II. LES RECETTES SONT AFFECTÉES PAR UNE MOINS-VALUE HISTORIQUE DE 24,3 MILLIARDS D'EUROS SUR LES RECETTES FISCALES NETTES
Si les recettes non fiscales et les prélèvements sur recettes ont connu en 2024 des variations limitées, respectivement de + 1,0 et + 0,6 milliard d'euros, par rapport à la prévision en loi de finances initiale, les recettes fiscales nettes connaissent, elles, une moins-value considérable de 24,3 milliards d'euros par rapport au montant attendu.
Ces prévisions actualisées du présent PLFG sont, dans l'ensemble, proches de l'estimation révisée présentée à l'occasion du projet de loi de finances pour 2025.
A. LES RECETTES FISCALES NETTES CONNAISSENT UNE CHUTE DE 24,3 MILLIARDS D'EUROS PAR RAPPORT À LA PRÉVISION, DONT L'EXPLICATION A COMMENCÉ À ÊTRE DÉTERMINÉE
Les recettes fiscales nettes17(*) seraient de 324,1 milliards d'euros, en très forte chute de 24,3 milliards d'euros par rapport au niveau prévu en loi de finances initiale (348,5 milliards d'euros). Elles seraient toutefois légèrement supérieures au niveau atteint en 2023 (322,9 milliards d'euros).
Le montant révisé lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2025 était de 322,5 milliards d'euros, soit un niveau inférieur de 1,6 milliard d'euros à celui présenté dans le projet de loi de finances de fin de gestion.
Évolution des prévisions de recettes fiscales nettes
(en milliards d'euros)
Révisé : produit prévu pour 2024 lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2025.
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Le principal déterminant de ces évolutions est la chute du produit de l'impôt sur les sociétés de 14,3 milliards par rapport au niveau prévu en loi de finances initiale. Le produit de cet impôt avait été estimé à un niveau très élevé de 72,0 milliards d'euros, mal expliqué dans les documents budgétaires comme l'avait noté le rapporteur général en examinant le projet de loi de finances pour 202418(*). La loi de finances initiale se fondait sur l'estimation d'un bénéfice fiscal 2023 en forte hausse de 14 %, alors que cette hausse n'a finalement été que de 1 %. De même, le bénéfice fiscal 2024 serait en baisse de 1,9 %, pour une hausse prévue en début d'année de 2,6 millions d'euros.
S'agissant de la TVA, son produit est revu en hausse de 1,0 milliard d'euros dans le présent projet de loi de finances de fin de gestion par rapport à l'estimation révisée, elle-même en diminution de 4,8 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale. D'une manière générale, une moins-value de 2,4 milliards d'euros a été constatée en fin d'année 2023, reprise en base en 2024. En outre, la croissance a été, en 2024, plus faible que prévue en emplois soumis à la TVA.
Les recettes d'impôt sur le revenu sont elles aussi inférieures de 5,3 milliards d'euros au niveau prévu en loi de finances initiale, sans modification par rapport à l'estimation révisée. Les revenus perçus en 2023 ayant été inférieurs au niveau estimé lors de l'élaboration du budget pour 2024, le solde de l'impôt sur le revenu est également moins élevé que prévu, ainsi que le prélèvement à la source 2024.
Les autres recettes fiscales nettes seraient en diminution de 1,0 milliard d'euros par rapport au niveau prévu en loi de finances initiale, dont une augmentation de 0,5 milliard d'euros pour le produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et une croissance des autres recettes brutes (+ 0,8 milliard d'euros) qui ne peut compenser la hausse des remboursements et dégrèvements (+ 2,3 milliards d'euros) qui sont soustraits des recettes nettes.
Les écarts entre la prévision et l'exécution des recettes fiscales en 2023 et en 2024 constituent un important sujet de préoccupation pour la commission des finances. Dès les premières révélations sur l'ampleur que prenait la situation, au mois de mars dernier, la commission des finances du Sénat a constitué une mission d'information qui a adopté un premier rapport le 12 juin 2024, puis a repris ses travaux à l'automne19(*) à la suite de nouvelles révélations, courant septembre, sur l'ampleur de la dégradation des comptes. Il est renvoyé sur ce point à la conclusion de ces travaux et aux préconisations de la mission.
Le Gouvernement précédent, pour sa part, a saisi l'Inspection générale des finances, qui a rendu des recommandations au mois de juillet20(*). Afin de pouvoir s'appuyer sur une analyse plus approfondie, le Gouvernement actuel a décidé de réunir un comité scientifique qui aura vocation à garantir la confiance dans les prévisions de finances publiques21(*).
* 17 Depuis l'exercice 2023, les recettes fiscales nettes sont égales aux recettes brutes minorées des remboursements et dégrèvements d'impôts d'État. Auparavant, les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux étaient également déduits des recettes fiscales nettes.
* 18 Rapport général n° 128 (2023-2024) sur le projet de loi de finances pour 2024, tome I, présenté par Jean-François Husson, rapporteur général, au nom de la commission des finances, déposé le 21 novembre 2023.
* 19 Mission d'information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023, son suivi par l'administration et le Gouvernement et les modalités d'information du Parlement sur la situation économique, budgétaire et financière de la France.
* 20 Inspection générale des finances, Les prévisions de recettes des prélèvements obligatoires, 11 juillet 2024.
* 21 Prévisions de finances publiques : Antoine Armand et Laurent Saint-Martin réunissent un comité scientifique, communiqué de presse, 14 novembre 2024.