EXAMEN EN COMMISSION
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous passons maintenant au rapport de Louis Vogel sur la proposition de loi visant à interdire la corrida et les combats de coqs en présence de mineurs de moins de seize ans. Nous accueillons Samantha Cazebonne pour nous la présenter, à qui je rappelle qu'elle devra quitter la salle après sa présentation.
Mme Samantha Cazebonne, auteure de la proposition de loi. - Nous abordons une question qui transcende les clivages politiques et les traditions : il s'agit de la protection de nos enfants contre l'exposition à la violence, en particulier au travers des spectacles tels que la corrida et les combats de coqs. Ces pratiques sont reconnues comme des actes de cruauté selon l'article 521-1 du code pénal. Bien que ces pratiques bénéficient d'une exception pénale lorsqu'une tradition est évoquée, ce motif dérogatoire d'ordre culturel ne saurait atténuer leur caractère cruel et violent.
Il est indéniable que, ces dernières années encore, l'État et les législateurs ont exprimé la volonté de protéger les mineurs de l'exposition à la violence, en vertu de leur vulnérabilité unanimement reconnue par des dispositions légales telles que les articles 226-14 et 434-3 du code pénal. L'article 227-24 pénalise également les messages violents accessibles aux mineurs, tandis que l'article D 4153-37 du code du travail interdit d'affecter les jeunes à des travaux liés à l'abattage, à l'euthanasie et à l'équarrissage des animaux.
L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) encadre, quant à elle, la diffusion de la tauromachie à la télévision pour éviter de heurter la sensibilité des téléspectateurs, imposant une signalétique jeunesse obligatoire et interdisant la diffusion de la mise à mort. Il est aussi essentiel de rappeler qu'une écrasante majorité des Français - à hauteur de 80 % - soutient cette proposition de loi interdisant l'accès à ces spectacles violents pour des mineurs de moins de 16 ans. Ce soutien transcende les divisions partisanes, même dans les départements taurins, et témoigne d'une conscience collective qui appelle à une action législative cohérente pour la protection de nos enfants sur l'ensemble du territoire national.
Je me permets d'insister sur la cohérence du droit et des recommandations : comment comprendre, dans un esprit rationnel, qu'un enfant spectateur de corrida derrière un écran devrait en être écarté par ses parents - comme le demandent les experts de l'enfance pour le protéger -, mais que, pour assister exactement aux mêmes scènes de cruauté in vivo, les recommandations et la loi s'effaceraient ? Qui peut le comprendre ?
Pour que nous nous comprenions bien, je prendrai un autre exemple. Qui parmi nous pourrait comprendre que l'Arcom et le législateur demandent aux parents de ne pas exposer leurs enfants à des scènes de pornographie à la télévision, mais que, sous prétexte de voir les mêmes scènes dans le réel, affranchissent ces mêmes parents de cette obligation ?
Pour ceux qui ne connaissent pas la corrida, je vous invite à imaginer l'expérience d'un enfant dans une arène. Le picador s'avance vers le taureau, plonge sa lance dans le dos de l'animal avec force ; la douleur étant immédiate, le taureau pousse un rugissement déchirant ; le sang s'écoule lentement, marquant le sol de l'arène ; le taureau, déjà affaibli, tente de charger ; le picador plante son arme effilée dans son cou et ses flancs, chaque impact accentuant sa souffrance ; l'expression du taureau trahit une lutte désespérée contre la douleur, son corps ensanglanté et fatigué montre les signes d'une agonie prolongée ; enfin, le matador entre dans l'arène avec un air de défi, avance sur le taureau ; même dégradé et abattu, celui-ci charge ; lors de l'estocade, le matador plante sa lame avec précision, mais la mort ne vient pas toujours instantanément. Le taureau s'effondre alors lentement, ses yeux implorant de l'aide, une dernière plainte se perd dans le tumulte avant que son corps ensanglanté ne reste sans vie sur le sol de l'arène, l'écho de son agonie résonant encore dans l'esprit des témoins, dont des enfants qui garderont à vie ces images.
C'est parce qu'elle a été forcée d'assister à cette cruauté que, dans son livre intitulé Grand-père, Marina Ruiz-Picasso évoquait avec franchise les traumatismes subis quand elle était enfant à la vue des corridas, traumatismes douloureux et encore présents à l'heure actuelle.
Quelle place une scène de violence où un taureau souffre doit-elle avoir pour un enfant de cinq ans ? Est-il acceptable qu'il soit témoin de la souffrance d'un être vivant, alors que sa compréhension des valeurs de compassion et de bienveillance est encore en pleine formation ? Nous avons le devoir de les protéger, de protéger leur innocence.
