C. UNE COMMISSION D'ENQUÊTE PORTANT SUR LA GESTION DES SERVICES PUBLICS

La commission d'enquête dont la création est demandée concerne la gestion de services publics en ce qu'elle vise à dresser le bilan des missions exercées par les agences, opérateurs et organismes consultatifs de l'État.

Il s'agit de trois types de structures administratives distinctes de l'administration centrale « classique », dont l'essor a été motivé par l'objectif principal de modernisation de l'administration, et qui ont en commun de concourir à la mise en oeuvre de missions de service public, sous un contrôle plus ou moins direct de l'État.

Les agences bénéficient d'une autonomie et d'une responsabilité à la fois structurante et exclusive dans la mise en oeuvre d'une politique publique donnée, tout en étant soumises aux instructions et au contrôle financier de l'État. Elles peuvent prendre différentes formes, allant de l'établissement public administratif (EPA) ou établissement public industriel et commercial (EPIC) à l'association, en passant par le groupement d'intérêt public (GIP). Dans son étude de 2012, le Conseil d'État recensait 130 agences.

Pour leur part, les opérateurs exercent pour l'État, et sous son contrôle direct, des missions d'intérêt général. Leur statut juridique est également varié. D'après le « jaune » budgétaire annexé au PLF pour 2025, le nombre d'opérateurs de l'État s'élève actuellement à 434.

Enfin, les organismes consultatifs de l'État, ou « commissions et instances consultatives ou délibératives »29(*), ont pour mission de conseiller et d'éclairer les pouvoirs publics sur des questions d'ordre général ou sur des points précis. Rattachés au Premier ministre, à un ministre ou encore à la Banque de France, ils formulent des avis et peuvent aussi, plus largement, élaborer des propositions, et réaliser des études. Ils sont aujourd'hui au nombre de 317.

Ainsi, le champ d'investigation de la commission d'enquête dont la création est demandée apparaît non seulement large, mais également relativement inédit dans son périmètre, en portant à la fois sur les agences, les opérateurs et les organismes consultatifs de l'État. Les statuts, missions et moyens varient en effet d'un type d'instance à un autre, si bien que l'ensemble constitué est loin d'être homogène - ce que constate, du reste, l'exposé des motifs lui-même lorsqu'il évoque un « ensemble aux contours assez flous ».

Au-delà de ces considérations d'ordre méthodologique, l'exposé des motifs met en avant trois principaux risques associés à l'émergence de ces démembrements de l'État.

Tout d'abord, ces structures ont un coût pour l'État, et donc pour le contribuable, s'agissant du budget de fonctionnement et des emplois associés ; aussi convient-il de veiller à l'efficacité et à l'efficience des dépenses induites, a fortiori dans le contexte budgétaire contraint qui est celui de la France. L'exposé des motifs en appelle ainsi au « passage en revue systématique et critique des dépenses publiques et du fonctionnement de l'ensemble des organes publics ».

Ensuite, est pointé du doigt le manque de lisibilité de l'activité de ces divers organes, en raison de « l'existence de doublons et de redondances dans leurs périmètres d'intervention respectifs ». Les membres du groupe Les Républicains, apparentés et rattachés, soulignent la nécessaire « rationalisation » du paysage administratif, en clarifiant l'articulation des compétences respectives des instances concernées, et en justifiant plus rigoureusement le recours à une agence, à un opérateur ou à un comité consultatif.

Enfin, ils mettent en avant la responsabilité jouée par ces structures administratives dans l'inflation et la complexité accrue des normes. En résulte, d'après eux, une « insécurité juridique » croissante pour « le citoyen, l'usager ou encore les acteurs des activités régulées ».

C'est pourquoi la commission d'enquête dont la création est demandée vise, en premier lieu, à dresser le bilan des missions exercées par les agences, opérateurs et organismes consultatifs de l'État et des moyens déployés à ces fins. Elle a ensuite pour objectif d'identifier des « pistes de rationalisation de leurs périmètres d'intervention », de manière à dégager des sources potentielles d'économies. Enfin, elle s'attachera à évaluer « l'impact de [l'] activité [de ces structures] sur la sécurité juridique et la complexité normative ».

Le champ d'investigation retenu s'inscrit ainsi pleinement dans le cadre d'une enquête portant, au sens large, sur la gestion d'un service public. Aussi, la proposition de résolution entre dans le périmètre défini à l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 précitée, sans qu'il soit nécessaire d'interroger le garde des sceaux aux fins de connaître l'existence d'éventuelles poursuites judiciaires en cours.

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Dès lors, la commission des lois a constaté que la proposition de résolution n° 245 (2024-2025) est recevable.

Il n'existe donc aucun obstacle à la création de cette commission d'enquête par la procédure du « droit de tirage ».


* 29 Dénomination utilisée par le « jaune » budgétaire.

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