B. UN SCHÉMA D'EMPLOIS POUR 2025 DE + 700 ETP CONFORME À LA TRAJECTOIRE PRÉVUE EN LPM ET QUI S'APPUIE SUR UNE STRATÉGIE DE FIDÉLISATION DES PERSONNELS
Le PLF 2025 prévoit un schéma d'emplois de + 700 pour 2025, soit un niveau conforme à la LPM30(*), et supérieur de 300 ETP à celui prévu en 2024. Il convient de noter qu'aucun schéma d'emplois n'a été exécuté à ce niveau depuis 2019.
Le schéma d'emplois se décompose en 630 ETP au profit du ministère des armées et 70 ETP dédiés à la direction des applications militaires du commissariat à l'énergie atomique (CEA). La réserve opérationnelle verrait quant à elle ses effectifs augmenter de 3 800 réservistes.
Répartition du schéma d'emplois de 2025 entre les principaux domaines d'emploi
(en pourcentage)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère des armées au questionnaire du rapporteur spécial
Pour l'atteindre, le ministère des armées table sur une réduction plus forte des sorties que celle des entrées par rapport à la prévision pour 2024. Cette tendance résulterait de succès en matière de fidélisation des personnels, qui fait l'objet d'une politique dédiée depuis plusieurs années.
Celle-ci vise à rentabiliser au mieux l'investissement consenti au profit du personnel. Elle se donne pour objectif de conserver l'expérience acquise et les compétences détenues, notamment au sein des forces, et en particulier s'agissant de compétences en tension. La fidélisation est aussi gage d'efficacité opérationnelle dans un contexte d'augmentation du nombre de missions et de durcissement des opérations.
Les politiques sont déclinées selon trois volets :
- le volet indemnitaire : outre la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM), dont l'ensemble des mesures sont applicables depuis 2024, des dispositifs spécifiques ont été déployés dans le cadre de la politique de fidélisation, au premier rang desquels la prime de lien au service (PLS), qui permet de cibler les compétences à fidéliser en orientant les flux et en définissant annuellement les viviers prioritaires, avec une grande souplesse laissée aux gestionnaires.
La nouvelle politique de rémunération des militaires
Le vaste chantier de refonte de la rémunération des militaires baptisé « nouvelle politique de rémunération des militaires » (NPRM) a été engagé en 2017. Il concerne l'ensemble du personnel relevant du statut général des militaires et s'étend à la majorité des éléments de rémunération servis à ce personnel (hors éléments de rémunération interministériels).
Cette nouvelle politique salariale poursuit plusieurs objectifs :
- permettre aux armées de conduire les politiques de ressources humaines dont elles ont et auront besoin demain (recrutement et conservation de compétences concurrentielles, adaptation aux évolutions des métiers) ;
- réaffirmer et mieux prendre en compte les sujétions et obligations inhérentes au statut de militaire ;
- s'adapter aux nouveaux enjeux sociaux de la communauté militaire (logement, mobilité, absence, nouvelles formes de vie familiale, etc.) ;
- permettre de simplifier la solde pour la rendre plus compréhensible et plus lisible par le militaire.
Ce projet a bénéficié de ressources programmées dans la loi de programmation militaire 2019-2025. La réforme repose sur un aménagement ciblé des grilles indiciaires et une rénovation complète du dispositif indemnitaire, réorganisée autour de trois volets et huit indemnités rémunérant chacune une seule sujétion :
- le volet « militarité », traitant des sujétions liées au milieu militaire, avec l'indemnité d'état militaire (IEM), l'indemnité de garnison (IGAR) et l'indemnité de mobilité géographique des militaires (IMGM) ;
- le volet « finalités », valorisant l'engagement opérationnel et l'exercice de responsabilités militaires, avec l'indemnité de sujétions d'absence opérationnelle (ISAO) et la prime de commandement et de responsabilité militaire (PCRM) ;
- le volet « capacités », favorisant la génération des ressources en quantité et en qualité nécessaires à l'accomplissement de la mission, avec la prime de parcours professionnels des militaires (3PM), la prime de performance (PERF) et la prime de compétences spécifiques des militaires (PCSMIL).