De plus, nous devons prendre en compte le conflit de loyauté auquel, souvent, nos enfants peuvent être confrontés. Combien d'entre eux osent dire « non » lorsqu'ils se trouvent sous l'influence d'un parent enthousiaste à l'idée d'assister à de telles atrocités ? Cette pression émotionnelle peut les pousser à des spectacles qui violent les normes fondamentales du respect de la vie. Les traumatismes qui résultent de l'exposition à ces images violentes ne sont pas à sous-estimer : de nombreuses études documentent l'impact négatif que cela a sur le développement moral et le comportement de nos jeunes.
Comment alors justifier une exposition réelle à de telles violences ? Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU a, depuis 2016, recommandé à la France de redoubler d'efforts pour interdire l'accès des enfants aux spectacles de tauromachie, soulignant l'importance de l'intérêt supérieur de l'enfant. Nos États doivent rendre des comptes et veiller à ce que ces recommandations soient suivies, car l'absence de mention de ces pratiques dans les rapports fournis au Comité témoigne d'une complaisance que nous ne pouvons plus accepter.
Là encore, avec Arnaud Bazin ainsi qu'avec d'autres cosignataires, de manière transpartisane, nous demandons de la cohérence pour protéger les enfants. Je tiens aussi à souligner le soutien affirmé d'Élisabeth Badinter et de Simone Veil pour une telle interdiction : l'expression de ces femmes d'engagement et de conviction, si estimables et remarquables, est un soutien qui constitue un puissant appel à l'action que nous ne pouvons ignorer.
Enfin, permettez-moi de saluer l'engagement de toutes celles et de tous ceux qui se battent pour protéger les enfants et faire reconnaître la souffrance d'êtres vivants.
En conclusion, il est de notre devoir de refuser toute forme de complaisance face à cette réalité ; nous devons agir avec conviction et voir la réalité en face, sans laisser penser ou dire que cette proposition de loi n'aurait pas lieu d'être au prétexte que le canal législatif ne serait pas le bon. Préférer la forme au fond serait un mauvais procès, car nous sommes là pour écrire la loi et l'amender si besoin.
Je le redis, ce véhicule législatif est le bon, car il s'agit d'un régime dérogatoire. La loi relative à la protection des enfants ne doit pas faire exception et cette proposition de loi ne mérite pas d'être présentée comme étant hors sujet. Nous n'avions d'autre choix, même s'il nous sera peut-être dit le contraire.
Protéger nos enfants de la violence n'est pas uniquement une question de législation, c'est un impératif moral. Ensemble, faisons en sorte que notre engagement mène à un avenir où les droits des enfants sont respectés sur l'ensemble du territoire, sans exception : il ne doit pas y avoir de territoire où les enfants ont le droit d'être traumatisés au nom de la tradition, alors qu'ailleurs en France le législateur fait voter des lois pour les protéger.
Le Comité des droits de l'enfant à l'ONU nous regarde, les Français nous regardent et, comme l'a fait le législateur en Catalogne, dans le pays aux origines de la tradition taurine, ne permettons plus à un seul enfant d'être exposé.
M. Louis Vogel, rapporteur. - Les objectifs qui nous ont été présentés à l'instant sont partagés par des membres de plusieurs groupes, qui ont cosigné le texte. De plus, cette proposition de loi n'est pas la seule à avoir été déposée sur le sujet. À ce titre, la rédaction du texte de Raymonde Poncet Monge semble plus précise.
L'objet de la proposition de loi que nous examinons n'est pas le bien-être animal, mais la protection des enfants. Il ne s'agit donc pas d'être pour ou contre la corrida et les combats de coqs, mais de s'interroger sur l'impact d'une forme de spectacle violent sur les enfants. Ce sujet est important et a fait l'objet de recommandations, qui ont été adressées à la France par le Comité des droits de l'enfant des Nations unies.
De fait, certains spectacles de corrida sont organisés de manière à inciter à la présence de mineurs et de familles, notamment en prévoyant la gratuité de l'entrée pour les moins de 12 ans.
J'ai entendu des experts psychiatres et des pédopsychiatres engagés sur cette question : ils ont condamné l'exposition des mineurs aux combats d'animaux, tout en laissant plusieurs questions en suspens, dont celle de l'âge.
En droit, se pose d'emblée la question de l'autorité parentale et de la nécessité pour le législateur de se substituer aux parents, pour déterminer si un mineur de moins de 16 ans doit assister ou non à une corrida.
Plus largement, j'ai été conduit à m'interroger sur la capacité de ce texte à atteindre l'objectif qu'il vise. Au terme de cette analyse, il m'apparaît qu'il est inapplicable et que, si l'on parvenait quand même à le mettre en oeuvre, il n'aurait pas d'autre effet que d'interdire purement les corridas et les combats de coqs.
