EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Champ des infractions
amnistiées
L'article 1er définit le champ des infractions amnistiées commises à l'occasion de conflits du travail et d'activités syndicales, ainsi qu'à l'occasion de mouvements collectifs revendicatifs, associatifs ou syndicaux.
Jugeant cet article trop large et inadapté, la commission ne l'a pas adopté.
1. Le dispositif proposé
L'article 1er se compose de deux parties.
Le I. définit les délits que la proposition de loi entend amnistier. Il s'agit des délits punis de moins de dix ans de prison et des contraventions. Les faits doivent avoir été commis avant la promulgation de la loi mais sans limite de temps en amont.
Pour entrer dans le champ de l'amnistie les faits concernés doivent avoir été commis « à l'occasion » de l'un des deux types d'événements suivants, quel qu'en soit le lieu :
- soit un conflit du travail, ou une activité syndicale ou revendicative professionnelle ;
- soit un mouvement collectif revendicatif, associatif ou syndical concernant cinq thématiques spécifiques : l'éducation, le logement, la santé, l'environnement et les droits des migrants.
Le II. prévoit deux types d'exception à l'amnistie :
- les délits de violence à l'égard d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public et ayant entraîné une incapacité de travail ;
- les atteintes volontaires à l'intégrité physique ou psychique d'un mineur de quinze ans ou d'une personne particulièrement vulnérable.
Ces infractions sont définies par renvoi aux articles 222-12, 222-13 et 222-14 du code pénal. On peut relever qu'elles sont pour la plupart punies de peines supérieures à celles prévues par le I. de l'article 1er de la proposition de loi et n'entrent donc de toute façon pas dans son champ. Les violences à l'égard des dépositaires de l'autorité publique ou chargés d'une mission de service public ayant entraîné une incapacité de travail sont ainsi punies de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Entrent légitimement dans le champ des exclusions les violences sur un mineur de quinze ans ou sur une personne d'une particulière vulnérabilité qui n'ont pas entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours et sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
2. La position de la commission
La commission considère que le champ des infractions susceptible d'amnistie est particulièrement large et peu discriminant, car susceptible de concerner non seulement les militants pacifiques, mais aussi les auteurs de violences et de dégradations et surtout les délinquants utilisant les mouvements revendicatifs comme prétexte ou couverture de leurs actions. Pourraient ainsi être amnistiés les vols précédés, accompagnés ou suivis de violence sur autrui ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant huit jours au plus, qui sont punis de sept ans de prison par l'article 311-5 du code pénal.
L'impossibilité de mesurer le nombre d'affaires concernées du fait des limites de l'outil statistique de ministère de la justice incite en outre à la plus grande prudence à l'égard de cette mesure.
La difficulté à caractériser les « mouvements collectifs revendicatifs, associatifs ou syndicaux » est également source d'incertitude sur l'étendue de l'amnistie envisagée. La formulation retenue est elle-même source de difficulté, puisqu'il n'apparaît pas clairement si les mouvements collectifs visés sont uniquement associatifs ou syndicaux, ou si leur caractère revendicatif peut s'exprimer en dehors de toute organisation. Le principe d'interprétation stricte de la loi pénale conduira à l'application la plus limitée du texte, au risque cependant de divergences de jurisprudence.
Au regard de ces difficultés la commission, à l'initiative de son rapporteur, n'a pas adopté l'article 1er.
La commission n'a pas adopté l'article 1er.
Article 2
Procédure de constat de l'amnistie
en
matière pénale
L'article 2 prévoit la procédure de constatation de l'amnistie en cas de condamnation, que celle-ci soit définitive ou non.
Par cohérence avec sa position sur l'article 1er, la commission n'a pas adopté cet article.
1. Le dispositif proposé
L'article 2 prévoit deux procédures destinées à permettre le constat de l'amnistie dans le cadre des procédures pénales.
La première concerne les condamnations devenues définitives. Il appartient dans ce cas au ministère public près la juridiction qui a prononcé la condamnation de la constater, d'office ou sur requête du condamné ou de ses ayants droit. La décision du ministère public est susceptible de contestation par requête au président du tribunal ou de la cour qui a rendu la décision, selon les modalités fixées par l'article 778 du code de procédure pénale.
La seconde procédure concerne les condamnations non encore définitives. La juridiction compétente est alors appelée à statuer sur les poursuites.
2. La position de la commission
La commission s'interroge sur la formulation retenue pour la procédure de constatation de l'amnistie dans le cadre d'une condamnation non encore définitive.
Par cohérence avec sa position sur l'article 1er, la commission, à l'initiative du rapporteur, n'a pas adopté l'article 2.
La commission n'a pas adopté l'article 2.
Article 3
Amnistie
des faits constituant des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou
professionnelles et des sanctions
dans les établissements
universitaires ou scolaires
L'article 3 prévoit l'amnistie des faits constituant des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles et de sanctions dans les établissements universitaires ou scolaires.