Ces primes ont été progressivement instituées à compter de 2021, engendrant à chaque « marche » un surcoût par rapport aux dispositifs remplacés :
- la « première marche » mise en oeuvre à compter du 1er janvier 2021 s'est traduite par la mise en place de l'IMGM, et a engendré un surcoût de 40,5 millions d'euros ;
- la « deuxième marche » mise en oeuvre à compter du 1er janvier 2022 s'est traduite par la mise en place de l'ISAO, de la PCRM et de la PERF, qui ont engendré un surcoût cumulé de 62 millions d'euros ;
- la « troisième marche » mise en oeuvre à compter du 1er octobre 2023 s'est traduite par la mise en place de l'IEM, de l'IGAR, de la 3PM et de la PCSMIL (remplaçant à elle seule 19 primes) qui ont engendré un surcoût cumulé de 88 millions d'euros en 2023 et un surcoût en année pleine de 351 millions d'euros.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
- le volet carrière, avec notamment des assouplissements des conditions pour passer du statut de contractuel au statut de carrière pour les officiers et des conditions d'âge pour l'accès aux commandements d'unités opérationnelles et l'objectif de modernisation des outils de formation ;
- le volet « conciliation entre vie professionnelle et vie privée », avec notamment la mise en oeuvre du plan Famille 2, doté de 750 millions d'euros sur 2024-2030 et centré autour de trois priorités : l'accompagnement de la mobilité (par exemple avec des mesures visant à atténuer la charge administrative, à accompagner les conjoints vers l'emploi, etc.), la compensation des contraintes opérationnelles les plus fortes (par exemple avec des mesures visant l'augmentation de l'offre de garde de jeunes enfants, notamment en horaires atypiques, à proposer au personnel une offre d'accès gratuit à internet en haut débit, y compris à l'étranger et dans certains bâtiments de la Marine) et l'amélioration de la vie quotidienne des familles dans les territoires (infrastructures de loisirs notamment).
Depuis mars 2024, un nouveau plan, intitulé « fidélisation 360 », est déployé dans l'objectif d'adopter une démarche de fidélisation globale et consolidée.
Le plan « fidélisation 360 »
Le plan « fidélisation 360 » a été lancé en mars 2024 par le ministre des armées, Sébastien Lecornu. Il vise à couvrir une logique à 360 degrés et portent aussi bien sur les contraintes opérationnelles que la mobilité, les conditions de travail et de vie en emprise militaire, la rémunération ou encore le parcours professionnel.
La démarche comprend 33 mesures regroupées en 6 axes :
- mieux compenser les sujétions militaires ;
- accompagner la mobilité ;
- améliorer les conditions de travail et de vie en emprise militaire ;
- assurer une juste rémunération ;
- proposer des parcours professionnels flexibles et évolutifs ;
- gagner la bataille des perceptions.
Le plan se structure autour d'outils financiers, d'avantages statutaires, de parcours professionnels qualifiants, de l'amélioration de l'accompagnement du personnel et de la prise en compte de la qualité de vie au travail.
Une partie des dispositifs mobilisés par ces outils existent déjà (NPRM, prime de lien au service, révision des grilles indiciaires31(*)). D'autres sont mis en oeuvre à compter de 2024 (aides aux déménagements, accompagnement vers l'emploi des conjoints, offres de prêts à taux préférentiels pour l'accès à la propriété, aides à la garde en horaires atypiques, etc.), tandis qu'une dernière partie sera mise en oeuvre ultérieurement, notamment à compter de 2025 (étude de l'élargissement de l'assiette de la pension militaire de retraite, développement de l'offre de logement pour les militaires mutés, etc.).
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Le PLF 2025 prévoit une hausse de 139 millions d'euros des crédits en faveur des revalorisations salariales, dont 89 millions d'euros relevant de l'extension en année pleine de mesures mises en oeuvre en cours d'année 2024 et de 50 millions d'euros de mesures nouvelles entrant en vigueur en 2025.
Sont concernés des efforts indiciaires incitant à la progression de carrière et des efforts indemnitaires ciblant les métiers en tension (cybersécurité, systèmes d'information et de communication, maintien en condition opérationnelle, santé, etc.). Peuvent notamment être citées la révision de la grille indiciaire des sous-officiers supérieurs (+ 42 millions d'euros) et des officiers (+ 12,5 millions d'euros), la politique salariale en faveur des agents contractuels (+ 27 millions d'euros) et une prime dans le domaine du numérique (+ 6,7 millions d'euros).
* 30 70 ETP ne relèvent toutefois pas du périmètre du ministère des armées.
* 31 Voir infra.