j'ai indiqué, serait exclu de la proposition de loi. Or le pays a besoin de centrales de production d'électricité à partir de combustibles fossiles pour couvrir les pointes de consommation.
J'ajoute que des subventions publiques sont en jeu car le mécanisme de capacité, qui serait modifié par la proposition de loi, constitue une aide d'État soumise à notification, au sens du droit européen, comme je l'ai déjà mentionné.
M. Khalifé Khalifé. - À l'origine, les centrales au fioul n'étaient pas incluses dans la réflexion générale.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Le texte déposé vise les « combustibles fossiles », et non uniquement ceux « solides ».
M. Khalifé Khalifé. - Mais, d'un point de vue technique, les centrales que j'ai évoquées seront les premières à pouvoir candidater au « concours » de RTE. C'est le sens de mon sous-amendement COM-8.
Le sous-amendement COM-8 n'est pas adopté. L'amendement COM-5 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-2 devient sans objet.
L'article 1er est ainsi rédigé.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Mon amendement COM-6 a pour objet de préciser que le dispositif proposé s'applique aux seules centrales existantes de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, à l'exclusion des nouvelles.
Demande de retrait ou avis défavorable sur les deux sous-amendements présentés par M. Khalifé. Le sous-amendement COM-9 vise à ajouter le mot : « solides » après le mot : « combustibles ». Le sous-amendement COM-10 tend à supprimer la référence selon laquelle le regroupement de procédures intervient à droit de l'environnement constant.
M. Khalifé Khalifé. - Dans le cas de Saint-Avold, nous sommes dans une procédure de « porté à connaissance ». Un pré-dossier a déjà été étudié par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal). Le dispositif proposé par le rapporteur nous ferait perdre un à deux ans.
M. Daniel Gremillet. - L'adoption de l'amendement du rapporteur aurait-elle pour conséquence de complexifier le dispositif ? S'agit-il d'une obligation juridique ?
M. Franck Menonville. - J'ai la même interrogation. Veillons en effet à concilier les objectifs de solidité juridique du texte et de simplification de son application.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Mon amendement permet de sécuriser juridiquement le texte, mais il ne le complexifie en rien : le processus ne serait pas modifié.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Dans certains cas, l'autorisation environnementale, prévue par le code de l'environnement, vaut autorisation d'exploiter, au titre du code de l'énergie. L'amendement du rapporteur vise à préciser que le regroupement de procédures est sans incidence sur le code de l'environnement. Il ne s'agit pas de créer une nouvelle obligation ou contrainte.
Le sous-amendement COM-9 n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement COM-10. L'amendement COM-6 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-3 devient sans objet.
L'article 2 est ainsi rédigé.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Mon amendement COM-7 a pour objet d'ajouter un article additionnel à la proposition de loi appliquant les dispositions à compter de la réponse de la Commission européenne quant à la compatibilité du mécanisme de capacité avec le droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État, ainsi que le prévoit l'article 19 de la loi de finances initiale pour 2025.
Une négociation est déjà en cours entre le Gouvernement et la Commission européenne. Le Gouvernement entend rattacher les centrales à charbon au mécanisme de capacité dans ce cadre. Nous n'ajoutons aucun délai. Les centrales à charbon devraient donc pouvoir concourir aux prochaines enchères de RTE.
À l'inverse, ne pas mettre de condition d'application reviendrait à laisser dans la proposition de loi des références à des articles inapplicables, car n'existant pas en droit.
M. Khalifé Khalifé. - Je doute fort qu'il n'y ait aucun délai supplémentaire. Par expérience, les procédures à l'échelon européen prennent au minimum six mois à un an. Je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. Franck Montaugé. - J'ai l'impression que la proposition du rapporteur consiste à indiquer dans le texte que la loi sera respectée. N'est-ce pas superfétatoire ?
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Je rappelle que les négociations entre le Gouvernement et la Commission européenne sont déjà en cours, les délais n'étant donc pas allongés. Il s'agit simplement de sécuriser la proposition de loi en renvoyant aux conditions d'application prévues par l'article 19 de la loi de finances initiale pour 2025. Ne faisons pas courir de risque juridique à ce texte, auquel nous sommes tous ici globalement favorables.
M. Franck Menonville. - Peut-on ou non s'exonérer d'adopter une telle mesure ?
M. Daniel Gremillet. - Que risquons-nous si nous ne l'adoptons pas ? Je pense qu'il est important de consolider le texte. Six mois supplémentaires, ce n'est pas un problème.
M. Yannick Jadot. - Si l'on ne respecte pas la loi et si la Commission européenne considère que les aides versées n'étaient pas justifiées, il faudra les rembourser.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Encore une fois, c'est prévu par la dernière loi de finances. Ne pas le faire, c'est risquer des contentieux.
L'amendement COM-7 est adopté et devient article additionnel.