La commission n'a pas adopté cet article.
1. Le dispositif proposé
L'article 3 se compose de deux parties.
Le I. prévoit l'amnistie des faits commis dans les circonstances prévues à l'article 1er en tant qu'ils ont pu donner lieu à des sanctions prononcées par un employeur public ou privé.
Le contrôle du respect de cette amnistie est confié à l'inspection du travail.
Le II. prévoit l'amnistie des sanctions disciplinaires prononcées dans les mêmes circonstances par les établissements scolaires et universitaires.
Il précise que l'amnistie implique le droit à réintégration, à l'exception toutefois des cas où l'exclusion a été prononcée suite à des faits de violence.
2. La position de la commission
La commission considère que les procédures de contestation des sanctions et mesures disciplinaires sont de nature à permettre une prise en compte équilibrée des circonstances, des intentions et des faits commis.
À l'initiative du rapporteur, elle n'a donc pas adopté l'article 3.
La commission n'a pas adopté l'article 3.
Article 4
Procédure de réintégration des
salariés et agents licenciés
et procédure de
contestation des sanctions pour des faits amnistiés
L'article 4 prévoit la réintégration des salariés et agents licenciés et définit les règles de compétence en matière de contestations relatives à l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles.
La commission n'a pas adopté cet article.
1. Le dispositif proposé
L'article 4 se compose de deux parties.
Le I. prévoit la réintégration des salariés ou agents publics représentants du personnel licenciés pour faute pour des faits amnistiés ; la réintégration ne concerne toutefois pas les cas de faute lourde. Il précise la procédure de réintégration : celle-ci peut être demandée dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi ou du prononcé de la sanction. Elle s'applique même en cas de succession d'employeur et est acquise dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande. La juridiction peut, saisie par le salarié ou agent, prononcer une restreinte à l'égard de l'employeur qui ne ferait pas droit à la demande de réintégration. Seule la force majeure peut s'opposer à celle-ci.
Le II. fixe la procédure de contestation des sanctions disciplinaires. Il distingue selon que la décision est définitive, auquel cas la contestation est portée devant l'autorité ou juridiction qui l'a prononcée, ou non encore définitive, auquel cas la contestation relève des autorités ou juridictions saisies des poursuites.
L'article prévoit que la procédure de contestation entraîne suspension de la sanction.
2. La position de la commission
Par cohérence avec sa position sur les articles précédents, la commission n'a pas adopté l'article 4.
La commission n'a pas adopté l'article 4.
Article 5
Effets de
l'amnistie
L'article 5 précise les effets de l'amnistie. Il prévoit, outre l'effacement de la condamnation ou l'extinction de l'action publique, la suppression des informations nominatives et des empreintes génétiques des fichiers de police. Il précise également la procédure de préservation des droits des tiers.
La commission n'a pas adopté cet article.
1. Le dispositif proposé
L'article 5 se compose de trois parties.
Le I. précise les effets de l'amnistie par référence aux articles 133-9 à 133-11 du code pénal et aux articles 6 et 769 du code de procédure pénale. Il précise qu'elle entraîne la remise des mesures de police et de sûreté prononcées. Il exonère également les personnes amnistiées des droits fixes de procédure. Enfin, il crée une amende de 5 000 euros pour toute référence à une condamnation ou une sanction amnistiée. Sont passibles de cette amende les personnes morales et physiques.
Le II. concerne la procédure applicable aux tiers. Il prévoit que, dans le cadre de l'instance sur les intérêts civils, le dossier pénal est versé aux débats. La juridiction saisie de l'action publique reste par ailleurs compétente pour statuer sur les intérêts civils.
Le III. concerne la suppression des informations contenues dans les fichiers de police et de police judiciaire, que celles-ci soient nominatives ou composées de traces biologiques. Il prévoit également l'amnistie des refus de prélèvements biologiques sanctionnés sur le fondement de l'article 706-56 du code de procédure pénale lorsque ce refus est commis à l'occasion d'un fait amnistié.
2. La position de la commission
Par cohérence avec sa position sur les articles précédents, la commission n'a pas adopté l'article 5.
La commission n'a pas adopté l'article 5.
Article 6
Application de l'amnistie
à l'ensemble du
territoire de la République.
L'article 6 prévoit l'application de l'amnistie à l'ensemble du territoire de la République.
La commission n'a pas adopté cet article.
Par cohérence avec sa position sur les articles précédents, la commission n'a pas adopté l'article 6.
La commission n'a pas adopté l'article 6.
La commission n'a pas adopté de texte sur la proposition de loi n°926 (2022-2023) portant amnistie des faits commis à l'occasion de mouvements sociaux et d'activités syndicales et revendicatives.
En conséquence, et en application du premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte initial de la proposition de loi.