II. ANALYSE PAR PROGRAMME
Le programme 169 concentre l'immense majorité des crédits de la mission « Anciens combattants ». Ses crédits sont principalement affectés à l'administration des rentes viagères dont bénéficient les anciens combattants. Cette facette du programme obéit à des données naturelles mais aussi à des mécanismes de revalorisation des droits ainsi financés.
Pour les actions de mémoire, le programme est largement tributaire du calendrier commémoratif. L'action en faveur des rapatriés a connu en 2022 une augmentation drastique de ses moyens, passant de 25 millions d'euros3(*) à 95 millions d'euros4(*) (+ 260 %). La programmation 2023 se positionne en légère augmentation, à 100,1 millions d'euros (+ 6,1 %), du fait notamment du fonctionnement en année pleine du dispositif de reconnaissance et réparation en faveur des harkis, autres supplétifs et rapatriés prévu par la loi n° 2022-229 du 23 février 20225(*).
Les crédits affectés à la JDC sont en légère augmentation du fait d'une cohorte de jeunes légèrement plus importante qu'en 2022 (14 000 jeunes de plus).
Enfin, le dispositif du SMV continue de gagner en importance du fait de l'augmentation du nombre de volontaires qu'il est amené à accueillir et de l'ouverture d'une antenne à Marseille.
L'autre programme (le programme 158) est un réservoir de moyens destinés à réparer les préjudices subis par les orphelins de victimes violences antisémites et d'actes de barbarie commis durant la seconde guerre mondiale et les spoliations du fait de l'application de lois antisémites. La très grande majorité de ces crédits finance des rentes viagères à destination des orphelins. La baisse du nombre des crédit-rentiers explique la baisse des crédits de la mission (- 1,3 %, les crédits passant de 92,8 millions d'euros en LFI 2022 à 91,6 millions d'euros en PLF 2023). Les moyens employés pour l'indispensable action de recherche et d'identification des spoliations et de leurs victimes sont eux en hausse, passant de 6 à 10 millions d'euros, du fait de deux dossiers à forts enjeux financiers devant aboutir en 2023.
A. LE PROGRAMME 169, UN PROGRAMME REGROUPANT DES ACTIONS DIVERSES MAIS DONT LES CRÉDITS SONT TOUJOURS DOMINÉS PAR L'ACTION EN FAVEUR DES ANCIENS COMBATTANTS
1. Des crédits hétéroclites, largement dominés par l'effort en faveur des anciens combattants
Le programme 169 comporte 6 actions aux crédits très inégaux :
- l'action 01, « Administration de la dette viagère », disposant de 1264 millions d'euros en AE et CP ;
- l'action 02 « Gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité », disposant de 109,6 millions d'euros en AE et CP ;
- l'action 03 « Solidarité », disposant de 312,4 millions d'euros en AE et 319,2 millions d'euros en CP ;
- l'action 07 « Action en faveur des rapatriés », disposant de 100,9 millions d'euros en AE et CP ;
- l'action 08 « Liens armée-jeunesse », disposant de 24,6 millions d'euros en AE et 24,5 millions d'euros en CP ;
- l'action 09 « Politique de mémoire », disposant de 20,9 millions d'euros en AE et CP.
Bien que les crédits du programme 169 soient globalement en baisse par rapport au PLF 2022 à périmètre constant, deux tendances se dessinent. Les crédits affectés au paiement des rentes viagères et à leur gestion sont en baisse, alors que tous les autres crédits connaissent une hausse plus ou moins marquée.
En ce qui concerne l'action 08 (liens armée-jeunesse), cette vue d'ensemble porte cependant sur des données largement faciales du fait de l'ampleur de la participation de programmes extérieurs à la mission au financement tant de la JDC que du SMV.
Les formules d'association de la jeunesse à la Défense tendent à se démultiplier (« Journée défense et citoyenneté », service militaire volontaire, service militaire adapté en outre-mer et service national universel au sein duquel existe la « Journée Défense et Mémoire ». Il faut ajouter à ces différents dispositifs les actions menées par la Direction du Service National et de la Jeunesse qui relèvent du ministère des Armées mais à la réalisation desquelles participe l'ONACVG, le principal opérateur de la mission « Anciens combattants ») moyennant une altération de la lisibilité des relations ainsi instaurées. Cette confusion se retrouve au niveau budgétaire, les financements inscrits à la mission sous revue paraissant de moins en moins justifiés au vu de la part réduite de sa contribution aux coûts des différents dispositifs.
2. Des crédits dédiés à l'effort en faveur des anciens combattants en baisse franche malgré une revalorisation de 4 % de la valeur du point d'indice
Les crédits de paiement et autorisations d'engagement de l'action 01 « Administration de la dette viagère » baissent de 148,3 millions d'euros en 2023, soit - 10,5 % (contre - 83 millions d'euros représentant une baisse de 5,5 % l'an dernier).
Malgré une revalorisation de 4 % du point de pension militaire d'invalidité (point PMI) prévue pour le 1er janvier 2023 liée à l'indexation des rentes viagères sur les rémunérations publiques, la baisse des crédits de l'action n'en demeure pas moins nette, ce qui correspond largement à une tendance naturelle à la contraction de la population bénéficiaire des allocations de reconnaissance et à une déformation de la structure des allocataires, qui bénéficient de plus en plus de pensions dérivées. Cette revalorisation du point PMI est de plus due à son indexation sur l'indice de traitement brut - grille indiciaire (ITB-GI) de la fonction publique et ne résulte donc pas d'une volonté politique particulière.
Parallèlement à cette baisse, les crédits dédiés à la gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité (PMI ; action 02) connaissent également une baisse conséquente (- 6,8 millions d'euros, soit - 5,85 %), une diminution beaucoup plus marquée qu'en 2022 (- 0,74 %). Les crédits affectés à l'action 03 « Solidarité » connaissent eux une baisse de 11,1 millions d'euros en AE (- 4,38 %), ce qui contraste avec l'année 2022 durant laquelle ce budget avait connu une augmentation de 10,25 millions d'euros (+ 3,24 %) en AE.
Évolution des crédits de paiement
d'intervention des actions 01, 02, 03 et 07
par type de prestation
(2022-2023)
(en millions d'euros)
Dispositif |
LFI |
PLF 2023 |
Différence |
PMI |
808,6 |
754,8 |
-53,8 |
Retraite du combattant |
604,1 |
509,4 |
-94,7 |
Soins médicaux gratuits, appareillage, expertises |
38,4 |
37 |
-1,4 |
Remboursement réductions de transport |
1,4 |
0,7 |
-0,7 |
Remboursement prestations sécurité sociale |
76,5 |
71,8 |
-4,7 |
Majoration des rentes mutualistes |
222,5 |
211,4 |
-11,1 |
ONAC (action sociale) |
25 |
25 |
0 |
Actions en faveur des rapatriés |
95,1 |
100,9 |
5,8 |
TOTAL |
1 871,6 |
1 711 |
-160,6 |
Source : commission des finances du Sénat d'après le projet annuel de performances pour 2023
Comme indiqué précédemment, la baisse des rentes viagères concentre la majorité des économies réalisées dans l'action en faveur des anciens combattants, et donc de celles réalisées par la mission dans son ensemble. La baisse démographique expliquant ces économies entraîne également une diminution des dépenses prévues du fait de l'exercice des droits liés à la perception d'une pension d'invalidité : soins médicaux, transports, remboursements des prestations de sécurité sociale. Si les crédits liés aux autres pans de la mission connaissent des augmentations, du fait d'extensions de droits ou de compensations liées à l'inflation, ces augmentations sont très largement inférieures aux économies constatées sur les actions liées aux anciens combattants.
Enfin, en ce qui concerne les crédits provisionnés au programme 169 à destination des opérateurs de la mission (non renseignés dans le tableau ci-dessus), les subventions destinées à l'ONACVG connaissent une hausse de 3,9 millions d'euros, liée à la revalorisation des rémunérations de ses agents et à l'intégration d'un nouveau dispositif de suivi d'anciens militaires victimes de blessures psychiques. Les crédits de fonctionnement courant de l'INI sont également en légère hausse (+ 800 000 euros) du fait de l'augmentation des rémunérations publiques. Il faut par ailleurs noter que l'INI dispose d'un financement important qui n'est pas crédité au programme 169 (cf. infra).
Une particularité liée à la « tuyauterie budgétaire » mérite attention
Le suivi des dépenses de PMI et de la retraite du combattant doit tenir compte de ce que la consommation des crédits inscrits à ce titre au programme 169 peut ne pas se traduire par des transferts équivalents au bénéfice des titulaires de droits en raison des modalités de la maquette budgétaire. Les dépenses sur crédits du programme 169 sont, en effet, versées en direction du compte d'affectation spéciale « Pensions » (en particulier du programme 743 de ce compte).
Elles en constituent les recettes, à partir desquelles sont effectués les versements effectifs aux bénéficiaires. Pour suivre la consommation des crédits correspondants du programme 169, il convient donc de mesurer les dépenses effectives du programme 743 qui correspondent aux recettes ainsi apportées à ce compte.
Il n'est pas prévu de recourir au solde excédentaire du CAS pensions pour les PMI ou la retraite du combattant en 2023.
a) Des extensions de droits de portée limitée ces dernières années, une revalorisation automatique du point PMI en 2023
Au cours des dernières années, une série de mesures d'extension des droits en faveur des anciens combattants sont intervenues. Les modifications apportées aux droits des anciens combattants (propres ou dérivés) n'ont eu qu'un assez faible impact sur leur situation.
