B. LES AMÉNAGEMENTS À L'OBLIGATION DE TRANSFERT N'ONT PERMIS QUE DE LE REPORTER ET D'EN ATTÉNUER PARTIELLEMENT SES EFFETS

Face à l'obstination du Gouvernement qui n'entend pas revenir sur le caractère impératif du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés des communes, le Parlement, et en particulier les sénateurs, a cherché à obtenir davantage de souplesse dans l'organisation de ces compétences et à préserver, autant que possible, les modes de gestion existants, dans un souci d'efficacité.

1. Un second report du transfert : l'échéance du 1er janvier 2026

À l'écoute des craintes des élus locaux, notamment en matière d'augmentation du coût de l'eau, d'une gestion moins directe de cette ressource et d'une connaissance moins fine des réseaux d'eau et d'assainissement par les intercommunalités, le Sénat a adopté à l'unanimité, le 23 février 2017, une proposition de loi, de Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues, tendant au maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes 4 ( * ) .

Toutefois, l'Assemblée nationale a fait le choix de renvoyer en commission ce texte et d'examiner une proposition de loi tendant plutôt à reporter la date de mise en oeuvre du transfert obligatoire des compétences prévu par la loi NOTRe.

La loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes, qui en est résultée, a donc instauré un mécanisme de minorité de blocage des communes leur permettant d'obtenir le report du transfert au 1 er janvier 2026 .

Initialement, ce report n'était possible qu'à trois conditions : la communauté de communes ne devait pas exercer les compétences eau et assainissement à la date du 5 août 2018, elle devait se prononcer sur le transfert avant le 1 er juillet 2019 et au moins 25 % des communes membres de la communauté de communes représentant au moins 20 % de la population devaient être favorables au report du transfert des compétences.

Par la suite, la loi « engagement et proximité » 5 ( * ) est venue faciliter les modalités de ce report . Premièrement, ce texte a étendu la minorité de blocage aux cas où la communauté de communes exerce les compétences eau et assainissement sur une partie du territoire seulement ou n'exerce qu'une partie de ses compétences. Deuxièmement, il a permis aux communautés de communes de se prononcer jusqu'au 1 er janvier 2020, régularisant ainsi les délibérations intervenues entre le 1 er juillet 2019, et cette nouvelle échéance. Troisièmement, si après le 1 er janvier 2020 la communauté de communes, qui n'exerce pas ou que partiellement les compétences eau et assainissement, se prononce sur leur exercice, les communes membres de l'intercommunalité peuvent s'y opposer si elles réunissent une minorité de blocage nouvellement définie par la loi Engagement et proximité.

2. Des assouplissements complémentaires mais limités : la délégation des compétences à un syndicat ou à une commune

En premier lieu, la loi du 3 août 2018 a permis aux communautés de communes de se substituer à leurs communes membres au sein d'un syndicat si au moins une commune siégeant au sein de ce syndicat n'est pas membre de la communauté de communes. Antérieurement à cette modification, le syndicat devait regrouper des communes appartenant à au moins trois établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

En second lieu, la loi Engagement et proximité a apporté une nouvelle souplesse, limitée, aux communes en prévoyant la possibilité de déléguer les compétences eau et assainissement à une commune membre de la communauté de communes ou à un syndicat infra-communautaire . La délégation à ce dernier est toutefois particulièrement encadrée.

En effet, le syndicat doit être existant au 1 er janvier 2019 et inclus en totalité dans le périmètre de l'intercommunalité. Les communes ne peuvent donc pas créer un syndicat pour bénéficier de cette faculté de délégation offerte par la loi Engagement et proximité. En outre, le maintien du syndicat doit être décidé, dans un délai de neuf mois, par le seul organe délibérant de la communauté de communes. La décision ne revient donc pas aux conseils municipaux et aucun mécanisme de minorité de blocage n'est prévu. Si le principe de la délégation est acté par l'intercommunalité, le maintien du syndicat est prolongé d'un an afin de permettre aux parties de prévoir les conditions de la délégation. Même si le syndicat est au final maintenu, il exerce ses missions pour le compte de l'intercommunalité à qui il rend compte de son activité.

En troisième lieu, l'article 30 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale dite « loi 3DS », dispose que les syndicats infra-communautaires de gestion des eaux préexistants au sein d'une communauté de communes sont maintenus après le 1 er janvier 2026, sauf si la communauté de communes délibère contre ce maintien . Les syndicats exerceront alors les compétences eau et assainissement en lieu et place de la communauté de communes. Le pouvoir des communes est donc fortement limité.

Par ailleurs, la loi 3DS prévoit la possibilité pour l'intercommunalité de financer, à l'aide de son budget général, les budgets « eau » et « assainissement des eaux usées » dans deux situations : lorsque des investissements sont nécessaires et que leur importance entraînerait une augmentation excessive des tarifs pour les usagers ou pendant la période d'harmonisation des tarifications de l'eau et de l'assainissement à l'issue de la prise de compétence par l'intercommunalité.


* 4 Proposition de loi n° 291 (2016-2017) visant au maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes déposée par Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues le 11 janvier 2017.

* 5 Article 14 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

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