B. 14 ARTICLES « PATCHWORK », INSUFFISANTS POUR RÉPONDRE À LA CRISE DU LOGEMENT

L'article 1er, loin d'intégrer les logements intermédiaires à la loi SRU comme l'avait annoncé le Premier ministre, les intègre uniquement au flux de rattrapage, mais pas au stock de logements sociaux, avec le double impact paradoxal d'un effet d'éviction à court terme sur le logement social, d'un maximum de 9 000 logements par an, et d'une augmentation de ses objectifs de production à long terme, par l'accroissement du nombre des résidences principales.

« Le gouvernement donne la main aux maires... mais ne leur lâche pas ! »

Sophie Primas, rapporteur

L'article 2 décline la seconde annonce du Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, de donner la main aux maires pour la première attribution. Le projet de loi va cependant beaucoup moins loin que la proposition de loi qui a été adoptée en octobre par le Sénat. Les premières attributions représentent environ 17 % du total annuel soit un peu plus de 70 000.

Les articles 4 à 6 visent à accélérer la production de logements en réduisant les délais du contentieux de l'urbanisme (article 4), facilitant la transformation des lotissements et des zones d'activité économique (article 5) et généralisant la possibilité de créer des lotissements multisites (article 6).

Face à la flambée des prix du foncier et de l'immobilier, l'article 3 autorise les maires à exercer le droit de préemption urbain pour motif de régulation des marchés foncier et immobilier.

Les articles 7 et 9 sont des mesures techniques visant à faciliter les activités de promotion immobilière des bailleurs sociaux, notamment avec des acteurs privés. Il y est question de sociétés civiles de construction vente, de VEFA inversée, de vente en démembrement de propriété, d'avances en compte courant à des filiales ou du développement du LLI. Mais ces mesures de niche n'auront qu'un impact limité. À titre d'illustration, Action Logement estime que celle sur la vente en démembrement devrait créer seulement 500 logements par an. De même, la hausse du plafond de LLI détenus par des bailleurs sociaux de 10 % à 20 % n'aura pas d'impact avant longtemps, le taux moyen étant actuellement inférieur à 3 %.

« Est-ce aux locataires HLM de compenser les 1,3 Mds€ de la RLS ? »

Dominique Estrosi Sassone, présidente

L'article 8 autorise les bailleurs à augmenter, sans condition, les loyers des logements anciens à hauteur de ceux des neufs à l'occasion des relocations. Cette mesure touche particulièrement 2 millions de logements anciens et pourrait générer 95 millions d'euros de recettes supplémentaires dès 2025, et 1,2 milliards à l'horizon de 15 ans, seule une moitié étant compensée par les APL. Or si des réévaluations ne sont pas en soi illégitimes, elles peuvent, dans le contexte actuel, susciter l'interrogation, donnant la nette impression que l'État cherche à faire payer les locataires pour redonner aux bailleurs les marges de manoeuvre financières qu'il leur a lui-même retirées il y a sept ans.

Les articles 10 et 13 visent à faciliter le logement des salariés, en prévoyant une délégation sous condition à Action Logement du contingent préfectoral - qui existe déjà au profit des autres bailleurs et des EPCI -, en clarifiant le lien fonction-logement social dans la fonction publique qui existe depuis 1983 (article 10), et en autorisant le bail mobilité, essentiellement pour les jeunes travailleurs, dans le parc social (article 13), mesure à l'impact très limité, sans doute de l'ordre d'un millier de logements.

Les articles 11 et 12 visent à inciter les locataires du parc social à la mobilité via le surloyer et la remise en cause du droit au maintien dans le logement :

- le paiement du SLS dès le premier euro, au lieu de 20 % au-dessus du plafond, toucherait 130 000 ménages, mais avec un supplément de seulement 10 euros par mois ;

- le durcissement des conditions de maintien dans les lieux, avec un plafond de ressources abaissé de 150 à 120 %, toucherait théoriquement 30 000 ménages, mais en réalité bien moins, en excluant les locataires handicapés, âgés de 65 ans, vivant en QPV, hors zone tendue... Sur 180 000 logements sociaux gérés par CDC Habitat, une vingtaine seulement pourrait être concernée !

On le voit, le nombre de logements qui pourraient être ainsi libérés est sans commune mesure avec les 600 000 demandeurs de logements sociaux en plus depuis 2017.

Enfin, l'article 14 simplifie à la marge les ventes HLM en dehors des conventions d'utilité sociale (CUS), en supprimant l'autorisation du préfet pour la confier aux maires. Cela ne représente qu'une vingtaine de ventes par département et par an.

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