Le point PMI doit être revalorisé de 4 % le 1er janvier 2023 en application de ses modalités d'indexation sur les rémunérations des agents publics. Sa valeur sera ainsi portée de 15,05 euros à 15,65 euros. Cette revalorisation ne compensera pas entièrement les effets de l'inflation tant pour les bénéficiaires d'une retraite du combattant que pour les bénéficiaires d'une pension militaire d'invalidité
Évolutions intervenues depuis 2018 pour
modifier
les droits des anciens combattants
Mesure |
Références |
bénéficiaires |
Coût associés |
Pension militaire d'invalidité |
|||
Majoration des pensions militaires d'invalidité perçues par les conjoints survivants de grands invalides ayant agi comme tierce personne en apportant des soins constants pendant une durée minimum de quinze années de vie commune. |
Décret n° 2019-1449 du 24 décembre 2019 rehaussant la majoration spéciale pour le conjoint ou partenaire survivant d'un grand invalide relevant de l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre au titre des soins donnés à leur conjoint ou partenaire décédé |
Non précisé |
Coût estimé à 600 000 € en année pleine. |
Réduction du nombre de points d'indice nécessaire (de 10 000 à 6 000) pour que l'ayant-cause puisse bénéficier d'une réversion de pension majoré prévue aux articles L. 141-18 et L. 141-21 du CPMIVG |
Article 221 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 |
197 bénéficiaires potentiels |
5 248 € annuels, pour un coût global d'environ 1 M€ d'euros en année pleine. |
Revalorisation exceptionnelle de 35 centimes et modification des modalités de revalorisation du point PMI |
Article 174 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 |
Tous les bénéficiaires d'une retraite du combattant ou d'une pension militaire d'invalidité |
30 millions d'euros |
Carte du combattant |
|||
Ouverture de la carte du combattant 62/64 |
Arrêté du 12 décembre 2018 modifiant l'arrêté du 12 janvier 1994 fixant la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant au titre de l'article L. 253 ter du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (prévu au budget 2019) |
40 000 bénéficiaires |
|
Allocations versées aux anciens membres des forces supplétives et à leurs conjoints survivants |
|||
Revalorisation du montant de l'allocation de reconnaissance (option 1) et de l'allocation viagère à 4 109 € et de l'allocation de reconnaissance (option 2) à 2 987 € (portées respectivement à 4 150 € et 3 017 € au 1eroctobre 2019 au terme des arrêtés d'indexation sur l'augmentation des prix à la consommation hors tabac) |
Article 223 de la loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 |
Néant. Les conditions sont inchangées. |
Allocation de reconnaissance option 1 et allocation viagère : 4 109 € (4 150€) |
Allocation de reconnaissance option 2 : 2 987 € (3 017€) |
|||
Doublement de l'allocation viagère et de l'allocation de reconnaissance |
Arrêté du 21 décembre 2021 fixant à compter du 1er janvier 2022 le montant de l'allocation viagère définie par l'article 133 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 |
Harkis, autres supplétifs et leurs veuves |
19,2 millions d'euros en 2023 |
Suppression du délai de forclusion pour la demande de l'allocation viagère |
Loi n° 2022-229 du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français |
Veuves de harkis n'ayant pas réalisé leur dossier d'allocation viagère dans les délais impartis |
|
Dispositif de reconnaissance et réparation aux harkis, autres supplétifs et rapatriés du fait des conditions indignes d'accueil sur le territoire national dans des camps ou hameaux de forestage |
Loi n° 2022-229 du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français |
30 000 à 35 000 demandes attendues |
45 millions d'euros en 2022, 60 millions d'euros en 2023 |
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
L'année 2022 a enregistré un effort significatif en faveur des harkis, autres supplétifs et rapatriés, qui ont vu les droits liés à leurs allocations viagères doublés. A également été ouverte une indemnité de reconnaissance et réparation du fait de leur accueil indigne dans des camps ou des hameaux de forestages. En conséquence, les crédits qui leur sont dédiés pour 2023 (100,9 millions d'euros) représentent quasiment le quadruple de la programmation initiale pour 2022 (26 millions d'euros).
Il n'y a pas eu de mesure d'extension du bénéfice de la carte du combattant depuis la carte 62/64. Aussi, les nouvelles attributions de la carte du combattant correspondent aux soldats en retour d'OPEX.
Impact sur la population des titulaires de la carte du combattant de l'article 87 de la loi de finances pour 2015 élargissant le bénéfice de la carte aux militaires ayant participé à des OPEX
Années |
Demandes reçues |
Attributions |
Rejets |
En cours d'instruction en fin d'année |
2015* |
19 787 |
13 524 |
1 109 |
5 154 |
2016 |
21 891 |
19 177 |
840 |
3 280 |
2017 |
14 069 |
13 780 |
1 039 |
2 530 |
2018 |
23 249 |
11 891 |
888 |
13 026 |
2019*** |
38 177 |
46 187 |
2 016 |
3 000 |
2020 |
12 117 |
12 784 |
1 333 |
1 000 |
2021 |
12 568 |
11 216 |
1 352 |
1 000 |
2022** |
7 117 |
6 450 |
667 |
1 000 |
* à partir du 1er octobre 2015
** état au 1er juillet 2022
*** dont 35 108 cartes attribuées au titre de la mesure 62/64
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
Le contingent des titulaires de la carte du combattant au titre des OPEX est marqué par l'impact de la mesure adoptée en 2019, sur une base réglementaire, ouvrant le droit à la carte du combattant aux militaires présents sur le sol algérien entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964. Au 1er juillet 2022, 40 509 demandes ont été présentées et 38 852 ont fait l'objet d'un avis favorable. Seules 1 300 demandes ont été formulées entre le 1er juillet 2021 et le 1er juillet 2022. Ainsi, il est probable que la prévision de 50 000 bénéficiaires ne soit pas atteinte, bien que l'administration estime que certaines personnes n'ont pas fait valoir leurs droits.
L'article 41 du PLF 2023 prévoit une extension du droit à pension aux victimes d'actes de terrorisme pour les attentats commis antérieurement au 1er janvier 1982. Le coût budgétaire de la mesure, 1 million d'euros, est cependant minime.
Ces dernières années ont également vu une revalorisation des pensions des ayants cause, avec une priorité donnée aux conjoints survivants ayant apporté un concours constant à l'invalide.
Rappels sur les pensions de réversion
Aux termes du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), pour ouvrir un droit à pension pour les ayants cause, il faut que le décès soit imputable au service, ou que le décès soit en relation avec une infirmité pensionnée ou que le militaire soit pensionné d'un taux supérieur ou égal à 60 %.
Les conjoints survivants ont droit à pension au taux dit « normal » (500 points) lorsque le décès est imputable au service ou en relation avec une infirmité pensionnée, ou que l'ouvrant droit était pensionné pour un taux d'invalidité de 85 % au moins.
Les conjoints dont le militaire était pensionné à un taux d'invalidité inférieur à 85 % et au moins égal à 60 % ont droit à une pension au taux dit « simple », soit les 2/3 de la pension au taux normal.
Cette pension a connu un mouvement de revalorisation très fort depuis 2004, passant d'une condition de soins constants de 15 à 10 ans et d'une pension s'élevant à 260 ou 350 points à 410 ou 500 points respectivement, selon que le conjoint invalide bénéficiait de l'allocation 5°bis°a ou 5°bis°b (art. L. 133-1 CPMIVG).
La LFI 2021 a prévu une réduction du nombre de points d'indice nécessaire, ce dernier passant de 10 000 à 6 000, pour que l'ayant cause puisse bénéficier d'une réversion de pension majorée prévue aux articles L. 141-18 et L. 141-21 du CPMIVG.
À l'issue de ce processus, les majorations de pensions accessibles sont les suivantes :
Conditions d'attribution de la majoration
spéciale et progression
du nombre de points d'indice de cette
majoration
(en euros)
Date d'effet |
Années de mariage ou de PACS et de soins donnés de manière constante, postérieures à l'ouverture de l'avantage prévu à l'article L. 133-1 du CPMIVG |
Conjoint survivant ou partenaire lié par un PACS d'un grand invalide titulaire de l'allocation aux grands invalides |
|
Allocation GI n° 5 bis b |
Allocation GI n° 5 bis a |
||
Avant le 01/01/2002 |
Au moins 15 ans |
230 |
140 |
A/C du 01/01/2002 |
Au moins 15 ans |
350 |
260 |
A/C du 01/01/2010 |
Au moins 15 ans |
400 |
310 |
A/C du 01/01/2015 |
Au moins 10 ans |
450 |
360 |
A/C du 01/01/2016 |
Au moins 10 ans |
500 |
410 |
A/C du 01/07/2016 |
Au moins 5 ans |
150 |
105 |
Au moins 7 ans |
300 |
230 |
|
Au moins 10 ans |
500 |
410 |
|
A/C du 01/01/2020 |
Au moins 15 ans |
550 |
460 |
Au moins 20 ans |
600 |
510 |
|
Au moins 25 ans |
650 |
560 |
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
b) Une population des bénéficiaires connaissant une forte érosion à l'origine des baisses de crédits du programme 169
Deux populations doivent être distinguées : celle des bénéficiaires de la PMI et celle des titulaires de la retraite du combattant. La PMI, contrairement à la retraite du combattant, voit son montant varier d'un attributaire à l'autre et est réversible à des ayants cause. De plus, si les deux populations s'inscrivent dans une tendance baissière, elle ne se réalise pas de la même manière et n'entraîne pas les mêmes conséquences budgétaires.
De manière générale, ces deux populations diminuent fortement, d'environ 6 % par an pour les invalides de guerre et 7 % par an pour les anciens combattants depuis 2021.
(1) La retraite du combattant, une reconnaissance de la Nation dont les crédits diminuent au rythme du nombre de ses bénéficiaires
Les bénéficiaires de la retraite du combattant sont les titulaires de la carte du combattant âgés de 65 ans ou plus. Malgré son nom, cette dernière n'est pas une retraite mais une allocation de reconnaissance de la Nation envers les anciens combattants. Elle n'est pas imposable et peut se cumuler avec une retraite professionnelle.
Facteur principal de la réduction des crédits attribués à la retraite des anciens combattants, la démographie des titulaires de la retraite du combattant est en forte baisse. Cette dernière s'établissait à 6,9 % en 2022 et les prévisions pour 2023 pronostiquent une nouvelle baisse de 6,9 %. Cette diminution se constate malgré l'extension en 2019 de la retraite du combattant aux militaires présents en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964, qui aura entraîné l'attribution de cette retraite à 38 852 anciens combattants. La population qui a bénéficié de cette nécessaire extension est très proche en matière d'âge de celle des anciens combattants de la guerre d'Algérie déjà titulaires de la retraite du combattant et est, de ce fait, soumise à la même évolution.
Les cartes attribuées pour un engagement postérieur à 1964 sont fortement minoritaires et les entrées dans le dispositif de retraite du combattant des possesseurs de la carte atteignant 65 ans sont très loin de compenser les sorties du dispositif. Au 1er juillet 2021, 1 688 237 cartes du combattant avaient été attribuées au titre de la guerre d'Algérie, contre 256 612 au titre d'un engagement au cours d'une OPEX. De plus, les 37 568 cartes du combattant attribuées suite à la reconnaissance de l'engagement des militaires en Algérie lors de la période 1962-1964 sont comptabilisées parmi les cartes du combattant attribuées au titre des OPEX. Il y a donc un peu moins de 220 000 cartes du combattant attribuées pour un engagement postérieur à 1964.
Répartition des cartes de combattant
attribuées en fonction des combats
justifiant les attributions (au
1er juillet 2021)
Conflits |
Cartes du combattant attribuées au 1er juillet 2020 |
Première guerre mondiale et TOE |
4 425 379 |
Seconde guerre mondiale |
2 605 181 |
Guerres d'Indochine et de Corée |
211 030 |
Guerre d'Algérie, combats en Tunisie et au Maroc |
1 688 237 |
Opérations extérieures |
256 612 |
Total |
9 186 439 |
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
En ce qui concerne la démographie actuelle des titulaires de la carte du combattant, aucune statistique ne recense le nombre de titulaires de la carte du combattant en vie chaque année. Toutefois, une estimation relativement précise peut être réalisée à partir du nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant.