Je commencerai par évoquer le régime actuel.
En droit, les corridas et les combats de coqs relèvent d'une dérogation aux dispositions du code pénal sanctionnant les sévices et le fait de provoquer la mort d'un animal. La lutte contre la violence faite aux animaux est ancienne et la première loi en la matière, dite Grammont, date de 1850. Elle a été modifiée en 1951, en 1963 et en 1964, pour aboutir à l'article 521-1 du code pénal, qui sanctionne le fait « d'exercer des sévices graves ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité ».
Les sanctions prévues ont été renforcées par l'ajout de circonstances aggravantes dans la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes : elles atteignent jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. La loi de 2021 a également créé l'article 522-1, qui sanctionne le fait de donner la mort à un animal sans nécessité.
Ces articles précisent que les qualifications et les sanctions prévues ne sont pas applicables « aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ». Elles ne sont pas non plus applicables « aux combats de coqs dans les localités où une tradition ininterrompue peut être établie ».
Toutes les « courses de taureaux » ne sont pas des corridas - ce terme est réservé aux combats aboutissant à la mise à mort de l'animal. Il existe aussi, entre autres, les courses dites camarguaises, qui sont plutôt des joutes sportives ou des jeux d'adresse, au cours desquels l'animal n'a pas vocation à être blessé ou tué.
Cette distinction est importante, du point de vue du bien-être animal, mais aussi sur le plan juridique, car le juge interprète la notion de tradition, qui fonde la possibilité d'organiser des courses de taureaux, de manière stricte : là où il n'existe qu'une tradition de course de taureaux sans mise à mort, on ne pourra organiser de corrida.
C'est également la jurisprudence qui a défini la zone géographique où des courses de taureaux peuvent être organisées : dans le territoire qui s'étend « entre le pays d'Arles et le Pays basque, entre garrigue et Méditerranée, entre Pyrénées et Garonne, en Provence, Languedoc, Catalogne, Gascogne, Landes et Pays basque ».
Les combats de coqs constituent une pratique très différente puisqu'il s'agit d'un combat entre deux animaux dont la combativité naturelle a été artificiellement exacerbée. Les territoires concernés sont, pour la France métropolitaine, une cinquantaine de communes des départements du Nord et du Pas-de-Calais et, pour les départements et collectivités d'outre-mer, La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et la Polynésie française.
L'organisation des combats de coqs fait l'objet d'un régime plus restrictif que pour les courses de taureaux. L'article 521-1 du code pénal prévoit l'interdiction de construire de nouveaux gallodromes, appelés « pitts » dans les outre-mer. Dans sa décision du 31 juillet 2015, le Conseil constitutionnel a souligné qu'en interdisant la construction de nouveaux gallodromes, le législateur a entendu « accompagner et favoriser l'extinction de ces pratiques ».
Si l'extinction du combat de coqs est un objectif du législateur, tel n'est pas le cas pour les courses de taureaux, pour lesquelles la construction de nouvelles infrastructures est autorisée.
La proposition de loi entend restreindre la dérogation posée aux articles 521-1 et 522-1 du code pénal, en interdisant la présence de mineurs de moins de 16 ans. Elle vise donc à atteindre un objectif de protection des mineurs en modifiant deux articles sanctionnant la violence contre les animaux, ce qui soulève des difficultés insurmontables en termes de légistique. De plus, la proposition de loi vise à couvrir des situations très différentes par un dispositif unique, ce qui représente une source majeure d'incohérence.
Tout d'abord, il me paraît impossible de traiter la question des combats de coqs de la même manière que celle des corridas. Alors que la tradition des premiers semble sur le déclin dans les communes du Nord et du Pas-de-Calais, elle demeure très vivante dans les outre-mer. Le combat de coqs y est lié à la pratique des paris, assimilables aux paris hippiques. De ce fait, il s'agit d'abord d'une activité d'adultes. En outre, s'il existe des exceptions, la pratique générale est celle d'un accès libre, sans vente de billets.
Pour être applicable, le dispositif proposé entraînerait donc la mise en place d'un contrôle d'accès aux combats de coqs et une forte implication des services de l'État, alors même que le nombre de mineurs présents ne paraît pas a priori le justifier.
La pratique traditionnelle des combats de coqs se trouverait ainsi fortement affectée, spécialement dans les outre-mer, sans concertation préalable avec les acteurs de terrain. Outre le risque de déport vers des pratiques de combats illégaux qu'elle comporte, une telle mesure pourrait être perçue par les populations locales comme une mesure unilatérale, remettant en cause les cultures locales. C'est ce que laissent craindre mes échanges avec les services de l'État dans les départements ultra-marins. Créer un nouveau sujet de tension dans ces territoires, alors même que la nécessité de protéger les mineurs de moins de 16 ans du spectacle des combats de coqs n'est pas suffisamment établie, ne me paraît pas opportun.