M. Philippe Grosvalet. - Notre amendement COM-4 rectifié vise à contraindre EDF à faire une proposition pour la conversion de la centrale de Cordemais.
M. Patrick Chauvet, rapporteur. - Avis favorable.
L'amendement COM-1 n'est pas adopté. L'amendement COM-4 rectifié est adopté et devient article additionnel.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Les sorts de la commission sont repris dans le tableau ci-dessous :
Article 1er |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
M. CHAUVET, rapporteur |
5 |
Ajustement de l'article 1er de la proposition de loi, qui propose de faciliter l'éligibilité au mécanisme de capacité pour les centrales de production d'électricité à partir du charbon converties notamment |
Adopté |
M. KHALIFÉ |
8 |
Précision de l'état « solide » des combustibles fossiles utilisés par les centrales de production d'électricité |
Rejeté |
M. KHALIFÉ |
2 |
Précision de l'état « solide » des combustibles fossiles utilisés par les centrales de production d'électricité |
Satisfait ou sans objet |
Article 2 |
|||
M. CHAUVET, rapporteur |
6 |
Ajustement de l'article 2 de la proposition de loi, qui propose de remplacer l'autorisation d'exploiter par la désignation comme lauréates du mécanisme de capacité pour les centrales de production d'électricité à partir du charbon converties notamment |
Adopté |
M. KHALIFÉ |
9 |
Précision de l'état « solide » des combustibles fossiles utilisés par les centrales de production d'électricité |
Rejeté |
M. KHALIFÉ |
10 |
Suppression de la référence selon laquelle le regroupement de procédures intervient à droit de l'environnement constant |
Rejeté |
M. KHALIFÉ |
3 |
Précision de l'état « solide » des combustibles fossiles utilisés par les centrales de production d'électricité |
Satisfait ou sans objet |
Articles additionnels après article 2 |
|||
M. CHAUVET, rapporteur |
7 |
Ajout d'un article additionnel à la proposition de loi, appliquant les dispositions à compter de la réponse de la Commission européenne quant à la compatibilité du mécanisme de capacité avec le droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État |
Adopté |
Mme DANIEL |
1 |
Obligation pour le groupe EDF de présenter un plan de conversion pour certaines centrales de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, d'ici le 31 décembre 2026 |
Rejeté |
Mme DANIEL |
4 rect. |
Obligation pour le groupe EDF de présenter un plan de conversion pour ses centrales de production d'électricité à partir de combustibles fossiles, d'ici le 31 décembre 2026 |
Adopté |
RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 32(*).
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie33(*). Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte34(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial35(*).
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires économiques a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 19 mars 2025, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 324 (2024-2025) visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement. Sont susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions relatives :
- aux conditions de mise en oeuvre des autorisations applicables aux installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles prévues par le code de l'énergie ou le code de l'environnement, ainsi qu'aux dérogations afférentes ;
- aux conditions de mise en oeuvre du mécanisme de capacité institué au sein du code de l'énergie par l'article 19 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Mardi 4 mars 2025
- GazelEnergie : Mmes Camille JAFFRELO, directrice de cabinet du président, directrice de la communication et des affaires publiques et Claire PALAZUELOS, chargée d'affaires publiques et règlementaires.
Mercredi 5 mars 2025
- Réseau de transport d'électricité (RTE) : MM. Olivier HOUVENAGEL, directeur Économie du système électrique et Philippe PILLEVESSE, directeur des relations institutionnelles.
- Sénat : M. Khalifé KHALIFÉ, Sénateur de la Moselle, auteur de la proposition de loi.
- Électricité de France (EDF) : MM. Olivier LAMARRE, directeur du parc nucléaire et thermique, division thermique, expertise et appui industriel multi-métiers et Bertrand LE THIEC, directeur des affaires publiques.
- Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) : M. Jean SEVESTRE-GIRAUD, adjoint au directeur de l'énergie, Mme Hermine DURAND, sous-directrice du système électrique et des énergies renouvelables, M. Florian LEDUC, chef du bureau du système électrique, de la programmation et des réseaux, Mme Chloé LE BARON, adjointe au chef du bureau du système électrique, de la programmation et des réseaux, MM. Aurélien PAILLARD, sous-directeur des marchés de l'énergie, Laurent DEPROIT, adjoint au sous-directeur des marchés de l'énergie, François LAVALETTE, adjoint au délégué interministériel à l'accompagnement des territoires en transition énergétique, Simon MOLINA, adjoint à la cheffe de bureau de la production électrique et des énergies renouvelables terrestres
- Délégué interministériel à l'accompagnement des territoires en transition énergétique : M. Yves SCHENFEIGEL, délégué interministériel.
LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES36(*)
- Commission de régulation de l'énergie (CRE)
- Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et Délégué interministériel à l'accompagnement des territoires en transition énergétique
- Électricité de France (EDF)
- GazelEnergie
- Réseau de transport d'électricité (RTE)
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl24-324.html
* 1 L'auteur du texte, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), le délégué interministériel à l'accompagnement des territoires en transition énergétique, Réseau de transport d'électricité (RTE), GazelEnergie et EDF.
* 2 Les syndicats de salariés concernés ont aussi été sollicités.
* 3 Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité (article 6).
* 4 Ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie.
* 5 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (article 89).
* 6 Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité (articles 7 et 9).
* 7 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (article 187).
* 8 Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité (article 6).
* 9 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 12).
* 10 Décret n° 2022-123 du 5 février 2022 modifiant le plafond d'émission de gaz à effet de serre pour les installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles.
* 11 Ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 2020 portant diverses mesures d'accompagnement des salariés dans le cadre de la fermeture des centrales à charbon.
* 12 Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat (articles 32 et 36).
* 13 Décret n° 2022-1233 du 14 septembre 2022 modifiant le plafond d'émission de gaz à effet de serre pour les installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles pris en application de l'article 36 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.
* 14 Décret n° 2023-817 du 23 août 2023 modifiant le plafond d'émission de gaz à effet de serre pour les installations de production d'électricité à partir de combustibles fossiles pris en application de l'article 36 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.
* 15 Dans le projet de PPE soumis à la consultation publique, le 7 mars 2025, la seconde action consiste désormais à « accompagner le lancement d'études ou de sites pilotes, par les exploitants, pour la conversion de centrale thermique existante en ayant recours à des combustibles moins émetteurs en CO2 dans une perspective de décarbonation à 100 % avec une attention particulière aux enjeux de disponibilité de la biomasse ».
* 16 De plus, le projet de SNBC renvoie à la PPE, en précisant que « la PPE prévoit l'arrêt de la production d'électricité à partir de charbon d'ici 2027 et de fioul d'ici 2030 et l'examen, le cas échéant, des opportunités de conversion à des combustibles décarbonés, avec une attention particulière aux enjeux de disponibilité de la biomasse ».
* 17 Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité (article 4-2).
* 18 Ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie.
* 19 Décision de la Commission européenne du 8 novembre 2016 concernant le régime d'aide SA.39 621 2015/C (ex 2015/NN).
* 20 Loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025 (article 19).
* 21 Règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l'électricité (refonte).
* 22 Règlement (UE) 2024/1747 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 modifiant les règlements (UE) 2019/942 et (UE) 2019/943 en ce qui concerne l'amélioration de l'organisation du marché de l'électricité de l'Union.
* 23 Décret n° 2020-456 du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie.
* 24 Corse, Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna, Mayotte, îles de Sein, Molène, Ouessant et Chausey.
* 25 Commission de régulation de l'énergie (CRE), GazelEnergie, Électricité de France (EDF), Réseau de transport d'électricité (RTE).
* 26 Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité (article 6).
* 27 Ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie.
* 28 Il s'agit :
- des installations utilisant l'énergie radiative du soleil jusqu'à 50 mégawatts (MW) ;
- des installations utilisant l'énergie mécanique du vent jusqu'à 50 MW ;
- des installations utilisant, à titre principal, l'énergie dégagée par la combustion ou l'explosion de matières non fossiles d'origine animale ou végétale, jusqu'à 50 MW ;
- des installations utilisant, à titre principal, l'énergie dégagée par la combustion ou l'explosion de biogaz, jusqu'à 50 MW ;
- des installations utilisant l'énergie des nappes aquifères ou des roches souterraines, jusqu'à 50 MW ;
- des installations valorisant les déchets ménagers ou assimilés, à l'exception de celles utilisant du biogaz, jusqu'à 50 MW ;
- des installations utilisant l'énergie houlomotrice, hydrothermique ou hydrocinétique implantées sur le domaine public maritime, jusqu'à 50 MW ;
- des installations utilisant, à titre principal, du gaz naturel, jusqu'à 20 MW ;
- des installations utilisant, à titre principal d'autres combustibles fossiles que le gaz naturel et le charbon, jusqu'à 10 MW ;
- des installations de production d'électricité en mer utilisant l'énergie mécanique du vent, jusqu'à 1 MW.
* 29 Décret n° 2020-456 du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie (article 8).
* 30 Règlements (UE) 2019/942 et (UE) 2019/943 en ce qui concerne l'amélioration de l'organisation du marché de l'électricité de l'Union tels que modifiés par le règlement (UE) 2024/1747 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 modifiant les règlements (UE) 2019/942 et (UE) 2019/943 en ce qui concerne l'amélioration de l'organisation du marché de l'électricité de l'Union (paragraphe 2 ter de l'article 64).
* 31 Loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025 (V de l'article 19).
* 32 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 33 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 34 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.
* 35 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.
* 36 Les syndicats de salariés concernés ont aussi été sollicités.