Années |
(a) Titulaires de la retraite du combattant au 1er janvier |
(b) Titulaires de la carte du combattant OPEX âgés de moins de 65 ans au 1er janvier* |
(a) + (b) Nombre total estimé de titulaires de la carte du combattant |
2015 |
1 159 167 |
78 000 |
1 237 167 |
2016 |
1 108 925 |
100 000 |
1 208 925 |
2017 |
1 058 921 |
124 000 |
1 182 921 |
2018 |
1 000 550 |
140 000 |
1 140 550 |
2019 |
940 071 |
151 000 |
1 091 071 |
2020 |
913 012 |
153 538 |
1 066 550 |
2021 |
857 205 |
163 365 |
1 020 570 |
2022 |
797 887 |
175 000 |
972 887 |
2023* |
742 674 |
184 000 |
926 674 |
* Estimations.
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
Aussi, à la vue de ces éléments, le nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant semble devoir continuer à fortement baisser jusqu'à ce qu'une stabilisation intervienne lorsque les entrées d'anciens combattants engagés en OPEX postérieurement à 1964 compenseront les sorties du dispositif. Cependant, le niveau de stabilisation est estimé à 500 000 ressortissants de l'ONACVG, veuves comprises.
La trajectoire baissière de cette population est le facteur principal de diminution des crédits affectés à la retraite du combattant. Le second est la revalorisation limitée de son point d'indice (voir infra) bien que cette dernière soit contrebalancée par l'augmentation du nombre de points de pensions militaires d'invalidité sur lequel est indexée la retraite du combattant qui est passé de 33 points en 2006 à 52 points actuellement.
Pour ce qui concerne l'extension du bénéfice de la retraite du combattant, cette dernière n'est accessible, dans la plupart des cas, que lorsque le titulaire de la carte du combattant atteint l'âge de 65 ans et sa jouissance n'est pas réversible. Le rapporteur spécial souhaiterait souligner que si cette allocation n'est pas une retraite, elle témoigne de la reconnaissance de la Nation pour un engagement, qui est souvent celui suprême de la personne même, et il peut apparaître paradoxal que son versement soit subordonné à une condition d'âge supérieure à celles auxquelles sont soumises des prestations au bénéfice desquelles ouvrent certains emplois dont les conditions de travail sont certes pénibles, mais ne présentent pas les mêmes risques que l'engagement militaire. Ces considérations d'équité se trouvent renforcées du fait que les données relatives à la population des anciens combattants, notamment ceux bénéficiant d'une pension militaire d'invalidité, indiquent qu'une proportion non négligeable d'entre eux décède avant d'avoir pu bénéficier de la retraite du combattant.
(2) Les pensions militaires d'invalidité, régime d'indemnisation recouvrant des situations très diverses et dont la population tend tout à la fois à diminuer et à se recomposer
La population des bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité (PMI) comprend, outre les titulaires eux-mêmes, des ayants cause, pour l'essentiel des anciens conjoints auxquels s'ajoutent des orphelins et des ascendants. Les deux populations, ayants droit et ayants cause, se réduisent.
L'année 2021 marque de ce point de vue une baisse forte, de 5,3 % des effectifs (ayants droit et ayants cause), après une année 2020 qui a vu disparaitre 7,9 % des pensionnaires. En particulier, la catégorie des ayants cause ascendants a perdu 42 % de ses effectifs entre 31 décembre 2020 et le 31 décembre 2021. Les baisses d'effectifs estimées pour 2022 et 2023 restent fortes, s'établissant dans les deux cas à - 6 %.
La proportion des ayants cause, après s'être renforcée, tend à refluer. S'ils représentent 26,4 % des pensionnés en 2020, ils n'en représentent plus que 24,6 % en 2021. Pour autant la part des ayants cause dans les versements de PMI se renforce : ils recevaient 42 % de la valeur des PMI versées en 2020 et 45 % de cette valeur en 2021.
Il faut par ailleurs souligner que si ces crédits ont traditionnellement un taux d'élasticité haut aux alentours de 1,5, les mouvements de crédits ne sont pas nécessairement proportionnels aux évolutions de la population. Ainsi, en 2021, le montant en valeur absolue des aides versées aux conjoints et orphelins est en hausse par rapport à 2020 (+ 3 millions d'euros, pour atteindre 380,4 millions d'euros) alors que le nombre des conjoints et orphelins est lui en baisse (- 5 800 bénéficiaires, soit une perte de 12 % de l'effectif).
Évolution des titulaires et des
dépenses de PMI
entre 2006 et 2023
Source : commission des finances du Sénat
Si jusqu'à présent la baisse des crédits présentait un taux d'élasticité important, la situation s'expliquait principalement par la structure particulière de la population bénéficiant de la PMI. Les pensions de réversion aux ayants droit sont d'une valeur moindre que celles dont bénéficiaient les titulaires. Aussi le décès d'un titulaire, s'il entraîne une réversion, entraînera également une baisse des crédits sans pour autant que le nombre global des bénéficiaires n'ait été modifié. Il existe ensuite une dispersion très nette des droits versés. Ainsi, si la population des bénéficiaires disposant des pensions les plus élevées subit une attrition plus forte que le reste des bénéficiaires de PMI, la baisse des dépenses constatée sera plus élevée que celle de la population globale des bénéficiaires.
Ces phénomènes ont conduit à une réduction forte de la valeur unitaire moyenne des PMI. Le montant moyen s'établissait à 3 360 euros en 2021.
L'élasticité constatée entre diminution de la population des bénéficiaires et diminution des crédits tend cependant à s'estomper ces dernières années. Elle s'établit ainsi à 1 en 2022 et une nouvelle diminution équivalente de la population des bénéficiaires et des crédits est anticipée en 2023. Ce phénomène semble indiquer une population plus homogène des bénéficiaires.
La valeur des pensions en elles-mêmes, de manière générale, est assez peu évolutive. Cette dernière étant, comme la retraite du combattant, calculée sur la base de points de PMI dont la revalorisation est traditionnellement faible (cf infra). Les pensions doivent être revalorisées de 4 % au 1er janvier 2023 du fait de leurs modalités d'indexation sur les rémunérations publiques. Si cette revalorisation est bienvenue, elle reste inférieure à l'inflation constatée en 2022.
La dispersion des droits versés trouve son origine dans un éventail de valeurs indiciaires particulièrement large qui sert de base au calcul des pensions. Ce dernier comprend une échelle d'invalidité allant de 10 % à 100 % + 100 degrés, chaque degré valant 10 % de taux d'invalidité. Une répartition exhaustive par taux et par indice aboutit au constat que les pensions sont payées sur la base de plusieurs milliers d'indices pour les invalides et plusieurs centaines pour les conjoints.
La répartition est inégale. Les invalides bénéficiant d'une prestation à un taux d'invalidité égal ou supérieur à 100 % ne représentent que 4,5 % des titulaires d'une pension. A contrario, 82 % des titulaires bénéficient d'une pension d'invalidité à un taux d'invalidité inférieur ou égal à 55 %. Les pensions versées varient très sensiblement selon le taux d'invalidité reconnu.
Ainsi, le montant moyen annuel d'une PMI valait 3 360 euros en 2021, ce qui correspond au double du montant médian annuel de la PMI, de 1 644 euros.
Le rapporteur spécial recommande une simplification du barème des pensions, tant pour des raisons d'équité dans la détermination des allocations que pour permettre une application plus fluide des dispositions d'indemnisation.
Une évolution concernant le contentieux des PMI doit être soulignée et saluée. En 2019, les commissions de réforme des pensions militaires d'invalidité (CRPMI) ont vu leur compétence en contentieux des PMI transférée aux tribunaux administratifs. En plus de ce transfert a été instauré un recours administratif préalable obligatoire auprès de la commission de recours de l'invalidité pour le contentieux des PMI. Ces deux mesures, qui ont entraîné la disparition des CRPMI, ont eu pour effet de réduire le délai de traitement des dossiers contentieux de plus de 20 mois en moyenne à 7 mois en moyenne.
(3) Des pensions dont la progression est traditionnellement atone car indexée sur l'évolution des rémunérations publiques, qui continuent à voir leur valeur réelle diminuer à cause de l'inflation
Les PMI et la retraite du combattant sont toutes deux indexées sur un indice nommé point de pensions militaires d'invalidité (point PMI).
Le point PMI est désormais calculé au début de chaque année civile, sur la base d'une période de référence fixe et sans application rétroactive6(*). Il est à noter que le passage du « rapport constant » aux modalités actuelles, s'il simplifie significativement le calcul de la valeur du point PMI et n'emporte que des conséquences financières modiques au niveau individuel, s'est fait en défaveur des pensionnés puisque les pensions sont désormais revalorisées sur une base annuelle plutôt que sur une base trimestrielle. Les revalorisations sont désormais prises en compte moins rapidement. Le point PMI est indexé sur l'indice de traitement brut - grille indiciaire (ITB-GI), publié conjointement par l'INSEE et la direction générale de l'administration et de la fonction publique. L'ITB-GI est un agrégat fonction de l'évolution de l'indice de la fonction publique et de mesures catégorielles au prorata de leur incidence sur l'échelle indiciaire des fonctionnaires.
Le point PMI connaîtra ainsi une revalorisation au 1er janvier 2023, notamment du fait de la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires. La valeur du point PMI devra s'établir à 15,65 euros au 1er janvier 2023, contre 15,05 euros au 1er janvier 2022, soit une augmentation de 4 %. Cette augmentation, bien qu'importante, reste inférieure à l'inflation constatée en 2022.
Le rapporteur spécial souligne et salue le fait que cette revalorisation applique la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires, qui, ayant eu lieu au 1er juillet 2022 aurait normalement dû être prise en compte pour 2024, la revalorisation au 1er janvier 2023 ne devant normalement tenir compte que des mesures de revalorisation des deux premiers trimestres de l'année 20227(*). Une application stricte de la règlementation adoptée le 2 février 2022 aurait conduit à ignorer cette revalorisation à un jour près.
La retraite du combattant n'a quant à elle pas perdu de valeur par rapport à l'indice de la consommation sur la période 2005-2022 du fait de l'augmentation de son nombre de points PMI, passé de 33 à 52 depuis 2005. Son montant reste cependant individuellement très modeste : 782,60 euros annuels au 1er janvier 2022, soit 65 euros mensuels. Au 1er janvier 2023, son montant devrait s'établir à 813,80 euros annuels, soit 67,82 euros mensuels.
La timidité de la revalorisation de la retraite du combattant explique que les crédits diminuent presque à proportion de la population des bénéficiaires. Elle implique également que les PMI n'évoluent que très faiblement dans le temps.
La très faible revalorisation du point PMI relève d'un choix politique visant à la contraction de la dépense publique. Aussi le Gouvernement souligne-t-il le coût qu'engendrerait une indexation sur l'inflation :
Source : réponse au questionnaire budgétaire
Il faut cependant souligner que ce surcoût reste largement inférieur aux économies réalisées par la mission « Anciens combattants » du fait de la réduction de la population bénéficiaire sur la même période. Aussi une revalorisation du point PMI est tout à fait envisageable dans une trajectoire baissière des crédits totaux, comme le montre au demeurant l'année 2023 où les crédits dédiés aux rentes viagères sont en diminution de 148 millions d'euros malgré une revalorisation de 4 % du point PMI.