J'en viens aux corridas. Du fait de sa construction, la proposition de loi interdirait la présence de mineurs de moins de 16 ans, y compris pour les courses de taureaux sans mise à mort, mais ce point est secondaire. J'examinerai successivement les questions suivantes : la participation active et passive du mineur, l'apprentissage, le régime pénal, le seuil d'âge, la contradiction avec l'autonomie des collectivités et l'autorité parentale.
D'abord, mes auditions et la comparaison avec les autres propositions de loi ayant le même objet laissent penser que ce texte vise à interdire deux situations distinctes : celle dans laquelle le mineur de moins de 16 ans assiste à la course ou au combat - visée dans l'exposé des motifs -, mais également celle où il y participe.
Cette dernière situation a déjà entraîné des débats sur le cadre juridique permettant à des enfants soumis à l'obligation scolaire de se produire en spectacle, de manière rémunérée ou non. On comprend que les auteurs du texte souhaitent interdire la participation active, dont l'effet sur les mineurs est nécessairement plus important que la position de spectateur. La clarté de la loi imposerait cependant que les deux circonstances soient explicitement visées.
De plus, la proposition de loi ne dit rien des écoles taurines. Si l'effet des mesures proposées est d'interdire aux mineurs de moins de 16 ans de participer aux corridas, la question de l'apprentissage de ces pratiques dans les écoles de tauromachie reste donc entière.
En effet, la loi pénale étant d'interprétation stricte, l'interdiction des écoles qui forment à la tauromachie n'entre pas dans son champ d'application, tant que ces institutions n'organisent pas de courses. Le régime proposé interdirait donc aux mineurs de moins de 16 ans d'assister aux corridas, mais permettrait aux parents d'inscrire leurs enfants dans les quelques écoles de tauromachie existant en France, dès l'âge de 6 ou 8 ans. Il s'agit là d'une incohérence fondamentale du texte.
En outre, le texte n'apporte aucune modification au régime pénal et fait donc reposer sur l'organisateur la responsabilité liée à la présence d'un mineur de moins de 16 ans. La proposition de loi ne prévoit de régime de responsabilité ni pour les parents, adultes ou mineurs de 16 à 18 ans, qui auraient facilité la présence du mineur de moins de 16 ans, ni a fortiori pour le mineur lui-même, qui se serait introduit malgré les contrôles et interdictions.
Le régime de responsabilité de l'organisateur n'est pas sans parallèle et nous pourrions citer le cas des exploitants de salles de cinéma. Cependant, cette responsabilité s'exerce généralement conjointement à la responsabilité parentale et elle est sanctionnée par une contravention, peine qui paraît la plus adaptée au regard de la gravité des faits.
Tel que le texte est rédigé, la présence d'un seul mineur de moins de 16 ans transformerait, du point de vue du droit pénal, un spectacle légal en sévices graves infligés à un animal. Le fait que ces sévices aient été commis en présence d'un mineur et qu'ils aient entraîné la mort de l'animal constituerait des circonstances aggravantes.
Ainsi, les personnes physiques seraient exposées à la peine maximale de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Les personnes morales risqueraient notamment l'interdiction d'exercice de l'activité professionnelle, en application de l'article 131-39 du code pénal.
Pareilles sanctions, qui aboutiraient de fait à l'interdiction des spectacles de corrida si elles étaient mises en oeuvre par le juge, ne paraissent pas conformes à l'échelle des peines, si l'on se place sur le terrain de la protection des mineurs.
Par ailleurs, les auditions que j'ai menées n'ont pas permis d'établir le seuil d'âge le plus adapté à l'objectif de protection poursuivi. Le seuil de 16 ans correspond à la fin de l'obligation scolaire et à la possibilité de l'émancipation. Il établit un parallèle avec le système de classification des oeuvres cinématographiques.
Cependant, ce seuil a été critiqué au cours des auditions. Certains le jugent trop bas, d'abord pour des raisons juridiques puisque, en ce qui concerne les sévices sur animaux, l'article 521-1 du code pénal considère comme circonstance aggravante la présence de mineurs, sans distinction d'âge. De plus, il est nécessaire de protéger le développement cognitif et psychologique des adolescents le plus longtemps possible.
À l'inverse, d'autres jugent le seuil de 16 ans trop élevé au regard de la majorité sexuelle, fixée à 15 ans. Reprenant le parallèle avec la classification des oeuvres cinématographiques, certaines des personnes entendues ont même considéré que le seuil de 12 ans serait le plus adapté.
