N° 204
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025
Enregistré à la Présidence du Sénat le 11 décembre 2024
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires européennes (1) sur la proposition de résolution européenne en application de l'article 73 quinquies du Règlement, visant à réformer la perception des cotisations des travailleurs frontaliers pour les prestations chômage,
Par Mme Florence BLATRIX CONTAT et M. Cyril PELLEVAT,
Sénatrice et Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Rapin, président ; MM. Alain Cadec, Cyril Pellevat, André Reichardt, Mme Gisèle Jourda, MM. Didier Marie, Claude Kern, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Georges Patient, Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Louis Vogel, Mme Mathilde Ollivier, M. Ahmed Laouedj, vice-présidents ; Mme Marta de Cidrac, M. Daniel Gremillet, Mmes Florence Blatrix Contat, Amel Gacquerre, secrétaires ; MM. Pascal Allizard, Jean-Michel Arnaud, François Bonneau, Mmes Valérie Boyer, Sophie Briante Guillemont, M. Pierre Cuypers, Mmes Karine Daniel, Brigitte Devésa, MM. Jacques Fernique, Christophe-André Frassa, Mmes Pascale Gruny, Nadège Havet, MM. Olivier Henno, Bernard Jomier, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Ronan Le Gleut, Mme Audrey Linkenheld, MM. Vincent Louault, Louis-Jean de Nicolaÿ, Teva Rohfritsch, Mmes Elsa Schalck, Silvana Silvani, M. Michaël Weber.
Voir les numéros :
Sénat : |
151 et 205 (2024-2025) |
AVANT PROPOS
Le législateur européen a adopté des règles de coordination des systèmes de sécurité sociale nationaux visant à déterminer lequel de ces systèmes doit prendre en charge les prestations dues aux travailleurs qui exercent leur droit à la libre circulation, de sorte que leurs droits sociaux soient préservés.
Des règles de coordination spécifiques s'appliquent aux travailleurs frontaliers, expression qui désigne toute personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans un État membre et qui réside dans un autre État membre où elle retourne en principe chaque jour ou au moins une fois par semaine.
Pour les frontaliers en situation de chômage complet, les allocations d'aide au retour à l'emploi (selon la terminologie française) ou prestations de chômage (selon la terminologie de l'Union) sont versées par l'État de résidence. Le versement de ces prestations a pour contrepartie que le bénéficiaire recherche activement un emploi et que cette recherche puisse être accompagnée et contrôlée par une institution compétente.
Si l'État de résidence est chargé de verser les prestations, c'est pourtant l'État d'emploi qui perçoit les contributions à l'assurance-chômage prélevées sur les salaires des frontaliers. Pour la France, État de résidence de travailleurs frontaliers, il en résulte un déficit de l'ordre de 800 millions d'euros pour l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Unédic), et ce bien que la législation actuelle prévoit que l'institution compétente de l'État d'emploi rembourse à l'institution compétente de l'État de résidence une partie du montant des prestations versées. Le déficit constaté par l'Unédic est principalement dû à l'indemnisation des demandeurs d'emploi ayant exercé leur activité en Suisse ou au Luxembourg.
La législation de l'Union impose une égalité de traitement entre les chômeurs ayant exercé leur activité en France et ceux ayant exercé leur activité dans un autre État membre ou en Suisse, ce qui limite le champ des mesures nationales qui pourraient être prises pour réduire le montant des seules prestations servies aux travailleurs frontaliers.
La proposition de résolution n° 151 (2024-2025) présentée par M. Cyril Pellevat vise donc plutôt à soutenir une révision des règles de l'Union régissant l'indemnisation des travailleurs frontaliers en situation de chômage ou, à défaut, à inciter la France à conclure des accords bilatéraux avec les États voisins pour obtenir un remboursement plus conséquent par ces derniers des prestations versées ou le versement des contributions à l'assurance-chômage qu'ils prélèvent sur les revenus des frontaliers en tant qu'États d'emploi.
I. LA COORDINATION DES SYSTÈMES DE SÉCURITÉ SOCIALE DANS L'INTÉRÊT DES TRAVAILLEURS, UNE NÉCESSITÉ POUR RENDRE EFFECTIVE LA LIBERTÉ DE CIRCULATION
A. UNE LIBERTÉ DE CIRCULATION GARANTIE PAR LE TRAITÉ SUR LE FONCTIONNEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE
La liberté de circulation des personnes est une des libertés fondamentales sur laquelle repose le marché intérieur. Les articles 45 à 48 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) garantissent cette liberté. Ainsi, l'article 45 permet aux citoyens de l'Union de se déplacer et de séjourner librement sur le territoire des États membres pour rechercher ou occuper un emploi.
C'est dans le but de favoriser l'exercice de cette liberté de circulation que l'Union européenne a institué un mécanisme de coordination des régimes de sécurité sociale.