Le rapporteur rappelle et regrette que la revalorisation exceptionnelle du point PMI de l'année 2022 de 35 centimes supposée rattraper le retard de l'indexation ITB-GI face à l'inflation sur la période 2018-2021 a retenu une hypothèse d'inflation de 0,6 % pour l'année 2021, soit une valeur inférieure à l'inflation tant prévue8(*) par le Gouvernement lui-même que celle constatée :
Tableau fourni par le ministère des armées en réponse au questionnaire du rapporteur spécial - session 2022.
Ainsi, en l'absence de volonté politique particulière, la valeur réelle des rentes viagères servies aux anciens combattants et aux victimes de guerre continue d'être grignotée année après année par l'inflation.
Aussi, il paraîtrait équitable d'enfin adosser la valeur du point PMI sur l'inflation et non plus sur l'ITB-GI, afin que sa revalorisation ne soit pas instantanément diluée par cette dernière et que les invalides de guerre cessent d'être les victimes collatérales des politiques publiques visant à maitriser le coût des rémunérations des agents publics, ces politiques n'ayant aucun rapport ni avec leur situation, ni avec le sacrifice qu'ils ont consenti et qui justifie une reconnaissance - y compris pécuniaire - de la Nation à leur égard.
Cette situation est d'autant plus préjudiciable pour les bénéficiaires d'une pension militaire d'invalidité fortement invalides pour lesquelles la PMI, encore plus exposée que la retraite du combattant à l'inflation puisqu'elle ne connait, elle, pas d'augmentation ponctuelle de nombre de points d'indice, représente une ressource importante.
c) Une déformation des équilibres de la politique de reconnaissance en faveur du monde combattant malgré des avantages peu mobilisés
Les interventions en faveur des anciens combattants financées par le programme 169 sont composites. Certaines, à vocation universelle (PMI, retraite du combattant), sont versées à tous ceux qui réunissent des conditions objectives tenant à leur situation de combattant ou de santé et à raison de celles-ci. D'autres impliquent un choix du bénéficiaire, et l'influence de variables tierces par rapport à celles en rapport avec la seule situation d'ancien combattant.
En dehors de l'effet asymétrique des dépenses fiscales déjà relevé, il en va tout particulièrement ainsi de la majoration des rentes mutualistes qui, pour concerner 277 686 bénéficiaires en 2023 (contre 293 486 en 2022), n'est servie qu'à un peu plus de 35 % des titulaires de la carte du combattant.
La rente mutualiste
La retraite mutualiste du combattant, devenue rente mutualiste du combattant, bénéficie d'un certain nombre d'avantages, de nature fiscale ou liés au régime de majoration légale institué par la loi du 4 mai 1948.
Les contribuables anciens combattants peuvent, chaque année, déduire de leurs revenus imposables, dans la limite d'un plafond, les versements effectués en vue de la constitution d'une rente donnant lieu à majoration de l'État.
Cette rente bénéficie, en plus de la majoration légale attachée à toute rente viagère (mais sans limite de plafond de ressources), d'une majoration spécifique de l'État de 12,5 % à 60 % selon le titre détenu et sa date d'obtention.
Le total formé par la rente et la majoration spéciale de l'État est limité à un plafond, dit « plafond majorable » égal à 125 points de PMI (en hausse de 1 881,25 euros en 2022 à 1 956,25 euros à compter de janvier 2023). Ces revalorisations pèsent cependant sur les budgets de l'année n+1 car les organismes mutualistes versent les majorations aux souscripteurs et sont remboursés l'année suivante par l'État. Ainsi, le budget 2023 est-il basé sur le plafond 2022 et le plafond 2023 sera pris en compte pour le budget 2024.
La rente mutualiste se cumule avec toutes les autres pensions et retraites. Elle est exonérée d'impôt pour sa part inférieure au plafond légal. Au-delà de ce plafond, le régime fiscal est celui de l'assurance-vie.
Or, cet avantage mobilise une part importante des dotations en faveur des anciens combattants : 211 millions d'euros en 2023 soit 12,3 % de ces crédits9(*), contre 11,9 % du total en 2022.
La part de la charge budgétaire liée aux majorations de rentes mutualistes augmente plus ou moins vite chaque année. Le rapporteur spécial rappelle que la majoration des rentes mutualistes n'absorbait que 8 % des dépenses du programme en 2011.
Ce phénomène est essentiellement dû à une augmentation du montant moyen annuel des majorations remboursées, qui entraîne une baisse moins rapide de ce poste budgétaire que pour la retraite du combattant et les pensions militaires d'invalidités elles-mêmes.
Données relatives aux rentes mutualistes (2018-2022)
Année de facturation |
Montant des remboursements des majorations
légales |
Montant des remboursements des majorations
spécifiques |
Total |
Nombre de bénéficiaires |
Montant moyen annuel des majorations remboursées |
2018 |
107,59 |
129,44 |
237,03 |
340 918 |
695,18 € |
2019 |
105,95 |
126,62 |
232,57 |
328 943 |
707,01 € |
2020 |
106,91 |
123,14 |
230,05 |
315 175 |
729,91 € |
2021 |
103,66 |
118,82 |
222,48 |
297 804 |
747,08 € |
2022 |
97,71 |
113,27 |
210,98 |
280 602 |
751,90 € |
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
Cette évolution a limité l'impact de la baisse du nombre des bénéficiaires sur la réduction des dépenses.
Les dépenses correspondantes ont ainsi connu une certaine résistance, qui contraste avec les prestations plus universelles financées par le programme 169.
Évolution de la charge des avantages
attribués aux rentes mutualistes
des anciens combattants et des
effectifs bénéficiaires
(2009-2022)
Source : commission des finances du Sénat
Le déficit de revalorisation du point PMI mentionné plus haut a toutefois, comme pour les autres prestations liées à la valorisation du point de PMI, également limité la dynamique de dépense correspondante.
Le rapporteur spécial souligne que le tableau suivant part d'une hypothèse d'indexation sur l'inflation à compter de 2018. Si l'indexation démarre en 2012, la valeur du point PMI est de 15,08 euros au 1er janvier 2018. Par ailleurs, ce tableau illustre parfaitement que la revalorisation de 35 centimes de 2022 supposée compenser l'inflation de la période 2018-2021 était insuffisante, la valeur du point PMI s'établissant 15 centimes en-dessous de ce qu'elle aurait été en cas d'indexation sur l'inflation lors de cette période.
Évolution des majorations de rentes
mutualistes sous l'hypothèse d'une indexation
sur l'inflation du
point de PMI
(en euros)
Rentes mutualistes du combattant |
||||||||
Année |
Valeur réelle du point PMI au 1er janvier |
taux d'inflation (source INSEE) |
Valeur du point PMI indexé sur le taux d'inflation |
Plafond majorable (125 points d'indice PMI) |
Plafond selon indéxation |
Différence de plafond |
Nombre de bénéficiaires au plafond |
Surcoût |
A |
B |
C = B - A |
D |
E = C X D |
||||
2018 |
14,46 € |
1,8 % |
1 806 € |
|||||
2019 |
14,57 € |
1,1 % |
14,72 € |
1 821 € |
1 840 € |
19 € |
41 540 |
780 000 € |
2020 |
14,68 € |
0,5 % |
14,88 € |
1 835 € |
1 860 € |
25 € |
39 164 |
990 000 € |
2021 |
14,7 € |
1,6 % |
14,96 € |
1 837 € |
1 869 € |
32 € |
32 931 |
1 050 000 € |
2022 |
15,05 € |
5,5 % |
15,20 € |
1 881 € |
1 900 € |
19 € |
32 931 |
610 000 € |
2023 |
15,65 € |
16,04 € |
1 956 € |
2 005 € |
49 € |
n.d |
n.d |
* Le plafond majorable équivaut à 125 points PMI.
Source : calcul en variante réalisé à la demande du rapporteur spécial par les services du ministère
La contribution de l'État aux rentes mutualistes (752 euros par bénéficiaire en 2022) apporte aux bénéficiaires un quasi-doublement de la valeur de la retraite du combattant qu'ils perçoivent.
Il convient de considérer que ce doublement touche un nombre des bénéficiaires limité par rapport aux prestataires de la retraite du combattant.
Dans ces conditions, le rapporteur spécial est conduit à s'interroger sur les facteurs expliquant le faible recours à la faculté ouverte aux ayants droit de se constituer un complément de retraite disposant d'un soutien élevé de l'État.
À ce stade, le rapporteur spécial se limitera à relever que cette sous-utilisation conduit à des économies significatives.
Le ministère avance à ce propos un chiffre de 41 millions d'euros sur la base du ratio des militaires âgés de 50 ans et plus en activité (soit 4,5 % des personnels potentiels non entrés dans le dispositif).
3. Les crédits affectés à l'action liens armées-jeunesse connaissent une hausse non significative du fait d'un financement de la JDC et du SMV à plus de 75 % par la mission défense
Le budget 2023 de l'action 08 « Liens armées-jeunesse » du programme 169 s'établit à 24,56 millions d'euros en AE et 24,52 millions d'euros en CP, en hausse de 4 % par rapport à 2022.
Il se compose de deux unités opérationnelles respectivement dédiées à la journée défense et citoyenneté (JDC) et au service militaire volontaire (SMV).
L'augmentation des crédits bénéficie à la JDC, dont la dotation augmente de 820 000 euros en CP. Les moyens du SMV s'accroissent eux d'environ 110 000 euros en CP. Ces augmentations sont cependant négligeables au regard du coût réel des dispositifs.
L'action reste ainsi principalement consacrée au financement de la JDC, qui absorbe plus de 80 % de ses dotations.
Les crédits de l'action 08 font l'objet d'abondements massifs en provenance de la mission « Défense », de collectivités territoriales ou de fonds de concours. Les crédits effectivement dépensés pour la JDC et le SMV s'établissent à plus de 150 millions d'euros (dont 112,7 millions d'euros pour la JDC), montant à comparer aux 24,5 millions d'euros effectivement apparents dans les crédits de la mission. Le rapporteur regrette cette situation qui conduit à une mauvaise lisibilité des documents budgétaires. Il salue cependant la comptabilité analytique tenue par le ministère des armées permettant de retracer le coût effectif des dispositifs.
a) Le service militaire volontaire, 3 millions d'euros inscrits au budget de la mission mais, au total, plus de 40 millions d'euros de crédits
Le Service Militaire Volontaire (SMV) est une action du ministère de la défense nationale visant à accueillir des jeunes dans une structure d'accompagnement de type militaire et ayant pour objet de favoriser leur intégration dans le monde du travail. Des jeunes de 18 à 25 ans se trouvent placés en internat sous statut militaire dans des établissements de formation avec encadrement militaire où sont dispensées des formations professionnelles.