Ces multiples difficultés me semblent rendre impossible l'adoption de la proposition de loi. De plus, même si elles étaient surmontées, un autre problème fondamental se poserait : l'interdiction proposée substitue l'appréciation du législateur à celle des collectivités concernées et à celle des parents. Or ce choix pose question, au regard du régime juridique spécifique des courses de taureaux et des combats de coqs, mais aussi des dispositifs de protection de la jeunesse.
La possibilité d'organiser des courses de taureaux et des combats de coqs se fonde sur des traditions locales ininterrompues, semblables à des coutumes. Or c'est moins l'absence de pratique qui met fin à la coutume que l'évolution des moeurs et la pratique contraire. Les traditions locales en matière de tauromachie et de combat de coqs reposent sur la transmission d'une culture. Les maires de villes taurines que j'ai entendus ont ainsi insisté sur le caractère familial et transgénérationnel des spectacles de corrida. En conséquence, l'intervention du législateur dans les traditions locales reconnues comme légitimes ne saurait se faire sans concertation avec les acteurs locaux.
Les règlements taurins adoptés par chacune des municipalités concernées paraissent représenter le véhicule le mieux adapté tant pour encadrer le fonctionnement des écoles taurines que pour faire évoluer la présence et la participation des mineurs à ces spectacles, en fonction du contexte local et du souhait de chaque municipalité, dont le degré d'attachement aux corridas est variable.
Surtout, l'exclusion totale prévue par le texte substitue l'appréciation du législateur à celle des parents. En cela, elle rompt avec une position traditionnelle du droit de la famille, qui laisse aux titulaires de l'autorité parentale la liberté de faire le choix qu'ils estiment le meilleur pour garantir la sécurité, la santé, la vie privée et la moralité de leurs enfants. Sur le terrain de la protection des mineurs, deux systèmes sont possibles : soit on fait confiance à l'autorité parentale et, en cas de désaccord, le juge intervient, soit on prévoit une exclusion quand il existe un risque, notamment de dépendance, comme dans le cas des jeux d'argent.
La décision de permettre à un mineur d'assister à une corrida relève de l'exercice conjoint de l'autorité parentale et de l'obligation pour les parents d'associer l'enfant aux décisions qui le concernent, comme le prévoit l'article 371-1 du code civil. Déroger à l'application de ces règles générales impose la plus grande prudence.
Pour toutes ces raisons et sans nier le caractère intrinsèquement violent des spectacles de combats d'animaux, la proposition de loi me paraît inapplicable et ses effets juridiques disproportionnés. Je vous propose donc de ne pas l'adopter.
- Présidence de M. Christophe-André Frassa -
M. Guy Benarroche. - Vous avez démontré que ce qui est utile et nécessaire, voire indispensable, pour la santé et la construction psychologique des enfants, pouvait être mis à mal par un argument : le législateur ne peut pas se substituer à une collectivité locale ou à des parents.
Or le législateur se substitue en permanence, y compris à des autorités locales et à des parents, en particulier quand un risque existe, comme c'est le cas avec les jeux d'argent ou la pornographie. Cependant, il existe aussi un risque avec les corridas, vous l'avez montré, et tous les pédopsychiatres et psychologues le disent.
De plus, la corrida avec mise à mort relève d'un régime dérogatoire et une dérogation peut être revue. C'est ce que prévoit ce texte, qui vise à défendre les droits des enfants, mais évoque aussi des traitements cruels à l'égard des animaux, qui ont lieu dans le cadre d'un spectacle.
Depuis quand ces traditions locales sont-elles « ininterrompues » ? Depuis des siècles ? Non. De plus, de nombreuses traditions ont disparu au cours de l'histoire, comme celle des jeux du cirque romains.
Vous dites qu'il faut respecter la légitimité des traditions locales, mais celle-ci est aussi liée à la perception que les gens ont de ces coutumes. Or, aujourd'hui, plus de 80% des Français sont opposés à ces pratiques, y compris dans les zones concernées. Quelle est la légitimité d'une autorité locale en la matière, dont l'intérêt essentiel est de défendre une activité économique et pas une tradition, contre l'avis de la population ?
Moins précis et complet que la proposition de loi de Raymonde Poncet Monge, le texte que nous examinons nous permet cependant d'entrer dans un processus important. Nous déposerons des amendements, notamment sur l'interdiction des écoles taurines pour les mineurs. Par la suite, nous demanderons l'interdiction des corridas.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - À titre personnel, je voterai ce texte. Cependant, il s'agit d'une question compliquée et le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain prévoira peut-être une liberté de vote.
Sur la question de la protection des mineurs, l'argument de l'autorité parentale me semble faible puisque des interdictions existent déjà dans un certain nombre de domaines.