Pérennisé à compter du 1er janvier 2019 par la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, ce dernier vise un objectif d'accueil de 1 300 « volontaires stagiaires » (ci-après volontaires), qui s'inscrit en baisse par rapport à l'objectif d'accueil initial pour 2022 qui s'élevait à 1 500 volontaires.
Le budget de la mission prévoyait pour le SMV 3,23 millions d'euros en 2022 et 3,33 millions d'euros en 2023. Cependant, les dépenses réelles pour l'organisation, après prise en compte des dépenses occasionnées sur le budget de la mission « Défense »10(*), s'élevaient à 53 millions d'euros en 2022. Les réponses au questionnaire budgétaire transmises pour 2023 sont moins précises et complètes que celles qui avait jusqu'alors transmises au rapporteur spécial et n'indiquent notamment plus le coût lié à la masse salariale mise à disposition par le ministère des armées, qui s'élevait à 35 millions d'euros.
Au titre des informations qui lui ont été transmises, le rapporteur spécial constate que 3,3 millions d'euros sont prévus au programme 169, que 30 millions d'euros sont attendus au titre de fonds de concours - information enfin inscrite dans le PAP, ce qu'il faut saluer - et qu'une aide indirecte à la formation d'une valeur de 7 millions d'euros est attendue.
Le dispositif est donc doté, a minima, de 40 millions d'euros pour 2023. Cette estimation est cependant incomplète. Les réponses au questionnaire budgétaire précisent que les données consolidées pour 2021 donnaient une exécution budgétaire à 52 millions d'euros au total, pour 1 230 volontaires stagiaires.
Les réponses au questionnaire budgétaire 2022 estimaient les participations de collectivités territoriales à 4,16 millions d'euros11(*), dont 2 millions d'euros de la région Grand Est et 0,8 million d'euros de la région Nouvelle Aquitaine. Les réponses 2023 confirment la continuation des financements par la région Grand Est et Nouvelle Aquitaine pour des sommes équivalentes mais ne précisent plus les participations des autres collectivités. Une connaissance exacte du coût du SMV devrait également prendre en compte les dépenses de formation éventuellement réalisées par des acteurs privés.
Outre un manque de lisibilité regrettable du budget du SMV, doit être souligné un coût par volontaire élevé, estimé à 42 000 euros par volontaire et par an depuis 2020. Ce coût est largement supérieur à celui des formations de droit commun, les formations les plus onéreuses (classes préparatoires aux grandes écoles), s'élevaient en 2017 à 15 760 euros par an, mais encore à celui de l'Établissement pour l'insertion dans l'emploi des écoles de la deuxième chance (EPIDE) qui est du même ordre.
Ce coût est à mettre en rapport avec les résultats du SMV. Le « taux d'insertion professionnelle » des volontaires s'élève à 82 % (en 2021). Il recouvre cependant des situations très diverses et pas toutes équivalentes à une intégration sur le marché du travail. D'un point de vue plus spécifique aux armées, en 2021, seuls 25 volontaires avaient rejoint les armées soit 2,6 % de la promotion insérée.
Enfin, le rapporteur spécial plaiderait pour une meilleure équité territoriale dans le déploiement du SMV. Sur le plan organisationnel, ce dernier se compose d'un état-major implanté à Arcueil et de six régiments et centres localisés dans cinq régions. L'ouverture d'une antenne à Marseille est à ce titre une avancée qu'il convient de saluer, puisqu'elle ouvre un accès au SMV dans une nouvelle zone géographique. Étant précisé que l'outre-mer dispose quant à lui d'un dispositif alternatif, le service militaire adapté (SMA) dont le budget ne relève pas de la présente mission, le SMV n'est présent que dans 5 (6 après l'ouverture de l'antenne de Marseille) des 13 régions métropolitaines. Aussi certains jeunes peuvent avoir des difficultés à y accéder.
Le rapporteur spécial observe que le coût du SMV semble très élevé au vu de l'étendue assez modeste des jeunes qui le suivent. Il recommande de procéder à son évaluation.
b) La journée JDC : la première programmation entièrement « normale » suite aux adaptations rendues nécessaires par la crise sanitaire
(1) Des crédits pour 2023 établis sur l'hypothèse d'un retour à la normale de la JDC et toujours principalement issus de la mission défense
La journée « défense et citoyenneté » (JDC) est une obligation à laquelle chaque Français doit déférer avant ses 18 ans. Elle succède au service militaire et prend, dans son format normal, la forme d'une journée de présentation ayant vocation à diffuser l'esprit de défense auprès des jeunes. Elle est mise en oeuvre par la direction du service national et de la jeunesse (DSNJ). Un certificat de participation est remis en fin de journée et ce dernier est obligatoire pour l'inscription aux examens et concours soumis au contrôle de l'autorité publique. Un jeune qui n'aurait pas suivi la JDC a toujours la possibilité de régulariser sa situation jusqu'à 25 ans.
Les crédits affectés à cette dernière dans le cadre du programme 169 s'élevaient à 20,37 millions d'euros en AE et 20,36 millions d'euros en CP dans la LFI 2022. 21,22 millions d'euros en AE et 21,19 millions d'euros en CP sont prévus pour 2022. Les crédits connaissent ainsi une légère hausse.
Cette première observation faite, il faut souligner que ces chiffres ne sont pas significatifs, tant en ce qui concerne l'évolution que le volume des crédits attribués à la JDC.
En ce qui concerne les évolutions, une revalorisation durable est intervenue à compter du 1er septembre 2020. L'indemnité pour le transport des jeunes, fixée depuis 1998 à 8 euros, a été revalorisée à 10 ou 20 euros selon que le jeune soit à moins ou plus de 20 km du site de la JDC. Le surcoût en année pleine est estimé à 2,2 millions d'euros. Le rapporteur spécial avait approuvé cette mesure d'équité. Il lui apparaît toutefois possible de mieux réaliser le rapprochement entre l'indemnité et les conditions réelles subies par les jeunes en évaluant les coûts effectivement supportés dans les zones moins bien desservies.
L'année 2023 représente également la première année de retour complet à la normale pour l'organisation de la JDC suite aux adaptations qui avaient été rendues nécessaires par la crise sanitaire. Les JDC en format demi-journée ont continué jusqu'au 1er septembre 2022.
Le coût par participant pour 2023 est estimé à 140,43 euros, en phase avec la cible de 140 euros fixée par le ministère. Le coût total de la JDC 2023 devrait ainsi s'élever à 112,7 millions d'euros.
Évolution des coûts complets de la JDC entre 2010 et 2021
En millions d'euros |
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (LFI) |
2023 (PLF) |
Alimentation |
5,2 |
6,2 |
6,2 |
6,4 |
5,8 |
5,9 |
5,4 |
7,2 |
3,2 |
0,3 |
6,6 |
6,7 |
Transport des jeunes |
4,2 |
4,8 |
4,8 |
5,6 |
4,7 |
5,1 |
5,5 |
5,4 |
5,0 |
3,2 |
9,3 |
9,8 |
Formation secourisme + sécurité routière |
6,2 |
4,8 |
4,4 |
4,6 |
0,1 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
Fonctionnement des sites (location de locaux civils) |
0,2 |
0,2 |
0,3 |
0,3 |
0,3 |
0,3 |
0,2 |
0,4 |
0,2 |
0,1 |
0,4 |
0,4 |
Autres charges |
2,9 |
2,1 |
3 |
2 |
3 |
2,3 |
2,4 |
2,8 |
2,3 |
2,1 |
3,1 |
3,1 |
Total dépenses réalisées sur le BOP P 167 « Liens Armée-Jeunesse » |
18,7 |
18,1 |
18,7 |
18,9 |
13,9 |
13,6 |
13,5 |
15,7 |
10,7 |
5,7 |
19,4 |
20 |
T2 : Masse salariale (programme 212) et CAS Pension* |
93 |
86,7 |
83,9 |
84,2 |
83,7 |
86 |
83,8 |
85,4 |
80,5 |
81,3 |
86,9 |
86,9 |
T3 : Autres charges de fonctionnement (programme 178) |
0 |
4 |
4 |
4 |
4 |
4 |
3,9 |
3,9 |
3,9 |
3,9 |
3,9 |
3,9 |
T5 : Infrastructures et SIAG (programme 212) |
5,1 |
5,1 |
5,1 |
4,1 |
3,1 |
3 |
3,4 |
2,6 |
1,8 |
1,9 |
1,9 |
1,9 |
Total dépenses estimées hors BOP « Liens Armée-Jeunesse » |
98,1 |
95,8 |
93 |
92,3 |
90,8 |
93 |
91,1 |
91,9 |
86,2 |
87,1 |
92,7 |
92,7 |
Total dépenses JDC en millions d'euros |
116,8 |
113,9 |
111,7 |
111,2 |
104,6 |
106,6 |
104,6 |
107,6 |
96,9 |
92,8 |
112 |
112,7 |
Nombre de jeunes présents |
748 593 |
763 842 |
783 266 |
795 293 |
774 785 |
786 515 |
770 245 |
793 534 |
614 690 |
919 185 |
788 962 |
802 567 |
Coût complet par jeune en euros (Total dépenses JDC/nombre de jeunes présents) |
156,90 |
149,10 |
142,61 |
139,82 |
135,01 |
135,53 |
135,82 |
135,66 |
157,60 |
100,96 |
142,01 |
140,43 |
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
Le rapporteur spécial tient à saluer le développement, bienvenu, par le ministère des Armées d'une comptabilité analytique des coûts de la JDC, même si cette dernière reste perfectible. Il est également regrettable que celle-ci n'apparaisse pas dans les rapports budgétaires, dans la mesure où cette dernière contribuerait grandement à la lisibilité des crédits affectés à la JDC.
Le coût moyen, après avoir été stable aux alentours de 135 euros par participant a profondément évolué en 2020-2021. Les prévisions d'exécution se situaient à 140,19 euros et 139,68 euros par participant respectivement. Cependant, l'exécution a été remise en cause par la crise sanitaire. La réalisation 2020 s'établit ainsi à 157,60 euros par participant. Bien que des économies par participant aient été réalisées suite à des moindres dépenses en encadrement, transports et repas, le maintien des coûts fixes à niveau stable auxquels s'ajoute une diminution significative du nombre de participants a au final entraîné un surcoût par participant par rapport à la situation pré-covid. A contrario, le coût par participant en 2021 a finalement été réévalué à 107 euros. Cette réduction drastique du coût par jeune s'explique d'une part par la mise en oeuvre de la JDC dématérialisée et d'autre part par la réalisation d'économies d'échelles du fait du rattrapage de la JDC par un nombre important de jeunes dans des conditions adaptées.
La cible de coût pour 2023 est, elle, fixée à 140,43 euros par participant dans le cadre d'une hypothèse de retour à la normale et devrait représenter le coût moyen pour les prochaines années. L'augmentation de coût par rapport à la période pré-covid correspondant au surcoût entraîné par la revalorisation de l'indemnité de transport en année pleine.
Une actualisation des supports et des méthodes pédagogiques doit également être mise en oeuvre dès le 1er septembre 2022.
Il est par ailleurs envisagé le maintien de la JDC dématérialisée comme modalité de droit commun pour les Français de l'étranger, ainsi que comme modalité de réalisation de la JDC pour ceux qui en sont actuellement dispensés, notamment les personnes en situation de handicap. Le rapporteur spécial salue une évolution qui permettrait à certaines personnes ne pouvant pas actuellement réaliser la JDC d'y participer.
(2) La JDC, une action clé de la lutte contre le décrochage scolaire et la marginalisation qui mérite d'être mieux suivie
Une des missions attribuées à la JDC est la détection de la marginalisation et de l'illettrisme de certains jeunes. La JDC apparaît particulièrement pertinente pour cette mission puisqu'il s'agit d'un point de passage obligé pour tous les jeunes d'une tranche d'âge, y compris en situation de déscolarisation.
La DSNJ intervient ainsi en aval du dispositif de repérage des « décrochés scolaires » en informant les appelés identifiés lors de la JDC, afin de contribuer à ce que « tout jeune de seize à dix-huit ans sorti sans diplôme du système de formation initiale et sans emploi soit effectivement inscrit dans un parcours de formation, d'accompagnement ou d'exercice d'une activité d'intérêt général lui permettant de préparer son entrée dans la vie active ». Le dispositif tel qu'il fonctionne actuellement n'est pas à la mesure des enjeux. On rappelle que de 100 000 à 150 000 jeunes sont réputés « sortir » chaque année du système scolaire sans la sanction d'un titre de formation.
Source : réponse au questionnaire budgétaire, session 2017
Rien n'indique qu'une amélioration soit intervenue depuis.
En 2021, les informations relatives à 36 917 jeunes (24 435 jeunes en 2020, chiffre qui s'explique principalement par les difficultés d'organisation de la JDC liées à la crise sanitaire), dont 3 121 en outre-mer, repérés en situation de décrochage scolaire, ont ainsi été transmises aux coordonnateurs locaux.
De plus, environ 3 % de chaque classe d'âge ne participe pas à la JDC, soit plus de 20 000 jeunes par année de naissance. Cette situation est en partie due à des erreurs de recensement et à l'efficacité des renouvellements de convocation. Le rapporteur spécial plaide pour un redressement actif du taux d'assiduité à la JDC, afin qu'elle puisse exercer pleinement son rôle de détection des jeunes en difficulté.
Par ailleurs les modalités alternatives d'organisation de la JDC créées pour cause de crise sanitaire et en particulier sa version dématérialisée interrogent sur la capacité que la JDC a eue à exercer ce rôle de détection. À ce titre, M. le général de corps d'armée Menaouine, directeur du service national et de la jeunesse, soulignait que le risque existe, lorsqu'il est renoncé à une rencontre physique obligatoire, que beaucoup de jeunes victimes de la fracture numérique passent « sous les radars » et que l'opportunité d'agir pour eux soit perdue. Or, 550 000 jeunes ont réalisé leur JDC en ligne lors de la crise sanitaire.
(3) Le SNU, un dispositif ayant vocation à remplacer la JDC et dont l'articulation avec cette dernière est actuellement incertaine
Le service national universel a été créé en 2019 et a vocation, après son extension, à se substituer à la JDC. Ce dernier a une ambition sans commune mesure avec la JDC. Le SNU prévoit notamment une « Journée Défense et Mémoire » (JDM), qui a vocation à remplacer l'actuelle JDC, avec une prise en compte plus forte des enjeux de mémoire et de résilience.
Les modalités d'un éventuel remplacement de la JDC par le SNU restent floues, de même que celles de l'articulation entre SNU et SMV. Pour l'instant, ces différents dispositifs existent les uns à côté des autres. Les effectifs du SNU augmentent mais restent trop faibles pour remplacer la JDC.
La JDM ne dispose actuellement pas de financement propre mais est animée par des agents militaires ou des intervenants civils formés par les agents de l'ONACVG et utilisant des ressources pédagogiques mises à disposition par l'ONACVG. Une partie de son coût, bien que mineure, est ainsi indirectement supportée par le programme 169.
4. La politique de mémoire, des crédits en légère hausse pour limiter les effets de l'inflation
La définition et la conduite de la politique de mémoire sont assurées par les services de la direction de la mémoire, de la culture et des archives (DMCA). La mise en oeuvre nationale du volet commémoration est directement réalisée par la DMCA et sa mise en oeuvre locale est déléguée à l'ONACVG. La mise en oeuvre de la politique de la pierre relève entièrement de l'ONACVG.
Cette politique, qui recouvre un spectre assez large d'actions, fait l'objet d'un financement budgétaire pouvant s'avérer très variable d'une année sur l'autre, ce dernier dépendant directement de l'actualité mémorielle.
Les crédits de l'action « mémoire » étaient stables la période 2021-2022, en étant légèrement supérieurs à 17,5 millions d'euros (17,85 millions en 2022, en AE = CP). L'année 2023 connaît une hausse significative, les crédits prévus s'établissant à 20,9 millions d'euros, soit une hausse de 17,2 %. Cette hausse s'explique principalement par une augmentation des dotations de l'ONACVG pour l'entretien des nécropoles nationales et des Hauts lieux de la mémoire nationale afin de compenser les surcoûts entraînés par l'inflation.
L'action « mémoire » est divisée en deux « opérations stratégiques (OS) » : l'OS « Mémoire » et l'OS « Sépultures de guerre et lieux de mémoire ». Pour 2023, 7,3 millions d'euros sont consacrés à l'OS mémoire et 13,6 millions d'euros à l'OS sépultures. Les crédits de l'OS mémoire connaissent une légère augmentation (6,9 millions d'euros pour la LFI 2022). L'OS Sépultures étant l'OS contenant les travaux d'entretien du patrimoine mémoriel combattant de l'État, concentre les crédits supplémentaires prévus pour l'année 2023 (10,95 millions d'euros pour la LFI 2022).
a) L'OS sépultures de guerre et lieux de mémoire, des crédits dédiés à l'entretien connaissant une hausse significative mais insuffisante
L'OS sépultures de guerre et lieux de mémoire correspond principalement à des opérations de rénovation et d'entretien, dont l'ONAC-VG a la charge, depuis que l'édification du monument d'hommage aux soldats morts pour la France lors des OPEX est achevée. Quelque 800 000 euros de l'OS sont dédiés au développement de partenariats avec les territoires dans le cadre du tourisme de mémoire, montant inchangé par rapport à 2022. Des travaux d'entretien sur le monument OPEX sont cependant nécessaires dès 2023.
Outre l'entretien courant des nécropoles et carrés militaires, l'ONACVG a lancé un programme de rénovation des hauts lieux de la mémoire nationale évalué initialement à 8 millions d'euros sur 4 ans.
13,6 millions d'euros sont consacrés à cet OS en 2023, une augmentation significative par rapport à 2022 (10,95 millions d'euros, soit + 24 %).
Cependant, malgré l'effort budgétaire consenti pour compenser les surcoûts liés à l'inflation, tant la DMCA que l'ONACVG estiment que le respect de l'enveloppe budgétaire prévue entraînera inévitablement des retards dans la réalisation des travaux.
Le rapporteur spécial tient ici à saluer la contribution des bénévoles de toutes provenances, qui apportent un concours précieux et particulièrement estimable à la nécessaire conservation de ces hauts lieux de mémoire.
Au demeurant, il tient à rappeler l'implication forte des bénévoles des associations et de leurs porte-drapeaux dans la tenue des actions mémorielles. Il appelle à toute action permettant à ces associations de forger des liens avec les jeunes générations afin de rendre possible une continuité de cet engagement dans le temps.
Le rapporteur spécial souhaite également que soient mieux favorisés les projets permettant aux collectivités territoriales de mettre en avant leur mémoire et l'histoire combattante. Les crédits prévus (0,8 million d'euros) ne semblent pas correspondre à ce que pourrait être une politique ambitieuse d'inscription de ce patrimoine dans nos territoires.
b) L'OS Mémoire, des crédits stables dans l'attente d'une année 2024
La programmation mémorielle pour l'année 2023 portera sur :
- Le 80ème anniversaire de la seconde guerre mondiale ;
- Le 70ème anniversaire de la fin de la guerre en Corée ;
- Le 40ème anniversaire de l'attentat du Drakkar au Liban ;
Pour 2023 7,3 millions d'euros sont prévus pour cet OS, soit une légère hausse par rapport à 2022 (+ 400 000 euros).
En plus de ces commémorations ponctuelles, des cérémonies nationales sont tenues chaque année. Leur nombre a significativement augmenté ces dernières années. Il n'y avait que 6 journées commémoratives nationales en 1993, contre 17 aujourd'hui. A par exemple été rajoutée une journée commémorative pour les victimes du terrorisme le 11 mars.
Chronique du coût des cérémonies nationales
(en euros, estimations pour 2020)
Cérémonie |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
19 mars, journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc |
52 000 |
4 800 |
41 040 |
98 007 |
Dernier dimanche d'avril, journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation |
14 000 |
1 125 |
92 405 |
101 546 |
8 mai, commémoration de la victoire de 1945 |
112 000 |
3 900 |
2 800 |
116 500 |
Deuxième dimanche de mai, fête nationale de Jeanne d'Arc et du patriotisme |
0 |
0 |
0 |
0 |
27 mai, journée nationale de la Résistance |
0 |
0 |
0 |
0 |
8 juin, journée nationale d'hommage aux « morts pour la France » en Indochine |
86 000 |
0 |
0 |
0 |
18 juin, journée nationale commémorative de l'appel du général de Gaulle le 18 juin 1940 à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre l'ennemi |
54 000 |
13 000 |
91 496 |
132 431 |
Le 16 juillet (si c'est un dimanche) ou le dimanche qui suit le 16, journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'État français et d'hommage aux « Justes » de France |
86 000 |
72 610 |
138 024 |
144 087 |
25 septembre, journée nationale d'hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives |
46 000 |
89 916 |
90 000 |
90 000 |
11 novembre, commémoration de l'armistice de 1918 et hommage à tous les morts pour la France |
120 000 |
12 426 |
100 000 |
100 000 |
5 décembre, journée nationale d'hommage aux « morts pour la France », aux rapatriés d'Afrique du Nord, aux personnes disparues, aux populations civiles victimes de massacres ou d'exactions et aux victimes civiles de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie |
39 000 |
0 |
60 000 |
60 000 |
Cérémonie d'hommage à Jean Moulin célébrée traditionnellement le 17 juin |
13 000 |
0 |
9 451 |
12 417 |
* cérémonie internationale du 11 novembre 2018 organisée principalement par le GIP Mission du centenaire.
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
5. Les opérateurs du programme, soumis à une budgétisation qui suscite l'inquiétude quant à la soutenabilité de leurs comptes
Le programme 169 compte trois opérateurs :
- l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG) ;
- l'Institution nationale des Invalides (INI) ;
- le Conseil national des communes « Compagnon de la libération ».