Par ailleurs, je regrette que l'auteure du texte ait décrit les corridas de manière univoque. Il s'agit aussi d'un spectacle inouï et d'un combat dans lequel les deux combattants risquent leur vie, le torero comme le taureau.
En ce qui concerne les effets psychologiques, l'âge retenu me semble un peu élevé. Cependant, l'adoption de ce texte rendrait probablement nécessaire de faire la liste d'un certain nombre d'autres situations, dans lesquelles la question des conséquences se pose, y compris économiques. Je n'y suis pas hostile, mais il faut y être prêt et les appréciations divergeront.
Quant aux traditions culturelles, elles ont leurs limites. Ainsi, certains pays essaient de modifier les textes internationaux relatifs aux droits des femmes, pour introduire le concept de tradition culturelle. Cependant, il faut les prendre en considération et la coutume est source de droit.
Enfin, si nous nous attachons au critère de la cruauté, il faudrait aussi nous préoccuper des abattoirs. Guy Benarroche a raison : dans les abattoirs, ce n'est sans doute pas beaucoup plus glorieux que dans une corrida...
Je n'ai fait qu'indiquer mon positionnement personnel. Certains des collègues de mon groupe expliqueront, en séance publique, en quoi ce texte ne leur paraît pas bienvenu.
M. Olivier Bitz. - Je remercie vivement le rapporteur de la qualité du travail qu'il a produit. Il n'est pas évident de se plonger dans une telle législation, qui, finalement, touche à beaucoup de choses.
J'ai un point de désaccord avec vous, monsieur le rapporteur. Vous estimez qu'il s'agit d'un sujet de protection de l'enfance. Non ! Le sujet est évidemment le bien-être animal ! D'ailleurs, ceux qui promeuvent cette initiative sont généralement mobilisés sur les questions animales plus que sur la protection de l'enfance. En réalité, ils n'ont qu'un objectif : interdire la corrida et les combats de coqs. Ce texte n'est qu'une étape sur la trajectoire de l'interdiction. L'intention des auteurs du texte doit être claire.
La protection de l'enfance se trouve dans un état absolument déplorable dans notre pays. Nous savons bien que nos services départementaux de protection de l'enfance croulent sous les difficultés. Si l'on s'intéresse vraiment à la protection de l'enfance, il faut l'aborder un peu plus sérieusement !
On sait bien que, parmi ceux qui veulent interdire ces spectacles au nom d'une certaine conception du bien-être animal, on trouve très souvent des personnes qui se positionnent contre la chasse et s'adonnent à un agribashing permanent, des personnes qui, fondamentalement, par certains aspects, veulent nous faire changer de civilisation.
Allons-nous, depuis cette salle, expliquer à nos compatriotes polynésiens, à 16 000 kilomètres d'ici, quelles sont les traditions acceptables et quelles sont celles qui ne le sont pas ? Quoi que l'on pense à titre personnel de ces pratiques, je vois dans cette initiative une forme de mépris à l'égard de nos territoires, voire l'expression d'une certaine vision néocoloniale.
M. Guy Benarroche. - C'est ce qu'a fait la colonisation pendant des centaines d'années...
M. Olivier Bitz. - Vu le nombre de difficultés auxquelles notre pays est confronté dans les territoires d'outre-mer aujourd'hui, il n'est vraiment pas nécessaire d'en rajouter. Cela vaut pour l'outre-mer comme pour les départements métropolitains. Je ne vois pas au nom de quoi nous pourrions nous opposer à une tradition locale ancrée qui ne pose pas de difficultés.
Enfin, je terminerai sur la manière dont ces travaux peuvent être perçus sur le territoire national. Dans le département de l'Orne, j'entends parler de désertification médicale, de pouvoir d'achat, d'éducation, de vieillissement de la population, mais jamais de tels sujets ! Nos compatriotes ne manqueront pas de s'étonner que nous ayons du temps et de l'énergie à consacrer à ce sujet, compte tenu de la situation de notre pays.
M. Guy Benarroche. - Ne faisons rien, en ce cas ! L'argument est spécieux...
M. Éric Kerrouche. - Il fallait un traitement juridique rigoureux du sujet. C'est ce que vous avez fait, monsieur le rapporteur, et je vous en remercie.
Sur le fond, la présentation du texte par son auteure est un peu particulière. Je pense qu'elle dessert profondément sa cause. La question qui nous est posée n'est pas une question de droit. Cette proposition de loi est hypocrite : on peut être contre la corrida, mais il n'est pas convenable de traiter le problème de manière détournée. On sait très bien que la protection des enfants est, au sens littéral, un prétexte.