L'ONACVG est l'opérateur principal du programme 169. Il a la charge de mettre en oeuvre les politiques de reconnaissance et réparation en faveur des anciens combattants et la mise en oeuvre des volets local et immobilier de la politique de mémoire.
L'INI prend en charge les blessés militaires, soit pour une réhabilitation, soit pour un accueil comme pensionnaire en cas de grand handicap.
Le Conseil national des communes « Compagnon de la libération » a « pour mission d'assurer les traditions des Compagnons de la Libération, d'en conserver la mémoire, de gérer le musée, d'organiser les cérémonies commémoratives de l'appel du 18 juin et de la mort du Général de Gaulle, de participer à l'aide morale et matérielle apportée aux veuves et enfants de Compagnons de la Libération ainsi qu'aux médaillés de la Résistance et à leurs familles. L'Ordre de la Libération développe l'esprit de défense à travers l'exemple de l'engagement des Compagnons de la Libération. »12(*).
a) L'évolution des crédits et des plafonds d'emploi des opérateurs de la mission
(1) Des crédits en très forte augmentation en raison de l'inflation et du renforcement des actions en faveur des harkis, autres supplétifs et rapatriés
L'année 2023 est marquée par des évolutions significatives des dotations.
L'ONACVG en particulier voit ses crédits attribués au titre du programme 169 augmenter de 89,2 millions d'euros, soit une hausse de 82,5 % par rapport à 2022.
Une petite partie de cette augmentation est due, à hauteur de 3,5 millions d'euros, aux conséquences de l'inflation. 2,27 millions d'euros viennent abonder les crédits dédiés à l'entretien et la rénovation des nécropoles nationales et Hauts lieux de la mémoire nationale et 1,25 million d'euros viennent compenser la hausse du point d'indice des fonctionnaires.
2,9 millions sont attribués à l'ONACVG pour le transfert de l'armée de terre à l'Office de la mission « ATHOS » d'accompagnement des traumatisés psychiques après leur départ de l'institution militaire.
Le reste de l'augmentation est dû au renforcement des politiques en faveur des harkis, autres supplétifs et rapatriés : 60 millions d'euros pour le dispositif d'indemnisation du droit à réparation et reconnaissance de la loi n° 2022-229 du 23 février 202213(*) et 19 millions du fait du doublement de l'allocation de reconnaissance et de l'allocation viagère à destination des harkis et de leurs veuves.
Les crédits qui lui sont transférés depuis le programme 158 sont eux en légère baisse, de 1,2 million d'euros (- 1,3 %), du fait de la diminution du nombre des crédirentiers bénéficiant des dispositifs dont les crédits sont transférés.
L'INI voit ses AE chuter, ces dernières étant en baisse de 7,1 millions d'euros alors que ses CP restent équivalents à ceux de 2022 à 20,4 millions d'euros.
Ces fluctuations sont dues à la mise en oeuvre du schéma directeur d'infrastructure de l'Institution, qui a lancé en 2021 des travaux de renouvellement globaux de ses locaux.
Par ailleurs la stabilité des CP cache une augmentation de la subvention pour charges de service public (SCSP, + 720 000 euros, soit + 5,5 %) qui s'établit à 13,7 millions d'euros en 2023 et le remplacement d'une dotation en fonds propres de 7,5 millions d'euros par une subvention pour charges d'investissement de 6,7 millions d'euros.
En plus des crédits du programme 169, l'INI reçoit une dotation annuelle de fonctionnement de 14 millions d'euros allouée par le ministère de la santé et de la prévention et génère 14 millions d'euros de recettes propres, portant ainsi le montant des crédits disponibles pour son fonctionnement courant à 41,7 millions d'euros.
Les crédits fléchés pour financer le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » restent quasi-identiques à ceux de 2022 (+ 30 000 euros du fait de la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires) à 1,7 million d'euros.
(2) L'évolution des plafonds d'emplois
Les opérateurs du programme ont connu de fortes baisses d'ETPT au cours des dernières années. Une diminution de 92 ETPT est constatée en exécution de 2019 à 2021. A cette baisse s'ajoute une baisse de 28 ETPT entre les autorisations budgétaire de 2021 et de 2022.
A contrario, l'année 2023 marque une stabilisation du plafond d'emplois autorisés avec une légère baisse de 4 ETPT.
Évolution des emplois ouverts aux deux
principaux opérateurs du programme
(2014-2022)
2019 |
2020 |
2021 |
PLF 2022 |
PLF 2023 |
|
INI |
416 |
407 |
399 |
425 |
424 |
dont sous plafond |
409 |
398 |
392 |
411 |
410 |
ONAC-VG |
877 |
836 |
798 |
805 |
802 |
dont sous plafond |
853 |
814 |
778 |
778 |
775 |
Total |
1 293 |
1 270 |
1 197 |
1 230 |
1 226 |
dont sous plafond |
1 262 |
1 212 |
1 170 |
1 189 |
1 185 |
Source : la commission des finances, d'après les documents budgétaires
Il faut souligner que l'augmentation faciale d'ETPT entre 2021 et 2022 n'est pas la conséquence d'une augmentation du nombre d'ETPT. Les données d'exécution, qui correspondent aux données qui sont constatées en fin d'année, sont inférieures aux autorisations en PLF : il y a en pratique moins d'agents au sein des opérateurs que ce que les prévisions budgétaires prévoient. Ainsi, le passage du nombre d'agents qui travaillent effectivement au sein des opérateurs en 2021 au nombre d'agents autorisés en loi de finances pour les années 2022 et 2023 donne l'impression d'une augmentation du nombre d'agents. Il n'y a pas eu d'augmentation du nombre d'agent et les données d'exécution 2022 devraient confirmer une trajectoire baissière lorsqu'elles seront disponibles.
Le rapporteur spécial regrette cet état de fait et appelle à une évaluation plus réaliste des effectifs en loi de finances afin de garantir une information sincère du Parlement.
b) L'ONAC-VG, un acteur incontournable pour la mise en oeuvre des crédits de la mission en cours de restructuration
(1) L'ONACVG, un acteur essentiel à tous les pans de la mission « Anciens combattants »
L'ONACVG est un établissement public sous tutelle du ministère des armées. Il a pour mission de servir au mieux les intérêts de ses ressortissants. Ces derniers recouvrent des situations très différentes, pouvant appartenir à 19 catégories différentes. Il s'agit pour l'essentiel d'anciens combattants, de prisonniers de guerre, de victimes civiles et de leurs ayants cause. Aux catégories historiques doivent malheureusement désormais s'ajouter les victimes de terrorisme.
L'ONACVG dispose d'une gouvernance collégiale particulière puisqu'il est géré conjointement par l'autorité de tutelle, représentée notamment par la secrétaire d'Etat chargée de la mémoire et des anciens combattants qui dirige le conseil d'administration, et par les associations d'anciens combattants et mémorielles, de manière paritaire. Cette forme de gouvernance donne ainsi directement voix aux ressortissants de l'ONACVG pour les décisions qui les concernent. La directrice générale de l'office dirige, jusqu'au 1er janvier 2023, le collège du Bleuet de France et l'ONACVG dispose de conseils départementaux, présidés par le préfet du département et dans lesquels sont représentées les associations d'anciens combattants, chargées d'émettre un avis sur les demandes qui leur sont adressées.
L'office dispose enfin d'un maillage territorial important puisqu'avec 104 services déconcentrés, il est présent dans chaque département, en outre-mer, en Algérie et au Maroc. Le service de Tunisie a été fermé en 2020. Ce maillage se justifie par la mission d'accueil par l'ONACVG de ses ressortissants ainsi que par la nécessité de maintenir des liens forts avec les associations d'anciens combattants locales, ce tissu associatif comprenant près de 8 000 associations, dont 7 500 locales.
La réalisation d'un nombre assez important de missions, parfois assez disparates, est confiée à l'office. Il est ainsi responsable :
- de la mise en oeuvre des mécanismes de reconnaissance et de réparation en faveur de ses ressortissants (attribution de la carte du combattant, réversion de la retraite du combattant et de la PMI, attribution de titres tels que « Mort pour la France », etc...) ;
- du soutien au monde combattant, notamment en apportant un soutien moral et matériel à ses ressortissants et en subventionnant ses associations ;
- de la reconnaissance des pupilles de la Nation et de la République et de leur suivi ;
- de l'exercice de missions de mémoire : entretien des sépultures militaires (carrés militaires, cimetières, nécropoles et monuments aux morts) et hauts lieux de la mémoire nationale ainsi que la mise en oeuvre locale du versant commémoratif de la politique de mémoire ;
- de la mise en oeuvre des droits des rapatriés et des membres des forces supplétives d'Afrique, ainsi que leurs descendants. L'ONACVG est le guichet unique pour toutes les actions publiques les concernant ;
- l'Office gère actuellement l'oeuvre nationale du Bleuet de France directement. Le Bleuet doit cependant être séparé de l'Office et prendre la forme d'un fonds de dotation au 1er janvier 2023 ;
- Il se voit également transférer les crédits du programme 158 pour la mise en oeuvre effective des indemnisations.
De manière générale, l'ONACVG est également un acteur de référence pour le volet mémoire de toute action de lien entre la Nation et ses armées. Il est ainsi amené à intervenir lors de la JDC ou du SNU, dans des concours scolaires comme le concours national de la résistance et de la déportation, ainsi que dans d'autres actions plus ponctuelles comme l'action « Aux sports jeunes citoyens ! ».
Enfin, l'ONACVG est en phase de restructuration dans le cadre de son COP 2020-2025. Ce dernier, sans changer fondamentalement les missions de l'ONACVG, vise à obtenir une meilleure exécution de ses missions tout en réduisant les coûts via un recours accru à la dématérialisation.
(2) Des crédits en augmentation mais qui ne couvrent pas encore l'intégralité des dépenses de l'ONACVG
L'ONACVG est dans une trajectoire de réduction de ses coûts. Le COP 2020-2025 prévoyait ainsi que les dépenses en AE de l'ONACVG passent de 123,4 millions d'euros en 2021 à 113,1 millions d'euros en 2025, dépenses d'intervention incluses. Une fois corrigée des 7 millions d'euros liés à l'action en faveur des enfants de harkis qui doit cesser au 31 décembre 2022, la baisse des crédits s'établit aux alentours de 3 millions d'euros14(*). Cet objectif de réduction des dépenses a été remis en cause par l'attribution de la mission ATHOS à l'Office, la revalorisation du point d'indice de la fonction publique et le renforcement des actions envers les harkis, autres supplétifs et rapatriés.
Les crédits transférés à l'Office au titre du programme 169 s'élèvent ainsi à 197,2 millions d'euros pour 2023, ce qui correspond à une augmentation de 82,5 % par rapport à 2022 (+ 89,2 millions d'euros).