Je suis sénateur des Landes. Il m'arrive d'assister à des spectacles de corrida et à des courses landaises. En parlant de « courses de taureaux », le texte ne fait pas de distinction entre les deux, ce qui pose un problème majeur. On ne saurait dire que les courses landaises posent un problème de bien-être animal - encore que certains le contestent...
Le sujet est compliqué. Je peux tout à fait entendre que certains soient opposés à la corrida, c'est un spectacle qui peut paraître violent et cruel. Cependant, je ne peux que conseiller à l'auteure du texte de lire L'animal et la mort, de l'anthropologue Charles Stépanoff : ce très bel ouvrage montre que la sacralisation de l'animal peut conduire à faire oublier la brutalité du vivant.
Le sujet est loin d'être univoque. Néanmoins, il a des conséquences bien plus larges sur la réalité territoriale que ce que peut laisser penser une certaine bien-pensance. Je ne suis pas pour l'usage du terme « tradition », la tradition pouvant être négative, mais il existe, en France, des cultures locales. Et faire comme si ces cultures locales pouvaient être niées sur la base de valeurs morales présentées comme universelles, qui s'appliqueraient de manière homogène sur l'ensemble du territoire, c'est faire une erreur d'analyse sur ce qu'est et ce qui constitue notre pays. Expliquer à des gens que ce qu'ils font depuis des siècles n'est pas acceptable, c'est la porte ouverte à l'intolérance. Pour reprendre un mot connu, la France est une « composition », faite de la variété de ces cultures locales. Je peux entendre que certains, avec l'évolution des moeurs, puissent être dérangés par ces cultures locales. Mais il serait risqué de vouloir les éradiquer au nom de valeurs prétendues universelles on ne sait pas jusqu'où peut aller un tel mouvement.
Encore une fois, je regrette que le texte ne soit pas franc dans ses intentions. L'autorité parentale n'est pas la bonne porte d'entrée. Sinon, d'autres spectacles et d'autres pratiques pourraient poser des difficultés... Laissons vivre les cultures locales qui existent depuis des années !
La question se pose également pour la chasse et il serait dommageable de perdre le rapport particulier à l'espace, à la vie locale qu'ont les chasseurs.
Il nous faut traiter ce sujet avec un peu de hauteur. Or ce texte entre dans la caricature et ne fait pas avancer le débat !
Mme Sophie Briante Guillemont. - Merci, monsieur le rapporteur, pour la clarté de votre rapport.
Avez-vous pu faire un point de droit comparé ? Comme l'indique l'auteure de la proposition de loi, plusieurs pays ont déjà procédé à une interdiction pour les mineurs, notamment des pays où existe une tradition de corridas, comme l'Espagne, plusieurs États du Mexique ou encore le Portugal.
L'un des arguments avancés contre ce texte est qu'il n'existe pas d'étude spécifique permettant de prouver qu'assister à ces spectacles serait dangereux pour les enfants, mais on trouve des études plus générales sur les spectacles impliquant des animaux. Pouvez-vous y revenir ?
L'un des sénateurs du groupe RDSE m'a fait savoir que, dans les faits, peu de mineurs assistaient à ces spectacles. A-t-on une idée de leur nombre ?
Mme Patricia Schillinger. - Je remercie le rapporteur de son travail.
Je veux rassurer Olivier Bitz : j'ai signé ce texte, mais je ne suis ni antichasse ni anticorrida.
Les adultes sont libres d'assister ou non à une corrida. Pour ma part, voilà quarante-cinq ans que je vais chaque année dans les Landes, je connais donc les corridas. J'ai assisté à l'une d'entre elles, et je n'irai plus, parce que je ne souhaite plus voir des oreilles de taureau voler dans le public. C'est mon choix.
Il faut faire la différence entre les jeunes qui connaissent la corrida par tradition, familiale ou locale, et les jeunes touristes qui ignorent à quoi ils vont être exposés. C'est pour cette raison que j'ai cosigné ce texte. Cependant, je comprends qu'il existe des traditions...
Cela dit, quand je constate que l'Espagne ou des pays d'Amérique latine ont opté pour une telle interdiction, je me dis que la France tergiverse sur de nombreux sujets. Sur le mariage pour tous, certains pays n'ont pas débattu durant trois ans !
M. Alain Marc. - Comme Éric Kerrouche et Olivier Bitz, je pense que ce texte est la première étape vers d'autres interdictions, ce qui me gêne particulièrement. En cette période extrêmement compliquée, on a peut-être autre chose à faire qu'à « emmerder les Français », pour reprendre l'expression d'un homme politique célèbre...