Par ailleurs, cette programmation budgétaire s'établit sur une hypothèse d'un coût du dispositif d'aide sociale aux enfants de harkis, qui sera forclos au 31 décembre 2022, de 1,9 million d'euros. Or, au regard du nombre de dossiers restant à traiter et de l'appel d'air créé par l'effet conjugué de l'introduction du dispositif de reconnaissance et réparation au titre du séjour dans des camps et hameaux de forestages et de l'échéance du dispositif de solidarité, l'Office estime le coût de ce dispositif à 10 millions d'euros sur 2023. Aussi si cette estimation est correcte, 8 millions d'euros devront être dégagés en cours d'exécution. Une utilisation de la trésorerie fléchée de l'ONACVG à hauteur d'un million d'euros est également envisagée pour abonder la dotation budgétaire.
Le fonds de roulement de l'ONACVG a été fortement mis à contribution au cours des quatre dernières années, comme l'indique le tableau ci-dessous. L'ONACVG indique qu'elle atteint en 2022 le niveau plancher de trésorerie pour son fonctionnement normal. Le rapporteur spécial appelle à ce que ce niveau soit maintenu par les prochains PLF. La même remarque s'applique pour la trésorerie non-fléchée de l'Office, 5 millions d'euros correspondant à 1 mois de fonctionnement courant et au niveau plancher nécessaire en cas de retard de versement de la subvention pour charges de service public.
Évolution du fonds de roulement de l'ONAC-VG (2017-2022)
Source : ministère des armées, en réponse au questionnaire budgétaire
Source : ONACVG
(3) Une restructuration visant à réduire les coûts de fonctionnement de l'ONAC-VG par une réduction des effectifs et un plus grand recours au numérique
Comme indiqué, le COP 2020-2025 vise à entraîner une restructuration de l'ONAC-VG. Ce dernier lui attribue ainsi 5 missions :
- assurer le meilleur service aux ressortissants ;
- ancrer la politique de mémoire et de citoyenneté dans les territoires ;
- renforcer l'accompagnement des combattants dans la durée ;
- porter une nouvelle ambition pour le Bleuet de France ;
- poursuivre la modernisation de l'Office.
Le point saillant de ces attributions est la poursuite de la modernisation de l'Office, qui porte des conséquences directes sur les quatre points précédents.
Dans le cadre de sa « nouvelle ambition », l'oeuvre nationale du Bleuet de France va être transformée au 1er janvier 2023 en fonds de dotation afin de se mettre en régularité avec les règles de gestion publique suite à des critiques adressées par la Cour des comptes15(*).
L'oeuvre a également fait l'objet d'une dématérialisation partielle par la mise en place d'une boutique en ligne et d'une concession de licence de marque à la société Arborescence afin de le rendre plus rentable. Arborescence reverse une partie de son chiffre d'affaires issu de cette concession de marque à l'ONACVG. Les conséquences budgétaires de cette concession sont actuellement minimes : Les revenus constatés pour l'Office s'élèvent à 60 630 euros entre le 27 juillet 2020 et le 31 décembre 2021.
La modernisation de l'office doit ensuite permettre de concilier meilleur service et moindres coûts, notamment grâce à un plus grand recours à la numérisation qui permet de centraliser le traitement des demandes de cartes dans les services du département de reconnaissance et de réparation de Caen et le déploiement de nouveaux outils de gestion. La plus grande partie du déploiement du matériel et des nouvelles solutions informatiques a désormais été réalisée. En conséquence, la grande majorité des dossiers traités par l'Office sont traités par le Département de la reconnaissance et de la réparation, situé à Caen.
Des gains d'efficacité significatifs ont été réalisés grâce à la dématérialisation : le délai moyen de traitement des dossiers qui s'inscrivait à 145 jours en 2020 est descendu à 91 jours en 2021, soit 54 jours de moins en moyenne et 44 jours de moins que la cible du PAP de 135 jours. La cible est fixée à 130 jours en 2022 mais elle paraît peu adaptée au regard des gains d'efficacité constatés en 2021. Le rapporteur salue vivement ces résultats.
Suite à la réduction des effectifs de l'ONACVG, quelque 400 ETPT restent répartis sur les 104 antennes locales de l'office. L'ONACVG estime ces effectifs suffisants pour la mise en oeuvre de ses missions. Cependant, il souligne quelques difficultés ponctuelles à reclasser certains agents dont le poste est supprimé et qui doivent continuer à être payés par l'ONACVG. Cette réduction aura également eu pour conséquence la relocalisation des antennes de l'ONACVG dans des locaux d'autres administrations, notamment des préfectures. Elle a également pour conséquence un nombre très réduit d'agents dans chaque antenne locale, ce qui peut provoquer des difficultés en cas d'absences. Le niveau actuel des emplois réparti sur le réseau territorial de l'ONACVG ne pourra pas faire l'objet de nouvelles réductions sans suppression d'antenne ou dégradation significative du service.
c) L'Institution Nationale des Invalides, un acteur unique et irremplaçable pour la prise en charge des invalides de guerre
L'Institution Nationale des Invalides est un établissement public administratif placé sous la tutelle de la ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Elle est chargée de trois missions :
- accueillir les invalides bénéficiaires des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- dispenser des soins en hospitalisation ou en consultation aux malades et aux blessés en vue de leur réadaptation fonctionnelle, professionnelle et sociale ;
- participer aux études et à la recherche sur l'appareillage des handicapés.
Plusieurs remarques doivent être formulées sur les crédits affectés à l'INI.
Les ressources de l'INI proviennent de différentes sources :
- 14 millions d'euros de revenus propres par ans ;
- une dotation annuelle de fonctionnement (DAF) de 14 millions d'euros allouée par le ministère de la santé et de la prévention pour financer la part des dépenses prises en charge par le régime d'assurance maladie ;
- de crédits transférés issus du programme 169, ces derniers s'élevant à 13,7 millions d'euros en AE et 20,4 millions d'euros en CP en 2023.
Les crédits transférés au titre du programme 169 recouvrent deux aspects : la subvention pour charges de service public (SCSP) et des financements pour la mise en oeuvre de la rénovation immobilière de l'institution.
La SCSP connait une légère augmentation de 720 000 euros en 2023 pour prendre en compte la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. La DAF est également en hausse du fait de la prise en compte du Ségur de la santé. Au total, les ressources non spécifiquement dédiées au financement du schéma directeur d'infrastructure s'élèvent donc à 41,7 millions d'euros.
A ces ressources s'ajoutent, en 2023, 6,7 millions d'euros de subvention pour charges d'investissement, en provenance du programme 169.
Un nouveau COP 2022-2026 a été mis en place par l'INI. Ce dernier défini deux grands axes :
- la création d'une offre de soin en continuation et en complémentarité du service de santé des armées et prenant notamment en compte les blessures psychiques, qui n'étaient pas prises en compte jusqu'à présent ;
- la mise en oeuvre de son schéma directeur d'infrastructure (SDI) prévoyant une rénovation d'une grande partie des bâtiments que comportent les invalides, auquel doit s'ajouter la réhabilitation du bâtiment Robert de Cotte.
Le coût total du SDI est actuellement évalué à 58,2 millions d'euros, l'évaluation initiale étant de 51 millions d'euros. 12,7 millions d'euros sont financés sur des ressources propres de l'INI. Actuellement 27 millions d'euros ont été versés en CP sous forme de dotations en fonds propres sur la période 2019-202216(*) auxquels doivent s'ajouter 6,7 millions d'euros de subventions pour charges d'investissement en 2023. Les surcoûts des travaux devraient commencer à peser sur le budget de l'État en 2024. À cela doit s'ajouter le coût de la réhabilitation du bâtiment Robert de Cotte, prévue à compter de l'année 2025. Cette opération est actuellement estimée à 15 millions d'euros17(*), dont le financement reste à définir.
L'INI a été également très touchée par la crise sanitaire, du fait du caractère particulièrement vulnérable de ses pensionnaires. La politique vaccinale a permis de normaliser le fonctionnement de l'Institution, cependant cette dernière constate toujours une perte d'activité de 6 500 journées en hospitalisation complète en 2022. L'activité de l'Institution continuera par ailleurs d'être limitée au cours des années à venir du fait de la mise en oeuvre du schéma directeur d'infrastructure.
Le fonds de roulement de l'INI s'élève à 43 millions d'euros au terme de l'exécution 2021, dont 13,9 millions d'euros de trésorerie non fléchée.
L'INI est également en cours de réduction de ses effectifs. L'INI disposait ainsi de 416 ETPT dont 409 sous plafond en 201918(*) contre 399 ETPT dont 392 sous plafond en 2021. Ces valeurs, constatées en exécution, sont par ailleurs systématiquement inférieures aux autorisations budgétaires, qui s'élèvent pour 2023 à 419 ETPT dont 410 sous plafond. 5 des 9 emplois hors plafonds concernent des apprentis.
Le rapporteur tient à souligner la particularité des missions de l'INI, qui doit ainsi aider à la reconstruction de pensionnaires qui doivent être très entourés. Aussi le taux d'encadrement de l'INI, qui est certes supérieur à celui d'établissements comparables, n'apparaît pas disproportionné au regard de la mission dont l'institution a la charge.
6. De quelques situations à mieux prendre en considération
Le rapporteur spécial insiste pour que des situations mal couvertes, comme celle des forces participant aux opérations de sécurité conduites dans le cadre de la protection des Français contre les actions terroristes (les opérations intérieures - OPINT) ou celle des personnes en charge, ou l'ayant été, de grands invalides de guerre soient mieux prises en compte. Sur ce dernier point, l'article 30 de la loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile qui prévoit la mention honorifique « Mort pour le service de la République », pour constituer une avancée, demeure trop partielle.
* 3 LFI 2021
* 4 Budget 2022 rectifié tel que présenté dans le PAP « Anciens combattants » 2023
* 5 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français.
* 6 Avant le décret n° 2022-128 du 4 février 2022 modifiant les modalités de fixation de la valeur du point PMI, il était calculé selon le principe du « rapport constant », soit une révision trimestrielle et avec effet rétroactif.
* 7 Selon les modalités définies par le décret du 4 février 2022 modifiant les modalités de fixation de la valeur du point de PMI
* 8 L'article 2 du PLF 2022 retenait une hypothèse de 1,4 % d'inflation sur 2021.
* 9Actions 1, 2, 3 et 7 du programme 169
* 10 45,6 millions d'euros en 2022.
* 11 Financement de fonds de concours par les régions et financement direct de formations.
* 12 Documentation budgétaire, PAP 2023 mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »
* 13 45 millions sont attribués à l'Office au titre de ce dispositif pour 2022, cependant la création de cette indemnisation ayant été décidée après le dépôt du PLF pour 2022, ces 45 millions n'apparaissent pas dans la programmation budgétaire initiale.
* 14 Contrat d'Objectif et de Performance de l'ONAC-VG 2020-2025, annexe 1.
* 15 Cour des comptes, rapport RD52435 du 9 juillet 2008
* 16 Somme des valeurs réalisées en 2019, 2020 et 2021 et des crédits prévus en LFI pour 2022.
* 17 19,4 millions d'euros en prenant en compte la phase d'étude. Cette dernière à cependant déjà été financée et réalisée.
* 18 RAP Anciens combattants, 2019.