Je reviens sur l'angle de la protection de l'enfance qui a été choisi. Mes chers collègues, beaucoup d'entre nous sont issus de familles d'agriculteurs. Combien d'entre nous ont assisté à la mise à mort d'un lapin par leur grand-mère ? Je ne pense pas que cela nous ait durablement perturbés... Il me semble que l'on s'égare, et je suis d'accord avec Éric Kerrouche pour dire que cette proposition de loi est complètement hypocrite. Entrer dans le sujet par le biais de la protection de l'enfance est une erreur fondamentale et un faux-nez. Je suis bien évidemment favorable au rejet du texte.
J'entends que 80 % de la population serait favorable, mais voulez-vous que nous fassions un sondage sur la peine de mort aujourd'hui ? Cet argument ne rime à rien.
M. Stéphane Le Rudulier. - Je suis d'accord avec Eric Kerrouche et Olivier Bitz : il y a une forme d'hypocrisie dans cette proposition de loi, puisqu'il s'agit, en réalité, d'interrompre la transmission intergénérationnelle d'une culture. Monsieur Benarroche, cette tradition ne date pas de plusieurs millénaires ! Elle a 150 ans en Provence.
Au-delà des aspects sociétaux, il y a des enjeux économiques. À Arles, ville chère à mon coeur, les retombées financières s'élèvent à 12 millions d'euros. Les élevages taurins, en France, ce sont des milliers d'emplois !
Ne soyons pas univoques. Abordons le sujet de manière beaucoup plus apaisée.
Du reste, je doute que cette proposition de loi soit en conformité avec le droit européen, puisque l'Union européenne nous incite à préserver nos cultures et nos traditions locales.
M. Guy Benarroche. - Je n'aime pas l'argument d'hypocrisie. Je ne veux pas défendre l'auteure de la proposition de loi, mais il n'y a pas plus d'hypocrisie à défendre l'interdiction aux mineurs des corridas qu'à justifier la corrida par la tradition ! On voit bien que les gens qui défendent la corrida aujourd'hui viennent des territoires qui y ont un intérêt économique - les propos de Stéphane Le Rudulier sont éloquents.
S'il hypocrisie il y a, elle est des deux côtés.
M. Louis Vogel, rapporteur. - Alain Marc et Éric Kerrouche ont employé le mot « hypocrisie ». Olivier Bitz affirme qu'il n'est pas d'accord sur le fait que ce soit un texte de protection de l'enfance. Mon cher collègue, je n'ai pas voulu faire de procès d'intention à l'auteure du texte !
Cela dit, ce décalage entre l'objectif et le moyen utilisé se paie juridiquement : toutes les incohérences juridiques qui rendent ce texte inapplicable sont précisément dues au fait que, sous couvert de protection de l'enfance, on veut, en réalité, protéger les animaux. On n'instrumentalise pas le droit si facilement.
Bien sûr, madame Briante Guillemont, il y a des exemples de droit comparé, mais sur des approches frontales du sujet, c'est-à-dire sur la volonté de supprimer les corridas ou les combats de coqs. En revanche, on n'a pas d'élément de droit comparé précis sur la protection de l'enfance dans le cadre des corridas.
Marie-Pierre de La Gontrie a rappelé que la coutume était source de droit. C'est fondamental ! En portant atteinte à une coutume reconnue par le législateur, nous prendrions une décision très grave.
Si le texte qui nous est soumis attaquait frontalement le sujet, on pourrait en discuter, mais ce n'est absolument pas le cas.
Monsieur Benarroche, vous avez dit que nous justifions le maintien des corridas en avançant des arguments économiques. C'est très réducteur ! L'intégration dans les quartiers à Arles se fait grâce aux corridas ! Les écoles de tauromachie permettent d'intégrer la population. C'est une vraie culture locale. Les corridas sont très importantes socialement.
Vous avez également déformé mes propos. Je n'ai jamais dit que le législateur ne pouvait pas se substituer aux parents ! J'ai dit qu'il ne fallait toucher au droit de la famille qu'« avec une main tremblante », pour citer Portalis - tous les spécialistes sont de cet avis.
Les exclusions du type de celle qui nous est soumise ne sont possibles que dans des cas extrêmement graves. L'autorisation d'assister à un spectacle relève de l'autorité parentale ; en cas de désaccord, c'est le juge aux affaires familiales qui tranche. Le texte est donc complètement en décalage par rapport à ce qui se fait par ailleurs en matière de protection de l'enfance.
M. Christophe-André Frassa, président. - Mes chers collègues, enapplication du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que le périmètre de la proposition de loi comporte les mesures encadrant l'organisation des courses de taureaux et des combats de coqs.
Il en est ainsi décidé.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
L'article 1er n'est pas adopté.
Article 2
L'article 2 n'est pas adopté.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance portera en conséquence sur le texte initial de la proposition de loi déposée sur le Bureau du Sénat.